La saisie immobilière : définition et conditions

Les conditions de la saisie immobilière

La procédure de saisie immobilière intervient lorsqu’un débiteur se trouve dans l’incapacité de rembourser ses créanciers ou d’honorer ses échéances d’emprunt bancaire. La saisie doit respecter des conditions :

  • La procédure de saisie immobilière nécessite l’intervention d’un avocat et d’un huissier ;
  • La procédure de saisie immobilière s’appuie sur un titre exécutoire ;
  • La procédure de saisie immobilière doit être en rapport avec le montant de la créance ;
  • Le débiteur est informé à plusieurs reprises de la menace de saisie immobilière en cas de non-remboursement de ses dettes : c’est le commandement de payer ;
  • La procédure peut être suspendue si le débiteur a saisi la commission de surendettement, le temps que son dossier soit analysé.

Chapitre 1: Définition de la saisie immobilière

«La saisie immobilière tend à la vente forcée de l’immeuble du débiteur ou, le cas échéant, du tiers détenteur en vue de la distribution de son prix» (Code Civil Article 2190).

La saisie immobilière était pendant longtemps une procédure longue, lourde et formaliste, elle pouvait durée de 6 à 18 mois sans incidents et entre 2 et 3 ans en cas d’incident. N’ayant pas été réformée en 1991, elle avait juste fait l’objet de quelques modification par les lois des 23 jan. et 29 juillet 1998. La réforme est intervenue par l’ordonnance n°2006-461 du 21 avril 2006 (ayant ajouté Code Civil Article 2190 à 2216) et son décret d’application n°2006-936 du 27 juillet 2006 modifié par le décret n°2006-1805 du 23 déc. 2006. La réforme est entrée en vigueur le 1er jan. 2007, elle s’applique aux procédures en cours n’ayant pas encore donné lieu au dépôt de l’ancien cahier des charges ainsi qu’aux procédures de distribution du prix de vente d’un immeuble dont l’ouverture de l’ordre n’a pas encore été requise.

La réforme poursuit un double objectif:

  • assurer une protection adéquate au débiteur en prohibant les expropriations injustifiées ou expéditives et en évitant de brader l’immeuble qui constitue souvent le seul bien important de son patrimoine.
  • offrir aux créanciers des procédures efficaces de recouvrement pour les inciter à faire crédit.

La saisie immobilière est une procédure judiciaire.

Compétence territoriale: «la saisie immobilière est poursuivie devant le JEX du TGI dans le ressort duquel est situé l’immeuble saisi» (D06 Article 2), avant la réforme, elle relevait de la compétence du TGI).

Représentation obligatoire: «les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat» (D06 Article 5).

Chapitre 2: Les conditions de la saisie immobilière

La saisie immobilière obéit à des conditions spécifiques (par rapport à la Partie 1) relatives aux personnes (Section 1), à la créance (Section 2) et à l’immeuble (Section 3).

Section 1: Les conditions relatives aux personnes

Des conditions concernent le créancier saisissant (1) et d’autres le débiteur saisi (2).

1) Les conditions relatives au créancier saisissant

vEn principe, tous les créanciers peuvent pratiquer une saisie immobilière puisque leur droit de gage général concerne l’ensemble des biens meubles et immeubles du débiteur (Code Civil Article 2284). Il peut donc s’agir d’un créancier hypothécaire, privilégié ou même chirographaire. Cependant, pour le créancier chirographaire, la saisie n’a aucun intérêt si la valeur de l’immeuble est inférieure au montant du passif privilégié, elle est donc souvent pratiquée par un créancier hypothécaire ou privilégié.

v« Tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière […] » (Code Civil Article 2191 al.1).
Lorsque la poursuite est engagée en vertu d’une décision de justice exécutoire par provision, la vente forcée ne peut intervenir qu’après une décision définitive passée en force de chose jugée» (Code Civil Article 2191 al.2). En effet, cette procédure portant atteinte au droit de propriété du débiteur, elle ne peut donc être engagée sur le fondement d’un titre provisoire (ex: ordonnance de référé.).

Si le créancier se prévaut d’une décision rendue par défaut, il doit attendre l’expiration du délai d’opposition avant de poursuivre la saisie (Code Civil Article 2191 al.3).

2) Les conditions relatives au débiteur saisi

Le plus souvent, la saisie est directement pratiquée contre le débiteur (A) mais à titre exceptionnel, l’immeuble peut être saisi dans les mains d’un tiers (B).

  1. A) La saisie entre les mains du débiteur saisi

En principe, la saisie est pratiquée directement auprès du débiteur mais il faut tenir compte des règles protectrices des incapables.

v«Les immeubles d’un mineur, même émancipé, ou d’un majeur en curatelle ou en tutelle ne peuvent être saisis avant la discussion de leurs meubles» (Code Civil Article 2197 al.1), la saisie immobilière devient alors subsidiaire.

2 exceptions:

  • pour «la saisie des immeubles indivis entre un majeur et un mineur ou un majeur en curatelle ou en tutelle, si la dette leur est commune» (Code Civil Article 2197 al.2).
  • « dans le cas où les poursuites ont été commencées alors que le majeur n’était pas encore placé sous curatelle ou sous tutelle» (Code Civil Article 2197 al.2 in fine).

v«En cas de saisies simultanées de plusieurs de ses immeubles, le débiteur peut demander au juge le cantonnement de celles-ci [ou] une conversion partielle des saisies en hypothèque» (Code Civil Article 2196).

  1. B) La saisie entre les mains d’un tiers détenteur

La saisie a lieu entre les mains d’un tiers lorsque le débiteur a transmis la propriété de l’immeuble affecté en garantie à l’un de ses créanciers. Dans ce cas, le tiers n’est pas obligé personnellement à la dette mais il est tenu car il détient l’immeuble, il est tenu propter rem. Cette hypothèse reste exceptionnelle car en principe le tiers est informé par le notaire et la purge est effectuée au préalable avant la vente.

S’il n’a pas été procédé à la purge, le créancier peut se prévaloir de son droit de suite et «la saisie immobilière diligentée par les créanciers titulaires d’un droit de suite est poursuivie contre le tiers détenteur du bien» (Décret de 2006 Article 16), le tiers souffre alors la saisie mais il dispose de plusieurs garanties:

  • il peut imposer au créancier de discuter préalablement à la saisie de l’immeuble, tous les autres immeubles hypothéqués en garantie de la même dette, encore entre les mains du débiteur. Ce bénéfice de discussion ne peut être opposé qu’au créancier disposant d’une hypothèque générale. Il peut être invoqué jusqu’à la dénonciation de la saisie immobilière.
  • il peut payer et désintéresser le créancier: ce sera notamment le cas s’il n’a pas déjà payé le prix au vendeur (débiteur) et si la créance hypothécaire de 1er rang est inférieure ou égale au prix de vente. Dans ce cas, l’acquéreur est subrogé dans les droits du créancier.
  • il peut délaisser l’immeuble i.e. en abandonner la possession au créancier saisissant pour ne pas avoir à subir la saisie. Dans ce cas, les poursuites sont engagées contre un curateur désigné par le TGI.

Section 2: Les conditions relatives à la créance

  • «Tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière» (Code Civil Article 2191) Ainsi, la saisie immobilière est soumise aux mêmes conditions que les autres saisies, le caractère certain n’est pas repris (cf. supra).
  • Conformément au principe de proportionnalité des mesures d’exécution, le montant de la créance doit être en correspondance avec la valeur saisie (cf. supra.). Ainsi, le créancier ne peut saisir plusieurs immeubles qu’en cas d’insuffisance du bien saisi pour satisfaire la créance.
  • Le créancier doit saisir en priorité l’immeuble qui lui est affecté en garantie, même s’il se situe entre les mains d’un tiers (il a un droit de suite). Ainsi, un créancier ne peut poursuivre la vente forcée d’un immeuble qui ne lui est pas affecté en garantie que si les immeubles qui lui ont été affectés en garantie sont insuffisants à la satisfaire. Cela suppose de savoir au préalable la valeur de l’immeuble, ce qui peut donner lieu à contestations.

Section 3: Les conditions relatives aux immeubles

Tous les immeubles sont saisissables mais il existe des restrictions.

1) Le principe: les immeubles saisissables

«La saisie immobilière peut porter sur tous les droits réels afférents aux immeubles, y compris leurs accessoires réputés immeubles, susceptibles de faire l’objet d’une cession » (Code Civil Article 2193). Sont ainsi visés tous les immeubles (Code Civil Article 517): immeubles par nature (terre, récoltes sur pied), par destination (Code Civil Article 524), par l’objet auquel ils s’appliquent (Code Civil Article 526): l’usufruit, les droits réels principaux: nue propriété.

«La saisie d’un immeuble emporte saisie de ses fruits, sauf l’effet d’une saisie antérieure [i.e. si les fruits ont déjà fait l’objet d’une saisie] » en vertu du principe accessorum sequitur principale (Code Civil Article 2194)

2) Les restrictions à la saisissabilité

Outre les restrictions communes (Partie 1), les restrictions propres ont pour objet d’éviter saisies inopportunes:

– certains droits réels ne peuvent être saisis: les servitudes puisqu’elles sont indissociables du fond, droit d’usage et d’habitation car incessibles

– en cas de saisie simultanée, le débiteur peut solliciter le cantonnement de la saisie à un ou plusieurs biens, limite de l’assiette.