Délais de procédure : modification, sanction, computation

Les délais de la procédure.

En étudiant les moyens de défense, deux types de délais de procédure furent distingués. Des délais d’attente, qui interdisent au plaideur d’agir immédiatement.

Le plaideur doit attendre l’écoulement d’un délai avant de procéder à l’acte de procédure considéré.

Par exemple, devant le Tribunal de grande instance, selon l’article 755 du Code de Procédure Civile, il faut attendre quinze jours pour le délai de comparution. Il en va de même avec les délais de forclusion, délais processuels et non pas substantiels comme en cas de prescription.

Pour les délais de forclusion, il faut agir avant l’expiration du délai, à peine de fin de non-recevoir. C’est logique, la forclusion consomme le droit d’action. Par exemple, un mois pour l’appel.

Ces délais ont un régime qui varie selon les cas mais obéissent toujours à un certain nombre de règles communes figurant aux articles 640 à 647 du Code de Procédure Civile.

La première chose à savoir est la computation des délais.

  1. A) La computation des délais.

La difficulté vient de ce que les délais de procédure peuvent être décomptés de plusieurs manières : en heures, en jours, en mois ou en années.

Précisément, les règles de computation ne sont pas les mêmes.

  1. Les délais exprimés en heure.

Ces délais sont rares. Parfois, en matière de référé, il est possible d’assigner en référé d’heure à heure. C’est rare.

  1. Les délais exprimés en jours.

L’article 755 du Code de Procédure Civile prévoit un délai de quinze jours pour comparaître devant le Tribunal de grande instance par exemple.

Ces délais sont comptent de jour en jour. Le jour est l’espace temporel compris entre zéro heures et vingt-quatre heures.

Il faut comprendre que ces délais de jour en jour expirent le dernier jour du délai, à vingt-quatre heures précises, selon l’article 642 alinéa 1er du Code de Procédure Civile. C’est le dia seqem.

La subtilité tient à ce que l’on ne va pas comptabiliser le jour au cours duquel s’est produit l’événement qui fait courir le délai, le dies a quo, le point de départ du délai, mais le lendemain à zéro heures du jour où s’est produit l’événement qui déclenche le délai.

Si le délai commence le trois du mois à quinze heures. On comptera quinze jours à compter du quatre. On arrivera au dix-huit à vingt-quatre heures (dans le cas d’un délai de quinze jours).

  1. Les délais exprimés en mois

Ils se calculent de quantième en quantième selon le Code de Procédure Civile. C’est-à-dire, du jour du mois de départ, au même jour, dans le mois d’échéance. Le délai s’achèvera à vingt-quatre heures, le jour du mois d’échéance.

A contrario, on ne va pas tenir compte de la durée exacte de chaque mois. Il peut donc arriver que le mois d’échéance ne comporte pas le quantième qui correspond au point de départ du délai. Si le délai démarre le trente-un mars, on n’aura pas de trente-un le mois suivant.

La règle veut que le délai expire le dernier jour du mois d’échéance. Celui qui se verra accordé un mois se verra spolié en cas d’année bissextile.

  1. Les délais exprimés en années.

Le délai va expirer le jour anniversaire de la dernière année et il expirera toujours à vingt-quatre heures.

Dans ce cas, on tiendra compte du jour du point de départ, du dies a quo.

Il faut apporter une précision commune à ces délais qui attrait à l’hypothèse où le délai s’achève un jour férié, jour où l’on ne travaille pas légalement, et chômé, jour où l’on ne travaille pas selon la convention de l’entreprise.

S’il s’agit d’un jour férié ou chômé, le délai sera en toute hypothèse prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant, le lundi pour le samedi ou le dimanche, selon l’article 642 du Code de Procédure Civile.

Pour que ces délais soient utiles, il faut que jusqu’au dernier moment l’on puisse procéder à la notification. Ces délais s’arrêtent à vingt-quatre heures. Les avocats ont l’habitude de travailler dans l’urgence. Comment pourra-t-il faire s’il agit à quinze minutes de l’échéance ?

Quand l’avocat voudra déposer une notification au greffe du Tribunal, celui-ci sera fermé. Il faut trouver d’autres solutions.

La Cour de Cassation a apporté réponse à ces difficultés. Celui qui veut déposer un acte au greffe doit faire constater cette impossibilité par huissier et ainsi, la jurisprudence l’autorise à régulariser alors, le lendemain, à la première heure ouvrable. Il en a été décidé ainsi dans une procédure d’appel, par la Cour de Cassation en sa Première Chambre civile du 4 octobre 2001.

Cette solution a été retenue en matière d’appel et est parfaitement transposable dans les autres hypothèses. Il faut encore trouver un huissier.

Il existe donc une seconde possibilité acceptée par la jurisprudence. Il faut faxer au greffe l’acte que l’on veut déposer dans les délais et le fax permettra d’établir la preuve que l’on a tenté de procéder à la notification dans le délai qui était imparti, sauf sa régularisation formelle ultérieure.

  1. B) La modification éventuelle de la durée des délais de procédure.

Les délais de procédure ne sont pas susceptibles d’interruption. On le conçoit bien pour un délai de forclusion, délai dans lequel on oit absolument agir. Ces derniers délais ne peuvent pas être interrompus, l en va de même pour les délais d’attente et pour une suspension.

Toutefois, ils sont susceptibles de modifications dans leurs durée qui n’est pas absolument figée. Ces modifications peuvent avoir des causes légales ou judiciaires.

  1. Les causes légales.

La loi exceptionnellement proroge parfois temporairement les délais, en raison de circonstances exceptionnelles, en cas d’intérêts moratoires.

On peut signaler qu’il existe une augmentation permanente de certains délais de procédure en raison des distances.

Il faut supposer qu’un acte doit être accompli dans un lieu qui est très éloigné géographiquement du domicile, de la résidence de celui qui doit l’accomplir. Parce que cet éloignement géographique risque de compliquer la tâche, l’accomplissement matière de la formalité, la loi accepte d’ajouter au délai ordinaire, en y ajoutant un délai spécial.

Ces délais de distance ont beaucoup décliné aujourd’hui. Ils avaient une grande importance au XIXe siècle mais aujourd’hui, ne jouent plus dans la France métropolitaine. On ne les trouve plus que lorsque l’auteur de l’acte doit agir en dehors de la métropole. De toute façon, même dans cette hypothèse, les délais de distance ne concernent pas tous les actes de la procédure.

En vérité, ces délais supplémentaires de distance ne valent que pour les délais de comparution et pour les délais imposés pour l’exercice de voies de recours, selon les articles 643 et suivants du Code de Procédure Civile.

Ces délais augmentés ne sont pas toujours le fait du législateur. Le juge aussi a certain pouvoir de modification des délais.

  1. Les causes judiciaires.

Elles sont exceptionnelles. Le juge ne peut modifier la durée d’un délai que si la loi le permet. On le comprend bien en logique. Le délai, lorsqu’il est établi par la loi est un droit pour celui qui en est le bénéficiaire, lorsque la loi le prévoit exactement.

Parfois, le législateur donne au juge le pouvoir de réduire certains délais.

Par exemple, quand la loi fixe des délais pour la comparution des parties, du défendeur précisément. C’est le demandeur qui doit respecter ce délai. Lorsqu’il y a urgence, le juge peut être autorisé à ne pas respecter ce délai ordinaire, et être autorisé à assigner à jour fixe.

Autrement dit, à obtenir une date d’audience qui se trouvera à l’intérieur du délai de comparution.

Autre manifestation de ce pouvoir du juge de modifier les délais. La loi permet au juge d’augmenter les délais qu’il accorde.

Autrement dit, le juge peut augmenter les délais judiciaires.

Par exemple, le juge de la mise en état a fixé un certain délai pour l’échange des conclusions. Il pourra augmenter ce délai. Cela ne vaut que pour les délais judiciaires et non légaux.

  1. C) La sanction des délais de procédure.

La violation d’un délai de procédure n’est pas la violation d’une forme obligatoire faisant encourir la formalité. Ce formalisme particulier fait l’objet d’une sanction spécifique.

La sanction de l’inobservation d’un délai n’est pas la nullité pour vice de forme. Le droit processuel exige la justification d’un grief, l’invocation in limite litis.

Tout au contraire, le législateur veut une sanction systématique de l’inobservation des délais. La solution est simple. L’acte qui est accompli en dehors des délais imposés, qui ne respecte pas le délai imparti, est radicalement inefficace. Il n’a pas d’efficacité juridique.

Autrement dit, le juge ne tiendra aucun compte de l’acte qui aura été accompli. Cette sanction est particulièrement grave dans l’hypothèse des délais de forclusion, qui imposent d’agir dans un délai maximum. La terminologie de ces délais indique que le plaideur est forclos. Il ne peut plus accomplir l’acte juridique qui est défaillant. Nous sommes en présence d’une véritable déchéance. Le plaideur est déchu du droit d’accomplir l’acte qui fait défaut.

Si le délai était prévu pour imposer l’action en justice, le droit d’action est perdu. Une fin de non-recevoir pourra être formée par l’adversaire.

Autant dire que les délais doivent être scrupuleusement respectés. L’avocat ne doit pas se laisser dépasser par les délais de la loi. Cette sanction ne suppose la démonstration d’aucun grief.

Il peut apparaître déraisonnable de sanctionner le dépassement d’un délai de procédure. C’est pourquoi à titre exceptionnel, la loi autorise parfois le juge à relever le plaideur de la forclusion qu’il encoure pour inobservation du délai.

On trouve un exemple important en pratique de ce relevé de forclusion à l’article 540 du Code de Procédure Civile.

Le texte nous dit « si le jugement a été rendu par défaut, ou s’il est réputé contradictoire, le juge a la faculté de relever le défendeur de la forclusion résultant de l’expiration du délai ». Ce délai est le délai d’appel. Le texte de poursuivre, « si le défendeur, sans qu’il y ait eu faute de sa part, n’a pas eu connaissance du jugement en temps utile pour exercer son recours ou s’il s’est trouvé dans l’impossibilité d’agir. »