Droit des entreprises en difficulté

Droit des entreprises en difficulté

Le droit des entreprises en difficulté est un droit issu du droit de la faillite dont il est historiquement issu.

La dernière réforme – loi du 26 juillet 2005 sur la sauvegarde des entreprises, complétée par son décret d’application du 28 décembre 2005 – a tout particulièrement mis l’accent sur la nécessité :

– de favoriser le redressement des entreprises en difficulté par un traitement amiable de ces difficultés ;

– d’intervenir judiciairement, à la demande du débiteur lui-même avant que soit constatée sa cessation des paiements.

A été ainsi réorganisée la procédure de conciliation (ancien règlement amiable) en même temps que créée une nouvelle procédure collective

– la procédure de sauvegarde

– préventive parce que ouverte à la demande du débiteur pour éviter sa cessation des paiements. dans tous les cas cependant, il s’agit plus d’une adaptation des procédures antérieures dans un contexte nouveau qu’une véritable création ex nihilo. outre ces innovations, ce nouveau dispositif législatif et réglementaire a corrigé de nombreuses imperfections de la loi du 25 janvier 1985. la nouvelle édition de cet ouvrage présente le droit positif en intégrant les premières applications de la loi de sauvegarde (par exemple l’affaire eurotunnel), la jurisprudence interprétant le règlement européen sur les procédures d’insolvabilité et les différentes réformes intervenues au cours de l’année 2006 ou prévues dans un avenir très proche (réforme des sûretés, de la saisie immobilière et du décret du 28 décembre 2005). elle met également l’accent sur les difficultés d’interprétation de ce droit nouveau sans ignorer les solutions antérieures. pour rester fidèle à l’esprit de la loi, l’auteur a choisi d’ordonner la présentation de la matière autour d’une double distinction : – d’abord celle du traitement amiable (1e partie) et du traitement judiciaire des difficultés (2e, 3e et 4e parties) ; – ensuite celle des procédures judiciaires tendant au redressement interne de l’entreprise, qu’elles soient préventives ou curatives (2e et 3e parties), et des procédures judiciaires tendant à la liquidation (4e partie). sont enfin présentés et expliqués, en fin d’ouvrage, le sort des salariés et les responsabilités et sanctions pouvant frapper les dirigeants (5e partie). ce manuel est conçu aussi bien pour la formation des étudiants que pour l’initiation à des recherches plus approfondies ou l’approche opérationnelle des difficultés des entreprises par les praticiens.

Introduction

Il faut savoir qu’en France, depuis de nombreuses années, environ 30 à 40.000 entreprises se trouvent en « difficulté ». Les derniers chiffres de 2009, pour des raisons conjoncturelles, indiquent que près de 60.000 entreprises ont été en difficulté et affectées par une procédure dite « collective ». Parmi elles, entre 85 et 90% sont vouées à disparaître à travers une liquidation judiciaire. Les autres pouvaient bénéficier auparavant d’un plan de cession ou de continuation de l’entreprise mais depuis la L26/07/2005, elles peuvent bénéficier d’une procédure de sauvegarde. Cette loi s’inscrit dans une ambition législative qui s’attache à sauver un maximum d’entreprises. Le législateur, depuis une quarantaine d’années, cherche éperdument des solutions qui permettraient de sauver un maximum d’entreprises. On connait les dégâts économiques et sociaux causés par la multiplication des entreprises en difficulté soumises à une procédure collective : licenciements, chômage, mise en difficulté des entreprises personnelles. Or, le législateur ne peut pas se désintéresser de ces entreprises en difficulté, bien que les libéraux purs prônent le « laisser faire, laisser mourir » des entreprises qui ne sont pas en mesure de supporter la loi du marché. Cette doctrine libérale n’est pas celle appliquée en France et ce, depuis longtemps puisque le législateur cherche à corriger les effets trop brutaux de la loi du marché et aide les entreprises en difficulté.

  • 1. Les fondements du droit des entreprises en difficulté.

Pendant longtemps, le DED était un droit de la faillite ie fondé sur :

– une sanction : punir les débiteurs défaillants. Au Moyen Age, le commerçant mauvais-payeur voyait son étale brisée d’où le terme de banqueroute qui est aujourd’hui une infraction pénale.

organisation collective des créanciers fondée sur un principe d’égalité dès lors qu’une procédure collective est ouverte : très tôt, le législateur français a considéré qu’il ne fallait pas privilégier certains créanciers. Or, ce principe est contraire à celui « du prix de la course » du Code civil selon lequel le créancier le plus diligent est celui qui est payé en premier.

Autant ce second caractère se retrouve dans tous les textes récents, notamment la L26/07/2005, autant ce premier caractère a été de plus en plus remis en cause au terme des réformes successives, qui se sont suivies à un rythme régulier : ordonnance du 23/12/1967, l/03/1984, L24/01/1985, L10/07/1994 et enfin la L26/07/2005 modifiée par une ordonnance du 18/12/2008.

  • 2. La remise en cause du caractère sanctionnateur.

Cette remise en cause de l’ancienne philosophie vient du fait que l’on constate que certains entrepreneurs sont plus maladroits que malhonnêtes et ont conduit leur entreprise à la faillite à cause de fautes de gestion, d’où la nécessité d’une liquidation judiciaire simplifiée, notamment face à une PME. En revanche, il n’est pas pour autant nécessaire de sanctionner ce débiteur qui n’a pas forcément accompli d’acte illicite. Autre idée, certains commerçants ou entrepreneurs ont indiscutablement accompli des actes illicites qui ont mis en péril leur entreprise ; pour autant, cette entreprise demeure viable, d’où l’idée d’une procédure de redressement judiciaire pour sanctionner celui-ci. Un troisième cas de figure permettait de constater les fautes de gestion de l’entrepreneur, commises sans acte illicite, lorsque l’entreprise demeurerait viable. Il s’agira alors d’écarter les dirigeants incompétents sans pour autant les sanctionner mais permettre à l’entreprise de disposer de procédure de redressement.

  • 3. Les réformes successives.

Depuis la L13/07/1967 en France, on dissocie le sort de l’entrepreneur de celui de l’entreprise. Cette volonté débouche sur la mise en œuvre d’une procédure principalement curative à l’égard de l’entreprise et accessoirement répressive à l’égard de certains dirigeants. Il y a la volonté de « soigner » l’entreprise et de réprimer éventuellement les dirigeants mais à la veille de la L26/07/2005, le bilan de ces textes était plutôt négatif. Dans les années 1960-70, 10 à 20.000 entreprises bénéficiaient d’une procédure collective, ce qui était faible face à l’évolution suivante de la disparition des entreprises.

Ensuite, les réformes successives, dans leur volonté principalement curative, ont quelque peu sacrifié les intérêts des créanciers. Il y a souvent un conflit d’intérêt entre l’entreprise en difficulté et les créanciers. Or, les réformes successives ont tranché ce conflit d’intérêt plutôt en faveur du débiteur, l’entreprise en difficulté. Encore, il se trouve que dans les lois antérieures, on ne pouvait ouvrir une procédure collective qu’à condition que l’entreprise soit déclarée en cessation des paiements. Or, juristes et économistes enseignent qu’il est alors déjà trop tard pour intervenir à ce niveau. Si on veut espérer un redressement d’entreprise, il faut intervenir beaucoup plus tôt.

La Loi de sauvegarde des entreprises de 2005, accompagnée par un décret d’application de décembre 2005 comportent deux caractères principaux :

  • un caractère curatif qui a été accentué dans la loi récente. Il s’agit de soigner une entreprise malade en cherchant à la redresser à chaque fois que c’est possible ou en lui administrant des soins palliatifs lorsqu’elle n’est plus viable, faire en sorte que la liquidation judiciaire cause le moins de dégâts collatéraux.
  • un caractère préventif très prononcé car la cessation des paiements marque une date souvent très tardive pour mettre en place un plan de redressement de l’entreprise, par le biais de dispositifs légaux qui permettent une intervention précoce du juge. Le législateur en en profité pour réformer un certain nombre d’aspects techniques et introduire certaines innovations qui tiennent au champ d’application des procédures collectives.

L’ordonnance 18/12/2008 a pris acte que les nouveautés de 2005 sont restées sans grands effets. La procédure-phare de 2005 est restée dans l’ombre (sauvegarde). La L22/10/2010 a introduit une nouvelle procédure de sauvegarde accélérée pour les établissements de crédit ; même chose pour l’ordonnance du 9/12/2010 sur l’adaptation des procédures collectives à l’EIRL[1].

L’examen de l’ensemble de ces dispositifs révèle d’une part des mécanismes non-contentieux, de traitement des difficultés des entreprises (livre 1) et d’autre part, des mécanismes contentieux donnant lieu à une véritable procédure judiciaire et à un traitement juridictionnel (livre 2).

PARTIE I

Les Mécanismes Non-Contentieux du Traitement des Difficultés

Chapitre 1 : Mécanismes purement amiables.

Ils reposent sur la technique de l’alerte mise à disposition de personnes non-dirigeante voire tiers à l’entreprise et visant le dirigeant. Encore faut-il que le législateur, lorsqu’il permet l’intervention, puisse le faire dans des conditions de légalité irrémédiables. Ces mécanismes fondés sur l’alerte malmènent un peu le principe de la liberté du commerce et de l’industrie. On va permettre à certaines personnes d’émettre des opinions voire de provoquer la mise en œuvre de mesures.

Ces prérogatives malmènent le principe de la liberté du commerce et de l’industrie car empiètent sur le territoire des pouvoirs du dirigeant. Ainsi, l’alerte ne sera possible que si elle est justifiée, ce qui implique que celui qui en bénéficie ait un droit à l’information afin d’asseoir sa décision sur des bases solides. Au fil des réformes, la loi a multiplié les devoirs d’information notamment vis-à-vis de l’expert-comptable ou encore l’obligation de rédiger un document prévisionnel pour les entreprises d’une certaine ampleur.

L’entreprise doit être en difficulté et la personne donnant l’alerte doit être informée des difficultés de l’entreprise, ce qui pose le problème du secret des affaires, écartant ainsi les tiers et les salariés des informations portant sur les difficultés. La loi a ainsi multiplié les obligations d’information de l’entreprise que ce soit au bénéfice du CAC ou du CE. Il s’agit d’obliger les entrepreneurs par ces règles légales à procéder à une gestion prévisionnelle de leur entreprise permettant de mesurer les éventuelles difficultés de celle-ci.

Encore faut-il, pour que ces mesures puissent être mises en œuvre, que l’entreprise puisse être qualifiée d’entreprise en difficulté. Or, l’intervention de cette tierce personne laisse penser qu’il faut qu’elle soit informée des difficultés de l’entreprise. Pour que la révélation puisse s’opérer, il faut que les informations soient disponibles. La loi, au fil des réformes, a multiplié les informations que doit fournir l’entreprise : informations comptables destinées au CAC ou au CE. Ainsi, les entreprises qui dépassent certains seuils en termes de taille se doivent d’établir des documents conventionnels. On invite les dirigeants de l’entreprise à fournir à ces organes des documents leur permettant d’apprécier des difficultés de l’entreprise.

Malgré cela, la notion d’entreprise en difficulté n’a pas été concrètement définie. Une « entreprise en difficulté » c’est aussi bien une entreprise en cessation des paiements, que celle qui ne l’est pas, bien qu’en difficulté. La différence va se faire sur le régime qui va s’appliquer. Pour une entreprise en difficulté qui n’est pas en cessation des paiements, on va parler d’une entreprise qui connait des faits de nature à compromettre la continuité de son exploitation. En pratique, cela se traduit par l’insuffisance de fonds propres, sous-capitalisation, et par un certain nombre d’alertes : l’entreprise est défaillante quant au paiement de ses dettes fiscales, ses cotisations sociales, recours à l’emprunt pour assurer ses dépenses courantes ou encore lorsque les marges bénéficiaires de l’entreprise sont trop étroites pour assurer sa pérennité économique. Or, il se trouve que les dirigeants sociaux se refusent souvent à voir ces difficultés réelles et en paient les conséquences lorsqu’elles ne sont pas repérées à temps, d’où le devoir d’alerte.

Section 1 : L’alerte interne.

Elle appartient aux associés (il faut une société), au commissaire aux comptes (CAC) et au Comité d’entreprise (CE).

  • 1. L’alerte par les actionnaires.

L225-31institue l’expertise de minorité en matière de SA, qui confère à un ou plusieurs associés minoritaires, la possibilité de demander au tribunal la nomination d’un expert qui devra rendre un rapport sur des décisions de gestion. Cette décision ne lie pas particulièrement les entreprises en difficulté mais on peut penser que l’entreprise ne se trouve pas alors dans la meilleure situation. C’est une alerte déclenchée par des associés minoritaires sous contrôle du juge.

L225-32complète l’expertise de minorité et vise plus précisément les entreprises en difficulté. Tout actionnaire représentant au moins 5% du capital social peut poser au moins deux fois par an, des questions au dirigeant de l’entreprise sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. Les dirigeants questionnés doivent obligatoirement répondre à ces associés minoritaires et cette réponse est communiquée également au commissaire aux comptes.

Grande liberté des associés : ils ne sont pas tenus à la confidentialité et peuvent avoir accès à toutes les informations (≠ CAC). En cas de questions, le dirigeant doit obligatoirement répondre et la réponse est communiquée au CAC ; si la réponse n’est pas satisfaisante, le CAC pourra engager la procédure d’alerte (L234-1).

  • 2. L’alerte par le Commissaire aux comptes.

L234-1permet au CAC de déclencher une procédure d’alerte chaque fois qu’il constate un fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. Il a un pouvoir d’appréciation sur les faits en question qui a fait dire à certains qu’il s’agissait là d’une exception au principe selon lequel le CAC ne doit pas s’immiscer dans la gestion de la société.

Il constate les difficultés et va demander des explications au dirigeant qui doit lui fournir des réponses sur les mesures de redressement qu’il envisage. Si les réponses ne sont pas satisfaisantes, il doit inviter le dirigeant à délibérer dans le cadre des organes de direction. Cette invitation est transmise au président du tribunal de commerce pour information. Le résultat de cette délibération est également transmise au président du tribunal de commerce (si c’est une société commerciale, sinon, au président du TGI). Si les organes dirigeants ne se sont pas réunis ou que la réponse n’est pas satisfaisante, celui-ci doit communiquer aux institutions compétentes (AG) un compte rendu.

On peut alors révoquer, mettre en cause la responsabilité des dirigeants ou bien renouveler la confiance dans les dirigeants, ce qui est bien souvent le cas. Cette procédure est relativement inefficace. Si au terme de cette délibération de l’AG, le CAC constate que les décisions prises ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation, il doit en informer le président de la juridiction. Pour assurer ces démarches, la loi instaure un régime d’irresponsabilité à l’égard du CAC. L822-15 délie le CAC du secret professionnel, au moins à l’égard du président du tribunal de commerce mais ce principe ne va pas jusqu’à exonérer le CAC des éventuelles fautes lourdes (L822-17).

  • 3. L’alerte par le Comité d’entreprise.

Créée par la L1/03/1984 : c’est un moyen d’associer les salariés à la vie de l’entreprise. Elle a été, à l’origine, très critiquée car on craignait que le comité d’entreprise porte sur la place publique des difficultés internes à l’entreprise, divulgation qui risquait d’aggraver ses difficultés. Cette crainte ne s’est jamais vérifiée en pratique. Autre critique, certains ont émis l’hypothèse que le CE n’avait pas les compétences nécessaires pour apprécier des informations qui lui seraient transmises. Là encore, la loi a prévu cette possibilité et la critique est infondée.

Le Code du travail précise qu’il faut un CE (plus de 50 salariés) et des faits « de nature à affecter de manière préoccupante la situation de l’entreprise ». Le CE est alors informé par le biais de documents comptables et c’est à partir de ces documents qu’il va décider ou non de déclencher l’alerte. Celle-ci consiste à poser des questions aux dirigeants sociaux. C’est un droit, pas une obligation. Si la réponse n’est pas satisfaisante, le CE doit établir un rapport qui doit conclure sur l’opportunité ou non de saisir les organes dirigeants de l’entreprise voire d’informer les associés par l’intermédiaire des organes dirigeants.

Cependant, le CE ne peut convoquer une AG en la matière. Le CAC est prévenu de cette démarche, tout comme le président du tribunal de commerce.

Le CE va bénéficier d’un certain nombre d’informations couvertes par le secret. La violation de ce secret par tel ou tel membre de l’entreprise pourrait justifier un licenciement. Les pouvoirs donnés au CE sont relativement limités.

Section 2 : L’alerte externe.

Elle concerne surtout les entreprises de taille modeste, dépourvues à la fois de commissaire aux comptes et de CE. L’alerte ne peut provenir pour ces entreprises que d’organes extérieurs à elles : les groupements de prévention agréés ou le président de la juridiction compétente

  • 1. Groupement de Prévention Agréés (L611-1com).

Les groupements de prévention agréés sont des centres de diagnostic des entreprises. Ils sont crées sur le fondement de la loi de 1901 (association) et font l’objet d’un agrément de l’administration en fonction des compétences de leurs membres, donné par le préfet et qui fonctionne sur le fondement de la cotisation. Ce groupement est au centre d’un réseau d’informations fournies par ses adhérents mais également par l’administration fiscale.

Ce groupement a pour fonction de fournir à ses adhérents une analyse comptable et financière, une assistance juridique. Il peut alerter les entreprises sur les difficultés constatées ou proposer l’intervention d’un expert mais en tout état de cause, il n’a qu’un pouvoir consultatif, le dirigeant de l’entreprise demeurant seul maître de la décision.

Ce groupement peut jouer un rôle de mandataire auprès de certains organes extérieurs à l’entreprise (organismes de crédit ou d’assurance). Cette intervention des groupements dans la vie des PME reste cependant très limitée car assez peu d’entreprises y adhèrent (aucun véritable avantage n’est lié à cette adhésion, hormis peut-être moins de contrôles fiscaux).

  • 2. Rôle du Président du tribunal.

La L1/03/1984 ne prévoyait qu’une intervention minimale mais elle a été élargie par les lois de 1994 et 2005 (L611-2).

Sont visées toutes les entreprises individuelles ou sociétaires, commerciales ou artisanales ; pour les autres, aucun texte ne délivre de pouvoirs au Président du tribunal de commerce (ex : profession libérale). Chaque fois que celui-ci est informé de faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, il peut convoquer le dirigeant afin d’envisager les mesures à prendre. Il s’agit d’une invitation adressée au chef d’entreprise en vue de nouer un dialogue et de l’alerter sur les difficultés de son entreprise. A travers ce dialogue va s’instaurer une véritable alerte au bénéfice du président du tribunal de commerce.

Il dispose d’un certain nombre d’informations (adressées par le Greffe, le Trésor, CAC, Urssaf, …). Le résultat de ce dialogue dépend étroitement de la personne du Président et de son autorité mais à ce stade, il ne peut rien ordonner. Si le dirigeant reste sourd à ses recommandations, le Président dispose de prérogatives : compléter ses informations, et si le dirigeant ne procède pas au dépôt des comptes au greffe (obligation), il peut lui adresser une injonction de le faire.

Dans le cas contraire ou lorsqu’il y a collaboration, il peut à la demande du dirigeant, nommer un mandataire ad hoc dont il va déterminer la mission et qui va examiner toutes les possibilités de redressement de l’entreprise. Cette nomination, ne peut se faire qu’à la demande du dirigeant qui peut d’ailleurs suggérer un nom, le but étant de faciliter la conclusion d’un protocole d’accord avec les créanciers voire d’ouvrir la voie à une procédure de conciliation ou à une procédure collective en présence d’une CDP.

Chapitre 2 : La procédure gracieuse de conciliation.

Cette procédure de conciliation, dans la loi de 2005, s’est substituée à la procédure de règlement amiable initiée dans la L1/03/1984. La loi nouvelle a élargi et précisé les conditions de cette conciliation.

Section 1 : Ouverture de la conciliation.

Toutes les personnes physiques ou personnes morales pouvant bénéficier d’une procédure collective peuvent bénéficier d’une conciliation (champ d’application large). La compétence du tribunal diffère selon la nature de l’entreprise (cial : Tcom, civile : TGI).

Conditions d’ouverture: le débiteur doit rencontrer des difficultés juridiques, économiques ou financières avérées ou prévisibles. Il ne doit pas être en CDP <45j: innovation qui élargit les possibilités d’ouverture à tel point qu’elle a eu plus de succès que la mesure phare ie la sauvegarde.

La définition de la CDP n’a pas changé : « l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible ». Cela suppose que la situation de CDP soit datée.

La procédure ne peut être ouverte que sur requête du débiteur(volontarisme). Le président ouvre la procédure pendant 4 mois prorogeable d’un mois. Lorsque le président est saisi de la requête, il dispose encore à ce stade d’une possibilité de compléter ses informations avant de répondre à la demande : informer le MP (certains ont craint un excès de judiciarisation), convoquer le débiteur ou toute personne de son choix (toujours pas de moyen de coercition car procédure gracieuse mais le refus de répondre à l’invitation peut être un signe), nommer un expert, … Si, aux vues de ces informations, la conciliation est justifiées et le président nomme un conciliateur qui a pour mission de permettre la conclusion d’accords entre le débiteurs et ses créanciers (rôle d’interface). Facilités octroyées : les autorités publiques peuvent aussi négocier leurs dettes.

Au terme de la période, la mission du conciliateur prend fin et aucune autre ne peut être ouverte avant 3mois. La décision qui ouvre la procédure est non-susceptible de recours (gracieux), communiquée au MP et à l’Autorité professionnelle en présence de professions règlementées.

Lors de la requête, rien n’oblige le juge à opérer des vérifications ie qu’il regarde juste les conditions d’ouverture et il peut refuser (susceptible de recours). L’ouverture se fait par le biais d’une ordonnance sur requête (pas de recours : gracieux) mais oui pour le refus d’ouverture (acte de nature juridictionnelle). La L2005 a précisé le statut du mandataire ad hoc et du conciliateur : ils doivent bénéficier d’une grande indépendance d’où un régime d’incompatibilité (L611-13). Au point qu’en l’absence d’indépendance, le débiteur peut les récuser.

Section 2 : Déroulement de la procédure de conciliation.

Le conciliateur n’est pas partie à la procédure : il n’exerce aucune fonction d’assistance ou de surveillance, il est juste là pour favoriser la conclusion de contrats entre l’entreprise et ses créanciers (L211-7). Ainsi, il n’a pas de pouvoir particulier mais juste des moyens d’informations. Rôle de facilitateur d’où l’importance de ses qualités personnelles d’autant que la poursuite des actions des créanciers reste possible.

Au terme de sa mission, il va rendre compte au tribunal, formuler des observations, indiquer l’accord auquel il a pu parvenir… A défaut d’accord, il indique au président qu’il a un constat d’échec. S’il constate la CDP, il doit aussi l’indiquer car cette constatation permettrait au tribunal de se saisir d’office de la procédure en vue de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire.

Pendant la conciliation, les poursuites des créanciers sont toujours possible (≠ avant 2005).Le débiteur peut demander au président des délais de grâce ou des réductions d’intérêts (111-1civ). En aucun cas, il ne peut décider d’une mesure générale de suspension totale des poursuites. Il peut subordonner ces mesures à la prise de garanties de la part du débiteur. En revanche, l’ouverture de la conciliation n’a plus d’effet de suspension générale des poursuites comme c’était le cas avant. Si la conciliation n’aboutit pas à un accord, le président du tribunal va constater l’impossibilité de l’accord et tout s’arrête sauf déclenchement d’une procédure contentieuse. Si en revanche l’accord s’avère possible, il faut le consacrer.

Section 3 : Consécration de l’accord.

Il s’agit d’un accord collectif conclu entre un débiteur et ses créanciers. Le débiteur présente un plan dans lequel figurent des dispositions concernant des cessions d’activités, une réorganisation, des licenciements, … Le plus souvent, ce plan va demander des sacrifices de la part des créanciers (ex : en terme d’échéance, de paiement, de remise de dettes, …) étant entendu que tous les créanciers ne sont pas obligés d’accepter. Ce sont en général, les principaux créanciers dont le consentement sera requis et seront sollicités. C’est le résultat d’une négociation (chacun a des motivations différentes) qui peut aboutir à des accords différents en fonction des créanciers voire pas d’accord.

  • 1. Formes de l’accord (2).
  • la constatation:sur requête conjointe, les parties saisissent le Président du Tcom qui constate l’accord ie lui confère une force exécutoire. L’accord reste confidentiel, non-publié et la décision du Président est non-susceptible de recours (gracieuse). Cela équivaut à une transaction en matière civile (611-8). Avantage car ne compromet pas le crédit du débiteur et ne révèle pas aux tiers les remises octroyées par les créanciers. Procédure préférée par les parties.
  • l’homologation: saisine du tribunal (forme collégiale) par le débiteur seul afin d’obtenir un jugement d’homologation. 3 conditions :

– le débiteur ne doit pas ou plus être en CDP

– l’accord doit assurer la pérennité de t’entreprise

l’accord ne doit pas porter atteinte aux créanciers non-signataires (qui peuvent continuer à poursuivre le débiteur)

Si les conditions sont réunies, le Président convoque en Chambre du Conseil le débiteur ou toutes personnes qu’il souhaite. Ensuite, il prononce sa décision, le jugement est déposé au greffe et publié puis communiqué au CAC et au MP.

Ce jugement est susceptible de tierce opposition dans le délai de 10j. Celui qui rejette l’homologation n’est pas publié mais il est susceptible d’appel comme celui qui l’accueille (mais que de la part du MP ou des parties en cas de contestation du privilège de new money). Il a un caractère public, ce qui constitue une contrainte pour les parties.

  • 2. Effets de l’accord.

L’ordonnance de décembre 2008 a supprimé la distinction faite jusque-là entre les effets produits lorsque l’accord était simplement constaté et les effets produits par l’accord homologué (L611-6-1 et 2). La distinction ne subsiste que pour ce qui est des effets :

interruption ou interdiction de toute poursuite de la part des créanciers parties à l’accord.En contrepartie, la loi prévoit que les délais de prescription sont suspendus. Cet effet bénéficie au débiteur mais aussi aux personnes engagées à ses côtés (caution, garant ou coobligé).

si l’accord a été homologué, l’interdiction d’émettre des chèques est suspendue pendant le déroulement et l’exécution de l’accord de conciliation.

Pour inciter à l’homologation, la loi a institué le privilège de new money (611-11) bénéficiant au créancier qui a apporté de l’argent frais ou qui a fourni un bien au débiteur. C’est un privilège car il sera payé par priorité si l’entreprise fait l’objet par la suite d’une sauvegarde, RJ ou LJ.

Cette règle a été inspirée du droit de la faillite des USA. Les créanciers peuvent donc être payés en priorité grâce à ce privilège, si par la suite de l’accord de conciliation, le débiteur est mis sous sauvegarde, en redressement ou liquidation judiciaire. Encore faut-il que les facilités de crédit, biens ou services fournis au débiteur l’aient été dans le cadre de la procédure de conciliation. En effet, si un créancier a fourni des facilités de crédit antérieurement à la période de conciliation, il ne bénéficie pas de ce privilège. Le but est d’inciter les créanciers du débiteur à jouer le jeu de la conciliation. Ce privilège jouera pour les créances antérieures mais aussi postérieures à l’ouverture d’une procédure collective.

Condition pour que ce privilège joue : l’apport en trésorerie ou l’apport de bien ou de service doit être consenti en vue de la pérennisation de l’activité de l’entreprise. Il faut savoir que ce privilège ne s’applique pas cependant aux apports consentis dans le cadre d’une augmentation de capital. En revanche, si l’apport en trésorerie est un apport en compte courant ie en réalité un prêt fait à l’entreprise, le privilège jouera normalement.

Une fois que le tribunal a constaté ou homologué l’accord, celui-ci devra être mis en œuvre. En cas d’inexécution de l’accord, le tribunal va prononcer la résolution de celui-ci à la demande d’une des parties. En même temps, il peut prononcer la déchéance de tout délai de paiement.Quels sont les engagements pouvant donner lieu à résolution de l’accord ? La loi ne prévoit rien. Le plus souvent, on peut penser qu’il s’agira de l’inexécution d’engagements financiers mais rien n’interdit que la résolution de l’accord puisse sanctionner des engagements sociaux ou juridiques.

La résolution de l’accord a-t-elle un effet rétroactif ? La réponse est douteuse en la matière. On a un argument de texte qui prévoit la possibilité de la déchéance de tout délai de paiement. Dans tous les autres cas, il ne semble pas y avoir rétroactivité. Dès lors, la résolution ne jouera qu’à partir du jour où elle a été prononcée.

Par ailleurs, se posait la question du devenir de la conciliation en cas d’ouverture d’une procédure collective. L611-12 est très clair sur la question : il indique que l’ouverture d’une PC met fin à la procédure de conciliation. Les créanciers retrouvent alors l’intégralité de leur créance, sans préjudice du privilège de «new money». Cette procédure collective serait prononcée dans le cadre d’un accord de conciliation.

PARTIE II

Les Mécanismes Contentieux du Traitement des Difficultés

Le législateur a voulu faire en sorte que cette nouvelle procédure devienne le droit commun. Il a conservé les procédures existantes antérieurement (redressement et liquidation judiciaire) mais c’est la procédure de sauvegarde qui devient le droit commun puisque dans les deux autres procédures, les textes opèrent à des renvois à cette procédure.

En outre, de nombreuses dispositions légales sont conçues de manière à inciter les praticiens à privilégier la procédure de sauvegarde. La loi de 2005 à 5 ans aujourd’hui. Les statistiques dont on dispose sur le taux de fréquence des différentes procédures n’incitent pas à l’optimisme dont le législateur avait fait preuve en 2005. En effet, les procédures de sauvegarde demeurent statistiquement très minoritaires, la grande masse étant représentée par les liquidations judiciaires. Ceci est peut-être dû au fait que reconnaitre ses difficultés c’est reconnaitre son échec. Les mentalités ont du mal à changer alors même que les procédures collectives ne sont plus regardées comme une punition.

Titre I : Procédure de Sauvegarde

L’obsession du législateur depuis longtemps est d’inciter le débiteur à déclencher rapidement une procédure avant que la situation de l’entreprise ne soit irrémédiablement compromise. Avec la loi de 2005, on annonce en quelque sorte clairement la couleur puisque la procédure de sauvegarde permet au débiteur de saisir le juge beaucoup plus tôt, alors même qu’il n’est pas en CDP. Elle est conçue comme un remède : permet de se mettre sous la protection du juge pour laisser le temps de se remettre en marche et d’obliger les créanciers (parapluie judiciaire).

Il faut noter la porosité des procédures ie la possibilité de passer facilement d’une procédure à une autre. Le dispositif légal a été conçu de manière souple, si bien que le débiteur à un certain nombre de dispositifs juridiques et procéduraux à sa disposition.

Caractère hybride de la procédure de sauvegarde, à la fois préventive (avant la CDP) et curative (elle s’inspire largement de la L1985 et de la procédure de RJ). Cette procédure institue à la fois une relation amiable entre le créancier et le débiteur mais aussi une procédure très judiciarisée.

Sous-titre I : Ouverture de la Procédure

Chapitre 1 : Conditions d’ouverture.

Section 1 : Champ d’application.

Depuis 2005, L620-2 a élargi son champ d’application à toutes les professions, qu’il s’agisse de personnes physiques ou de PM.

  • 1. Entreprises appartenant à des personnes physiques.

Personnes physiques exploitant une entreprise : tout artisan, commerçant ou toute personne exerçant une activité professionnelle indépendante (activité habituelle exercée à titre lucratif et de manière indépendante), qu’elle soit règlementée ou non. Les professions libérales règlementées bénéficient de règles protectrices et d’un organisme professionnel qui contrôle ses membres et qui est associé au déroulement de la procédure.

ex : un salarié ou fonctionnaire qui exerce des actes de commerce ne peut pas être soumis à la procédure car l’activité de commerce est accessoire même s’il n’y a pas d’exigence d’inscription au RCS pour bénéficier de la procédure.

Cas particuliers d’exclusion :

2 personnes exercent en commun une même activité : le service est possible mais il y aura 2 procédures car une société créée de fait ne peut pas en bénéficier. Le tribunal pourra se baser sur la confusion des patrimoines et ouvrir une seule procédure (ex : coexploitation); ou lorsque le 2nd époux exerce une activité commerçante accessoire.

– sont exclus, les associés d’une société dans laquelle ils ne sont responsables que jusqu’à concurrence de leur apport.

L620-2 exige qu’une autre PC ne soit pas en cours : faillite sur faille ne vaut. Si une personne exerce 2 activités, l’action concernera normalement l’ensemble de ses activités donc de ses patrimoines sauf cas de l’EIRL qui est le résultat d’un patrimoine affecté.

Pour les entreprises PM, l’article vise toutes les personnes de droit privé (civile, cial, …groupement doté de la PM). Sont exclus, les sociétés ou groupements sans personnalité morale (ex : société en participation ; possible pour l’associé s’il exerce une activité indépendante).

  • 2. Entreprises personnes morales.

Les PM de droit public, à priori, ne sont pas visées sauf celles soumises à un régime de droit privé (ex : société d’économie mixte). Exclusion des sociétés créées de fait mais le gérant peut le demander s’il exerce une activité indépendante.

Pour la société dissoute, ce ne sera pas possible et c’est d’ailleurs absurde mais la liquidation reste possible (même chose pour la société en formation).

Section 2 : Causes d’ouverture de la procédure.

La L2005 et l’ord.2008 permettent d’anticiper l’ouverture de la procédure car avant il fallait être en CDP. Désormais, l’entreprise même in bonis peut demander l’ouverture d’une sauvegarde (L620-1) si le débiteur justifie de difficultés qu’il n’est pas en mesure de surmonter.

Problème car la nature des difficultés n’a pas été déterminée. Il faut évidemment des difficultés avérées. Risque avec une telle définition que des entrepreneurs abusent de la procédure en cas de petites difficultés car elle les met à l’abri des créanciers. D’où l’importance du contrôle du juge. La jurisprudence est souple.

Chapitre 2 : Ouverture de la Sauvegarde.

Section 1 : La compétence du tribunal.

La compétence du tribunal est déterminée par 2 facteurs :

ratione materiae : TGI ou Tcom en fonction de la nature du débiteur. Les tribunaux sont encore plus sollicités du fait de l’élargissement des personnes concernées.

ratione loci : tribunal du siège social sauf si les circonstances en présence imposent le choix d’un autre tribunal (ex : grèves). Entre le siège social réel et le siège statutaire, la priorité vient au siège réel. En cas de changement de siège social dans les 6mois précédant la saisine, le tribunal du siège social initial reste compétent pour éviter le forum shopping.

Les procédures et les compétences peuvent être étendues à d’autres personnes (confusion de patrimoines et fictivité). Il y a confusion des patrimoines lorsque ceux-ci sont tellement imbriqués qu’il est difficile de distinguer les actifs et les passifs de chacune des entreprises. Lorsqu’il y a jonction de procédures, il est possible qu’une CDP apparaisse et la procédure de sauvegarde doit alors stopper.

Pour ce qui est de la compétence internationale, les règles internes s’appliquent. Un problème se pose quant aux effets d’une procédure ouverte à l’étranger en présence de biens en France. Le principe de territorialité devrait s’opposer à ces effets mais cela obligerait le créancier à agir à nouveau en France sauf qu’en matière de sauvegarde, le créancier ne peut pas saisir le juge (seulement le débiteur). Ainsi, si une procédure est ouverte en France, elle n’aura d’effet à l’étranger qu’en cas d’exéquatur ; si une procédure est ouverte à l’étranger, elle ne produira d’effets en France que sous conditions.

Le Règlement du 29/05/2000 sur les CDL et de J en matière de PC donne compétence au tribunal où se trouve le centre principal des intérêts de l’entreprise (siège social) mais l’ouverture de la PC peut avoir des effets dans d’autres Etats membres. Toutefois, le système de territorialité n’est pas tout à fait abandonné car il est possible d’ouvrir une procédure secondaire dans un autre Etat.

Section 2 : Le rôle du tribunal.

Il ne peut être saisi que par le débiteur (procédure volontariste) qui n’est pas en CDP ie in bonis (il reste à la tête de l’entreprise). Etapes :

  • 1. L’information du tribunal.

Le juge doit s’informer sur les causes d’ouverture et en particulier sur la nature des difficultés et l’absence de CDP. Il peut aussi convoquer toute personne dont l’audition lui parait utile. Si le débiteur exerce une profession règlementée, le juge devra auditionner l’Ordre professionnel. Ainsi, il commettra un juge enquêteur disposant d’un pouvoir d’investigation. Il peut être aidé par des experts et établit un rapport qui pourra être discuté (contradictoire). Intervention possible du MP mais cela devient obligatoire s’il y a eu mandat ad hoc ou conciliation dans les 18mois précédents.

  • 2. La décision d’ouverture de la procédure.

Le jugement a une nature constitutive (créé une situation nouvelle).

  1. contenu du jugement d’ouverture.
  • vérification des conditionsde L620-1 notamment l’absence de CDP. Il est possible d’ouvrit une procédure de sauvegarde à la suite d’une conciliation à condition que le débiteur soit toujours in bonis (exceptionnel).
  • nomination des organesde la procédure :

o juge commissaire(veille au déroulement)

o organes non-judiciaires(ex : représentant du personnel, expert) et notamment l’administrateur et le mandataire judiciaire dont il va fixer les missions:

AJ : professionnel qui appartient à une profession règlementée et qui figure sur une liste permettant au juge de faire son choix. Incompatibilités notamment familiales avec le gérant. Fonction d’assistance et de surveillance. Nomination facultative pour l’entreprise de taille modeste (CA <3millions et <20salariés : c’est le débiteur lui-même qui va exercer ces fonctions).

– MJ : représente les créanciers. Le juge le choisit sur une liste, mêmes conditions et incompatibilités.

A la demande du MP, il sera possible de nommer plusieurs AJ et MJ. Le débiteur peut même proposer un nom figurant sur la liste. Le MP peut s’opposer à ce que ce choix se porte sur le mandataire ad hoc et le conciliateur. Procédure de remplacement (L621-7).

  1. effets du prononcé de la décision.

L’opposabilité :

La décision est opposable ie qu’il s’agit d’un jugement constitutif et non déclaratif. Opposable à tous même aux personnes non parties à l’instance (l’opposition du débiteur n’est pas possible même en cas de jugement par défaut). Il ne faut jamais dissocier le contenu des règles des conditions économiques car les règles de cette matière s’expliquent par des circonstances éco.

Le jugement est immédiatement opposable (dès 0 heure) dès son prononcé ie sans attendre les mesures de publicitéet les créanciers subissent un certain nombre de contrainte. C’est un avantage pour le débiteur car dès le début de la procédure il va bénéficier du parapluie judiciaire. Le jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

La publicité du jugement :

Les mesures de publicité ont un rôle essentiellement informatif, ce qui peut porter préjudice aux créanciers et certains ont soutenu qu’il ne fallait alors pas de publicité mais il ne faut pas cacher la situation aux partenaires extérieurs. Il faut aussi informer les tiers (pas seulement les créanciers) du fait des incidences de la procédure à leur égard. En effet, elle va avoir pour effet de réduire les pouvoirs du débiteur. De plus, ils vont devoir s’exécuter dans un certain délai et il faut donc les mettre au courant du point de départ.

La publicité ce fait au RCS (commerçant), au répertoire des métiers (artisan) ou dans un registre spécial au TGI. Un extrait du jugement sera publié au BODACC.

Les voies de recours :

Il peut faire l’objet d’un appel et d’un recours en cassation. L’organisation des voies de recours est fondée sur un impératif économique ie qu’il faut éviter celles qui ont un effet dilatoire (freiner le déroulement de la procédure). Plus on attend, plus la situation de l’entreprise tend à s’aggraver, il n’y a pas lieu de trainer. Les voies de recours sont donc très encadrées (661-1 : liste limitative des personnes qui peuvent exercer ces voies de recours).

La tierce oppositionest ouverte à défaut de disposition contraire contre toutes les décisions susceptible d’appel et de cassation. Elle est utile chaque fois que la personne qui dispose de cette voie, ne peut pas interjeter appel ou cassation et qui considère que les difficultés de l’entreprise ne sont pas insurmontables (remet en cause l’appréciation du juge). Cette tierce opposition est aussi susceptible d’appel ou de cassation.

Sous-titre II : Déroulement de la procédure après le jugement d’ouverture

Pendant le déroulement de la procédure, l’activité de l’entreprise doit continuer.

Chapitre 1 : Organisation de la procédure.

Section 1 : Les organes judiciaires.

  • 1. Le tribunal.

Depuis la L1985, les pouvoirs des organes judiciaires ont été rééquilibrés en faveur du juge commissaire.

  1. les attributions du tribunal.

Même si depuis 1985, il y a eu un rééquilibrage des pouvoirs en faveur du JC, les pouvoirs du tribunal restent étendus : il organise l’administration de l’entreprise, modifie sa structure et décide de l’issue de la procédure. Par ailleurs il nomme les principaux organes (AJ, MJ, …), il fixe la durée de la période d’observation, …

Quelques attributions particulières : il a le pouvoir de suppléer le juge commissaire notamment lorsque celui-ci est défaillant, il statue sur le recours formé contre les ordonnances du juge commissaire.

Prorogation de compétence pour trancher tous les litiges qui concernent la procédure, pour prononcer des sanctions contre les dirigeants mais également pour examiner un certain nombre de litiges pour lesquels normalement il ne serait pas compétence (sorte d’attraction de la PC). Il suffit en effet pour que cette attraction puisse jouer, que le litige concerne la procédure (ie soit né de la procédure ; ex : un tiers par son comportement a aggravé la situation de l’entreprise) et que la procédure exerce sur le litige une influence juridique (ex : un associé d’une entreprise en difficultés aurait dû libérer son apport, l’action contre lui en vue de la libération de cet apport relève de la compétence du tribunal). De même, lorsque la procédure est étendue à d’autres entreprise.

Il demeure cependant des exceptions dans la mesure où le tribunal peut se heurter à la compétence exclusive d’une autre juridiction ou lorsque le litige est totalement étranger à la procédure (ex : litige successoral).

Lorsque le tribunal est compétent, sa compétence est d’OP ie qu’elle ne peut être écartée par une clause attributive de juridiction ou clause compromissoire (arbitrage) mais si le tribunal a été désigné à tort, il devra soulever d’office son incompétence.

  1. les règles de procédure.

Elles sont souvent dérogatoires au droit commun. Il en est de même quant au déroulement de la procédure, jugements rendus et voies de recours.

  1. les jugements rendus.

Tout jugement rendu quelqu’il soit doit être précédés d’un rapport du juge commissaire (JC). Il est aussi exécutoire à titre provisoire ie par exemple que l’appel n’est pas suspensif (contraire au principe commun). Il n’y a pas d’exécution provisoire lorsque le jugement a de graves conséquences (ex : sanctions professionnelles contre un dirigeant) et donc est suspensif dans ce cas. L’appel du MP est suspensif à l’égard des jugements dont les effets sont difficilement réversifs. Il est également prévu parfois l’arrêt de l’exécution provisoire : le Président de la CA lorsqu’un appel a été interjeté (appel non-suspensif), a le pouvoir d’arrêté l’exécution provisoire par une décision en référé par exemple en cas de violation manifeste de la loi applicable ou du principe du contradictoire et de manière générale lorsque l’exécution provisoire risque d’entrainer des conséquences manifestement excessives.

  1. les règles en matière de voies de recours.

Ces règles sont assez analogues à celles vues au-dessus (ex : les délais sont identiques ; 10j [brefs]). Pour les mêmes raisons qu’indiquées précédemment, les règles sont fondées sur la nécessité d’agir rapidement. L’accès aux voies de recours est restrictif car il ne s’agit pas de permettre les actions dilatoires au risque de dégrader le sort de l’entreprise.

Dans L661-1 à -7, la loi distingue selon le contenu de la décision attaquée. Il est prévu toute une liste non-exhaustive. 2 types de décisions :

– celles pouvant faire l’objet de toutes les voies de recours. L661-1 donne une liste des personnes ayant qualité pour interjeter appel

celles qui ne peuvent faire l’objet que d’un appel ou que d’un pourvoi en cassation (L661-6 et -7). Seules certaines parties au procès peuvent exercer ces voies de recours (ex : certaines sont réservées au MP)

L’accès aux voies de recours est vu de manière restrictive du fait de circonstances économiques (impératif).

L’appel-nullité est-il conservé (appel qui permet d’attaquer une décision entachée d’une grave irrégularité même lorsqu’il est interdit un appel de droit commun). 12/05/1992 : cette action est conservée. Elle vise simplement à obtenir la nullité d’une décision.

  • 2. Les autres acteurs judiciaires.
  1. le juge commissaire.

Il est nommé dès l’ouverture de la procédure. Il veille au bon déroulement de la procédure et à la protection des intérêts en présence. Pour cela il dispose de puissants moyens d’information car non seulement il a la possibilité de requérir toute une série d’actes et de documents et il est obligatoire de lui transmettre un certain nombre de document. Il est au carrefour d’informations qui doivent converger vers lui. Il n’est pas possible de lui opposer le secret professionnel

IL doit surveiller l’activité d’acteurs non-judiciaires. Il statue sur la procédure d’admission des créances, il peut autoriser certaines opérations importantes (ex : licenciement). Ces pouvoirs relèvent tantôt d’une bonne administration de la justice tantôt d’une fonction juridictionnelle. Dans tous les cas, il décide par voie d’ordonnances susceptibles de recours devant le tribunal qui a ouvert la procédure. En fin, il assiste le tribunal et notamment il lui fait rapport sur toutes les contestations qui découlent du déroulement de la procédure (formalité substantielle ie que l’absence de rapport justifie la nullité des actes du tribunal).

  1. le Ministère public.

Les PC sont toutes communicables au MP. L’entreprise en difficultés met en jeu l’intérêt général économique. Pour autant, il n’interviendra pas tout le temps. Il n’empêche qu’il a un rôle actif à jouer dans la mesure où son avis est souvent sollicité(ex : il peut demander le remplacement d’un organe non-judiciaire, demander la prolongation de la procédure d’observation, demander la sanction d’un dirigeant). Au final, ces attributions vont dépendre de l’importance économique de l’entreprise : plus l’entreprise est importante, plus l’impact de sa disparition peut se révéler décisif sur l’économie locale et plus son rôle sera important.

En ce sens, il va disposer d’un certain nombre de recours et son appel est suspensif. Lui aussi, bénéficie d’un droit à la communication d’informations.

Section 2 : Les organes non-judiciaires de la procédure.

  • 1. Les organes nommés par le tribunal.
  1. l’administrateur judiciaire.

Ses attributions sont bien plus limitées qu’en matière de RJ ou LJ car le débiteur reste à la tête de ses affaires. En effet, en sauvegarde, l’entreprise est in bonis.

Pouvoirs de gestion au cours de la période d’observation :

Il est nommé par le tribunal dans le jugement d’ouverture de la procédure. Il peut être remplacé à la demande par exemple du MP mais la décision relève toujours du tribunal. L621-4 : sa mission consiste à surveiller et assister le débiteur mais en aucune manière il ne peut se substituer sauf conditions. Il dispose d’attributions spéciales (ex : prendre des mesures conservatoires, si le débiteur est dans l’interdiction d’émettre des chèques). Seul l’AJ peut décider de la continuation des contrats en cours et recevoir la revendication des biens meubles. Par ailleurs, il partage avec le MJ l’exercice d’actions en justice spécifiques (ex : en matière de LJ, ils peuvent mettre en cause la responsabilité des dirigeants lorsque l’insuffisance d’actif est liée à des fautes de gestion).

Pouvoir de préparation du plan de sauvegarde :

Il est le maitre d’œuvre du plan de sauvegarde. Le débiteur doit tenir compte de la présence de l’AJ et n’a pas de recours contre la décision fixant la mission de l’AJ mais il peut interjeter appel du jugement d’ouverture (dans lequel est fixée la mission). Le tribunal peut à tout instant modifier la mission de l’AJ de même que les différents organes de la procédure peuvent lui demander de la modifier. Il s’agit de vaincre les réticences du débiteur.

Pour l’ensemble de ses attributions, l’AJ va recevoir une rémunération. C’est une profession réglementée et il figure sur une liste.

Il est possible de contester ses décisions auprès du JC par voie d’ordonnance. Qui dit pouvoir, dit responsabilité donc l’AJ peut engager sa responsabilité lorsqu’il cause des dommages par sa faute. Il peut même, exceptionnellement, encourir une responsabilité pénale. Ces actions ont lieu devant le TGI et une caisse des garanties est affectée au remboursement de ces fonds.

  1. le mandataire judiciaire.

Pouvoir de défense de l’intérêt collectif des créanciers

Il est chargé de défendre l’intérêt collectif des créanciers (≠ la somme des intérêts particuliers des différents créanciers). Ses attributions se traduisent par cette idée de représentation (ex : participe à la vérification des créances, au sort de l’entreprise en consultant notamment les créanciers). En ce sens, il doit être auditionné par le tribunal et il a la possibilité d’exercer des voies de recours. De manière générale, il a la capacité d’engager une action en justice lorsque l’intérêt des créanciers est remis en cause.

Il peut aussi engager sa propre responsabilité. S’il cause un préjudice à l’intérêt collectif des créanciers, sa responsabilité ne peut être mise en œuvre que par un remplaçant ie un nouveau MJ.

  1. les contrôleurs.

Depuis L1985, on est passé d’une désignation facultative à une désignation obligatoire. Ils sont nommés par le JC parmi les créanciers (1 à 5), chirographaires ou privilégiés. Evidemment, ils doivent être assez indépendants et donc il est prévu un régime d’incompatibilités entre le débiteur et les contrôleurs (conflit d’intérêts).

Ils peuvent être révoqués en cas de faute. Ils n’ont pas de pouvoir direct donc ils ne peuvent engager leur responsabilité qu’en cas de faute lourde. Lorsque le débiteur relève d’une profession règlementée, des membres de l’Ordre doivent être sélectionnés.

Attributions :

– droit à l’information

fonction d’assistance du MJ et de l’AJ (ex : obligation de les auditionner en cas de prise de décisions importantes ou possibilité pour eux de suppléer la carence du MJ)

  • 2. Les salariés.

Les institutions représentatives :

Le Garde des Sceaux Badinter disait au moment de l’élaboration de la L1985 que les salariés devaient devenir de véritables citoyens de l’entreprise. En effet, ils ont été d’avantage associés au déroulement de la procédure, ce qui est la moindre des choses puisque leur emploi est en cause. Les organes (CA, …) seront informés ou consultés à chaque stade de la procédure et notamment lorsque le tribunal est amené à prendre des décisions importantes. Ils ont également la faculté d’exercer des voies de recours sous conditions.

Le représentant des salariés :

La loi prévoit la désignation par ces organes d’un représentant des salariés. Dans les entreprises en-deçà du seuil, ce représentant va être élu directement par les salariés.

Attributions :

vérifier les créances qui résultent des contrats de travail (relevé des créances salariales signé par lui)

– dans les entreprises de taille modeste, il exerce les pouvoirs des organes représentatifs

– assiste le salarié lorsque le contrat de travail fait l’objet d’un contentieux devant le CPH

– …

Pour exercer toutes ces prérogatives, il bénéficie de protections statutaires (ex : son licenciement est soumis pour avis au CE et ne pourra intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail). L’exercice de sa mission est décompté en temps de travail. Contraintes : il est soumis à une obligation de discrétion différente du secret professionnel (responsabilité civile voire mise à pied), sans compter les conséquences d’une faute grave.

Chapitre 2 : L’administration de l’entreprise.

A côté de l’ouverture de la procédure va démarrer une période d’observation permettant d’élaborer un bilan afin de mettre en œuvre un plan de sauvegarde.

Section 1 : La poursuite de l’activité de l’entreprise.

La période d’observation ne peut avoir qu’un caractère provisoire et une durée relativement courte (impératifs économiques). Pendant cette période, l’entreprise continue de perdre de l’argent : elle a normalement une durée maximale de 6mois renouvelable une fois par un nombre limité de personne. Il est même prévu la prolongation exceptionnelle au-delà d’un an par le MP d’une durée qui ne peut être supérieure à 6mois.

Elle peut être interrompue à tout moment s’il apparait que le débiteur est dans une situation beaucoup plus grave que prévu (ex : découverte d’une CDP, L622-10).

Au cours de cette période, il ne peut être question d’arrêter l’activité d’autant que l’entreprise n’est pas en CDP. La survie de l’entreprise est conditionnée par la continuation de l’activité d’où la protection de celle-ci. Cette protection et cet encouragement de l’activité se traduit par différentes mesures.

  • 1. L’exercice du pouvoir pendant la période d’observation.

Dans le cadre d’une sauvegarde, l’entreprise est in bonis ie qu’il ne peut être question d’un dessaisissement du débiteur (ne peut être déclenchée que par la demande du débiteur). La question de la mission de l’AJ peut être posée : normalement juste assistance ou surveillance. Cette mission peut s’exercer sur tous les biens du débiteur.

Lorsque le débiteur est une personne physique, cette mission peut-elle porter sur les biens non-affectés à l’activité professionnelle ? Il peut en effet arriver notamment grâce à l’EIRL, que certains biens non-affectés soient utilisés dans le cadre de l’activité. Le tribunal est seul maitre en la matière et peut donc moduler la mission de l’AJ.

Il demeure cependant que certains biens du débiteur sont insaisissables et donc de plein droit en-dehors du champ de la mission de l’AJ (ex : salaires d’une activité extérieure, biens nécessaires à sa survie, …).

A priori, l’assistance concerne tous les actes juridiques mais c’est au tribunal de moduler les prérogatives de l’AJ. De manière générale, l’AJ devra se préoccuper de faire fonctionner l’entreprise.

  1. les actes accomplis par le débiteur seul.

Cela est possible car le débiteur reste à la tête de son entreprise.

Actes conservatoiresie qui tendent à conserver le patrimoine du débiteur (dans l’intérêt des créanciers). Si le débiteur est défaillant, l’AJ pourra le suppléer. Il s’agit par exemple d’entretenir le matériel ou d’opérer des saisies sur ses propres débiteurs.

Inventaire(L622-6): le débiteur doit réaliser un inventaire de son patrimoine. Obligation telle que s’il ne le fait pas, le tribunal peut désigner une personne pour le faire. Que doit-on y faire figurer ? Lorsqu’il s’agit d’une entreprise à responsabilité limitée, il doit inventorier les biens qui font patrie du patrimoine affecté et ceux qui ne le sont pas mais qui sont utilisés par l’entreprise. Cet inventaire est réalisé en présence de l’autorité compétente s’il s’agit d’une profession réglementée. Il doit aussi donner la liste des principaux créanciers, le montant des dettes et les contrats en cours.

Il peut exercer tous les droits et actions à caractère personnel ie ceux qui ne peuvent être exercés que par lui (ex : action oblique, divorce, action pénale, action en réparation d’un préjudice moral).

  1. les actes nécessitant une assistance.

Ce sont les actes qui ne sont pas de gestion courante par exemple. Ces actes qui seraient accomplis en violation d’une mesure d’assistance sont inopposables à la procédure. Le bénéficiaire de l’acte litigieux ne pourra pas faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure.

  1. les actes interdits.

Le principe en la matière, c’est l’interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture. C’est un principe qui vaut pour la sauvegarde (L622-7) le redressement judiciaire (L631-14) et la liquidation judiciaire (L641-3). Hormis cette exception, le domaine est très large. Le principe d’interdiction vaut aussi bien pour l’administrateur que pour le débiteur. C’est une règle classique en matière de procédure collective, fondée sur le principe d’égalité entre créanciers. En matière de sauvegarde et de redressement judiciaire, ce principe se justifie d’un point de vue économique : il s’agit de préserver l’actif de l’entreprise dans l’attente du sort de celle-ci.

Le domaine de cette interdiction a été étendu en 2005 à certaines créances postérieures au jugement d’ouverture. Il doit s’agir de créances postérieures qui ne sont pas nées pour les besoins de la procédure ou de la période d’observation mais aussi pour des créances nées postérieurement mais qui n’ont aucun rapport avec l’ouverture de la procédure (L622-17 §1). Le paiement effectué en violation de la loi est nul. Tout intéressé peut demander la nullité dans un délai de 3 ans, que le créancier soit de bonne ou mauvaise foi. Le créancier devra restituer les sommes qu’il a perçues indûment. La loi de 2007 a étendu cette interdiction. Le créancier gagiste sans dépossession, au cours de cette période, ne peut plus opposer le droit de rétention, ce qui veut dire qu’il ne pourra plus récupérer le bien en paiement de sa créance à l’ouverture de la procédure (sauf exception).

  1. les actes autorisés par exception.

Ce sont des actes qui font exception au principe d’interdiction (L622-7) :

  • exception de compensation: lorsque le débiteur est créancier de son créancier. Normalement la compensation légale ne peut pas s’exercer car elle équivaudrait à un paiement mais si elle est intervenue avant l’ouverture de la procédure, elle sera valable. On a également autorisé la compensation après l’ouverture de la procédure lorsque les deux dettes sont connexes (figurent toutes deux au débit et au crédit d’un même compte courant, par exemple les dettes réciproques d’un même contrat). La compensation peut alors intervenir après l’ouverture de la procédure en raison de leur connexité (19 mai 1991 et L622-7).
  • actes de disposition étrangers à la gestion courantede l’entreprise : ils peuvent être autorisés exceptionnellement par le JC. Exemple, l’aliénation d’un bien pendant la période d’observation, à condition que l’aliénation de l’élément d’actif de l’entreprise soit autorisée par le JC mais celui-ci peut autoriser le consentement à une convention d’arbitrage. Lorsque la poursuite de l’activité l’exige également (entreprise qui a une dette antérieure, normalement impayable mais qui constitue lacontrepartie de la restitution d’un bien). Enfin, le paiement peut être autorisé par le JC lorsque celui-ci est un paiement provisionnel de toute partie d’une créance sur un bien du débiteur grevé d’une sûreté spéciale. Or, pour cela, il va falloir que le débiteur paye la créance garantie par cette sûreté : le créancier bénéficiaire doit présenter une garantie émanant d’un établissement de crédit car normalement il ne peut pas obtenir le paiement de sa créance. La sanction est identique aux actes non-autorisés. Pour les actes non-autorisés par le JC, ils peuvent faire objet d’une action en nullité dans un délai de 3 ans.

  • 2. La continuation des contrats en cours.

Au cours de la période d’observation, c’est le tribunal fixe les pouvoirs de l’administrateur. Le débiteur demeurant à la tête de ses affaires, les pouvoirs de l’administrateur vont être limités. Cependant, ils n’empêchent pas une attribution à l’administrateur en ce qui concerne la continuation des contrats en cours. Dans le cadre de l’observation, dans une procédure de sauvegarde, il faut maintenir un réseau contractuel. Lorsque s’ouvre la procédure et démarre l’observation, il est rare qu’à cet instant, tous les contrats arrivent immédiatement à échéance. D’où l’importance du sort de ces contrats en cours.

  1. les règles communes.

De manière générale, certes il est intéressant pour l’entreprise de pouvoir continuer les contrats en cours mais le risque est l’alourdissement du passif. La loi a institué en la matière une option confirmée par la suite.

  1. l’option.

Elle confère une prérogative à l’administrateur qui est dérogatoire au droit commun quelle que soit l’étendue de la mission de celui-ci (L622-13 §2). Elle permet en effet d’imposer au cocontractant la continuité du contrat alors même qu’il n’a pas été exécuté antérieurement à l’ouverture de la procédure et qu’il aurait été prévu une clause de résolution de plein droit.

De la même manière et à l’inverse, en raison même de cette prérogative, l’administrateur peut décider d’échapper à l’exécution forcée d’un contrat jugé inopportun. Encore faut-il qu’il y ait eu un administrateur. S’il n’y en a pas, c’est le débiteur lui-même qui va exercer cette prérogative d’opter ou non pour la prolongation, après accord du MJ. En cas de désaccord, le JC tranche la décision.

  1. a) le domaine de l’option

L622-13 est un texte de portée générale donc on ne peut pas y échapper par une clause particulière. Toute clause qui tendrait à échapper à la continuation d’un contrat en cours serait nulle.

Tous les contrats peuvent être concernés, même ceux conclus intuitu personae.Dans ces contrats, le jugement d’ouverture de la procédure nuit à la confiance qui peut exister entre le débiteur et son cocontractant. La prérogative de continuation ou de non-continuation demeure (la Cass. l’a consacrée à propos d’un crédit). De même, les contrats instantanés n’échappent pas à cette option possible mais ils concernent les contrats à exécution échelonnée ou successive. l

Sont exclus en revanche de cette option, les contrats de travail, le contrat d’édition, de production audiovisuelle et le contrat d’assurance (qui a perdu depuis 2005 son caractère dérogatoire), le contrat de fiducie (par lequel le propriétaire d’un bien le remet à un tiers qui va le gérer). Encore faut-il évidemment qu’il s’agisse d’un contrat en cours.

Que se passe-t-il si le contrat est résilié avant le jugement d’ouverture ?La prérogative de continuation disparaît. De même en ce qui concerne la résiliation qui résulterait d’une clause résolutoire de plein droit dans la mesure où celle-ci aurait joué avant le jugement d’ouverture (baux commerciaux : le bail est en cours donc bénéficie de la prérogative de continuation ou non-continuation tant que le jeu de la clause résolutoire n’a pas été consolidé par une décision de justice passée en force de chose jugée).

Par ailleurs, pour que le contrat soit en cours, il ne doit pas avoir été intégralement exécuté sinon on voit mal comment on pourrait le considérer comme un contrat en cours. Il faut nuancer l’affirmation : est-ce qu’un contrat dont le prix n’a pas été versé au créancier peut être considéré comme un contrat en cours ? Si le paiement intervient entre deux échéances, le créancier impayé peut-il exiger que la dernière échéance lui soit versée, ce qui conduirait à contourner la règle de l’interdiction des paiements ? Pour autant, on ne va pas considérer qu’il s’agit d’un contrat en cours car si tel était le cas, cela voudrait dire que l’administrateur peut procéder à la continuation. On va considérer qu’un contrat est en cours simplement quand la prestation principale et caractéristique (livraison de la chose, prestation de service etc.) n’a pas été fournie mais du moment que la vente a opéré transfert de la chose à l’acheteur, on peut considérer que le contrat n’est plus en cours.

  1. b) les modalités d’exercice de l’option.

Aucun délai n’a été prévu par le texte. Une présomption de renonciation à continuer le contrat existe lorsque l’on a adressé à l’administrateur une mise en demeure restée sans réponse pendant un mois. Chaque cocontractant du contrat a la possibilité d’envoyer un courrier à l’administrateur, avec renonciation s’il y a absence de réponse. Dès lors, le contrat est résilié. Ceci est renforcé par le caractère résolutoire prévu par la loi. Le JC a la possibilité d’octroyer à l’administrateur un délai plus court ou plus long qui ne peut excéder 2 mois. Le but est d’éviter des longueurs dans la procédure.

  1. c) la situation du cocontractant.

Le contrat peut-il contenir une clause de résolution de plein droit en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde ? A priori une telle clause est valable mais le droit des procédures collectives est dérogatoire au droit commun etL622-13 §1 prévoit qu’est nulle toute clause résolutoire du seul fait de l’ouverture d’une PC.Il reste que les clauses résolutoires expresses qui auraient déjà produit leurs effets avant l’ouverture de la procédure demeurent valables. Sont illicites les clauses qui lient la résolution du contrat à la survenance d’une PC (21/02/1990) : on a admis que si le jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde intervenait avant le jugement de résolution, intenté avant l’ouverture de la procédure sur le fondement d’une clause résolutoire, l’instance en résolution pouvait se poursuivre.

Le cocontractant peut-il subordonner la continuation au règlement intégral de ses créances par le débiteur ? La Cass et la loi ont refusé cette solution. En la matière, pour les créances antérieures, le cocontractant doit produire ses créances comme n’importe quel créancier antérieur. Le créancier ne peut pas invoquer l’indivisibilité des créances qui pourraient permettre au contractant d’échapper à ses obligations. Il ne peut pas se fonder sur l’inexécution antérieure du contrat pour fonder la résolution ultérieure du contrat.

  1. les conséquences de l’option en faveur de la continuation.

L’option va conférer au débiteur des droits mais également des obligations. C’est le régime du droit commun des contrats qui va s’appliquer même si on remarque que les textes récents ont renforcé la position du cocontractant.

  1. d) la soumission au régime de droit commun.

L’administrateur et le débiteur doivent respecter les clauses du contrat (ex : une clause compromissoire). Si l’administrateur n’exécute pas le contrat en cours, le cocontractant peut demander la compensation entre la créance de DI et la dette de restitution d’acompte qu’il a également à l’égard du débiteur. Il pourrait même différer ce paiement jusqu’à ce qu’il soit statué sur les DI qui lui reviennent.

Quant aux créances issues de la continuation, elles vont bénéficier d’un traitement préférentiel. Le cocontractant bénéficie ainsi de l’exception d’inexécution : il pourra refuser de livrer la chose ou la retenir s’il n’est pas payé. L’administrateur ou le débiteur peuvent pour leur part obtenir la livraison de la chose en payant le prix mais sur autorisation du JC.

ex : si le prix de la réparation du véhicule est considéré comme une créance antérieure, on se heurterait au principe d’interdiction de paiement des créances antérieures. La loi a prévu que l’administrateur peut obtenir la restitution de la chose en payant le prix, sur autorisation du juge commissaire.

Cette possibilité de rétention n’existe que pour les créances échues. Les créances à terme, immédiatement exigibles, n’obéissent pas au même régime. Le domaine du droit de rétention s’en trouve réduit. Par ailleurs, le cocontractant peut obtenir une résiliation de plein droit du contrat pour inexécution par le débiteur de ses obligations. Enfin, on considère que l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ne constitue pas un cas de force majeure qui justifierait de sa part l’inexécution du contrat, en particulier si l’AJ n’use pas du pouvoir de continuer le contrat, ce qui pourrait causer un préjudice au cocontractant. Cette non-continuation donnera alors lieu à des DI fixés par le juge ou le contrat lui-même (clause pénale).

  1. e) le renforcement de la position du cocontractant.

On constate dans L622-13 que la position du cocontractant a été peu à peu renforcée. La loi a prévu des dispositions particulières chaque fois que le contrat se traduit par le paiement d’une somme d’argent (ex : cocontractant fournisseur de biens ou de services, organisme de crédit). Plusieurs situations :

  • le fournisseur doit être payé au comptant dans le cadre de l’exécution du contrat. L’AJ, au moment où il décide de la continuation, doit s’assurer qu’il dispose des fonds nécessaires. Ce serait une faute de décider la continuation du contrat si les fonds ne sont pas disponibles.
  • si le contrat est à paiement échelonné, l’administrateur devra de toute façon y mettre fin s’il ne dispose pas des fonds nécessaires et ce, dans le but d’éviter une fausse illusion. Si l’administrateur prenait le risque malgré tout, il s’exposerait d’une part à une résiliation du contrat à défaut de paiement et d’autre part, il engagerait sa responsabilité. Divers organes de la procédure pourraient demander à ce que soit prononcée la fin de la période d’observation ou la liquidation judiciaire.

  1. les cas particuliers.
  2. le bail d’immeuble.

Il s’agit en fait, le plus souvent, du bail commercial par lequel le débiteur utilise un local dans lequel il exerce son activité. La continuation du contrat est très importante pour la survie de l’entreprise. A priori, l’ouverture de la procédure de sauvegarde n’entraine pas la résiliation du bail de l’immeuble et toute stipulation contraire est réputée non-écrite. Si en revanche une décision définitive a constaté ou prononcé la résiliation du bail avant le jugement d’ouverture, le bail ne va pas revivre par le simple effet de la PC.

En revanche, si une clause résolutoire a été mise en œuvre avant le jugement d’ouverture mais qu’elle n’a pas été constatée par un jugement définitif, on peut demander la suspension des effets de la clause (cial.26/06/1991).

Les textes récents (L26/07/2005) ont élargi les cas de résiliation durant la période d’observation. Soit la résiliation est décidée par l’AJ et dans ce cas, la fin du bail prendra effet au jour de la résiliation (L622-14), soit le bailleur demande la résiliation ou la fait constater après le jugement d’ouverture pour défaut de paiement des loyers pour une période postérieure au jugement d’ouverture. Dans ce cas, le bailleur peut demander la résiliation mais la loi a prévu un délai de latence au profit du débiteur : la résiliation ne peut intervenir qu’au terme d’un délai de 3 mois après la prononciation du jugement d’ouverture. Pour le reste, c’est l’application du droit des contrats avec une nuance cependant puisque la loi offre une possibilité de régularisation si le débiteur paye les loyers en retard avant l’expiration du délai de 3 mois.

En revanche, les loyers échus pour une occupation postérieure à un jugement d’ouverture doivent bénéficier d’un traitement privilégié par rapport aux créances postérieures. Si aux côtés du débiteur, s’est engagée une caution, le bailleur peut engager celle-ci caution pour les loyers échus après le jugement d’ouverture. Enfin, il a été institué un privilège au bénéfice du bailleur dont l’étendue varie en fonction qu’il s’agisse de loyers échus avant l’ouverture de la procédure ou à échoir.

  1. les contrats de travail.

L622-13 ne concerne pas les contrats de travail. En effet, dans le cadre d’une procédure de sauvegarde, les contrats de travail doivent se poursuivre normalement. L’AJ doit rester informé des créances salariales impayées mais celles-ci sont soumises à un régime qui leur garantit quasiment le paiement.

Section 2 : La préparation du plan de sauvegarde.

Il y a deux nécessités du plan de sauvegarde : préserver l’activité de l’entreprise et préparer le plan de sauvegarde (cf. Sous-titre 4, Chapitre 1).

Sous-titre III : La Situation des Partenaires de l’entreprise

Chapitre 1 : Les créanciers.

Au fil du temps et des réformes, les créanciers ont perdu des prérogatives car le législateur n’a de cesse depuis 1984 de tenter de sauver les entreprises par le droit. La loi de 2005 n’a fait qu’accentuer le processus. Certes, quand la situation est irrémédiablement compromise, on cherche à apurer le passif et à assurer le remboursement des créanciers mais dans la procédure de sauvegarde, l’intérêt premier est celui de l’entreprise, d’où des conséquences sur la situation des créanciers.

On ne peut envisager cette situation indépendamment du patrimoine du débiteur. Toutes les règles qui affectent les créances des créanciers vont avoir un effet sur le passif du débiteur que la loi va chercher à diminuer au maximum : plus le passif est réduit, plus on a de chances de sauvegarder l’entreprise et vice versa. Ceci constitue le problème de l’apurement du passif. En second lieu, il s’agit également de préserver l’actif de l’entreprise. Or, cet actif est parfois menacé par des revendications exercées par les fournisseurs du débiteur. Ces deux objectifs ne sont pas contradictoires et ne concourent qu’à la sauvegarde de l’entreprise.

Section 1 : L’apurement du passif.

Une distinction oppose classiquement les créances antérieures et les créances postérieures au jugement d’ouverture.

  • 1. Le critère de distinction entre les diverses catégories de créances.

L622-24 exige que le créancier déclare sa créance chaque fois qu’il s’agit d’une créance née antérieurement au jugement d’ouverture.C’est de cette manière qu’est définie la naissance de la créance, peu importe sa date d’exigibilité. Problème de preuve : pour un acte de commerce, pas de soucis, la preuve se faisant par tous moyens ; pour un acte sous seing privé, c’est la date certaine de l’acte qui fait foi. Si l’acte a été conclu avant le jugement d’ouverture mais a acquis date certaine après, la créance sera postérieure. Bien entendu, s’agissant d’une preuve, rien n’interdit de contester la date de naissance de la créance mais c’est celle-ci qui va faire foi.

Le problème est que certaines créances ont une cause créatrice antérieure au jugement d’ouverture mais leur objet et leurs contours ne sont déterminés que par un acte postérieur.

ex : une créance de DI qui répare un préjudice d’origine contractuelle ou délictuelle peut être une créance antérieure s’il s’agit d’une créance née précédemment au jugement d’ouverture. Si le préjudice est causé avant le jugement d’ouverture mais les contours de la créance indemnitaire ne seront fixés qu’après le prononcé du jugement d’ouverture. La jurisprudence considère que la créance a une origine antérieure au JO.

ex : une créance née de la garantie d’un vice caché. Elle n’apparait que postérieurement au JO alors que le contrat a été conclu avant l’ouverture du JO. La jurisprudence considère là aussi que la créance est antérieure (8/06/1999).

La solution inverse peut prévaloir en présence de contrats continués ou en présence de contrats à exécution successive. Dans ce cas, selon la date de l’exécution du contrat, la créance peut être antérieure ou postérieure.

ex : une créance de loyer pour un bail conclu avant le JO concerne une période d’occupation du local postérieure au jugement d’ouverture. Elle est postérieure au JO.

ex : indemnité fixée postérieurement pour sanctionner l’inexécution antérieure d’un contrat. Le fait générateur de la créance c’est l’inexécution donc créance antérieure ; même chose pour les dommages subis par une personne.

Enfin, un contrat de travail donnant lieu au paiement de charges sociales qui s’effectue auprès de l’URSSAF (débiteur important dans le secteur des entreprises en difficulté): les créances de l’URSSAF sur le débiteur peuvent être postérieures ou antérieures. Si la créance en question concerne une période de travail antérieure au JO mais si elle n’est exigible que postérieurement, la créance sera postérieure puisque l’assiette est postérieure au jugement d’ouverture.

  • 2. Le régime des créances antérieures.
  1. la connaissance du passif.

Etapes : déclaration (créancier), vérification (MJ) et admission (JC).

  1. la déclaration des créances.
  2. a) quelles créances antérieures ?

Une procédure de déclaration des créances une demande en justice par laquelle le créancier sollicite au JC le remboursement de sa créance. S’il ne déclare pas sa créance, il ne pourra pas participer aux opérations d’apurement du passif. Toutes les créances doivent être déclarées du moment qu’elles sont antérieures : futures, exigibles ou non, certaines ou éventuelles, chirographaire ou privilégiées, liquide ou non… Les institutions publiques doivent également déclarer leurs créances (URSSAF, Trésor Public). Il est possible que parmi toutes ces créances, certaines n’aient pas fait l’objet d’un titre exécutoire qui constate le montant de la créance car celle-ci est contestée par exemple : elles sont admises à titre provisionnel pour le montant déclaré. De même, doivent être déclarées les créances de l’AGS, organisme d’assurance des créances salariales. Pour les créances non-liquides, il faudra procéder à une évaluation.

Les seuls qui échappent à ce régime de déclaration des créances sont les salariés car ils sont soumis à un autre régime de déclaration. Echappe également à ce régime de déclaration, les titulaires d’obligations (obligataires). En réalité, c’est le représentant qui va faire une déclaration globale au nom de tous les obligataires. Les créances alimentaires sont aussi exclues (L622-25). Si la créance peut être recouverte auprès d’un tiers, elle n’est pas soumise à déclaration.

ex : la loi de 1975 a prévu que le sous-traitant, dans un contrat d’entreprise, peut exercer une action directe contre le maitre de l’ouvrage. Cela veut dire que si l’entrepreneur est mis sous sauvegarde, le sous-traitant qui a une créance envers cet entrepreneur pourra, non pas déclarer sa créance mais exercer l’action directe contre le maitre de l’ouvrage ie un tiers au contrat.

Pour les créanciers revendiquant (qui revendiquent un bien dont ils prétendent avoir la propriété auprès du débiteur), si le bien est effectivement le leur, le débiteur doit le rendre. Il est préférable de leur conseiller de faire une déclaration de prévention notamment pour se prémunir contre l’échec de la revendication. En revanche, une innovation a été introduite dans la loi de 2005 : certaines créances postérieures doivent également faire l’objet d’une déclaration au même titre que les créances antérieures.

  1. b) le délai de déclaration.

Il dépend de l’information à la procédure collective. Ces créances doivent être déclarées dans un certain délai. Tous les créanciers connus dès l’ouverture de la procédure sont avertis dans les 15 jours à compter du jugement d’ouverture par un avis du mandataire de justice (R622-21 et s. com.). Ensuite, ils ont un délai de 2 mois pour déclarer leur créance à partir de la publication du jugement au BODACC. Ce délai peut être prolongé par les créanciers suite à la continuation du contrat (le délai est prolongé d’autant).

S’il n’y a pas cette publicité, il n’y a pas forclusion, le délai n’ayant pas commencé à courir. D’où l’intérêt de publier au plus tôt.

Les créanciers titulaires d’une sûreté ou d’un contrat publié (en matière immobilière) sont avertis personnellement et le délai de 2 mois va courir à compter de la notification.Pour certaines créances postérieures (pas publiées), le délai va courir à compter de la date d’exigibilité de la créance. Pour les créances nées d’une infraction pénale, le délai court à partir du jugement définitif qui en fixe le montant.

Délai de déclaration relativement bref. Lorsque les créanciers sont connus, pas de problème mais s’ils sont inconnus, ils risquent rapidement la forclusion. Cependant, s’ils sont forclos, ils peuvent être relevés de forclusion mais ce relevé n’est jamais automatique, de plein droit (appréciation du tribunal).

  1. c) la personne du déclarant.

Cette question a donné lieu à une jurisprudence foisonnante voire contradictoire.Normalement, c’est le créancier lui-même mais on autorise un préposé ou un mandataire du créancier, il doit justifier d’un mandat spécial, sauf s’il est avocat et sauf s’il est dirigeant de la personne morale créancière (organe de la société). En revanche, s’il s’agit d’une personne extérieure à la personne morale, le mandat est nécessaire. La Cass a tranché en faveur de la seule exigence d’une délégation de pouvoir permettant au préposé d’accomplir un certain nombre d’actes au nom de la personne morale. Nuance (AP 26/01/01 : déclaration faite par le représentant d’un pool bancaire dans le cadre d’une procédure collective): ce chef de file doit disposer d’un mandat spécial et renouvelé à chaque opération.

  1. d) contenu et forme de la déclaration.

montant de la créance (intégralité des sommes ie créances antérieures et postérieures)

– date d’échéance

– sommes à échoir et échues

– montant des intérêts acquis

moyens d’établir l’existence de la créance (titre exécutoire, contrat)

modalités de calcul des intérêts (conversion s’il s’agit d’une créance étrangère)

privilèges ou sûreté dont est assortie la créance (omission entraine la perte de la sûreté : L622-25)

– si litige, précision quant à la juridiction saisie

Les créances doivent être munies d’un titre exécutoire, à défaut, le créancier doit au moins certifier sincère la créance. Si le CAC refuse le visa sur la créance il devra motiver son refus. Tous les documents justificatifs de cette créance auront intérêts à être produits.

Si la créance a plusieurs codébiteurs et qu’ils sont tous dans le cadre de procédure collective, le créancier peut produire sa créance dans chaque procédure ouverte sauf s’il y a solidarité entre tous les codébiteurs car dans ce cas il ne pourra que la produire une seule fois.

Ne sera déclaré que le montant de la créance qui n’a pas été honoré. Si la créance a fait l’objet du paiement d’un acompte, la déclaration se fait sous déduction de cet acompte. Si elle a fait l’objet d’un cautionnement et qu’il y a eu un paiement partiel par une caution, la caution peut elle-même déclarer sa créance au débiteur pour ce paiement partiel.

Si un des coobligés a payé, on va considérer qu’il n’a pas de recours contre les autres sauf l’hypothèse où la réunion des sommes versées en vertu de la procédure excède le montant total de la créance (L622-32). Pour le reste, la loi n’impose aucune formalité particulière : le plus souvent cette déclaration prendra la forme d’une lettre RAR.

En cas d’irrégularité de la déclaration, la nullité de celle-ci pourra être prononcéesans que celui qui l’invoque ait à avancer l’existence d’un grief. La régularisation n’est possible pour l’irrégularité de fond qu’avant l’expiration du délai de forclusion de 2 mois. En cas d’irrégularité de forme, il n’y a nullité que si la formalité omise est substantielle, d’ordre public ou a causé un grief (par ex, absence de document justificatif nécessaire et cela porte grief au débiteur).

  1. a) le défaut de déclaration.

Lorsque la créance n’a pas été déclarée dans les délais, le créancier quelqu’il soit (chirographaire ou privilégié) va subir une double sanction :

  • il est frappé de forclusion : les tribunaux ont interprété de manière assez stricte cette forclusion même si la jurisprudence a un peu assoupli cette sanction. Il ne peut plus déclarer sa créance et en perd le bénéfice (ie ne participe pas à l’apurement du passif : exclut des répartitions). L622-26 précise qu’il ne subit la forclusion que s’il a été avisé personnellement. Jusqu’à la loi de 2005, la créance non-déclarée était considérée comme éteinte mais le législateur est revenu sur le principe, elle est simplement inopposable à la procédure (règlement communautaire sur les procédures d’insolvabilité).
  • non-déclarée est simplement inopposableà la procédure. Les créanciers sont écartés de la répartition. Si ultérieurement, le débiteur revient à meilleure fortune, le créancier pourra reprendre ses poursuites. Cette inopposabilité va jouer pendant l’exécution du plan de sauvegarde à l’égard du débiteur et des personnes physiques coobligées (le créancier ne pourra pas être payé). Elle va jouer aussi après le plan de sauvegarde si les engagements du plan ont été tenus par le débiteur (ord.2008). Il en va de même en matière de liquidation judiciaire : les créances sont éteintes mais le créancier forclos pourrait cependant échapper à cette extinction/purge, dans la mesure où il pourrait faire valoir des exceptions (L643-11). En pratique, ce sont des hypothèses exceptionnelles.

La question s’est posée de savoir si elles sont applicables à la caution qui aurait garanti la dette du débiteur. Or, en la matière, l’inopposabilité de la créance non-déclarée est considérée comme une exception personnelle au débiteur. Il en résulte que la caution demeure tenue et la sanction n’a pas d’effet à son égard. En ce sens, elle doit pouvoir être poursuivie malgré la forclusion.

Un relevé de forclusion est possible, la demande doit être adressée à un JC. Deux circonstances peuvent le justifier : le créancier ignore l’existence de sa créance ou le débiteur a omis volontairement de mentionner le créancier dans la liste remise au mandataire au moment du jugement d’ouverture (preuve difficile). Il faut démontrer cette omission volontaire (nouveauté L2005). Le JC va exercer son pouvoir d’appréciation. Si le créancier obtient le relevé de forclusion, il peut produire sa créance malgré l’expiration du délai.

  1. la vérification des créances.
  2. a) les créances concernées

Sont concernées toutes les créances antérieures qui ont fait l’objet d’une déclaration bien que certaines y échappent :

  • celles qui font l’objet d’instances en justice en cours : les instances vont être interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait déclaré sa créance (L622-22). Elles reprendront de plein droit à cette date, après fourniture d’une copie de la déclaration de créance devant être remise à la juridiction saisie. La juridiction tranche ensuite le litige et rend une décision qui, lorsqu’elle a un caractère définitif (autorité de force jugée), sera portée sur l’état des créances. La vérification résulte de la décision de justice qui statue sur la créance.
  • les créances salariales lesquelles sont soumises à un régime particulier.

  1. a) la procédure de vérification et d’admission.

Etablissement de la liste des créances :

Une fois les créances déclarées, c’est en principe le mandataire judiciaire qui les vérifie et en dresse une liste dans un délai fixé par le tribunal mais non précisé par la loi (ce délai doit inciter le mandataire à faire diligence). Pour chaque créance figurant sur la liste, il fait alors des propositions d’admission de la créance totale ou partielle, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente. Une discussion est alors possible entre les créanciers et le mandataire (peut solliciter le débiteur).

S’il s’avère qu’une créance est litigieuse et qu’il y a des contestations, le mandataire doit informer le créancier lequel doit répondre dans un délai de 30 jours à compter de la date de réception du courrier du mandataire et doit lui faire connaître ses explications (L622-27). Si le créancier est inerte dans ce délai, il s’interdit toute contestation ultérieure (risque de forclusion) et ne pourra plus interjeter appel devant le JC qui statue ensuite sur chaque créance déclarée.

Prononcé de la décision par le juge commissaire :

La liste établie par le mandataire est communiquée au JC. Une fois les délais de contestation expirés, le juge statue sur chaque créance déclarée. S’il n’y a pas de contestation, il n’a pas à entendre les parties mais il devra le faire dans le cas inverse. Le JC dresse ensuite un état des créances transmis au greffe du tribunal et publié.

Contestation des créances :

Si la créance n’est pas contestée, il prononce une décision d’admission. Si en revanche elle l’est, deux cas de figure sont envisageables :

un procès est en cours et le juge attend la décision définitive du tribunal qui sera ensuite mentionnée sur l’état des créances à la requête du créancier intéressé (ACJ).

aucun procès n’est en courset le JC tranche et prononce le rejet ou l’admission de la créance ou encore une décision d’incompétence. Dans ce dernier cas, le créancier devra saisir la juridiction compétente (celle qui a ouvert la procédure, prorogation de compétence) dans les 2 mois suivant la décision en vue de faire trancher le litige au fond. Dans certains cas, la question litigieuse relève de juridictions particulières (exclusivité de compétence) auquel cas le JC doit se déclarer incompétent et le créancier doit saisir la juridiction compétente.

Recours contre la décision du juge commissaire :

Les décisions du JC concernant l’admission des créances peuvent être contestées de différentes manières :

les parties à la procédure interjettent appel de son ordonnance devant la CA lorsque la matière relève de la compétence du tribunal qui a ouvert la procédure mais pour les créances d’un montant modeste, le juge statue parfois en dernier ressort (« juste pourvoi » ; dont le montant n’excède pas le montant de compétence du tribunal saisi statuant en dernier ressort)

un tiers fait une réclamation devant le JC dans le mois qui suit le dépôt de l’état des créances au greffe du tribunal de commerce. Cette réclamation fait l’objet d’une décision qui peut elle-même faire l’objet d’un appel devant la CA (R624-9 3°).

Une fois que le délai de contestation d’un mois à compter de la publication du dépôt de l’état des créances est échu, la liste arrêtée par le juge commissaire devient définitive.

  1. a) les effets de l’admission.

L’autorité de la chose jugée :

La décision bénéficie de l’autorité de la chose jugée et ne peut plus être contestée. Cette admission est opposable à toute personne notamment aux codébiteurs solidaires qui ne peuvent plus contester ces créances. Il y a une particularité en matière de liquidation judiciaire, le JC ayant ici le pouvoir d’ordonner sur proposition d’un organe de la procédure, le paiement à titre provisionnel d’une quote-part d’une créance définitivement admise. Lorsque la créance est d’un montant modeste et ne met pas en cause l’apurement du passif, le juge peut ordonner un paiement provisionnel et peut même subordonner le paiement à la présentation par le créancier d’une garantie bancaire.

L’action en nullité à l’égard de la créance admise :

Si la décision bénéficie de l’autorité de la chose jugée à l’égard de la décision d’admission, rien n’empêche une action en nullité à l’égard de la créance admise, qui tient aux conditions dans laquelle est née la créance. En matière de redressement ou liquidation judiciaire, il est possible en effet de faire déclarer la nullité d’une créance contractée pendant la période suspecte ie la période située entre le jugement d’ouverture et la date de CDP qui est presque toujours antérieure. On craint ici que le débiteur informé de ces difficultés soit amené à faire prononcer la nullité de certains actes accomplis pendant la période des actes répréhensible ou des actes de précaution.

  1. les restrictions aux droits des créanciers.

Ces restrictions sont relativement contraignantes pour les créanciers puisque, par exemple, il est interdit au débiteur de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture (L622-7, L631-14, L641-3). Les dettes non-échues ne deviennent pas exigibles par le seul fait de la procédure collective. L’exigibilité immédiate des créances (déchéance du terme) n’intervient qu’en matière de liquidation judiciaire. Cette interdiction concerne aussi bien la sauvegarde que la liquidation et le redressement judiciaire (L641-3). Elle est d’ordre public (toute clause contraire est réputée non-écrite) et ce maintien du terme va profiter au débiteur et à sa caution, si caution il y a. Tant que la créance n’est pas échue, il ne peut y avoir d’action ni contre le débiteur, ni contre la caution. En revanche, l’interdiction ne vise pas les créances alimentaires. Les créances sont exigibles à l’ouverture de la liquidation judiciaire sauf en ce qui concerne le plan de sauvegarde. La loi de 2005 a repris des restrictions qui figuraient déjà dans la loi antérieure.

  1. l’interruption ou l’interdiction des poursuites individuelles.
  2. b) le champ d’application.

L622-21 prévoit l’interruption ou l’interdiction des poursuites individuelles de la part des créanciers à partir du jugement d’ouverture afin d’éviter une dispersion prématurée des biens du débiteur mais cet arrêt des poursuites ne vaut cependant qu’à l’égard du débiteur lui-même et non de ses propres débiteur ou, par exemple, des codébiteurs solidaires qui ne seraient pas eux-mêmes placés sous sauvegarde. Il ne faut pas oublier que la finalité c’est la sauvegarde.

Tempérament(L1994 et 2005): en particulier à l’égard des personnes physiques coobligées ou ayant consenti un cautionnement ou une garantie autonome, on ne pourra poursuivre ni les codébiteurs, ni les cautions, ni les garants. En effet, très souvent dans les petites entreprises, le dirigeant personne-physique s’est porté caution pour le passif de son entreprise et ainsi il n’est pas incité à déposer le bilan. On a alors considéré qu’il fallait le protéger, L622-28prévoit en ce sens la suspension des actions non seulement à l’égard du débiteur mais aussi des personnes physiques coobligées ou ayant consenti un cautionnement ou une garantie autonome. Cette suspension vaut au moins jusqu’au jugement arrêtant le plan ou prononçant une liquidation judiciaire. Les cautions personnes morales comme les organismes de crédit pourront être poursuivies par les créanciers. Certains ont fait valoir que cette protection est dangereuse et que certains dirigeants en profiteraient pour organiser leur insolvabilité.

Ainsi, les créanciers peuvent prendre des mesures conservatoires à l’égard des cautions pour éviter ces comportements mais cette protection ne dure que pendant la procédure. Il ne s’agit que d’un sursis. Si la situation du débiteur se dégrade il pourra être poursuivi. Cette suspension ne concerne pas les personnes morales, ce qui devrait inciter les créanciers à demander des cautions bancaires plutôt que des cautions au dirigeant personne physique de l’entreprise.

Les actions interrompues à l’égard du débiteur sont :

  • celles qui tendent à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent
  • celles tendant simplement à la fixation de créances incertaines, assimilées à une action tendant au paiement d’une somme d’argent
  • les actions en résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent (L622-21 2°).La règle cherche à éviter que le vendeur impayé qui aurait obtenu la résolution du contrat puisse ainsi obtenir la restitution de la chose vendue et du prix payé. Si la résolution ne doit pas être prononcée mais juste constatée par le juge (clause résolutoire), deux situations sont envisageables :

si la résolution est acquise au jour du jugement d’ouverture par le jeu d’une clause résolutoire, l’interruption ne doit pas jouer (com. 9/04/1991)

les actions en résolution pour inexécution ou mauvaise exécution d’une obligation non-pécuniaire ne sont pas interrompues car il s’agit là d’une action en nullité du contrat ou d’une action en rescision pour lésion ou encore devant le CPH

  • celles en exécution d’une obligation de faire, elle n’est pas possible et se traduit par des DI donc par le paiement d’une somme d’argent et sera donc interrompue (com. 9/07/1996).

Il reste aux créanciers la nécessité de déclarer leurs créances (antérieures) par précaution, les délais pour agir étant suspendus.

L622-21 §2 vise également l’arrêt ou l’interdiction de toute interruption des voies d’exécution tant sur les meubles que sur les immeubles sauf lorsque ces voies d’exécution ont déjà produit leur effet à l’égard du créancier saisissant. La saisie-attribution emporte attribution de la créance saisie au bénéfice du créancier.

  1. a) les effets dans le temps.

L’arrêt des poursuites n’est que temporaire et prend fin à la déclaration de la créance. Après, les instances peuvent être reprises devant la juridiction saisie à qui l’on doit remettre une copie de la déclaration mais elles ne peuvent avoir pour objet que la constatation de la créance et la fixation de son montant (L622-22). La juridiction saisie ne peut pas prononcer une condamnation à une somme d’argent, ni la résolution du contrat. Sa décision vaudra admission de la créance.

Il y a interdiction avant la déclaration de la créance mais une fois celle-ci déclarée, rien n’interdit de poursuivre la procédure.

La décision est portée sur l’état des créances établies par le JC, ce qui vaut vérification de la créance. Cette règle ne vaut que pour les instances en cours au jour du jugement d’ouverture. Les voies d’exécution sont définitivement arrêtées à l’exception des saisies immobilières.

Les décisions en justice qui échappent à l’arrêt des poursuites individuelles pourront continuer à être librement intentées après l’ouverture de la procédure (L622-23).

  1. l’interdiction des inscriptions et des publications de sûretés (L622-30).

Il s’agit de prendre des sûretés sur les biens du débiteur. Ce principe s’applique aussi bien aux meubles qu’aux immeubles, les gages ayant été ajoutés par l’ord.2008. Le créancier perd le droit de publier sa sûreté et l’acte qui a été conclu.

Exceptions concernantle Trésor Public qui conserve son privilège et le vendeur du fonds de commerce qui pourra inscrire son privilège postérieurement au jugement d’ouverture.

Cette interdiction ne vise que les premières inscriptions et non les inscriptions en renouvellement ou celles qui régularisent une inscription provisoire. Sont aussi visés les actes et décisions judiciaires (dans la mesure où elles n’ont pas force exécutoire avant le JO), translatifs ou constitutifs de droits réels. Ex : on ne peut plus inscrire au fichier central des hypothèques, une vente immobilière, à compter du jour où a été prononcé le jugement d’ouverture et à condition qu’ils n’aient pas obtenu date certaine avant le jugement d’ouverture.Le créancier ne peut donc plus publier son droit après le jugement d’ouverture.

Un droit non-publié, en la matière, est un droit inopposable aux tiers.

  1. l’arrêt du cours des intérêts (L622-28).

L’arrêt du cours des intérêts constitue une facilité de trésorerie pour les entreprises concernées. On simplifie le calcul du passif pour éviter de l’aggraver par le cours des intérêts d’emprunt (interruption du cours des intérêts au jour du JO). Les cautions/garants du débiteur peuvent se prévaloir également de cet arrêt du cours des intérêts qui est une exception inhérente à la dette. Cette règle s’applique à toutes les catégories de créances antérieures, qu’elles soient privilégiées ou chirographaires, et à tous les intérêts qu’ils soient conventionnels ou légaux et même aux intérêts de retard (majorations pour retard). A compter du jugement d’ouverture, les intérêts ne courent plus.

Toutefois, le législateur a prévu une exception (L622-28), afin d’encourager les banques à procurer aux entreprises du crédit à moyen ou long terme. Celui qui prête sur une durée plus longue, bénéficie de la continuation du cours des intérêts. Celui qui prête à court terme, voit le cours des intérêts interrompu (contrat de prêt). Ainsi, les intérêts résultants de contrats de prêts conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d’un paiement différé d’un an ou plus ne sont pas affectés par l’arrêt du cours des intérêts.

  • 3. Le régime des créances postérieures.

Ces créances sont visées par le nouvel article L622-17 qui introduit des modifications importantes tout en reprenantle principe d’un paiement prioritaire constitutif d’un véritable privilège.

  1. la définition des créances postérieures.

Ces créances supposent d’être qualifiées de créances postérieures mais cela ne suffit pas car elles doivent être utiles et régulières. Le juge tient parfois compte d’avantages du fait générateur de la créance plutôt que de la date de la naissance de l’acte proprement dit.

En matière contractuelle, s’il y a exécution tardive d’un contrat, postérieurement au jugement d’ouverture, qui entraîne des pénalités de retard à la charge du débiteur, ces dernières seront considérées comme des créances postérieures alors que le contrat est antérieur au jugement. En effet, le fait générateur de la pénalité de retard est né lors de la constatation du retard.

En revanche pour des cotisations de sécurité sociale impayées postérieurement, on considère que bien qu’elles aient été exigibles postérieurement au jugement d’ouverture, la cotisation correspond à une période antérieure et constituent ainsi des créances antérieures.

En ce qui concerne le contrat de travail d’une personne qui a fait l’objet d’un licenciement, l’indemnité résultant du fait générateur qu’est le licenciement, est postérieure.

Il résulte des textes de 2005 que sont considérées comme des créances postérieures (donc bénéficiant d’un privilège de paiement) les créances postérieures utiles et régulières.

  1. des créances postérieures utiles.

Jusqu’à la loi de 2005, seul le critère chronologique était important pour bénéficier de cette prise en considération. L’inconvénient de ce système était qu’une fois que l’on avait payé toutes les créances postérieures, la totalité de l’actif était absorbé par ce paiement de créances et les créanciers ultérieurs ne voyaient jamais leurs créances honorées. La loi de 2005 et l’ordonnances de 2008 ont voulu limiter le nombre et le montant des créances postérieures en les distinguant dans deux catégories à L622-17.

Les créances élues ou méritantes (bénéficiant d’un avantage):

Ce sont les créances nées pour les besoins du déroulement de la procédure,au cours de la période d’observation ou en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette même période. ex : la créance de l’avocat qui défend le débiteur pendant la procédure est une créance postérieure élue. Liens directs avec la procédure ouverte ou avec l’activité économique du débiteur. Les dettes extérieures devraient donc être rejetées. De plus, ce régime prioritaire doit se limiter aux créances nées pendant la période d’observation.

La seconde catégorie devrait être plus facile à identifier car elle correspond à la définition fondamentale des créances postérieures. Or, les créanciers, après l’ouverture de la procédure, ne sont pas enclins à poursuivre leurs relations avec le débiteur sans aucun avantage accordé par la loi d’où l’instauration d’un paiement prioritaire.

On a ajouté au critère chronologique habituel (date de la naissance de la créance), un critère qualitatif posant des problèmes d’interprétation. Le caractère postérieur de ces créances doit être limité à la seule période d’observation. Ce critère qualitatif introduit par loi de 2005 doit faire l’objet d’une appréciation relativement stricte par les tribunaux pour ne pas faire trop de créances car la réforme serait alors inutile.

Les créances exclues (non-méritant):

Ils sont exclus du traitement privilégié même si leurs créances sont nées après le jugement d’ouverture car elles n’ont aucun lien avec l’exploitation de l’entreprise ou la procédure. Le régime de ces créances exclues est défavorable : il est aligné sur le régime des créances antérieures. Elles sont soumises à déclaration (comme les créances antérieures) mais le délai n’est pas le même. Celui-ci court à partir de la date d’exigibilité de la créance et est de 2 mois (pas à compter du JO). Pour les créances postérieures fondées sur des contrats à exécution successive, une seule déclaration suffit pour l’ensemble de ces créances.

  1. des créances postérieures régulières.

Il faut que les créances soient nées régulièrement ie prendre leur source dans un acte du débiteur accompli dans le cadre de sa compétence. La régularité est-elle liée à la poursuite de l’activité ? C’est la réponse affirmative qui s’impose logiquement mais le texte englobe en la matière les actes pour les besoins du déroulement de la procédure. Le débiteur ayant accompli un excès de pouvoir dans la conclusion de l’acte à l’égard du créancier, empêche ce dernier de se retourner contre lui dans le cadre du régime sur les créances postérieures puisque celle-ci est irrégulière.

Depuis la loi de 2005, l’acte doit être nécessaire à la poursuite de l’activité et, à défaut, est exclu du régime préférentiel. Là encore, le texte englobe les actes pour les besoins du déroulement de la procédure posant le problème des créances d’origine délictuelle qui n’entrent pas dans le cadre de la poursuite de la procédure. Si ces dettes (issues d’un acte de concurrence déloyale par exemple) sont le résultat d’un acte régulièrement accompli pour les besoins de la période d’observation, elles devraient bénéficier du régime préférentiel, selon les commentateurs.

Si la créance répond aucritère d’antériorité, de nécessité et de régularité, elle devra bénéficier d’un paiement prioritaire assorti de privilèges.

  1. un paiement prioritaire assorti d’un privilège.
  2. le paiement prioritaire.

Ces créances sont normalement payées à l’échéance, elles ne subissent pas de restriction aux droits antérieurs, d’où la possibilité de les payer immédiatement. Le créancier le plus diligent doit être payé en premier (prix de la course) et des saisies entre les mains du débiteur peuvent être opérées. Encore faut-il que les fonds soient disponibles. En cas d’insuffisance, un concours s’organise entre les créanciers s’ils réclament tous en même temps leur créance. D’où la nécessité d’un classement qui a été établi par la loi.

  1. le classement des créances de l’art. L622-17.

A défaut de fonds suffisants, les créanciers postérieurs élus participent aux répartitions auxquelles procèdent les organes de la procédure et qui peuvent intervenir à différents moments (à l’occasion de la vente d’un bien, d’un plan de sauvegarde etc.). Pour bénéficier de la conservation de ce privilège, la créance postérieure impayée doit avoir été portée à la connaissance du mandataire ou de l’administrateur dans un délai d’un an à compter de la fin de la période d’observation, pour éviter qu’une éventuelle répartition soit remise en cause par l’apparition d’un passif ultérieur (L622-17§4).

Cette obligation doit-elle être assimilée à une forme de déclaration de créance qui s’impose à tous les créanciers antérieurs ? Si tel était le cas, il n’y aurait plus d’intérêt à distinguer les deux. En réalité, il ne faut pas confondre cette obligation d’information et la procédure de déclaration (L622-24). En outre, L622-24 al.5 exclut expressément de la procédure de déclaration des créances, les créances postérieures privilégiées.

Le privilège est organisé différemment selon le type de procédure mise en œuvre. Cette différence vise les créances assorties de sûretés que l’on va sacrifier d’avantage quand elles sont impliquées dans une procédure de liquidation judiciaire, de sauvegarde ou de redressement judiciaire.

L622-17 3°précise ce classement :

  1. Le privilège de paiement s’opère en tenant compte de certains créanciers antérieurs qui bénéficient d’une dérogation en leur faveur. Ces créanciers bénéficiant d’une super priorité sont les salariés (garantis par un super privilège mais uniquement pour les 60 derniers jours de salaire), les créances antérieures garanties par le privilège des frais de justice mais depuis l’ord.2008, on y intègre les créance postérieures aux frais de justice, les créances garanties par le privilège de new money dont bénéficient les créanciers antérieurs quand ils ont alloué des crédits/de la trésorerie dans le cadre d’une procédure de conciliation.
  2. Le second classement va être établi au sein même des créances postérieures. Parmi elles viennent en tête les créances postérieures de salaires, les frais de justice, les créances postérieures résultant de frais bancaires etc. (cf. L622-17 §3).

On paie ensuite les créances de salaire postérieures non-prises en charge par l’AGS, les frais de justice postérieurs, les créances postérieures résultant de prêts bancaires et de la continuation des contrats en cours.

Les sommes résultant des garanties de certaines catégories de salaire. Enfin les autres créances postérieures élues (cotisations de sécurité sociale, autres contrats, créances délictuelles etc.).

L’ensemble de ces créances postérieures élues perdent ce privilège si elles n’ont pas été portées à la connaissance du mandataire ou de l’administrateur.

Efficacité de la réforme de 2005 ? Pas certaine car la définition des créances postérieures élues reste large.

Section 2 : La préservation de l’actif.

A partir du jugement d’ouverture, le patrimoine du débiteur est frappé de certaines immobilisations et en même temps, il est soumis à une administration contrôlée. Dans le cadre d’un redressement judiciaire, il s’agit de reconstituer autant que possible l’actif de ce patrimoine, tout en préservant celui-ci des revendications effectuées par certains partenaires du débiteur. En matière de procédure de sauvegarde, seule subsiste la possibilité de revendication.

La revendication de l’actif sous-entend que certains actes ont été accomplis frauduleusement par le débiteur au bénéfice de certains créanciers et ce, durant la période suspecte (entre la date de CDP et la date d’ouverture) qui est soumise à des conditions strictes (ils vont pouvoir continuer à exercer des actions en revendications, notamment de biens meubles indûment détenus par le débiteur). Le seul instrument de préservation de l’actif est la possibilité pour le débiteur de se défendre contre certaines actions en revendications accomplies par les créanciers. Cette action est la même en matière de sauvegarde ou de liquidation.

  • 1. L’exercice de l’action en revendication.

Dans le cadre d’une procédure collective, il est légitime que chaque propriétaire d’une chose se trouvant aux mains du débiteur recherche le paiement de la chose vendue, d’où la possibilité pour lui d’exercer une action en revendication qui s’applique surtout en matière de meubles. En matière immobilière, d’autres procédures permettent de clarifier qui est véritablement propriétaire du bien (publicité foncière) mais en matière mobilière, comme le rappelle l’art.2276civ, «possession vaut titre». En matière mobilière, la possession jouant un très grand rôle, le propriétaire du meuble peut craindre durant la période d’incertitude de ne pas récupérer le meuble qui lui appartient mais on peut craindre aussi que les propriétaires de biens meubles profitent de cette période d’incertitude pour dépouiller le débiteur de son patrimoine. D’où l’obligation des propriétaires de revendiquer dans des conditions de forme et de délai rigoureuses, sans quoi leur droit de propriété sera inopposable à la procédure. Leurs biens seront comptés à l’actif du débiteur.

Cette règlementation s’explique également par le rôle que joue l’apparence. Les biens meubles détenus par le débiteur contribuent à la solvabilité apparente du débiteur. Il y a un équilibre à trouver entre la nécessité de protéger la propriété du bien meuble et la solvabilité apparente du débiteur. Il faut éviter que la procédure de sauvegarde ne soit fondée sur des chimères. L624-16(L2005) : tout bien meuble déposé chez le débiteur ou consigné chez lui à titre précaire, peut être revendiqué par le véritable propriétaire dans des conditions très strictes. Ce droit de revendication est paralysé par L622-23-1 tant que le plan de sauvegarde est en cours d’exécution et que le débiteur exécute ses engagements. Cette possibilité de revendication vise le loueur d’objets mobiliers, le prêteur de biens et l’établissement de crédit dans le cadre du crédit-bail.

Conditions de fond :

Il faut prouver la propriété (demeuré ou devenu propriétaire) et que le bien est détenu à titre précaire par le débiteur. Le bien revendiqué doit se retrouver en nature chez le débiteur et il doit être individualisé à la date du jugement d’ouverture. Problème quand il a été incorporé dans un autre bien par le débiteur (matière première): la récupération doit pouvoir se faire sans dommage pour le bien lui-même (L624-16).

Un autre problème réside dans la question des choses fongibles (matières premières) qui se trouvent entre les mains du débiteur-acheteur et qui sont par définition interchangeables. Dans ce cas, la revendication est conditionnée par l’existence de choses de même espèce et de même qualité dans les mains du débiteur mais cela ne joue que dans les contrats de vente assortis d’une clause de réserve de propriété (voir cas particulier du vendeur de meubles).

Les marchandises que détient le débiteur peuvent aussi avoir été revendues par lui auquel cas la revendication devient difficile voire impossible pour le vendeur initial puisqu’elle se fait sur un bien qui n’est plus dans le patrimoine du débiteur au jour de la revendication. Le prix peut alors être revendiqué entre les mains du sous-acquéreur qui a acheté les marchandises et doit les payer (cas de subrogation réelle sur le paiement du prix, action directe), le sous-acquéreur étant protégé par l’art.2276civ. Le bien ne devra pas avoir été incorporé à un autre bien (com.14/01/1997) mais si le sous-acquéreur a déjà payé le prix, il sera d’autant plus protégé de la revendication de la chose et du prix et le vendeur ne pourra plus se retourner que vers son acheteur initial (le débiteur). Le nouveau propriétaire dépouillé pourra alors se retourner contre l’acquéreur initial ie déclarer sa créance.

Cette action en revendication, qu’elle porte sur le bien lui-même ou sur le prix, est soumise à un délai de 3 mois à compter du jugement d’ouverture (L624-9) ceci aussi bien pour les biens déposés chez le débiteur que ceux résultant d’un contrat en cours. Si le bien a fait l’objet d’un contrat en cours et que le débiteur n’est pas en mesure de payer le prix, la revendication devra se faire dans le délai de 3 mois mais la restitution ne pourra se faire qu’au terme du contrat, le délai commençant à courir à partir de la demande de résiliation ou du terme du contrat. C’est un délai préfix, insusceptible d’interruption ou de suspension. En l’absence de dispositions légales, la Cass dispense le revendiquant de toute déclaration de sa créance mais il a intérêt à le faire quand la valeur du bien se trouve affectée par son usage (com.19/01/1996).

A défaut de revendication dans le délai légal, le créancier est forclos, ce qui ne signifie pas que le débiteur a pour autant acquis la propriété du bien. Le créancier ne peut plus revendiquer, il peut juste déclarer sa créance et subir le sort des créanciers antérieurs, le bien devenant le gage des créanciers.

Conditions de forme :

La revendication peut se faire par simple lettre RAR adressée aux organes de la procédure. La loi a prévu pour certains créanciers l’absence de revendication pour récupérer leur bien, notamment tous les contrats faisant l’objet d’une publicité (contrat de bail). Le contrat ne doit pas pour cela avoir fait l’objet d’une demande de continuation.

Pour faciliter la procédure, la loi de 1994 modifiant la loi de 1985 a ajouté une disposition particulière relative au contentieux de la revendication (L624-17). Elle prévoit que l’administrateur peut acquiescer à la demande en revendication avec l’accord du débiteur, ce qui accélère la procédure de revendication. Si le débiteur ne donne pas son accord à cet acquiescement ou s’il conteste la demande en revendication, la demande est portée devant le juge commissaire qui statue sur son bien-fondé et sur le sort du contrat. Cet accord permet d’éviter, lorsqu’il est accepté, une procédure devant le juge commissaire.

A contrarioen l’absence de contestation, la procédure d’acquiescement va faciliter la restitution du bien, ce qui va éviter la dépréciation du bien et les stockages inutiles (coûteux). Si la revendication est rejetée, ou si l’action en revendication n’est pas exercée dans les délais, le bien peut être vendu par l’administrateur ou le débiteur. Dans ce cas, le prix doit être consigné et tenu à la disposition du créancier et il doit lui être restitué après clôture de la procédure sur ordonnance du Président du tribunal. En revanche, si la revendication est couronnée de succès, elle emporte de plein droit la restitution (R624-13) sauf s’il s’agit d’un contrat continué/en cours, la restitution étant alors différée au jour de la résiliation du contrat (rôle de l’AJ).

Cette action en revendication vise le bien dont une personne est propriétaire et qui est détenu par le débiteur, quel que soit le titre sur le fondement duquel le débiteur détient ce bien. Quand ce bien est détenu par un débiteur acheteur, le vendeur subit des restrictions.

  • 2. Les restrictions aux droits du vendeur de meubles.

Le droit commun offre en principe au vendeur de meubles impayé, toute une série de solutions pour contraindre le débiteur-acheteur au paiement. Il pourra exercer un droit de rétention en cas de paiement comptant, une action en résolution du contrat, un privilège sur le prix de la chose vendue (2332 4°civ), un droit de revendiquer le bien qui serait encore entre les mains de l’acheteur (art.2102 4°civ) mais ces instruments ont été partiellement sacrifiés par le droit des procédures collectives. Il s’agit d’établir un compromis entre les garanties apportées par le Code civil en matière de meuble et les droits des créanciers du débiteur (principe d’égalité entre les créanciers).

  1. les solutions en l’absence d’une clause de réserve de propriété.
  2. le vendeur est encore en possession de la marchandise.

L624-14autorise le vendeur à exercer son droit de rétention et ceci peu importe que la propriété ait été ou non transférée. Le vendeur qui n’a pas été payé et dispose encore de la marchandise peut exercer son droit de rétention. L’administrateur ou le débiteur peut alors réclamer l’exécution du contrat (livraison du meuble si celle-ci est avantageuse pour le débiteur).

En revanche, si l’exécution du contrat n’est pas demandée par le débiteur, le vendeur qui n’a pas été payé peut alors invoquer le non-paiement pour obtenir la résolution de plein droit du contrat (L622-13). S’il a reçu des acomptes, il devra les restituer mais s’il reçoit des DI en raison des préjudices résultant de la non-exécution du contrat, il devra les déclarer à sa créance et pourra différer la restitution des éventuels acomptes jusqu’au paiement des DI.

  1. la marchandise est en cours de transport.

Dans ce cas, la revendication demeure possible (L624-13) tant que la marchandise n’a pas été livrée au débiteur et ceci pendant toute la durée du transport. Cela pose le problème des contrats internationaux. Le vendeur peut adresser un contre-ordre ou une défense de livrer au transporteur qui devra faire demi-tour et lui restituer le bien, sans engager la responsabilité du vendeur qui empêche la livraison à l’égard du destinataire, le vendeur tirant argument de l’ouverture de la procédure collective. Cela s’exerce dans le cadre d’une saisie-revendication ou même simplement par une défense de livrer adressée au transporteur dans une forme quelconque, lequel engagerait sa responsabilité à l’égard du vendeur s’il refusait de faire droit à la demande de ce dernier.

L’administrateur ou le débiteur peut toujours demander la continuation de l’exécution du contrat en payant le prix mais uniquement sur autorisation du JC. A défaut, il y aura résolution du contrat.

La revendication suppose que le meuble soit identifié sans discussion possible. Or, il se peut que le bien meuble ait été revendu sans fraude pendant le temps de transport avant d’arriver à destination et la revendication devient alors de plus en plus difficile voire impossible, le titre étant endossé par un autre propriétaire, le bien meuble est détenu par le transporteur mais plus pour le compte du sous-acquéreur mais pour celui d’un sous-sous-acquéreur. La revendication ne pourra porter que sur la partie du prix impayée. Si en revanche, il n’y a pas de titre de propriété représentant la marchandise, pas d’endossement du titre par le sous-acquéreur, celui-ci n’est plus protégé contre une revendication. Dans ce cas, le sous-acquéreur s’expose à devoir payer le prix de cette marchandise au vendeur initial.

  1. la marchandise est en possession de l’acheteur.

L624 11°prévoit que si la marchandise a été livrée au débiteur-acheteur et qu’il a pris réellement possession du bien, le vendeur perd le droit dont il dispose en vertu de l’art.2102civ à savoir le privilège du vendeur de meuble, le droit de revendication et le droit de résolution pour défaut de paiement du prix car une procédure collective étant ouverte, il se trouve sur un pied d’égalité avec les autres créanciers. Le vendeur ne peut plus revendiquer que dans la limite des dispositions des articlesL624-12 à L624-18 (exercice de l’action revendication).

On considère qu’il y a réellement livraison quand le meuble a été livré à un mandataire/commissionnaire du débiteur acheteur. Dans le cas contraire, on considère qu’il n’y a pas prise de possession. Il faut une véritable détention matérielle. De manière générale, il faut que le débiteur-acheteur en ait l’usage exclusif.

Si la résolution de la vente a été prononcée avant le jugement d’ouverture ou si une clause résolutoire a été mise en œuvre avant le JO, le débiteur-acheteur n’est plus qu’un détenteur précaire. Il doit alors restituer un bien dont il n’est pas propriétaire puisque la résolution du contrat a anéanti celui-ci (L624-12).

De même on admet la revendication si la résolution est prononcée après le jugement d’ouverture mais que l’action en revendication ou résolution a été intentée avant le jugement et ceci à condition que cette action en revendication/résolution ait été fondée sur une autre cause que le défaut de paiement du prix. En effet, dès l’ouverture de la procédure, les créanciers ne peuvent plus agir en résolution pour défaut de paiement du prix (L622-21). Dans le cas contraire, elle peut se poursuivre.

La revendication ne peut pas être exercée si le prix a été payé immédiatement sur décision du JC. En revanche, la loi prévoit que celui-ci peut accorder un délai de règlement avec le consentement du créancier requérant. Ce dernier bénéficiera alors d’un privilège de paiement des créances postérieures alors qu’en réalité le prix du bien concerne une créance antérieure.

Si les marchandises ont disparu après le jugement d’ouverture, l’action du vendeur se répercute sur le prix. En effet, il devient créancier du prix et sa créance est considérée comme une créance postérieure. Son droit de revendication est alors considéré comme une créance postérieure.

En tout état de cause, la restitution est obligatoire quand l’administrateur ou le débiteur ne veut ou ne peut pas conserver le bien. Il faut alors considérer que la vente est résolue obligeant le vendeur à restituer le bien, les acomptes (sauf compensation avec une créance de dommages-intérêts). La créance est éteinte à concurrence de la valeur du bien qu’il a repris. Si la valeur de la créance est supérieure au bien (dépréciation du bien), le solde de la créance est déclaré au passif. Si la valeur de la créance est inférieure au bien restitué (bien usagé remis en état), le créancier devra restituer l’excédent à l’actif du débiteur.

  1. les solutions en présence d’une clause de réserve de propriété

La clause de réserve de propriété est une clause par laquelle le vendeur peut se réserver la propriété d’une chose tant que le prix n’est pas payé intégralement. La licéité de cette clause a été longtemps discutée (on voulait empêcher le vendeur de reprendre les meubles livrés antérieurement car ils représentaient un élément apparent de solvabilité du débiteur). Sa validation date d’une loi du 12/05/1980 et tous les textes successifs l’ont confirmé. Aujourd’hui, L624-16 al.2 permet au vendeur de demeurer propriétaire, encore faut-il qu’une telle clause ait été prévue au contrat au plus tard au moment de la livraison. Les vendeurs qui l’ont stipulée sont donc protégés. Le succès de cette clause a été immédiat, encouragé par la jurisprudence qui en a fait une garantie. On a considéré que la clause pouvait se transmettre avec la créance.

L’introduction de cette clause peut présenter un avantage pour le vendeur qui, sécurisé, accorde plus facilement des délais de paiement au débiteur en difficulté (le vendeur peut transmettre la réserve de la propriété en cédant la créance) mais la pratique montre que c’est surtout une protection du créancier-vendeur. On considère que le vendeur ainsi sécurisé va continuer ses livraisons, qu’il accordera plus facilement des délais de paiement, et de cette manière, sera donc aussi bénéfique pour le débiteur.

  1. les conditions de mise en œuvre de la clause de réserve de propriété (2).

La clause doit être écrite et stipulée au plus tard au moment de la livraison :

Elle peut être rédigée dans le contrat proprement dit ou dans un contrat-cadre. La clause n’a pas à être répétée à chaque livraison bien que cette disposition soit préférable pour éviter les problèmes de preuve. Il suffit que la clause soit stipulée par écrit et de manière suffisamment apparente.

Cependant, l’acceptation de la clause par l’acheteur n’est pas nécessairement écrite puisque le vendeur pourra prouver par tout moyen, avec exactitude, l’acceptation. C’est un avantage, en particulier lorsque le rapport de force dans le contrat de vente n’est pas en faveur du vendeur (ex : vente à une centrale d’achat). Comme le vendeur n’a pas à prouver la stipulation écrite, il pourra s’opposer plus facilement au non-paiement de l’acheteur.

Les marchandises ayant été incorporées dans un autre bien mobilier alors qu’elles sont couvertes par une clause de réserve de propriété :

La revendication peut s’effectuer si la récupération pouvait avoir lieu sans dommages (cial. 18/07/1989). En l’espèce, des pneus livrés à un garagiste pour être montés sur des voitures, couverts par une CRP : récupération sans dommages pour le véhicule possible.

S’il s’agit debiens fongibles on peut interpréter L624-16 al.2 de deux manières :

soit il institue une présomption simple de la propriété du revendiquant à l’égard des biens qui sont détenus par le débiteur (présumés être la propriété du revendiquant).

soit il s’agit d’une présomption irréfragable et sur simple revendication le vendeur serait déclaré propriétaire des biens trouvés en stock chez le débiteur lorsque ceux-ci sont de même nature. Cette présomption confère un pouvoir exorbitant au vendeur qui va pouvoir récupérer tout bien fongible en nature de même qualité et de même espèce chez le débiteur (cial. 5/03/2002 va en ce sens).

  1. l’exercice de l’action en revendication.

Art. L624-12 à 18.

  1. les effets de la clause.

Si la clause est conforme aux exigences légales, le vendeur pourra revendiquer dans les délais et formes prévus à propos de l’action en revendication. Toutefois, l’administrateur dispose du droit d’option concernant la continuation des contrats en cours et pourra conserver le bien mais il devra le payer (L622-13) avec l’autorisation du JC qui vérifiera que le bien est utile à l’exploitation de l’entreprise. Il pourra aussi éventuellement accorder des délais de paiement si le vendeur l’accepte. Si le contrat n’est pas continué, le bien devra être restitué et la créance sera éteinte à concurrence de la valeur du bien.

Chapitre 2: Les partenaires à l’intérieur de l’entreprise.

A l’origine, il ne s’agissait que des dirigeants mais au fil des textes, les salariés ont vu leur place relativement reconnue au sein de la procédure

Section 1 : Les salariés.

Avant la loi de 1967, les salariés n’étaient considérés que comme des créanciers parmi d’autres, disposant seulement d’un privilège reconnu par la loi, devenu un super privilège (paiements des 60 jours de salaires) dans les années 1930. En 1973 est créée l’AGS (Association nationale pour la Gestion du régime d’assurance des créances Salariales), assurance payant les salaires lorsque le débiteur est dans l’impossibilité de le faire.

La loi ne prévoyant aucune mesure spécifique quant aux conséquences sur l’emploi que pouvait avoir l’ouverture d’une procédure collective, les salariés restaient en marge. Cette situation était critiquée, d’autant plus qu’un état de cessation des paiements ajouté à un mauvais climat social était négatif pour redresser l’entreprise. En 1985, pour la première fois, on a essayé de traiter les salariés en véritables citoyens de l’entreprise (R. Badinter). Or, les lois de 1994 et de 2005 ou l’ordonnance de 2008 n’ont pas accentué cette tendance à associer les salariés à la procédure collective.

  • 1. Le sort des salariés au cours de la procédure.
  1. l’association des salariés à la procédure.

Depuis la loi de 1985, l’association des salariés à la procédure a été renforcée mais sans aller jusqu’à les faire devenir des partenaires de la procédure. On peut regretter que les syndicats continuent d’être exclus de la procédure, qu’on continue à leur contester le rôle de partenaire de l’entreprise. Dans la mesure où elles existent, les institutions représentatives du personnel (CE si plus de 50 salariés ou délégué du personnel si plus de 10 salariés) jouent alors un rôle dans la procédure : elles désignent un représentant parmi les salariés ou les salariés l’élisent directement s’il n’y a pas d’institution représentative, ce qui est le cas pour la moitié au moins des entreprises (L621-4). Les représentants des salariés désignés vont pouvoir exercer certains pouvoirs sur la procédure et notamment des voies de recours.

  1. l’information et la consultation.

Elles sont faites directement auprès des institutions représentatives. Par exemple, lors de l’élaboration du bilan économique et social, on informe les institutions représentatives du personnel (L623-3 al.4). Même chose quand est envisagé le remplacement de dirigeants sociaux, l’incessibilité de certaines valeurs mobilières ou leur cession forcée, dans le cadre du plan de sauvegarde. De même, lorsque le tribunal arrête le plan de sauvegarde ou le modifie substantiellement.

Toutes ces informations doivent être écrites et précises, les institutions représentatives doivent disposer d’un délai raisonnable de réflexion. Si elles émettent un avis, le chef d’entreprise ou à défaut l’administrateur doivent répondre de façon motivée. Si cette procédure n’a pas été respectée, les auteurs de la violation s’exposent au délit d’entrave aux fonctions de représentant (délit pénal) entraînant une possibilité de nullité de l’acte décidé en l’absence de cette consultation.

  1. l’exercice des voies de recours.

L661-1dispose que les institutions représentatives du personnel peuvent interjeter appel de certaines décisions ou se pourvoir en cassation contre certaines décisions relatives à la procédure que le juge est amené à prendre. Ce peut être des décisions ouvrant une procédure de sauvegarde ou toute autre procédure collective ou encore des décisions qui rejettent ou arrêtent un plan de continuation.

Ces règles bousculent les règles de procédures puisque ce sont les institutions représentatives du personnel qui peuvent intervenir dans une procédure alors même qu’elles ne sont pas parties à la décision. On a craint des abus mais en pratique ces craintes ne sont pas fondées puisque l’intervention des parties n’est possible que dans des cas limitativement énumérés.

  1. le devenir des contrats de travail

Depuis 1985, toutes les lois qui se sont succédées affichent un objectif de protection de l’emploi : «l’utopie d’aujourd’hui sera la réalité de demain». Aucune disposition particulière n’a été prévue dans un plan de sauvegarde qui est une situation différente de la procédure de redressement judiciaire puisque la société est toujours in bonis. Les contrats de travail obéissent donc au droit du licenciement économique, que l’entreprise soit sous sauvegarde ou non.

La procédure de sauvegarde a pour finalité la continuation des contrats et le redressement de l’entreprise et ce, même si le principe de licenciement économique de droit commun n’a pas été écarté dans ce cadre. Ce principe doit être arrêté par le tribunal. Le plan de sauvegarde comportera en outre un volet social et le principe de continuation des contrats de travail en cours s’applique à chaque fois qu’il y une modification de la situation juridique de l’employeur (L1244-1CW). Ce sera le cas si, à l’occasion du plan de sauvegarde, une partie de l’activité est cédée à un tiers (L626-1 al.2).

  • 2. Le statut des créances salariales.

Les salariés ont acquis, au fil des années, un régime favorable de super privilège sur certaines parties du salaire. Les salariés bénéficient donc de sûretés qui leur confèrent un statut particulier. Ils n’ont pas à déclarer leurs créances et ils bénéficient dans une certaine mesure de l’AGS.

  1. l’établissement des créances salariales.

L625-1organise de manière générale l’établissement des créances salariales. Le MJ (représentant des créanciers) établit la liste des créances salariales au moment de l’ouverture de la procédure après avoir entendu les débiteurs et celle-ci est soumise au représentant des salariés pour avis, lequel est soumis à une obligation de discrétion (L625-2). S’il y a des difficultés, il peut s’adresser à l’administrateur voire au JC.

Tout cela se fait dans des délais d’établissement relativement brefs (L3253-19CW). Le relevé des créances va être établi par le JC et chaque salarié va être informé par le mandataire sur la nature et le montant de sa créance salariale sous forme de publicité et d’affichage dans le siège de l’entreprise. Le salarié pourra dès lors contester sa créance dans un délai de forclusion de 2 mois à compter de la publicité. Si un salarié ne voit pas sa créance figurer, en tout ou en partie, sur le relevé, il doit alors saisir le CPH celui-ci prononcera le relevé de forclusion dans ce délai s’il y a lieu et il bénéficiera aussi bien au salarié qu’à l’AGS.

L’AGS peut être amenée à régler les créances salariales, elle peut donc aussi contester ce relevé et refuser de régler une créance. Elle doit alors en informer le MJ qui peut aussi saisir le CPH. Si le refus de payer de l’AGS n’est pas fondé, il peut la condamner à payer à la place de l’employeur défaillant. La loi a même prévu la possibilité pour toute personne de former une tierce-opposition sur ce relevé.

Si une instance prud’homale est en cours au jour du jugement d’ouverture, elle pourra être poursuivie même après ledit jugement mais le mandataire devra figurer dans l’instance (L625-3). Rien n’interdit que l’AGS soit impliquée dans l’instance mais cette instance ne peut tendre qu’à la constatation de cette créance salariale et pas à des mesures d’exécution. À compter du jugement d’ouverture, le CPH perd la compétence de prendre des mesures d’exécution. Ainsi, la décision du CPH sera portée sur l’état des créances et le tribunal chargé de la procédure prendra les mesures nécessaires au paiement des créances salariales.

  1. le paiement des créances salariales

Elles sont normalement réglées en fonction des fonds disponibles qui doivent servir prioritairement au paiement des salaires antérieurs. En ce qui concerne le super privilège, le débiteur doit régler dans les 10 jours suivants le jugement d’ouverture une somme égale aux 60 derniers jours de travail sur ordonnance du JC à titre provisionnel, s’ils sont demeurés impayés (L3253-2 du CW).

Le règlement du privilège (art.2101 et 2104civ) concerne les créances salariales des 6 derniers mois demeurées impayées mais le paiement ne sera effectué que s’il y a des fonds disponibles. Avant même l’établissement des créances, le débiteur doit payer avec l’autorisation du JC une somme égale à un mois de salaire (L625-8 al.2).

Ces créances salariales ne peuvent faire l’objet d’aucune remise, ni d’aucun délai de paiement (L626-20) mais cela concerne les créances salariales antérieures au jugement d’ouverture. Les créances postérieures sont payées à l’échéance et s’il n’y a pas de fonds disponibles, elles sont payées selon les rentrées de fonds au fur et à mesure. Si le paiement est véritablement impossible, le mandataire peut demander le règlement à l’AGS, ce qui est bien souvent le cas.

  1. le domaine d’intervention de l’AGS.

L’AGS est instituée dans les art. L3253-6 et suivants du CW et créé par une loi de 1973. Cet organisme a pour objet de combler les carences du débiteur. La loi de 1985 a élargi le champ des cotisants auprès de l’AGS à tout employeur, civil ou commercial, personne physique ou morale de droit privé, aux professions libérales réglementées ou non. L’AGS est gérée par l’UNEDIC et agit comme une garantie. Cette caisse autonome est payée par les cotisations des employeurs à hauteur de 0,35 % des salaires versés par l’entreprise. Sont couverts par l’AGS tous les salariés, y compris les dirigeants sociaux pouvant bénéficier d’un salaire.

S’agissant des créances couvertes par l’AGS, en matière de sauvegarde, les conditions sont très encadrées. L’entreprise est toujours in bonis (pas en CDP) lorsqu’une procédure de sauvegarde est ouverte. Les auteurs ont ainsi mis en avant le risque que le débiteur n’use de la procédure de sauvegarde pour faire payer les licenciements. L’AGS ne paie pas les créances salariales dues à la date du jugement d’ouverture puisque le débiteur n’est pas en CDP. En revanche, elle peut intervenir pour les salaires au cours de la période d’observation et dans le mois qui suit l’adoption du plan de sauvegarde. Elle peut en outre payer les créances salariales résultant de la rupture du contrat de travail.

  1. le règlement des créances par l’AGS.

La condition sine qua non pour que l’AGS intervienne est que le débiteur ne dispose pas des fonds nécessaires pour régler les créances salariales visées. Elle intervient alors dans des délais très brefs à savoir 5 ou 8 jours à dater de la réception du relevé des créances (constat). Cette intervention est considérée comme une avance de fonds qui doit être autorisée par le JC. S’il n’y a pas de contestation, les fonds sont versés par l’AGS directement au mandataire qui les redistribue immédiatement aux salariés.

L’AGS doit même payer en cas de contestation par un tiers. Si la contestation aboutit, l’AGS ne pourra pas forcément récupérer ces sommes sur l’actif du débiteur. Ses avances pourront être récupérées dans le cadre du mécanisme de la subrogation. Elle est subrogée dans les droits des salariés pour lesquels elle a fait une avance concernant la procédure de sauvegarde.

Section 2 : Les dirigeants de l’entreprise.

Leur régime juridique s’inspire, dans la loi de 2005, de l’idée de la séparation entre l’Homme et l’entreprise. Depuis 1985, le dirigeant n’est plus sanctionné parce que son entreprise est en difficulté, il ne l’est que s’il a commis une faute. En effet, il n’est pas normal que les dirigeants fautifs profitent de l’écran de la société pour bénéficier d’une impunité. Cependant, les lois successives ont atténué la rigueur de la répression à l’encontre des dirigeants fautifs, surtout pour la procédure de sauvegarde, puisque subsiste dans la loi de 2005 l’action en comblement du passif mais qui ne peut être exercée que dans des conditions limitées.

Les textes avaient déjà atténué les sanctions réservées aux dirigeants impliqués dans des procédures de redressement ou liquidation judiciaire mais l’ordonnance de 2008 supprime toute possibilité particulière d’agir en responsabilité contre les dirigeants fautifs. Ainsi, l’action en comblement du passif conservée par la loi de 2005 et consacrée par celle de 1985 a été tout simplement abrogée par l’ordonnance de 2008. L’art.53 de l’ordonnance a abrogé la possibilité de conditionner l’adoption du plan de sauvegarde à l’évincement de certains dirigeants. Cette démarche vise à inciter les dirigeants à se tourner plus facilement vers une procédure de sauvegarde que de redressement judiciaire. De même, a été abrogée la possibilité de conditionner l’adoption du plan à l’incessibilité des titres, toujours dans le but d’inciter les dirigeants à opter plutôt pour la procédure de sauvegarde.

Il ne reste donc plus aucune disposition permettant de remettre en cause la responsabilité des dirigeants sauf en se fondant sur la responsabilité de droit commun telle que la faute.

Sous-titre IV : Le Plan de Sauvegarde de l’Entreprise

Prévoir ou subir, telle est la question. Globalement, ce plan de sauvegarde est le même que celui présent dans la loi de 1985 et relatif au redressement. La différence essentielle c’est que le plan de sauvegarde ne nécessite pas la cessation des paiements. Les deux plans interviennent certes dans un contexte différent mais le processus d’élaboration reste le même.

Chapitre 1: La préparation du plan de sauvegarde.

Section 1 : L’élaboration du plan de sauvegarde.

  • 1. Le travail de réflexion et d’investigation.

Il s’agit d’anticiper la survenance de problèmes plus graves en faisant le bilan économique et social de l’entreprise et de commencer à élaborer un projet de plan de sauvegarde. Démarche d’anticipation.

  1. le bilan économique et social.

Il s’agit d’établir une information impartiale sur la situation de l’entreprise. L’administrateur chargé de ce bilan recherche une information que lui fournissent le débiteur et certains experts (dont il peut demander la désignation au tribunal ; en l’absence d’administrateur, rôle tenu par le débiteur).

Ce bilan n’est pas seulement une analyse comptable, il doit s’accompagner d’un bilan environnemental si l’entreprise exerce une activité classée au sens du droit de l’environnement (art. L623-1 et suivants), il doit permettre de fournir des éléments d’information sur le passé et l’avenir de l’entreprise.

L’administrateur est à un carrefour d’informations et pour établir ce bilan, il aura des informations fournies par le juge commissaire et par différentes institutions (Trésor Public, organismes de crédit, Sécurité Sociale), il peut consulter des personnes pour établir ce bilan, notamment le mandataire judiciaire, le débiteur, les salariés. Il doit en outre travailler en étroite coopération avec les autres organes et notamment l’ordre professionnel ou l’autorité compétente si l’entreprise est une profession libérale réglementée. Il se procure la liste certifiée de tous les créanciers et le montant des dettes encourues. Il a l’obligation d’informer sur l’état d’avancement de son travail.

Sera alors élaboré un projet de plan de sauvegarde, ensuite présenté au tribunal qui est seul compétent pour adopter ce plan. C’est désormais le débiteur qui propose le plan avec le concours de l’administrateur (L626-2). C’est au débiteur de proposer ce plan à l’administrateur (ord.2008).

  1. l’élaboration d’un projet de plan de sauvegarde.

Le projet de plan doit comporter des éléments obligatoires (art. L626-2) :

déterminer les perspectives de redressement de l’entreprise (en fonction de l’activité exercée, des moyens mis en œuvre, réorganisation…mesures essentiellement à caractère économique)

prévoir un chapitre social (justifier du niveau de perspective d’emploi)

définir des modalités de règlement du passif (négociation préalable avec les créanciers)

prévoir la continuation de l’entreprise (sa réorganisation). Les solutions prévues ne peuvent correspondre qu’à une continuation de l’entreprise si cela est économiquement possible sauf à conclure aux vues du bilan que la procédure doit être convertie en procédure de redressement ou de liquidation judiciaire (car CDP).

L’ensemble de ces mesures figure dans un rapport présenté au tribunal, qui n’est pas lié par ce document, et avant présentation, il est communiqué pour avis à des organes tels que l’inspection du travail, au tribunal qui tranchera en faveur de telle ou telle décision (ancien art. L626-8 du CW, principe du contradictoire).

Ce rapport ne peut véritablement être élaboré qu’à la suite d’une négociation avec les créanciers.

  • 2. La négociation avec les créanciers.
  1. le principe d’une consultation individuelle.

L’administrateur consulte les créanciers individuellement sur des propositions de règlement des dettes qui pour l’essentiel comportent des délais de paiement, des remises de dettes (totales ou partielles) et des conversion de créances en parts de capital (L23/10/2010 a autorisé cette possibilité jusque-là prévue seulement en présence d’un comité d’entreprise) sauf lorsque le projet de plan ne modifie pas les modalités de remboursement ou prévoit même un remboursement immédiat. L’art. L626-5 prévoit une procédure de consultation individuelle des créanciers informés par lettre RAR adressée par le mandataire judiciaire. Il peut répondre par une acceptation ou par une contre-proposition. En revanche, s’il ne répond pas dans les 30 jours de la réception du courrier, il est présumé avoir accepté la proposition. Ceci étant, ce n’est pas parce que le créancier a accepté des remises de dettes, que sa créance est définitivement admise (deux procédures distinctes).

Tous les créanciers sont consultés (consultation collective) et notamment les créanciers publics ou quasi-publics tels que les administrations financières (Trésor Public, URSAFF) et sociales (Sécurité Sociale), qui sont le plus souvent les premiers touchés. Toutefois, ceux-ci peuvent consentir des remises de dettes (renonciation totale ou partielle). L’art. L626-6 dispose que ces remises de dettes consenties ne peuvent être octroyées que dans des conditions de respect de la concurrence par rapport aux opérateurs privés. En effet, ce texte vise à éviter que ces remises de dettes constituent des aides publiques occultes (un organisme public ne peut consentir une remise de dettes que dans les mêmes conditions que celles qui auraient été acceptées par un opérateur économique privé dans la même situation) mais la même règle ne pèse pas sur les opérateurs privés qui peuvent consentir des remises de dettes très importantes à un débiteur.

Au terme de cette consultation, le mandataire judiciaire dresse un état des réponses obtenues des créanciers ensuite adressé aux différents organes pour avis. Si cet avis est positif, l’état pourra être joint au rapport présenté au tribunal pour l’arrêt du plan de sauvegarde.

  1. la constitution de comités de créanciers

Cette innovation est issue de la loi de 2005 instaurant des comités de créanciers dans des entreprises au-delà d’une certaine taille (mesure gadget). Cette mesure a été présentée comme une avancée considérable, s’inspirant du droit américain sur les faillites mais elle n’affecte aux USA que 5% des entreprises mises en faillite chaque année et les Américains eux-mêmes se posent des questions au sujet de ce mécanisme, qu’ils pourraient réformer.

La loi de 2005 dispose que chaque fois que l’entreprise a plus de 150 salariés et au moins 20 millions d’euros de chiffre d’affaires, deux comités de créanciers doivent être constitués (art. L626-29 et s. et R652-26). Il est cependant possible de mettre en œuvre ces comités même si les seuils ne sont pas atteints, avec l’autorisation du juge commissaire.

Le 1er comité est constitué d’un représentant des établissements de crédit: établissements assimilés tels que définis par le décret du 12/02/2009, ainsi que les titulaires de créances acquises auprès d’établissements. Pour le 2ème comité,sont membres de droit les fournisseurs de biens ou services disposant de créances qui représentent plus de 3% du total de cette catégorie de créances. Seuls sont pris en compte les créanciers antérieurs. Peuvent aussi en faire partie les cessionnaires.

Une fois les comités constitués à l’initiative de l’administrateur, le débiteur leur présente des propositions en vue de l’élaboration d’un projet de plan de sauvegarde, sans que soit mentionnée la présence du mandataire judiciaire (représentant des créanciers, critique). Ces comités, après délibérations et négociations, vont être amenés à se prononcer sur ces propositions dans un délai de 20 à 30 jours. Les créanciers obligataires sont consultés par voie d’AG à la majorité des 2/3 mais ne sont pas membres de ces comités.

Les membres des deux comités statuent à la majorité de leurs membres représentant au moins les 2/3 du montant des créances. Ces deux comités doivent voter le projet de plan qui leur a été soumis. Si on parvient à obtenir la majorité des 2/3, la loi de la majorité va s’imposer aux minoritaires. Le rejet de ces propositions par un seul des comités empêche leur adoption. Si les propositions sont adoptées, le texte prévoit qu’elles s’imposent à tous les créanciers même ceux qui leur étaient hostiles.

De plus, le contenu du plan qui doit être adopté par les deux comités peut déroger quant à sa durée et ses modalités de paiement qui gouvernent le plan en l’absence de comité (par consultation individuelle). Les créanciers dont les modalités de paiements ne sont pas modifiées ne votent pas. Le plan doit prendre en compte les accords déjà conclus entre les créanciers (ex : accords de subrogation dans lequel un créancier accepte d’être payé après un autre).

Le plan peut aussi ne pas être adopté et dans ce cas, on revient à une procédure de consultation individuelle des créanciers (délai de 6mois à compter du jugement d’ouverture). C’est d’ailleurs la règle pour les créanciers hors comité et les créanciers publics (qui ne peuvent pas faire partie de ces comités). Si le tribunal refuse le plan, même solution. L’exigence de seuil fait que cette procédure ne concerne qu’un très petit nombre d’entreprises. Ceux qui ne font pas partie des comités sont interrogés par voie de consultation individuelle. Les créanciers publics ne peuvent pas faire partie d’un comité (L626-30).

Procédure de sauvegarde financière accélérée(L22/10/2010, L628-5 modifié) nécessite pour être mise en œuvre une procédure de conciliation au préalable et ne concerne que les établissements de crédit. Elle sert à palier contre l’inertie de créanciers minoritaires récalcitrant. Lorsque le débiteur est engagé dans une procédure de conciliation, qui peut demander une SFA dans un délai de deux mois et seuls les entreprises dépassant un certain seuil sont concernées (mêmes seuils que pour les comités). Le tribunal statue sur cette procédure après rapport du conciliateur. Les créanciers peuvent déclarer leur créance mais cette déclaration n’est pas obligatoire. Le mandataire va informer les créanciers des caractéristiques des créances. La déclaration est réputée accomplie si le créancier ne fait pas sa déclaration dans les délais. Les autres créanciers ne sont pas affectés pas l’ouverture de cette procédure et devront donc être payés à échéance et échappent. La SFA n’a d’effet qu’à l’égard des créanciers établissements de crédit et donc les mesures contraignantes n’ont pas d’effet à l’égard des autres créanciers. Cela vise des situations particulières. Dans ce cas, un seul comité sera réuni ie celui des établissements de crédit. Il se prononcera sur l’adoption d’un plan ensuite soumis au tribunal qui pourra l’adopter ou pas. Le tribunal met fin à la procédure.

Lorsque le plan est élaboré, il faut le soumettre au tribunal pour son adoption définitive.

Section 2 : L’adoption du plan de sauvegarde par le tribunal.

Comme presque toujours en matière de procédure collective, le législateur a adopté une conception restrictive de la possibilité d’exercer des voies de recours contre le plan de sauvegarde. Les raisons sont les mêmes que celles qui justifient un accès restreint aux voies de recours : l’efficacité qui peut être compromise si le délai est trop long (art.661-1§1 2°, L2005).

Le projet de plan, pour être adopté, doit être arrêté par le tribunal qui vérifie que les intérêts des créanciers sont suffisamment protégés (art. L626-31). Les décisions en la matière montrent que les contestations naissent lorsque le créancier considère que l’adoption d’un plan ou d’une procédure de sauvegarde porte atteinte à ses intérêts. Si c’est le cas, le tribunal l’adopte et il est appliqué à tous les membres des comités, même minoritaires. Le tribunal statue aux vues d’un rapport préparé par l’administrateur, qui doit indiquer quelles sont les possibilités de sauvegarde de l’entreprise (L626-1). En matière de redressement judiciaire, on a gardé la possibilité d’un plan de cession. Le plan doit recueillir l’avis du ministère public si l’entreprise réalise un chiffre d’affaires HT de plus de 3 millions d’euros et 20 salariés. Il y a une implication croissante du ministère public dans les procédures collectives.

Selon le décret, le tribunal doit statuer avant l’expiration de la période d’observation. Ce n’est pas une solution nouvelle mais elle est précisée expressément. Si cela n’est pas réalisé dans les délais, le tribunal dispose du pouvoir de convoquer le débiteur aux fins de clôture de la procédure et ce jugement se substitue au jugement arrêtant le plan.

Le jugement d’adoption du plan comporte la nomination d’un commissaire à l’exécution du plan qui peut être l’administrateur ou le mandataire judiciaire mais ce n’est pas obligatoire (l’administrateur peut rester en fonction). Il est soumis au même régime juridique que ceux-ci. Le mandataire reste en fonction le temps qu’il est nécessaire pour vérifier le montant des créances.

Le tribunal ne se contente pas d’arrêter le plan et de lui conférer un caractère obligatoire: il peut modifier les dispositions relatives au règlement des créances sauf lorsqu’elles ont été adoptées dans le cadre des comités de créanciers. Pour des raisons de rapidité liées aux nécessités économiques, les voies de recours sont admises de manière restrictive. Le jugement peut aussi faire l’objet d’une tierce-opposition de la part d’un créancier.

Chapitre 2 : La mise en œuvre du plan de sauvegarde.

Cette mise en œuvre nécessite un certain nombre de mesures arrêtées dans le plan mais qui compte des aléas que la loi nouvelle a mieux pris en compte que les anciennes lois. La loi antérieure (1985) ne prévoyait pas de procédure de sauvegarde.

Section 1 : Les mesures mises en œuvre.

Le plan qui sera adopté par le tribunal n’est pas très différent par sa durée et par son contenu du plan règlementé autrefois à propos du redressement judiciaire par rapport à la loi de 1985. Ce plan détermine les modalités pour atteindre des perspectives de redressement et est adopté pour 10ans maximum en vertu de l’art. L626-12com.

  • 1. Les mesures de réorganisation économique et de réorganisation de l’entreprise.

Ce plan de sauvegarde peut comporter des mesures de réorganisation économique (adjonctions d’activités, réorganisation de l’entreprise, modification des statuts de la société etc.). Peuvent être mises en œuvre des mesures de réorganisation de l’entreprise comme des modifications de statuts (L626-15) par le recours à une augmentation de capital (L626-3) ou la révocation des dirigeants (L626-16). Ce n’est pas le tribunal qui décide de l’augmentation de capital (new money) par exemple.

Toutes ces mesures telles qu’elles sont décidées dans le plan doivent faire l’objet d’une délibération des organes de l’entreprise. L’AGE devra délibérer sur l’augmentation de capital décidée dans le plan. Mesure abrogée par la loi de 2008 : le tribunal ne peut plus décider de la cession forcée de titres détenus par les dirigeants mais il peut toujours décider de l’inaliénabilité de certains biens pour une durée qu’il fixe. Si cette aliénation devait être malgré tout envisagée, elle devrait faire l’objet d’une demande au tribunal. En cas de violation de cette aliénation, il y aurait une sanction pénale.

Modification de L626-13 (L12/2010): l’interdiction d’émettre des chèques est levée lorsque le débiteur exploite une EIRL. Cela vise les comptes concernés par la procédure.

  • 2. Les mesures de réorganisation sociale

L’entreprise est toujours in bonis et donc les plans de licenciement vont obéir au droit commun des licenciements économiques. Le plan doit exposer et justifier le niveau et les perspectives d’emploi, les conditions sociales envisagées pour la poursuite d’activité, les mesures de reclassement et licenciements. En cas de licenciement, la loi nouvelle prévoit que l’AGS intervient de manière limitée car l’entreprise est in bonis ie seulement pour les créances de salaire postérieures et les licenciements donnant lieu à des indemnités de licenciement.

ex : la rupture du contrat de travail a lieu pendant la période d’observation ou les licenciements interviennent dans le mois suivant la mise en place du plan de sauvegarde.

  • 3. Les modalités de règlement du passif.

Le plan comporte enfin des modalités de règlement du passif qui ont été discutées préalablement avec les créanciers soit de manière individuelle, soit dans le cadre de comité de créanciers. Malgré la négociation individuelle qui s’est nouée ente débiteur et créanciers, le tribunal conserve le pouvoir de réduire les délais de paiement proposés ou les remises de dettes qui ont pu être consenties par les créanciers (avantage pour eux). Il a même la possibilité d’imposer des délais uniformes pour les créanciers récalcitrants (mais ne peut pas excéder la durée du plan de sauvegarde). Si, avant l’ouverture de la procédure, certains créanciers avaient consentis des délais de paiement supérieurs à la durée du plan, ces délais demeurent inchangés (L626-18).

Ces dispositions ne sont pas applicables quand il y a eu réunion d’un comité de créanciers : dans ce cas, cette adoption entraine l’obligation pour le tribunal de se conformer aux dispositions votées par les créanciers (L626-21).

Certaines créances échappent à toute remise ou à tous délais (super privilégiées des salariés [60 derniers jours travaillés], créance d’un montant faible dans la limite de 5% du passif estimé et n’excédant pas 300€). Ces créances, lorsqu’elles ne sont pas contestées, bénéficient d’un versement provisionnel.

En la matière, on note peu de modifications au regard du droit antérieur mais, en revanche, une innovation qui concerne le paiement de chaque annuité. Chaque année, le débiteur devra apurer dans le cadre du plan, une partie du passif accumulé et devra le faire sous forme d’annuité. Au-delà de la 3ème année du plan, l’apurement ne peut être inférieur à 5% du passif qui a été admis, le premier paiement devant intervenir avant l’expiration de la première année (L626-18).

Pour éviter qu’en fin de plan les sommes à rembourser par le débiteur soient trop importantes, on l’oblige à étaler de manière rationnelle les remboursements dans le temps. Le premier paiement doit intervenir avant l’expiration de la première année de plan. Les créanciers n’ont pas été complètement sacrifiés sur l’autel de la sauvegarde, ils ont même retrouvé des couleurs : tous les créanciers ayant participé à la sauvegarde bénéficient d’un principe d’irresponsabilité donc pas d’action possible pour avoir consenti un concours financier au débiteur (L650-1). Lorsqu’on vend un bien grevé d’une sûreté, le montant du prix de ce bien est déposé à la caisse des dépôts et consignation.

L’ordonnance de 2008 a modifié l’article 650-1 qui prévoyait un principe d’irresponsabilité des créanciers ayant apporté un concours financier au débiteur en cas de redressement ou de liquidation judiciaire sauf cas de fraude ou d’immixtion du créancier dans la gestion du débiteur. Cette disposition a été introduite dans la loi de 2005 à la demande des établissements de crédit disposant que ce n’est pas parce qu’une banque a consenti de manière abusive des découverts à son client qu’elle pourra être poursuivie en responsabilité.

  • la loi de 2005 a adopté un principe d’irresponsabilité générale. L’ordonnance de 2008 a apporté des précisions : ce principe ne vise que la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation.
  • exceptions :

– lorsque l’établissement de crédit s’est immiscé dans la gestion du débiteur.

lorsque l’établissement de crédit a pris des sûretés sur les biens du débiteur d’un montant disproportionné par rapport aux dettes de celui-ci : le tribunal peut alors les annuler ou les réduire. Une fois ce plan adopté, il est opposable à tous. Est-ce que les garants/caution, personnes physiques, du débiteur peuvent se prévaloir du plan à l’égard des créanciers ? L’art.626-1&com. précise que les cautions, garants et autres peuvent se prévaloir de ce plan. Cette faveur ne bénéficie pas aux cautions garants en matière de redressement judiciaire.

Les cautions, coobligés, garants et autres peuvent se prévaloir du plan. La loi nouvelle n’étend pas cette faveur aux mêmes personnes qu’en matière de redressement judiciaire. Le sens de cette différence de régime juridique est important. Tout a été fait dans la loi de 2005, confirmée en 2008, pour privilégier le régime de la sauvegarde afin d’inciter le débiteur à se tourner plutôt vers elle. Cette mesure, qui permet aux coobligés de se prévaloir du plan, devrait en effet inciter les dirigeants garants (personnes physiques) à préférer la procédure de sauvegarde (ex : ces garants ne pourront pas être poursuivis par les créanciers). « Parapluie judiciaire ». Encore faut-il que les dirigeants soient bien informés et qu’ils aient une volonté d’affronter leurs difficultés le plus tôt possible.

Section 2 : Les aléas de la mise en œuvre.

Très souvent, la modification du plan (L626-26) va s’opérer dans les mêmes conditions que l’adoption du plan. Plus vraisemblablement, l’inexécution du plan peut conduire à sa résolution. Dans la loi de 2005, on distingue plusieurs situations :

  • le débiteur n’exécute pas les engagements résultant du plan: le tribunal peut décider de la résolution du plan. Si la résolution est prononcée à la suite du constat de CDP, l’ordonnance de 2008 a prévu que cette résolution conduit à une conversion de la procédure soit en redressement judiciaire soit en liquidation judiciaire. La résolution du plan va mettre fin à la procédure et au plan sauf nouveau au plan. Si c’est une liquidation judiciaire qui est prononcée, les créanciers vont pouvoir réenclencher des poursuites. Les délais de paiement seront caducs. S’il y a conversion, les créanciers n’auront pas à déclarer de nouveau leurs créances.
  • si l’inexécution résulte, sans que l’entreprise ne soit en CDP, d’un non-paiement des dividendes par le débiteur mais que le tribunal se refuse à prononcer la résolution du plan, le commissaire à l’exécution du plan se substituera au débiteur pour procéder au recouvrement de ces dividendes pour apurer le passif auprès des créanciers. Si à la clôture du plan ou durant son exécution, le tribunal constate la CDP, il va prononcer la résolution du plan ou la conversion en redressement ou liquidation. Si une procédure de liquidation a été ouverte, les créanciers soumis au plan de sauvegarde se retrouveront soumis à une liquidation mais seront dispensés de déclarer à nouveau leur créance (L626-27§3).
  • à l’inverse, si le plan s’est exécuté normalement, jusqu’à son terme, le tribunal clôture le plan de sauvegarde par une décision de clôture (L626-28) qui suppose que la mission de l’administrateur et du mandataire soit elle-même achevée.

Titre II : Les Procédures de Redressement et de Liquidation judiciaire

En 2005, le législateur n’a pas été dupe. Il sait que ce n’est pas du jour au lendemain que les entrepreneurs vont changer de culture ; or, la sauvegarde a été inventée pour leur éviter des désagréments. La nécessité de procédure faisant suite à la constatation d’une cession des paiements est essentielle. Il a fallu prolonger les dispositifs légaux en vigueur avant la loi de 2005. Statistiquement, les procédures de redressement ou de liquidation judiciaire sont beaucoup plus nombreuses que les procédures de sauvegarde. L’objectif du législateur en 2005 n’a pas été atteint.

La procédure de sauvegarde constitue le droit commun, ce qui explique pourquoi en matière de redressement et de liquidation, on procède par renvoi aux textes de la sauvegarde. Ces procédures de redressement font suite au constat de la cessation des paiements. Elles empruntent leur régime à celui de la sauvegarde et comportent un certain nombre de dispositions spécifiques. La philosophie générale des dispositions de 2005 vont dans le sens d’une simplification voire d’une accélération de procédure (du moins c’est la volonté affichée), en particulier pour la liquidation judiciaire (car s’il n’y a aucun espoir de redresser l’entreprise, il n’y a pas de raison de faire trainer les choses) et pour les TPE. A propos du redressement, la procédure de la cession a été conservée. Avant, elle était prévue dans les dispositions relatives au redressement (1985), aujourd’hui, elle l’est en matière de liquidation.

Sous-titre I : La Procédure de Redressement Judiciaire

L’art. L630 et s. com. institue une procédure de redressement judiciaire destinée à permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif (L631-1 al.2). Par comparaison à la matière de la sauvegarde, il y a une quasi copie des objectifs à la différence près qu’ici il y a cessation des paiements.

Chapitre 1 : L’ouverture de la procédure.

Section 1 : Les conditions d’ouverture de la procédure.

  • 1. Le champ d’application.
  1. les personnes physiques.

La solution adoptée dans la loi de 2005 à L631-1 est identique en matière de sauvegarde et en matière de redressement donc toutes les personnes physiques, civile, commerciales, exerçant une profession libérale règlementée ou non, artisan, agriculteur, les conjoints coexploitants, peuvent faire l’objet d’une procédure de redressement judiciaire. Elle s’applique aussi aux personnes interdites d’exercer le commerce ou aux personnes qui ont une incompatibilité avec l’exercice du commerce.

Deux particularités :

le professionnel retiré des affaires : normalement, dès la cessation de son activité, il perd sa qualité de commerçant mais il se peut qu’au moment de la cessationd’activité, le professionnel soit en CDP et qu’il cède son entreprise à un repreneur. Le législateur a considéré qu’il devait pouvoir être mis en redressement ou en liquidation même après cette cessation d’activité. Cette solution a été retenue en matière de redressement (L631-3) et en matière de liquidation (L640-3). Pour qu’il puisse se voir actionner en redressement ou liquidation, il suffit que tout ou partie de son passif provienne de l’époque où il était encore en activité mais on ne peut pas, alors qu’il est retiré des affaires, indéfiniment l’actionner en redressement ou en liquidation. L’ouverture de la procédure à son égard ne peut être demandée que dans le délai d’un an qui suit la radiation au registre du commerce ou qui suit la cessation d’activité s’il n’était pas commerçant. Ce délai n’est imposé qu’au créancier qui assigne et non au débiteur lui-même. Il s’agira le plus souvent de l’ouverture d’une liquidation car on ne voit pas l’intérêt d’ouvrir une personne de redressement pour une personne qui n’est plus en activité.

l’exploitant décédé : possibilité d’ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation à l’encontre d’un exploitant décédé alors qu’il était en CDP (L631-3 al.2 et L640-3 al.2). Il faut agir dans le délai d’un an à compter du décès. Le tribunal a la possibilité de se saisir d’office. C’est son patrimoine qui sera mis en redressement (si les héritiers veulent poursuivre l’activité) ou en liquidation et non pas celui des héritiers qui n’ont pas forcément la qualité requise pour faire l’objet d’une procédure collective.

  1. les personnes morales.

Toutes les personnes morales de droit privé peuvent faire l’objet d’un redressement judiciaire.

Parfois, le redressement est inenvisageable. C’est le cas si on est en présence d’une société dissoute, en cours de liquidation amiable au cours de laquelle il apparait que la société est en CDP, elle ne pourra pas faire l’objet d’une procédure de redressement car on convertira la liquidation amiable en liquidation judiciaire.

Dans la loi de 2005, on a abrogé l’extension de plein droit de la procédure collective à tous les associés solidairement et indéfiniment responsables du passif social. L’extension est possible mais jamais de plein droit. Elle est parfois inopportune et notamment chaque fois que l’associé solidairement et indéfiniment responsable du passif social n’exploite pas lui-même une entreprise. De même, les dirigeants peuvent être affectés par la procédure collective mais à condition qu’ils remplissent les conditions légales (sanctions pénales, …). Ils s’exposent en outre, à des sanctions patrimoniales mais ceci uniquement en matière de liquidation alors qu’en matière de sauvegarde, toute sanction à l’égard des dirigeants a été supprimée.

  • 2. Les causes d’ouverture de la procédure.

La loi de 2005 n’a pas modifié la cause traditionnelle d’ouverture, l’entreprise doit être en CDP.

  1. la notion de cessation des paiements.

La définition de la cessation des paiements a été à l’origine définie par la jurisprudence puis reprise par la loi de 1985 et L631-1: il s’agit d’une entreprise qui est « dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible ».

Cessation des paiements et insolvabilité. Toute entreprise insolvable est forcément en CDP ie qu’elle a un passif qui est tel que celui-ci ne peut pas être couvert ni par son actif disponible ni par son actif indisponible (qui n’est pas mobilisable à court terme, comme un immeuble). Toutefois, toute entreprise en CDP n’est pas forcément insolvable ie que l’entreprise est dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible (trésorerie de l’entreprise pouvant être mobilisée à très court terme). L’actif indisponible suppose d’être mobilisé un certain temps (actif immobilisé). Une entreprise peut donc être en CDP mais elle peut peut-être couvrir son passif exigible avec l’actif indisponible. Elle n’est pas dans la possibilité d’honorer ses échéances car elle ne dispose pas à court terme de liquidités.

  1. le passif exigible.

Définition : l’ensemble des dettes de l’entreprise, civiles ou commerciales, professionnelles ou liées à sa vie privée. Peu importe le nombre et le montant de ces dettes. Un débiteur peut être en CDP alors qu’il n’a qu’une dette d’un montant correspondant à la définition de la CDP (com.8/03/1994).

Encore faut-il que ces dettes répondent à certaines conditions :dettes certaines, liquides et exigibles (terme échu). Le débiteur est fondé à ne pas payer les dettes qui ne présentent pas ces trois caractères et son attitude ne révèle pas une défaillance de sa part justifiant l’ouverture de la procédure. De même, lorsque la dette est contestée dans son montant ou dans son principe, elle ne peut pas être prise en considération. Attention aux contestations dilatoires.

Dette exigible mais non exigée: encore faut-il pour constater la CDP que le créancier ait procédé à une assignation en paiement demeurée infructueuse. La jurisprudence a pu considérer qu’une telle dette exigible mais non-exigée octroyait un délai de paiement implicite car le créancier ne cherche pas à recouvrer cette dette. Il faut donc une dette exigible mais aussi exigée.

Il en est de même lorsque l’entreprise bénéficie d’un crédit auprès d’une banque ou d’un découvert permanent ou de facilités de caisse (le banquier admet que le compte puisse avoir un crédit négatif sans trop le réclamer), on va considérer que le passif n’est pas exigible sauf si la banque décide de mettre fin à ce crédit (com.18/03/2008).

L’art. L631-1 consacre cette jurisprudence à savoir que si le débiteur poursuivi peut établir l’existence d’un moratoire (délais de paiement) ou peut justifier de l’existence de réserves de crédit qui lui permettent ainsi de faire face au passif exigible, il n’est pas considéré comme étant en CDP.Il faudra en établir la preuve. On a assoupli la situation du débiteur en se contentant d’une preuve établie par le débiteur.

  1. l’actif disponible.

Définition : tous les éléments d’actif qui figurent à l’actif du bilan et qui sont suffisamment liquides pour permettre de faire face aux dettes exigibles. C’est la trésorerie disponible, les valeurs mobilières, les créances dont le débiteur dispose et qui vont être payées rapidement. On peut aussi y inclure les réserves de crédit dont dispose le débiteur dans une banque. La seule réserve c’est que ce découvert est un moyen pour la banque de tenir le débiteur hors de l’eau et de profiter d’une situation car perçoit des intérêts (soutien artificiel de l’entreprise). C’est tout le problème de la responsabilité du banquier.

Exclusion des stocks de marchandises qui demandent du temps pour être vendus et les immeubles.

  1. la mise en œuvre de la cessation des paiements.

Preuve de la cessation des paiements :

C’est celui qui demande l’ouverture de la procédure, celui qui s’en prévaut, qui en fait la preuve et le débiteur est le mieux placé. Pour les créanciers, la preuve de la CDP sera plus dure à administrer. Il faudra un faisceau d’indices qui peut être établi par tout moyen. Ce qu’il faut retenir de l’administration de la preuve, c’est que la CDP ne peut pas se caractériser par le simple refus du débiteur de payer une dette. Le créancier ne peut pas simplement argumenter sur le refus du débiteur de payer une dette pour établir cette preuve.

Un certain nombre d’éléments (faits matériels) sont des indices : lorsque l’entreprise est en difficulté, elle va procéder à des manœuvres plus ou moins licites qui révèlent une situation très détériorée (recours massif à l’emprunt pour payer ses dépenses courantes, émission de traites de complaisance, multiplicité d’actions en justice, sous le feu des voies d’exécution etc.).

Appréciation du tribunal :

Le tribunal aura à se prononcer au vue de ces preuves. Il dispose d’un pouvoir souverain pour apprécier la matérialité des faits. Il s’agit d’une question de fait mais qui n’est pas entièrement laissée au pouvoir souverain du juge du fond car la Cour de cassation se réserve malgré tout le pouvoir de contrôler la qualification de la notion de CDP. Elle ne va pas apprécier la preuve des faits qui sont avancés par le débiteur ou le créancier mais elle va surtout apprécier la qualification que fait le juge de la situation de CDP. S’il y a cessation caractérisée des paiements, il y a lieu de fixer la date de la CDP avec précision.

Date de la cessation des paiements :

Soit la date est fixée, soit on peut la fixer, soit on ne peut pas. Si on ne peut pas fixer la date, la date est celle du jour du jugement d’ouverture mais dans la majorité des cas, la date de CDP est antérieure au jour du jugement d’ouverture d’où la nécessité pour le juge de fixer cette date.

Elle a deux intérêts : elle permet de fixer le point de départ de la période suspecte (entre la date de CDP et la date du jugement d’ouverture). Important car les actes passés pendant cette période sont susceptibles d’être annulés. De plus, certaines sanctions qui frappent les dirigeants visent des faits intervenus après la CDP. Ex : le dirigeant qui ne déclare pas au juge la CDP dans le délai de 45 jours qui suit cette date s’expose à des poursuites de nature correctionnelle.Attention ! En matière de liquidation judiciaire, il y a lieu de faire la preuve de la date de cessation des paiements !

Section 2 : La procédure d’ouverture.

  • 1. Le tribunal compétent.

Principe : c’est le tribunal de commerce, si la société est commerciale (en principe, lieu du siège social), civil si le professionnel n’est pas commerçant etc.

Deux problèmes(possibilité d’extension):

personnes morales fictives: possibilité d’étendre la procédure lorsqu’il apparait que la personne morale à l’égard de qui la procédure a été ouverte est en réalité fictive. Il ne sera pas nécessaire de constater la CDP de la filiale, il suffira de faire une déclaration de fictivité. Cette extension a vocation à s’appliquer en matière de redressement ou de liquidation judiciaire.

confusion des patrimoines: les deux personnes physiques ou morales existent vraiment mais chacune d’entre elles s’est comportée comme s’il n’y avait qu’un seul patrimoine (l’une a assumé les charges de l’autre ou circulation de trésorerie d’une personne à l’autre sans que ces mouvements de fonds ne correspondent à aucune prestation réelle). Il faut établir l’imbrication des passifs et des actifs des deux personnes. L’extension de la procédure permettra de réunir les éléments d’actif et de passif et de n’en faire qu’un seul élément. Un seul tribunal sera compétent.

Ex : deux sociétés qui ont créé une société créée de fait, parfois entre une société-mère et sa filiale (l’unité économique d’un groupe de société ne suffit pas à établir l’imbrication), deux sociétés dont les titres sont détenus par les mêmes personnes (ex : SCI qui loue un immeuble et SA qui y siège)

action en réunion du patrimoine dans le cadre de l’EIRL: une partie du patrimoine est affectée (L12/2010) à l’activité professionnelle mais il peut arriver que les autres patrimoines, dès lorsqu’ils touchent au patrimoine affecté (et non à l’activité économique affectée), fassent aussi l’objet de la procédure collective.

  • 2. Le rôle du tribunal.
  1. la saisine préalable du tribunal.

Cette saisine est imposée par le principe et la nécessité d’une procédure judiciaire auquel obéit toute procédure collective. La différence avec la sauvegarde, c’est que le débiteur est en CDP, ce qui va affecter les conditions de la saisine. En effet, le tribunal peut être saisi par le débiteur, les créanciers et il peut enfin se saisir d’office.

  1. la saisine par le débiteur.

En effet, l’art. L631-4 indique que normalement dès que le débiteur constate la CDP, il doit saisir le tribunal en vue de l’ouverture d’une procédure qui peut être une soit de redressement soit de liquidation. En revanche, le débiteur qui saisit le tribunal pourrait demander l’ouverture d’une procédure de conciliation dans les 45 jours à compter de la date de CDP. Cet acte de saisine par le débiteur constitue en droit une déclaration de CDP (dépôt de bilan) qui est déposée au greffe du tribunal avec d’autres documents (R631-1com.).

Le débiteur en CDP a l’obligation de saisir le tribunal sauf qu’en ce qui le concerne, c’est un droit qui lui est personnel ie qui ne peut pas être exercé par quelqu’un d’autre. Par exemple, un créancier de ce débiteur ne pourrait pas exercer l’action de ce débiteur dans le cadre de l’action oblique prévue par l’art.1166civ. Cette action est un droit personnel du débiteur. On admet cependant que la déclaration que fait le débiteur peut être faite par son mandataire ou par les dirigeants sociaux.

  1. la saisine par les créanciers.

Les créanciers disposent du droit de saisir le tribunal lorsque le débiteur est en CDP, aussi bien en ce qui concerne le redressement judiciaire que la liquidation (L631-5 et L640-5com.). C’est une différence notable par rapport à la procédure de sauvegarde où seul le débiteur peut saisir le tribunal. Le créancier qui saisit le tribunal en vue de l’ouverture d’un redressement ou d’une liquidation doit démontrer l’état de CDP.

Droit discrétionnaire. Ce droit du créancier de demander l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire est discrétionnaire ie qu’il n’est pas susceptible d’abus. Il ne pourrait éventuellement y avoir citation abusive que dans le cas où la CDP ne serait pas établie (ex : un créancier un peu vindicatif qui agit de mauvaise foi ou de façon téméraire alors que le débiteur n’est pas en CDP).

Limitation du droit des créanciers de saisir le tribunal. La loi a limité quelque peu le droit des créanciers de saisir le tribunal. En effet, la demande d’ouverture d’une procédure est en effet exclusive de toute autre demande, ce qui veut dire que normalement, une demande de mise en redressement judiciaire incidente ou subséquente accessoire à une demande initiale en paiement d’une créance devrait être irrecevable (R631-2 al.2). Ex : demande principale en paiement et demande accessoire d’ouverture d’une procédure de RJ ou LJ.

Interdiction des assignations pression. Est condamnée la pratique de l’assignation pression qui est une sorte de chantage consistant à assigner le débiteur en redressement ou liquidation pour l’obliger à payer une dette. Or, normalement cette pratique est interdite mais elle subsiste. 42% des assignations en redressement judiciaire sont rejetées. Ça signifie que l’objet de ces assignations tend à obtenir le règlement d’une créance. En effet, le défaut de paiement d’une créance ne suffit pas à établir la CDP. Ce n’est pas parce qu’un créancier n’a pas été payé qu’il a le droit de demander l’ouverture d’une procédure. Encore faut-il que ce créancier soit en mesure de démontrer l’existence de la CDP.

Qualité de la créance et des créanciers. En revanche, peu importe la qualité de la créance du moment qu’elle permet d’établir la CDP. Peuvent agir devant le tribunal en vue de l’ouverture d’une procédure non seulement les créanciers titulaires d’une créance assortie d’une sûreté (créanciers privilégiés) mais aussi les créanciers chirographaires. La nature de la créance importe peu, c’est la capacité du créancier à démontrer que le débiteur est en CDP. L’existence de la créance doit être certaine ie qu’on ne peut pas demander l’ouverture d’une procédure simplement à partir d’une créance conditionnelle qui n’est pas une créance certaine.

Le créancier qui se trouve placé dans ces conditions a le pouvoir de demander l’ouverture de la procédure. Il agit par voie d’assignation et peut le faire tant que dure l’état de CDP et tant que sa créance demeure impayée. Par exemple, le créancier qui a mis en œuvre des voies d’exécution pour permettre le recouvrement de sa créance qui n’a pas obtenu gain de cause, a la possibilité, en indiquant la nature, le montant de sa créance et les voies d’exécution qui se sont révélées être un échec, d’assigner le débiteur en vue d’une procédure.

  1. la saisine d’office.

C’est une solution traditionnelle confirmée par la loi de 2005 avec quelques adaptations.

Saisine d’office ou saisine par le parquet.Le tribunal peut soit se saisir d’office soit être saisi par le ministère public. Les autorités judiciaires, tant le tribunal que le parquet, disposent de différentes sources d’information qui leur permettent parfois de connaitre l’état de CDP de tel ou tel débiteur. Par exemple, quand le débiteur omet de déposer les comptes au greffe du tribunal, quand s’accumulent les inscriptions de sûretés au greffe du tribunal ou encore lorsque le débiteur fait l’objet de multiple poursuites en paiement. Ce sont des indicateurs qui peuvent laisser penser que le débiteur est en mauvaise position voire en CDP et la loi a prévu dans ce cas que le tribunal peut se saisir d’office.

Hypothèses de saisine. La loi a ainsi précisé les hypothèses de saisine d’office. Par exemple, en cas d’échec d’une conciliation, s’il apparait aux termes de cet échec que le débiteur est en CDP ou que l’on ne parvient pas à surmonter cette CDP, le tribunal peut se saisir d’office et ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation. Le tribunal peut également se saisir au vue des éléments dont il dispose ou bien être saisi par le ministère public sur requête. La CA qui annule un jugement d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation pour vice de forme n’en est pas moins autorisée à ouvrir une procédure et ensuite, cette ouverture étant décidée par elle, renvoyer l’affaire devant le tribunal compétent.

Conséquences de la saisine d’office. Le tribunal peut se saisir d’office au cours d’une instance formée par les créanciers mais il se trouve que l’assignation de ces créanciers est irrégulière. Autre hypothèse : lorsque le tribunal a été saisi par le créancier dans le cadre d’une assignation en paiement et qu’à cette occasion, on a constaté la CDP du débiteur. Là encore, le tribunal peut substituer à l’assignation en paiement l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation. C’est une possibilité dont ne disposent pas les créanciers. Possibilité également pour le tribunal de convertir la procédure de redressement en procédure de liquidation et ce, à tout moment chaque fois qu’il constate que le redressement est impossible (L640-5).

  1. la déclaration d’ouverture de la procédure.

Le champ d’application de cette procédure est équivalent à celui de la sauvegarde : toute personne physique ou morale exerçant une activité professionnelle à titre indépendant. Faillite sur faillite ne vautie qu’il faut attendre la clôture d’une procédure avant d’en ouvrir une autre. Exception récente dans le cas d’une EIRL : il s’agit pour une personne physique d’affecter une partie seulement de son patrimoine à une activité professionnelle. Si l’activité professionnelle à laquelle est affecté ce patrimoine fait l’objet d’une procédure collective, cela n’interdit pas l’ouverture d’une procédure contre un autre patrimoine non-affecté à cette activité (L631-2com issu de la L2010). La loi de 2010 permet en effet à une personne d’affecter plusieurs parties de son patrimoine à des activités professionnelles autonomes.

Contradictoire.Ce principe doit être respecté même en cas de saisine d’office. Chacune des parties au procès doit pouvoir discuter le dossier. Avant d’ouvrir la procédure, le juge doit recueillir des informations complétées par une enquête préalable.

Enquête préalable. Avant d’ouvrir la procédure, le tribunal va procéder, alors qu’il a été saisi ou qu’il s’est saisi, à une enquête préalable. C’est un juge enquêteur qui réalise cette enquête. Cela permettra d’appeler le débiteur avant l’ouverture de la procédure et de l’entendre en chambre du conseil (séance non-publique). Si, aux termes de l’enquête et du rapport du juge enquêteur, le tribunal est amené à ouvrir la procédure, il prononce une décision qui est un jugement constitutif (créé un état nouveau) et constate que le débiteur est en CDP (justifie l’ouverture de la procédure). Ce jugement constitutif est opposable à tous et exécutoire de plein droit à titre provisoire sauf effet suspensif en cas d’appel ie que si le jugement d’ouverture a été prononcé, même s’il est fait appel, il est exécutoire de plein droit. L’effet suspensif ne peut intervenir que sur décision expresse du président de la CA. Cette particularité est liée au caractère économique de la décision du tribunal. Le législateur est conscient que lorsque l’entreprise est en difficulté, il ne faut pas tarder à régler les problèmes. Ce jugement fait l’objet d’une publicité dans les mêmes conditions que la procédure de sauvegarde.

Période d’observation. Si le débiteur est en CDP, il va en même temps ouvrir une période d’observation au cours de laquelle on fera l’état des lieux. On dresse l’état des créances et en profite pour tenter d’élaborer un plan de redressement judiciaire ; si tel n’est pas le cas ie que si on constate que le redressement est impossible, le jugement d’ouverture pourra être converti en liquidation judiciaire. Cette période d’observation a une durée de 6 mois prorogeable une fois voire, exceptionnellement, une seconde fois pour une durée fixée par le tribunal.

Fixation de la date de cessation des paiements par le tribunal. C’est une autre attribution du tribunal dans la décision d’ouverture. Il fixe la date de CDP et celle de la période suspecte qui se situe entre la date de CDP et celle du jugement d’ouverture. Cette fixation n’est pas obligatoire : s’il ne fixe pas la date de CDP, la loi indique que la cessation est réputée être intervenue au jour du jugement d’ouverture mais c’est une hypothèse exceptionnelle (L631-8 ou L641-1§4).

L’autorité de chose jugée de la décision d’ouverture de la procédure de redressement ne joue pas car cette date de CDP peut être reportée une ou plusieurs fois par le tribunal. Cette date décidée par le tribunal est antérieure au jugement d’ouverture mais peut ensuite être reportée dans le temps par le tribunal une ou plusieurs fois sans que cette date ne puisse être antérieure de plus de 18 mois à la date du jugement d’ouverture. Sauf fraude de la part du débiteur, cette période suspecte ne peut pas être reportée à une date antérieure à l’homologation de la conciliation. Lors de l’homologation, le tribunal a dû vérifier que le débiteur n’était pas ou plus en CDP donc s’il a vérifié cela, on comprend que la date de CDP ne puisse pas aller au-delà de la date d’homologation qui donne autorité de chose jugée à l’accord.

Cette demande de modifications peut être faite dans un délai d’un an à compter du jugementd’ouverture. La décision de report est fréquente car lorsque le tribunal ouvre la procédure de redressement, le plus souvent il ne dispose pas de toutes les informations nécessaires pour statuer de manière définitive sur la date de CDP. Or, au cours de la période d’observation, il va recueillir d’autres informations lui permettant de justifier le report de la date de CDP.

Le jugement comporte la nomination de certains organes : juge commissaire, administrateur, mandataire, …, qui obéissent aux mêmes conditions de statut que dans la sauvegarde. Ils sont indépendants et peuvent être remplacés. Pour les entreprises de taille modeste, l’administrateur n’est pas obligatoire. Il faudra nommer des contrôleurs par le biais du juge commissaire et les salariés désigneront leur représentant.

En cas deconversion de la sauvegarde en redressement: l’entreprise ayant été déclarée en CDP a été mise en redressement et au cours de la période d’observation, il y a conversion de la sauvegarde en redressement ou liquidation.

  • la demande de modification de la date de CDP (report) doit intervenir dans le délai d’un an à compter du jugement d’ouverture. Lorsqu’il y a eu conversion, le point de départ du délai d’un an est celui du jugement de conversion (et non du jugement d’ouverture, ord.2008).
  • prise en considération de la date du jugement d’ouverture de la sauvegarde pour calculer la période suspecte (art. 77 ord.2008, L631-2 al.2, L631-8). Pas de prise en considération du jugement de sauvegarde.

Le jugement d’ouverture qui concerne la décision sur la date de CDP n’est pas revêtu de l’autorité de la chose jugée. Une telle décision de report de la date de CDP n’est pas rare car au moment où il ouvre la procédure, même s’il a fait procéder à une enquête par un juge enquêteur, le tribunal ne dispose pas toujours des éléments nécessaires pour statuer sur la date de la CDP. C’est à l’occasion de l’état des créances qu’on va se rendre compte que la CDP remontait plus loin dans le temps.

Par ailleurs, le jugement d’ouverture ne peut pas comporter la nomination des différents organes : un juge commissaire, un administrateur, un mandataire judiciaire, avec des procédures de remplacement. Pour les entreprises de taille modeste, il n’est pas obligatoire de nommer un administrateur judiciaire.

Les valeurs mobilières détenues par les dirigeants, à compter de l’ouverture de la procédure, sont déclarées incessibles mais l’art.631-10 a prévu que le tribunal pouvait décider des conditions d’une éventuelle cession.

Chapitre 2 : Le déroulement de la procédure.

Section 1 : L’organisation de la procédure.

  • 1. Les organes judiciaires.

Le tribunal. Ses pouvoirs sont équivalents à ceux dont dispose le juge en matière de sauvegarde : pouvoir de nommer les organes, adoption du plan. Il est compétent pour convertir la procédure, proroger sa compétence et pour tous les litiges concernant la procédure sauf les litiges qui relèvent de la compétence exclusive d’une autre juridiction (ex : CPH ou pénales). Pour les voies de recours (L661-1), le délai d’appel de la décision est de 10 jours à compter du jugement d’ouverture (admises de manières restrictive pour ne pas faire trainer la procédure).

Le juge commissaire. Pouvoirs identiques à ceux qu’il a en matière de sauvegarde : pouvoir d’information mais aussi de décision. Ces décisions sont prises par ordonnance aux termes d’une procédure contradictoire et sont susceptibles de recours devant le tribunal dans les 8 jours suivant la notification de l’ordonnance du juge commissaire. Pareil qu’en matière de sauvegarde, le débiteur participe à l’élaboration du plan (en matière de sauvegarde, c’est le débiteur qui élabore le plan avec l’assistance de l’administrateur). Cette participation est rémunérée et le montant est fixé par le juge commissaire. Le débiteur peut demander des subsides pour lui-même et sa famille.

Le ministère public. Il a un pouvoir de saisine d’office du tribunal lorsqu’il constate la CDP en vue de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire. Ce pouvoir est plus important que dans le cadre de la sauvegarde car il peut saisir le tribunal et ce faisant il peut demander le prononcé d’office de l’ouverture d’une procédure (redressement ou liquidation). En matière de sauvegarde, seul le débiteur peut saisir le juge. Il a le pouvoir d’influer sur le sort de l’entreprise : il peut demander le remplacement de certains organes de la procédure, la prolongation ou la cessation de la période d’observation, la poursuite des dirigeants lorsqu’ils ont commis des fautes (demande au tribunal) ou leur condamnation à certaines sanctions professionnelles lors d’une faillite personnelle. Il dispose de moyens d’information dont il disposait déjà dans le cadre de la procédure de sauvegarde.

  • 2. Les organes non-judiciaires.

Le mandataire judiciaire :

Il représente l’intérêt collectif des créanciers. Il doit établir l’état des créances et participe à la vérification de celles-ci, il reçoit les déclarations de créances et consulte les créanciers sur les propositions de règlement du passif, il peut être auditionné par le tribunal et exercer des voies de recours contre les décisions du tribunal. De manière générale, il a qualité pour intenter toute action en justice dans l’intérêt collectif des créanciers. L’exercice de ces attributions peut engager sa responsabilité.

L’administrateur judiciaire :

Ses attributions sont plus étendues en matière de redressement judiciaire qu’en matière de sauvegarde notamment chaque fois que l’administrateur se voit investit d’une mission de représentation par le tribunal car, en principe, il n’a qu’une mission de surveillance du débiteur en matière de sauvegarde. Il peut se voir adjoindre des experts par le tribunal.

Pour le reste, ses attributions sont comparables à celles de l’administrateur en matière de sauvegarde : il peut prendre des mesures conservatoires, faire fonctionner les comptes bancaires, décider de la continuation des contrats en cours, recevoir les revendications des biens meubles exercées par les créanciers, prononcer d’éventuels licenciements. Enfin, un certain nombre d’actions dont il dispose sont partagées avec le mandataire judiciaire (action en nullité des actes accomplis durant la période suspecte, action en prononciation de sanctions contre les dirigeants sociaux etc.).

Il est maitre d’œuvre du plan de redressement judiciaire qu’il élabore avec l’assistance du débiteur. C’est lui qui va proposer au débiteur soit la continuation de l’entreprise soit un plan de cession. Si le tribunal adopte le plan, il va participer à la mise en œuvre de celui-ci et sera nommé commissaire à l’exécution du plan. Selon l’art. L631-13, dès l’ouverture de la procédure de redressement, l’administrateur peut recevoir des offres de la part de repreneurs éventuels.

La représentation des salariés : mêmes attributions qu’en matière de sauvegarde.

Les contrôleurs :

Ce sont des créanciers nommés par le tribunal pour suivre le déroulement de la procédure et qui peuvent demander au mandataire judiciaire un certain nombre d’informations. Ils peuvent aussi demander la cessation de l’activité et le prononcé d’une liquidation. On note un pouvoir particulier : celui de demander que soit prononcée la liquidation judiciaire lorsque les conditions de cette liquidation sont réunies (redressement impossible). Mêmes conditions et attributions qu’en matière de sauvegarde.

Section 2 : L’administration de l’entreprise.

Démarre une période d’observation dans laquelle pourra être poursuivie l’activité de l’entreprise et sera préparé le plan de redressement. La différence entre la sauvegarde et le redressement réside dans le fait que dans un cas, l’entreprise n’est pas en cessation des paiements et dans l’autre oui.

  • 1. La poursuite de l’activité de l’entreprise.
  1. l’exercice du pouvoir pendant la période d’observation.
  2. les pouvoirs du débiteur.

Le législateur a procédé là aussi par copier-coller. Le débiteur continue à exercer sur son patrimoine, les actes d’administration et de disposition pendant la période d’observation (L631-14 renvoi à L622-3). La différence, c’est que ces pouvoirs sont soumis à un contrôle dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire car l’entreprise est en CDP. La liberté dont bénéficie le débiteur pour gérer l’entreprise est sensiblement réduite, encore plus lorsqu’un administrateur est désigné.

Dans un certain nombre d’hypothèses, il n’y pas d’administrateur car dans les entreprises de taille modeste (chiffre d’affaire < 3 millions d’euros et < 20 salariés), la nomination de l’administrateur est facultative. Quand le débiteur exploite une EIRL, la fixation de la rémunération du juge commissaire va tenir compte des revenus de que ce débiteur perçoit au titre des autres patrimoines qui ne sont pas visés par la procédure. Dans l’EIRL, seule une partie du patrimoine de l’activité professionnelle est affectée par la procédure collective. Le débiteur peut recevoir des rémunérations pour les patrimoines non-visés. Le débiteur peut accomplir un certain nombre d’actes seul, d’autres actes nécessitent une assistance, d’autres sont interdits, d’autres sont autorisés par exception.

Incessibilité des valeurs mobilières qui donnent accès au capital dont sont touchés les dirigeants. Ces valeurs mobilières vont être bloquées sur un compte spécial (L631-10). Le tribunal peut éventuellement décider de la cession dans des conditions déterminées par lui (cf. ce qui a été vu en matière de sauvegarde).

  1. les pouvoirs de l’administrateur.

La mission de l’administrateur peut être élargie ou modifiée par le tribunal. Cas de figure :

  • soit le tribunal charge ensemble ou séparément le ou les administrateurs d’assister le débiteur pour certains actes de gestion ou pour certains d’entre eux, l’administrateur participe aux côtés du débiteur à l’accomplissement d’actes juridiques qu’implique la gestion de son patrimoine (cela se traduit par une double signature).
  • soit le tribunal charge l’administrateur d’assurer seul et entièrement la gestion de l’entreprise (lorsque par exemple, le débiteur a fait preuve d’incompétence ou a commis des fautes). On assiste à un mécanisme de représentation du débiteur qui équivaut à son dessaisissement comme en matière de liquidation judiciaire à la différence que dans ce dernier cas, le dessaisissement est de plein droit alors qu’en redressement, il suppose une décision particulière du tribunal. Le débiteur doit faire fonctionner sous sa signature les comptes bancaires. Ainsi, tous les actes accomplis par le débiteur en violation de cette assistance ou de cette représentation, sont inopposables à la procédure. Bien entendu, l’administrateur représentant le débiteur n’en n’est pas moins tenu au respect des obligations légales et conventionnelles qui incombent normalement au débiteur. Le mécanisme de continuation des contrats en cours est calqué sur celui de la procédure de sauvegarde.

Le mécanisme de continuation des contrats en cours est calqué sur celui de la procédure de sauvegarde : l’administrateur décide seul de la continuation des contrats (L631-14 renvoi à L622-13).

  1. les évènements pouvant ponctuer la période d’observation.

Ce sont des évènements qui vont conduire à une remise en cause de la procédure ouverte à l’origine. En effet, l’organisation des procédures collectives tant par la loi de 2005 que par l’ordonnance de 2008, se caractérise par sa souplesse et par diverses passerelles instituées entre ces procédures. Une fois la procédure de redressement ouverte, on peut considérer que rien n’est acquis.

Capacité de financement suffisante. Pour que la procédure puisse se poursuivre normalement, il faut que l’entreprise dispose des capacités de financement suffisantes (L631-15com.). Dans les 2 mois à compter de ce jugement d’ouverture, le tribunal doit vérifier que le débiteur dispose des capacités de remboursement suffisantes.

Conversion de la procédure. A tout moment de la période d’observation, le tribunal peut prononcer la conversion en procédure de liquidation à la demande des organes ou d’office si les conditions de L640-1 sont remplies (redressement impossible). Il met alors fin à la période d’observation et à la mission de l’administrateur qui pourra alors devenir liquidateur. Il peut prévoir la possibilité d’un maintien temporaire de l’activité dans le cadre de la liquidation judiciaire et peut ordonner la cessation partielle de l’activité.

Par ailleurs, sur le plan social, des licenciements peuvent intervenir au cours de la période d’observation. Là où la sauvegarde applique la procédure de licenciements économiques, la liquidation est soumise à une procédure particulière : les licenciements sont autorisés par le juge commissaire et prononcés par l’administrateur. Ces licenciements doivent présenter un caractère urgent, inévitable et indispensable. L’administrateur, avant la saisine du juge commissaire, doit consulter les institutions représentatives du personnel et doit informer l’autorité administrative compétente (inspection du travail) et ensuite, ayant justifié de toutes ces diligences, il saisit le juge commissaire en demandant l’autorisation de prononcer les licenciements et, bien entendu, doit en même temps proposer au juge commissaire l’indemnisation des salariés et leur reclassement.

  • 2. La préparation du plan de redressement.

Elle est quasiment identique à celle organisée dans le cadre de la procédure de sauvegarde (cf. partie sur la sauvegarde).

Particularité : possibilité de cession totale ou partielle des actifs dès l’ouverture de la procédure. Les repreneurs potentiels sont admis dès l’ouverture de la procédure, à faire des offres à l’administrateur qui va préparer le plan mais s’il doit y avoir un plan de cession. Ce plan de cession est calqué sur le plan de cession tel qu’il est organisé dans le cadre de la liquidation judiciaire.

Chapitre 3 : La situation des partenaires de l’entreprise.

Là encore, cette situation varie peu d’avec la situation en matière de sauvegarde. Les textes en matière de redressement renvoient pour l’essentiel à la sauvegarde (L631-18 qui renvoie aux chapitres 4 et 5 du titre 2 sur le sort des créances). Il en est de même pour les salariés qui voient leur créance de salaire soumise au même régime. Avec une différence, la couverture de l’AGS en ce qui concerne le paiement des créances salariales est beaucoup plus étendue en matière de redressement judiciaire qu’elle ne l’est en matière de sauvegarde. Certaines sanctions spécifiques en matière de redressement judiciaire peuvent frapper les dirigeants.

Section 1 : Les créanciers.

Ils représentent le passif, les créances, les dettes mais il faut prévoir un plan d’apurement du passif pour se prémunir contre les créanciers souhaitant récupérer leurs biens. Il faut donc protéger l’actif.

  • 1. Le régime gouvernant le passif.

Similitudes avec la procédure de sauvegarde. Même distinction entre créance antérieure et créance postérieure. Pour les créances antérieures, on retrouve le régime de déclaration et de vérification mais aussi le régime de restriction aux droits des créanciers pendant la période d’observation (interdiction de paiement des créances antérieures sauf exception, interruption ou interdiction des poursuites individuelles ayant pour objet le paiement d’une somme d’argent, interdiction des inscriptions et publications de sûretés, arrêt du cours des intérêts).

Différences avec la procédure de sauvegarde. Les personnes physiques qui se sont engagées aux côtés du débiteur sous sauvegarde peuvent se prévaloir de l’arrêt du cours des intérêts. Il n’en est pas de même en matière de redressement ou de liquidation judiciaire : ces personnes ne bénéficient pas de l’arrêt du cours des intérêts en matière de liquidation ou de redressement ie qu’on pourra poursuivre les cautions et les intérêts continueront de courir.

En revanche, les mêmes personnes visées bénéficient en matière de redressement et de sauvegarde de la suspension des poursuites individuelles jusqu’au jugement qui arrête le plan. Pendant la sauvegarde comme pendant le déroulement du redressement, jusqu’au jugement arrêtant le plan, on ne peut pas poursuivre le débiteur ni les personnes engagées à ses côtés. Le tribunal peut même leur accorder des délais de paiement dans la limite de 2 ans. Cela signifie que ces personnes physiques ayant apporté une garantie à l’entreprise ne pourront être poursuivies qu’à compter du jugement arrêtant le plan mais pour la totalité du plan, des dettes. On s’aperçoit que tout a été fait dans la loi pour orienter le débiteur en difficulté plutôt vers une procédure de sauvegarde que vers une procédure de redressement. Ces personnes engagées aux côtés du débiteur sont souvent les dirigeants eux-mêmes. En matière de redressement, le dirigeant-caution ne pourra pas être poursuivi pendant le déroulement de la procédure mais le cours des intérêts continuera à courir et une fois le plan adopté, il pourra être poursuivi par les créanciers. Les avantages du débiteur sont plutôt en faveur de la procédure de sauvegarde.

Innovationà l’art. L631-16 qui tend à accélérer la procédure : c’est l’hypothèse où, au cours de la période d’observation, apparaitraient des sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers. Cette situation est très marginale en pratique car en général, les chefs d’entreprise attendent le dernier moment pour déclarer leurs créances. Le tribunal peut arrêter la période d’observation à la demande du débiteur ou des organes de la procédure.

Quant aux créances postérieures, elles sont soumises au même régime qu’en matière de sauvegarde. Distinction entre les créances utiles et les autres créances. Dans l’ordonnance de 2008, on a supprimé une condition particulière : pour faire partie de ces créances postérieures, il n’est plus nécessaire qu’elle soit née pour les besoins de la procédure.

  • 2. La préservation de l’actif.

2 mécanismes :

  • mécanisme défensiflié aux actions en revendication des biens meubles qui pourraient être exercées par les créanciers. En matière de sauvegarde, les créanciers qui ont livré un bien ou qui ont une créance en lien avec un bien détenu par le débiteur, ont la possibilité de revendiquer ces biens meubles. Les textes sont identiques à ceux de la sauvegarde (L631-18 renvoi à L624-9). En revanche, il y a un mécanisme de revendication dans lequel le débiteur peut s’opposer ie qu’il peut se défendre contre les éventuelles revendications des créanciers.
  • mécanisme offensifest propre au redressement judiciaire et permet aux organes de la procédure de faire annuler certains actes accomplis pendant la période suspecte. C’est un mécanisme qui permet, par une action exercée par les organes de la procédure, de réintégrer dans le patrimoine du débiteur des biens qui n’auraient jamais dû en sortir. C’est l’action en nullité des actes accomplis pendant la période suspecte : pendant cette période, le débiteur peut avoir été conduit à faire des actes qui vont priver les créanciers de leur garantie et donc la loi a considéré que les actes accomplis pendant cette période étaient susceptibles d’être annulés. Il peut aussi exercer l’action paulienne, agir contre les débiteurs du débiteur quand certains actes ont été accomplis en fraude des droits des créanciers. La loi de 2005 a institué un régime spécial de nullité en cas d’ouverture d’une procédure collective. Ce régime n’est pas applicable en matière de sauvegarde car il n’y a pas de période suspecte (pas de CDP). L’administrateur cherche à réintégrer dans le patrimoine du débiteur des biens qui n’auraient jamais dû en sortir.

Régime juridique de droit commun : nullités de plein droit et nullités facultatives.

  1. le régime juridique commun.

Cette action en nullité peut être exercée par les organes de la procédure devant le tribunal qui a ouvert la procédure. Aucun délai impératif n’est exigé pour agir tant que la procédure est en cours et même si la créance a été admise de manière définitive. Dans un arrêt du 7/12/1999, la Cour a indiqué que l’on pouvait agir même si la créance a été admise et vérifiée. La nullité va alors produire des effets à l’égard de tous les créanciers. Chaque fois qu’un acte est annulé, ça permet de faire revenir dans le patrimoine du débiteur des biens qui n’auraient jamais dû en sortir et donc de l’actif. La nullité produit des effets à l’égard des tiers. S’il y a nullité, le transfert de propriété sera annulé ; si un bien a été vendu puis revendu, le sous acquéreur devra restituer le bien. La nullité donnera lieu à d’éventuelles restitutions qui pourront être réciproques si l’acte annulé a fait l’objet d’un contrat synallagmatique.

Le législateur a énuméré une liste limitative de comportements répréhensibles (pendant la période suspecte) qui peuvent donner lieu soit au prononcé d’une nullité de plein droit soit au prononcé d’une nullité facultative.

  1. les nullités de plein droit.

Elles sont envisagées par l’art. L632-1§1. Ce sont les cas de nullités obligatoires qui doivent être prononcées chaque fois que les conditions légales sont remplies. Le tribunal n’a pas d’appréciation en la matière.

Encore faut-il que l’acte puisse être qualifié et puisse entrer dans une des catégories énumérées par l’art. L632-1.

Deux conditions nécessaires.

– condition liée à la durée de la période suspecte, l’acte doit avoir été accompli pendant la période suspecte. La preuve peut se faire par tout moyen s’il s’agit d’un acte de commerce.

condition liée à la nature de l’acte. Dans l’état de l’ordonnance de 2008, il y a 10 catégories d’actes qui sont visées par l’art. L632-1. Ce sont par exemple tous les actes à titre gratuit accomplis pendant la période suspecte (donations) ou encore les contrats léonins (contrat commutatifs déséquilibrés ie un contrat prévoyant des obligations réciproques mais où le créancier est largement avantagé), tout paiement d’une dette non-échue ou échues par des procédés anormaux. Le paiement ne doit pas avoir lieu par un moyen usuel.

Tout dépôt ou consignation d’une somme d’argent équivaut à la constitution d’une sûreté en période suspecte. La constitution de toutes sûretés réelles sur les biens du débiteur pour des dettes contractées n’est faite que pour calmer les créanciers. Toute autorisation ou levée d’option accomplies pendant la période suspecte (stock option) consiste à permettre à certains dirigeants salariés de la société de bénéficier de remise d’action gratuite quand la société ne va pas bien. Ces avantages peuvent avoir des incidences sur la situation du débiteur. Est nul tout transfert de droit ou de bien dans un patrimoine fiduciaire ou tout avenant à un contrat de fiducie conclu pendant la période suspecte.

Il faut prouver l’acte car il doit être fait dans les 18 mois à partir de la date du jugement. Cette date peut être contestée. Pour faire l’objet d’une nullité, l’acte doit être intervenu depuis la cessation des paiements. Il n’est plus obligatoire que l’acte soit fait par le débiteur ie que l’on peut annuler plus d’actes qui auraient été accomplis par un tiers au profit du débiteur et qui auraient une incidence sur son patrimoine. Avant, ces actes étaient exclus car non réalisés par le débiteur. Concernant l’EIRL, il s’agirait pour le débiteur pendant la période suspecte de détourner un bien du patrimoine affecté à l’entreprise ie appauvrissement du patrimoine.

  1. les nullités facultatives.

Différents types d’actes peuvent être annulés. Les nullités facultatives sont visées par deux textes :

  • L632-1§2 vise les actes à titre gratuit accomplis dans les 6 mois qui précèdent la date de cessation de paiement, le début de la période suspecte. Ils sont considérés comme graves par la loi. On craint que le débiteur ne cherche à échapper à la revendication de ses créanciers.
  • L632-2 vise les paiements des dettes échues et tous les actes à titre onéreux accomplis après la date de cessation des paiements. Le tribunal peut annuler ces actes si ceux qui ont traité avec le débiteur avaient connaissance de la cessation des paiements.
  • L632-2al.2 autorise également le prononcé d’une nullité facultative pour d’autres actes que ceux envisagés jusque-là (nouveauté L2005). Par exemple, la saisie attribution (voie d’exécution permettant à un créancier muni d’un titre exécutoire de se faire payer de manière forcée) accomplie pendant la période suspecte alors que le créancier dispose d’un titre exécutoire, est susceptible d’être annulée lorsque le créancier avait connaissance de la CDP. De même, l’avis à tiers détenteur est une sorte de saisie attribution particulière aux créanciers publics (Trésor public…). Cet avis à tiers détenteur équivaut à une sorte de saisie attribution. Il en est de même lorsque cet avis est émis pendant la période suspecte et qu’il est démontré que le créancier public connaissait l’état de CDP du débiteur. Le juge peut dans ce cas être saisi pour prononcer la nullité de cet acte.

Exception. L632-3 : les nullités de plein droit ou les nullités facultatives, lorsqu’elles sont prononcées par le juge, comportent le risque de mettre en cause le mécanisme du paiement par un effet de commerce. Le droit cambiaire est organisé de telle manière qu’il cherche à assurer au maximum le paiement du créancier. Si on prononce la nullité d’un acte qui a donné lieu à un effet de commerce, cette nullité risque de remettre en cause le paiement qui résulte de ce mécanisme cambiaire.

D’où une exception créée par l’art. L632-3com. à savoir qu’est valide le paiement d’une dette même non-échue effectué pendant la période suspecte au moyen d’un effet de commerce. Une fois que le paiement a été autorisé, le texte autorise certains organes de la procédure à effectuer une action en rapport qui tend à faire revenir la somme payée dans le patrimoine du débiteur chaque fois que le bénéficiaire avait connaissance de la CDP au moment où il a été payé.

Le critère de la connaissance de la CDP par le créancier va jouer non seulement en cas de nullité facultative car c’est l’une des conditions du prononcé de la nullité par le juge lorsqu’il est établi que le créancier connaissait l’état de CDP mais c’est aussi un critère de succès d’une éventuelle action en rapport lorsque le créancier bénéficiaire d’un paiement par effet de commerce connaissait l’état de CDP. Tout un contentieux s’est développé sur l’appréciation par le juge de la connaissance de l’état de CDP. C’est une question de fait laissée à l’appréciation du pouvoir souverain des juges du fond.

Section 2 : Les dirigeants de l’entreprise.

Leur situation s’est améliorée à la suite de la loi de 2005 et de l’ordonnance de 2008. Il ne subsiste que les sanctions de faillite personnelle et de sanctions pénales. Ils ne peuvent plus faire l’objet d’une action en comblement du passif depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance de 2008 car elle a abrogé la possibilité de déclencher une action en comblement du passif chaque fois qu’on se trouve en présence d’un plan de redressement judiciaire qui avait fait l’objet d’une résiliation. Cette action est réservée à la liquidation. D’autres mesures peuvent être prises.

  • 1. Les mesures professionnelles.
  1. les dirigeants visés.

Sont assimilés aux dirigeants, les commerçants personnes physiques mais aussi tous les dirigeants de société (de droit ou de fait mais aussi les dirigeants de toute personne morale de droit privé affectée par une procédure collective).

Ces dispositions ne sont pas applicables aux personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante règlementée car elles sont soumises, dans le cadre de leur profession, à des règles disciplinaires, des règles de déontologie. Chaque fois qu’elles commettent des infractions aux règles de déontologie, elles vont être frappées sur le plan disciplinaire. Si on leur appliquait les sanctions du code de commerce, on serait en présence d’un mécanisme de double peine. C’est ce que l’on a voulu éviter aux professions libérales.

Les dirigeants visés sont ceux ayant accomplis un certain nombre d’agissements répréhensibles. Les articles L653-3, L653-4, L653-5 et L653-8 énumèrent les différents agissements répréhensibles pouvant donner lieu à ces sanctions d’ordre professionnel. Par exemple, peuvent être sanctionnés par la faillite personnelle, les dirigeants ou toute personne visée par l’art. L653-1 qui aurait poursuivi abusivement une exploitation déficitaire ne pouvant conduire qu’à la CDP ou toute personne physique qui aurait détourné tout ou partie de son actif etc.

Le tribunal va être saisi par l’organe de la procédure. Il avait la possibilité de se saisir d’office mais cette possibilité n’a pas été reconduite. Il statue en audience publique. Publicité not au casier judiciaire de la personne sanctionnée.

  1. les sanctions infligées.

Les sanctions infligées font l’objet de publicité au casier judiciaire, la même publicité que pour le jugement d’ouverture.

La faillite personnelle :

L653-2 : sanction qui a pour objet d’interdire à une personne physique de diriger une entreprise quelle qu’elle soit. Vise toute entreprise ayant une activité économique donc ça peut aussi être une association si elle est considérée comme exerçant une activité économique.

Cette sanction conduisant à une interdiction a un caractère facultatif. Le texte indique que le tribunal peut prononcer une telle sanction. Plutôt que de prononcer la faillite personnelle (sanction très générale), le tribunal peut moduler cette sanction en limitant sa décision au prononcé de l’interdiction de diriger toute entreprise ou certaines d’entre elles. En quelque sorte, le tribunal, dans le prononcé de sa sanction, peut se montrer sélectif. Par exemple, il pourra interdire au dirigeant ou au commerçant personne physique de diriger telle entreprise de tel secteur ou toutes entreprises dans tel secteur commercial etc. Cette sanction, qu’il s’agisse d’une sanction générale (faillite personnelle) ou d’une interdiction particulière, peut faire l’objet de sanctions secondaires.

Les sanctions secondaires :

Les dirigeants sanctionnés peuvent être privés de leur droit de vote au sein des assemblées de la personne morale soumise à la liquidation ou au redressement. Ils détiennent des actions ou parts sociales mais du fait de l’interdiction, ils ne peuvent plus voter. Le droit de vote est exercé dans ce cas par un mandataire désigné par le tribunal. Au terme de la procédure de liquidation judiciaire, les créanciers vont retrouver leur droit de poursuite individuel à l’égard des débiteurs frappés de faillite personnelle. Le droit de poursuite des créanciers disparait sauf exception. En effet, à ce stade, le débiteur sera généralement insolvable. Selon l’art. L653-10, la faillite personnelle peut s’accompagner de l’incapacité d’exercer une fonction publique élective. Le tribunal désignera ces fonctions électives (L653-10).

La durée des mesures :

La durée des mesures est fixée par le tribunal et celle de la faillite personnelle ne peut être supérieure à 15 ans. Au terme de la durée prononcée, elle cesse de plein droit. Le tribunal peut ordonner l’exécution provisoire de la décision en attendant qu’il soit statué sur les voies de recours éventuelles. Les sanctions secondaires vont suivre la sanction principale (interdiction sélective ou faillite personnelle) sauf que l’incapacité d’exercer une fonction publique élective ne peut être supérieure à 5 ans (L653-10). Ces mesures peuvent prendre fin avant le terme fixé si intervenait un jugement de clôture de la procédure pour extinction du passif ou encore sur demande de l’intéressé.

  • 2. Les sanctions pénales.

Les difficultés que sont rencontrées par les professionnels, personnes physiques ou dirigeants de personnes morales, peuvent avoir été l’occasion pour ces personnes d’accomplir un certain nombre d’actes sanctionnés pénalement.

Au fil des réformes, on constate un allègement des sanctions pénales, une certaine dépénalisation du droit des affaires. Quant aux infractions qui subsistent, elles sont rarement poursuivies. Libéralisme à l’égard des commerçants, entrepreneurs et dirigeants de personnes morales. Le fondement de ce libéralisme est de dire qu’il ne faut pas décourager les professionnels, faire peser sur eux une épée de Damoclès et surtout il ne faut pas les décourager de déposer leur bilan car s’ils savent qu’en déposant leur bilan, ils risquent des sanctions pénales sévères, ils vont retarder l’échéance et risquent de s’enfoncer d’avantage et d’être sanctionnés plus tard. Conflit d’intérêts (public avec la sanction et privé).

  1. la banqueroute.

C’est l’infraction la plus importante intervenant dans le cadre d’une procédure collective. L’origine de ce mot est italienne : lorsqu’un entrepreneur défaillant ne remboursait pas ses créanciers, on cassait son étal. Cette infraction est prévue à l’art. L654-1.

Les personnes viséessont les mêmes que celles visées par la faillite personnelle : tous les professionnels personnes physiques, dirigeants de personnes morales, personnes morales depuis le NCP, commerçantes ou non-commerçantes, professions libérales règlementées ou non-règlementées etc., qu’ils soient auteurs ou complices.

Condition d’ouverture. Pour que la banqueroute puisse être prononcée par le tribunal, une procédure de redressement ou de liquidation doit avoir été ouverte. Par exemple, si un dirigeant ou un commerçant personne physique a commis des actes visés par l’infraction de banqueroute mais avant l’ouverture d’une procédure de conciliation, il ne pourrait pas être poursuivi pour banqueroute.

Faits constitutifs. L654-2 énumère une série de faits constitutifs de la banqueroute: dissimulation ou détournement de tout ou partie de l’actif du débiteur, augmentation frauduleuse du passif du débiteur, comptabilité fictive etc.

Procédure. Si les faits sont avérés, la juridiction répressive est saisie selon les règles de la procédure pénale soit par le ministère public, soit un organe de la procédure peut se constituer partie civile voire même la majorité des créanciers nommés contrôleurs peuvent se constituer partie civile (compétence exclusive). C’est une action soumise à prescription à compter du jour de l’ouverture de la procédure (et non de commission des faits).

Peines. Les peines encourues sont de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende applicables aux auteurs et aux complices (L654-3). La condamnation à une banqueroute peut être l’occasion de condamner à une faillite personnelle sauf si la personne incriminée a déjà fait l’objet de cette sanction (retour de la compétence du Tcom).

A côté de la banqueroute qui est une infraction propre au redressement ou à la liquidation, il y a d’autres infractions pouvant être commises à l’occasion d’une procédure collective.

  1. les autres infractions.

La CDP peut avoir été l’occasion de commettre des infractions de droit commun (vol, escroquerie, abus de confiance). La loi de 2005 a repris toute une série de dispositions spéciales prévues par L654-8 et suivants. Il y a bon nombre d’infractions qui peuvent être poursuivies à cette occasion.

L654-8. Est passible d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros le fait :

pour toute personne mentionnée à l’art. L654-1, de passer un acte ou d’effectuer un paiement en violation des dispositions de l’art. L622-7

pour toute personne mentionnée à l’art. L654-1, d’effectuer un paiement en violation des modalités de règlement du passif prévues au plan de sauvegarde ou au plan de redressement ou de faire un acte de disposition sans l’autorisation prévue par l’art. L626-14

– pour toute personne, pendant la période d’observation ou celle d’exécution du plan de sauvegarde ou du plan de redressement, en connaissance de la situation du débiteur, de passer avec celui-ci l’un des actes mentionnés aux 1° et 2° ou d’en recevoir un paiement irrégulier

pour toute personne de procéder à la cession d’un bien rendu inaliénable en application de l’art. L642-10.

L654-9. Est puni des peines prévues par les articles L654-3 à L654-5 le fait :

– dans l’intérêt des personnes mentionnées à l’art. L654-1, de soustraire, receler ou dissimuler tout ou partie des biens, meubles ou immeubles de celles-ci, le tout sans préjudice de l’application de l’art.121-7 du code pénal

– pour toute personne de déclarer frauduleusement dans la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, soit en son nom, soit par interposition de personne, des créances supposées

– pour toute personne exerçant une activité commerciale, artisanale, agricole ou toute autre activité indépendante, sous le nom d’autrui ou sous un nom supposé, de se rendre coupable d’un des faits prévus à l’art. L654-14

L654-10. Le fait, pour le conjoint, les descendants ou les ascendants ou les collatéraux ou les alliés des personnes mentionnées à l’art. L654-1, de détourner, divertir ou receler des effets dépendant de l’actif du débiteur soumis à une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, est puni des peines prévues par l’art.314-1 du code pénal

La loi de 2010 a inséré pour les EIRL, le fait de dissimuler des biens appartenant à un patrimoine affecté à la procédure ou appartenant à un patrimoine qui n’est pas affecté par la procédure.

Chapitre 4 : Les solutions de la procédure de redressement judiciaire.

A l’issue de la période d’observation, le tribunal peut adopter un plan de redressement. Ce plan peut être un plan de continuation ou un plan de cession.

En matière de continuation(cf. plan de sauvegarde). Si le plan se caractérise par une continuation, l’entreprise va être maintenue dans le patrimoine du débiteur. Le plan de continuation est calqué sur le régime du plan de sauvegarde. Lorsqu’un plan de continuation est mis en œuvre en matière de redressement judiciaire, il est plus hasardeux car les statistiques montrent que 90% des entreprises en redressement qui bénéficient d’un plan de continuation sont finalement liquidées.

En matière de cession(cf. plan de cession est calqué sur celui de la procédure de liquidation judiciaire). Dans ce cas, l’entreprise sera cédée à un repreneur qui aura fait une offre préalable. Dans la loi de 2005, on a hésité à conserver la possibilité d’un plan de cession prévue initialement uniquement en matière de redressement judiciaire car lorsqu’a été ouverte une procédure de redressement judiciaire, le débiteur se trouve en cas de cession, dans une situation très proche de celle qui résulterait de l’ouverture d’une liquidation. Dans le cadre d’une cession, on va céder les actifs à un repreneur qui va payer un prix de cession redistribué entre les créanciers et une fois que l’ensemble de l’actif aura été cédé, il faudra prononcer la dissolution de la personne morale s’il s’agit d’une société ou opérer une radiation au registre du commerce.

Dès lors, certains avaient émis l’idée d’organiser cette procédure de cession dans le cadre d’une liquidation. Le débat est venu devant les parlementaires à qui on a fait valoir l’argument selon lequel la liquidation judiciaire est perçue dans le monde des entreprises comme une procédure infamante qui porte atteinte à la dignité de la personne (argument psychologique). En revanche, la procédure de redressement judiciaire parait psychologiquement plus acceptable pour le dirigeant d’une société ou pour un commerçant personne physique. Ainsi, les parlementaires ont considéré qu’il fallait conserver la possibilité d’une cession dans le cadre de la procédure de redressement mais pour autant, les mécanismes de la cession du redressement judiciaire sont claqués sur les mécanismes de la cession d’une liquidation judiciaire.

Particularités du plan de continuation en matière de redressement(//sauvegarde)prévues par l’art. L631-19-1 issu de l’ordonnance de 2008 : le tribunal peut subordonner l’adoption du plan de continuation au remplacement de certains dirigeants (impossible en matière de sauvegarde). Le tribunal peut prononcer l’incessibilité des valeurs mobilières de la société détenues par les dirigeants. Il peut aussi décider que le droit de vote sera exercé par un mandataire désigné par le tribunal au lieu des dirigeants ou encore ordonner la cession des valeurs mobilières détenues par les dirigeants.

Par ailleurs, les cautions, garants et autres ne peuvent pas se prévaloir du plan de continuation (une fois que le plan a été adopté, les cautions garants et autres peuvent être poursuivis par les créanciers ; fait pour inciter les dirigeants caution à solliciter une sauvegarde).

Si une cessation des paiements intervient au cours de l’exécution du plan, celui-ci sera résolu mais le tribunal devra prononcer la liquidation. Il se peut que le plan de continuation ayant des difficultés à être exécuté, on se tourne alors vers une cession. Si cession il doit y avoir, le tribunal devra obligatoirement désigner et nommer un administrateur. De même, chaque fois que le débiteur est manifestement dans l’impossibilité de redresser l’entreprise, l’administrateur peut demander au tribunal de prononcer la cession.

Autre particularité du plan de redressement en matière de licenciement après l’adoption du plan qui obéit à l’art. L631-19 (régime dérogatoire): il faut consulter les institutions représentatives du personnel et informer l’autorité administrative compétente (inspection du travail). Le plan doit préciser le nombre de licenciements qui doivent intervenir dans le délai d’un mois après le jugement qui adopte le plan (sur simple notification de l’administrateur au salarié sous réserve des droits de préavis). Procédure de licenciement très simplifiée. A défaut d’administrateur (entreprise de taille modeste), c’est le débiteur lui-même qui appliquera ces règles et procèdera aux licenciements. Le mandataire exerce les fonctions de l’administrateur lorsqu’il n’y en a pas.

Sous-titre II : La Procédure de Liquidation Judiciaire

Statistiquement, elle est la procédure collective la plus utilisée mais avant 2005, elle était bien moins présente dans les textes que la procédure de redressement. Jusqu’à la loi de 2005, la procédure de liquidation était conçue comme la conséquence du constat qu’une entreprise ne pouvait pas être redressée. Dès lors, puisqu’elle ne peut être redressée, ses actifs doivent être liquidés au mieux pour permettre aux créanciers de voir honorer tout ou partie de leur créance. Dans le meilleur des cas, les créanciers n’obtiennent qu’un remboursement partiel de leur créance. Voilà la situation au moment du vote de la loi de 2005. La loi a cherché à innover en ce sens que le souci de sauvegarder l’emploi et l’outil d’exploitation n’a pas été absent du souci de la liquidation judiciaire. La procédure n’est plus conçue comme une sanction du débiteur qui a failli mais plutôt comme un remède aux difficultés de l’entreprise en privilégiant un plan de cession de celle-ci. De nombreuses dispositions de la loi renvoient à la procédure de sauvegarde.

Chapitre 1 : Les diverses phases de la procédure.

Section 1 : L’ouverture de la procédure.

Le champ d’application ratione personae:

Selon l’art. L641-1, la procédure de liquidation judiciaire qui est instituée, peut être ouverte à l’encontre de tout débiteur visé par l’art. L640-2 ie les mêmes que ceux visés par la procédure de sauvegarde. Il n’y a pas de particularité en ce qui concerne les personnes. L’art. L640-2 précise juste qu’il ne peut être ouvert de procédure de liquidation judiciaire à l’encontre d’une personne déjà soumise à cette procédure tant qu’elle n’a pas été clôturée (hypothèse d’un débiteur qui a plusieurs fonds de commerce et dont un a été mis en liquidation car le débiteur n’a qu’un seul patrimoine): « faillite sur faillite ne vaut ». Cette idée pourrait être remise en cause avec la loi visant à consacrer en droit français le patrimoine d’affectation à travers la création de la société individuelle à responsabilité limitée (EIRL) qui lui permettrait de séparer son patrimoine professionnel et son patrimoine familial (remet en cause le principe de l’unicité du patrimoine).

La procédure de liquidation peut aussi affecter un professionnel retiré des affaires ou un professionnel décédé. Il suffira juste de démontrer qu’au moment de son retrait ou décès, il était en CDP.

La loi a mis en œuvre pour les entreprises de taille modeste, une procédure de liquidation judiciaire simplifiée que l’ordonnance de 2008 a perfectionnée (R641-2 2°) ie qu’il existe désormais soit une liquidation simplifiée impérative soit une liquidation simplifiée facultative. En ce qui concerne les personnes, ce sont les mêmes à quelques nuances près. L’actif du débiteur ne doit pas comporter de biens immobiliers. C’est une procédure expéditive car elle va concerner des entreprises qui n’ont plus d’actif. Cette procédure est prononcée de plein droit lorsque l’entreprise ne dépasse pas les seuils (300.000 € de chiffre d’affaire et 1 salarié maximum) mais elle peut aussi faire l’objet d’une demande. Si cette procédure est prononcée initialement, avant toute autre procédure, la décision peut être prise par ordonnance du président du tribunal statuant seul. En revanche, lorsque la procédure de liquidation judiciaire anticipée intervient dans la procédure de liquidation judiciaire, c’est le tribunal qui est compétent. Cette faculté de prononcer une liquidation judiciaire simplifiée lorsque les seuils sont dépassés, ne pourra bénéficier à l’entreprise que si son chiffre d’affaire est situé entre 300.000 et 750.000 € et comprend de 1 à 5 salariés (conversion de la procédure de liquidation traditionnelle en liquidation simplifiée).

La condition de cessation des paiements :

De la même manière, la liquidation judiciaire nécessite une cessation des paiements.La loi précise que le redressement de l’entreprise doit être impossible. L’ouverture de cette procédure peut intervenir de manière initiale ou à la suite d’une conversion d’une procédure de sauvegarde, d’une conciliation ou d’un redressement. Chaque fois qu’il apparait au cours de la première procédure ouverte que le redressement étant manifestement impossible seule subsiste la procédure de liquidation.

Procédure. Sur le plan procédural, la procédure est ouverte dans les mêmes conditions que le redressement. Le débiteur et le créancier peuvent saisir le tribunal qui peut même se saisir d’office.Le débiteur doit saisir dans les 45 jours suivants la CDP. La liquidation peut intervenir en cas d’échec de la conciliation ou à la demande des créanciers. Si cette assignation du créancier intervient pour un débiteur retiré ou décédé, le créancier doit assigner dans le délai d’un an du retrait ou du décès (L640-5).

Contenu du jugement d’ouverture :

Outre le déclenchement de la procédure, le jugement d’ouverture doit comporter plusieurs éléments : Le tribunal fixe la date de CDP (pas possible de fixer la CDP plus de 18 mois avant l’ouverture de la procédure); ce jugement n’a pas autorité de chose jugée et la date peut être modifiée. Le tribunal va nommer les organes de la procédure. Il peut nommer un administrateur mais c’est exceptionnel, le plus souvent c’est juste un liquidateur qui est nommé parmi les mandataires judiciaires inscrits près la CA. Possibilité de nommer aussi une personne dotée d’une expérience particulière. Si la procédure a fait l’objet d’une conversion, le mandataire judiciaire est nommé liquidateur. Il est prévu une procédure de remplacement de ces organes quand ils commettent des fautes. On peut adjoindre des liquidateurs au liquidateur principal si l’entreprise est de grande taille.

Le liquidateur nommé va exercer les attributions du mandataire judiciaire ie qu’il va représenter l’intérêt collectif des créanciers et en ce sens, il va veiller à la vérification des créances. Il a le pouvoir d’exercer certaines actions en justice et procéder aux opérations de liquidation judiciaire.

Enfin un représentant des salariés est nommé dans les conditions de l’art. L621-4 auquel renvoie L641-1. Ce liquidateur va subir des contraintes. En particulier, il est prévu des incompatibilités entre les fonctions de liquidateur et des liens familiaux qui existeraient avec le débiteur ou le dirigeant de la personne morale.

Section 2 : Le déroulement de la procédure.

Si on examine L640-1, la liquidation judiciaire est destinée à mettre fin à l’activité de l’entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale des actifs ou par une cession séparée des actifs. Ce qui est nouveau, c’est que le législateur a cherché une alternative. En effet, la cession globale en vue de faire reprendre une partie des actifs par un repreneur qui poursuivra l’activité de l’entreprise et une cession séparée lorsque l’actif est cédé sans que l’activité puisse être poursuivie par un repreneur.

En droit, l’entreprise est appelée à disparaitre mais la loi de 2005 a tenté d’organiser une alternative à la disparition pure et simple de l’entreprise, une alternative à la liquidation. La cession doit permettre dans certains cas à l’entreprise de poursuivre tout ou partie de son activité. Les objectifs poursuivis par la loi vont avoir une incidence sur le déroulement de la procédure en ce qui concerne les pouvoirs des organes et sur les questions du maintien de l’activité, du sort des contrats en cours et du régime des créances.

  • 1. Les pouvoirs des organes.

La solution classique n’a pas été véritablement modifiée. La liquidation demeure une sanction au moins partiellement. On a voulu la faire évoluer mais la conception traditionnelle demeure même si elle n’est plus exclusive. C’est une sanction, sinon comment expliquer que le débiteur demeure dessaisi de ses pouvoirs d’administration et de disposition de ses biens ?

Pouvoirs du débiteur

Règle traditionnelle de l’art. L641-9 à savoir que la liquidation entraine le dessaisissement des pouvoirs du débiteur. Jusqu’à la clôture de la procédure, ses droits et actions seront exercés par le liquidateur. Le débiteur, à compter de l’ouverture de la procédure est considéré comme une sorte d’incapable qui doit être représenté. Le liquidateur se substitue au débiteur dans l’exercice des pouvoirs du débiteur ainsi que dans l’administration de l’entreprise étant entendu que le tribunal peut avoir décidé pour des raisons d’opportunité de maintenir au moins temporairement l’activité de l’entreprise. En présence d’une EIRL, le débiteur va être dessaisi de ses pouvoirs pour le patrimoine affecté mais il va les conserver pour les autres patrimoines non affectés à la procédure collective.

Si le débiteur est une société comme c’est souvent le cas, le jugement de liquidation judiciaire va entrainer sa dissolution (1844-7 7°civ.). Il est précisé dans cet article que la personnalité juridique de la société va subsister pour les besoins de celle-ci. La société va être dissoute à l’occasion de la liquidation mais elle ne va pas intervenir de manière instantanée. On considère que la personnalité subsiste pour les besoins de la liquidation.

La loi de 2005 en a tiré une conséquence logique : la possibilité pour les dirigeants sociaux de rester en fonction au sein de la société en liquidation sauf disposition contraire des statuts ou sauf décision contraire de l’assemblée générale. Ils sont dirigeants d’une société débitrice qui a été dessaisie de ses pouvoirs. Ce sont des dirigeants dessaisis qui vont perdre leurs pouvoirs ordinaires de dirigeants au profit du liquidateur. Avant, les dirigeants perdaient leur fonction mais désormais, on les maintient en fonction pour éviter une difficulté. Du fait de la dissolution et de l’exclusion des dirigeants, on était obligé de nommer un mandataire ad hoc pour représenter la société et exercer les droits de cette société pour toute une série d’actes.

Des droits échappent au dessaisissement donc pour ces droits, on était dans une situation délicate et les tribunaux nommaient un mandataire ad hoc. On s’est alors dit qu’il valait mieux maintenir les dirigeants. Les dirigeants peuvent aujourd’hui se constituer partie civile au nom de la société et exercer directement l’action civile pour établir la culpabilité de l’auteur d’un délit ; ils peuvent exercer les droits actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur et exercer des voies de recours, demander la clôture de la liquidation judiciaire, exercer les droits de la défense.

Pouvoirs du liquidateur

Sous cette réserve, c’est au liquidateur qu’il appartient de gérer l’entreprise ie qu’il va exercer les attributions qui sont traditionnellement dévolues à l’administrateur ou au mandataire en matière de sauvegarde (L641-4). La loi nouvelle a introduit une innovation au niveau de la réception du courrier. Jusque-là, le courrier, dès le prononcé de l’ouverture de la procédure, devait être adressé au liquidateur. Désormais, c’est le juge commissaire qui décide quel est le destinataire du courrier adressé au débiteur. En l’absence de décision du juge, c’est le débiteur qui reçoit le courrier. Si le tribunal décide que le liquidateur doit recevoir le courrier, le débiteur peut l’assister. S’il s’agit d’un courrier électronique, le liquidateur peut demander d’y accéder dans les conditions prévues par le décret.

  • 2. Le maintien de l’activité.

Poursuite temporaire de l’activité.Normalement, la liquidation doit entrainer l’arrêt de toute activité car l’entreprise est destinée à disparaitre mais pour des raisons d’opportunité, une poursuite temporaire de l’activité peut être souhaitable, le temps de liquider ou de réaliser les actifs dans les meilleures conditions possibles. Cette opportunité qui consiste dans le maintien de l’activité peut s’avérer d’autant plus souhaitable lorsqu’une cession des actifs est envisagée (qui a pour résultat une sorte de continuation par un entrepreneur). Dans ce cas, il vaut mieux qu’il n’y ait pas eu de rupture de l’activité. Cette possibilité avait déjà été consacrée par le droit antérieur et est confirmée par la loi nouvelle de 2005.

Durée. La poursuite peut être envisagée pour une durée de 3 mois prolongée une fois à la demande du ministère public. La loi autorise en fait, dès le prononcé du jugement d’ouverture, l’ouverture d’une période d’observation au cours de laquelle l’activité sera maintenue.

Rôle du liquidateur durant cette période. C’est normalement le liquidateur qui gère l’entreprise durant cette période temporaire de l’activité, procède aux licenciements nécessaires (L631-17) et exerce les pouvoirs dévolus à l’administrateur dans la procédure de sauvegarde. Il reçoit les informations nécessaires utiles à sa mission, prépare le plan de cession et passe les actes nécessaires à la réalisation de ce plan si le plan est adopté par le tribunal.

Nomination possible d’un administrateur. Lorsque l’entreprise est autorisée à maintenir l’activité et que ce maintien est confirmé par le tribunal, la loi prévoit une possibilité de nommer un administrateur pour gérer l’entreprise aux côtés de l’administrateur. Ceci est prévu pour les entreprises de taille importante (chiffre d’affaire < 3 millions et < 20 salariés). L’administrateur exerce les fonctions qu’exercerait le liquidateur : fonction de gestion de l’entreprise à laquelle s’ajoute la préparation du plan de cession et la réalisation des actes afférant à ce plan. Le liquidateur voit ses prérogatives cantonnées à l’apurement du passif. Si l’administrateur ne dispose pas des sommes nécessaires pour la continuation de l’activité, il peut se les faire remettre par le liquidateur sur autorisation du juge commissaire.

Quant au juge commissaire, il exerce les mêmes attributions que dans la procédure de sauvegarde (L641-11).

  • 3. Le sort des contrats en cours.

Principe d’identité de régime juridique avec les autres procédures collectives :

Il y a la possibilité de continuer les contrats en cours sous réserve du maintien temporaire de l’activité (L641-11-1). C’estle liquidateur qui dispose du droit d’opter pour la continuation ou pour la cessation du contrat. En matière de sauvegarde c’est l’administrateur qui dispose de ce droit. Paradoxalement, la jurisprudence a admis largement le régime de la continuation du contrat en cours même en l’absence de maintien temporaire de l’activité.

La nécessité de la poursuite des contrats en cours ne joue pas seulement lorsqu’il s’agit de poursuivre l’activité mais aussi pour permettre le bon déroulement de la procédure en sauvegardant la valeur des actifs. Même si l’entreprise ne fait pas l’objet d’une cession, la continuation des contrats en cours peut permettre d’organiser la liquidation dans les meilleures conditions possibles notamment en sauvegardant la valeur des actifs (com.15/02/2005). Si la liquidation intervient à la suite d’une conversion, le liquidateur ne statuera que pour les contrats sur lesquels il n’a pas été statué. Il ne peut pas statuer sur la continuation des contrats que l’on avait déjà décidé d’interrompre. Pour le reste, les règles retenues sont celles que nous avons vues en matière de sauvegarde.

Particularisme du bail d’immeuble :

L’art. L641-12 renvoie à L622-14 où est réaffirmé le principe selon lequel la liquidation n’entraine pas de plein droit la résiliation du bail d’immeuble. Le liquidateur ou l’administrateur peut décider de continuer ou au contraire d’interrompre le bail. L’ordonnance de 2008 a cependant prévu en la matière les conditions dans lesquelles la résiliation du bail pourrait malgré tout intervenir (L641-12). Elle peut intervenir le jour où le bailleur est informé de la décision du liquidateur de ne pas continuer le bail, pour des causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire à la demande du bailleur. Une fois la liquidation prononcée, le bailleur peut demander la résiliation pour des causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire à condition qu’il en fasse la demande dans les 3 mois du jugement de liquidation judiciaire. La résiliation peut intervenir à la demande du bailleur en cas de défaut de paiement des loyers pour une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire.

Il y a également la possibilité de céder le bail plutôt que de le résilier. La cession doit intervenir dans les conditions prévues par le bail mais aucune solidarité ne peut être imposée par le cessionnaire au cédant. Enfin, le bailleur a aussi un privilège en ce qui concerne les loyers impayés.

Particularisme des contrats de travail :

Les contrats de travail échappent à la procédure de continuation des contrats en cours comme en matière de sauvegarde. Le liquidateur a la possibilité de décider de licenciements dans les 15 jours du jugement d’ouverture et dans les conditions prévues par les textes du code du travail. Le respect de ce délai est important car il va conditionner la prise en charge par l’AGS des créances qui résultent de la rupture des contrats de travail. Si au contraire, un plan de cession est envisagé alors les licenciements ne devraient qu’avoir un caractère exceptionnel car il est prévu dans le code du travail une disposition qui impose la continuation des contrats de travail lorsque la structure juridique de l’employeur est modifiée. C’est le cas lors d’une cession intervenant à l’occasion d’une liquidation judiciaire. Il existe cependant des exceptions.

  • 4. Le régime des créances.

Les règles n’ont pas subi de modifications importantes avec la loi de 2005 ni même avec l’ordonnance de 2008.

  1. les créances antérieures.

L’ensemble des dispositions en matière de sauvegarde et de redressement judiciaire sont applicables (L621-14) en matière de liquidation judiciaire : déclaration des créances, vérification et admission (décision prise par le juge commissaire). Le même régime concerne la restriction des droits des créanciers après le jugement d’ouverture, le régime des nullités des actes conclus pendant la période suspecte, enfin, sont applicables les dispositions particulières relatives aux contrats de travail à la différence près que c’est le liquidateur qui doit mettre en cause les institutions représentatives du personnel.

A été maintenu le système de l’exigibilité immédiate des créances antérieures non-échues, dès le prononcé du jugement, ce que l’on ne trouve pas dans les autres procédures. C’est ce qu’on appelle parfois le principe de la déchéance du terme. Toutes les créances antérieures deviennent immédiatement exigibles (différent de la sauvegarde et du redressement judiciaire). Un aménagement a été introduit lorsque le tribunal autorise le maintien d’activités en vue d’un plan de cession. Les créances non-échues au jour du jugement d’ouverture ne deviendront exigibles qu’au jour de la cession ou à défaut à la fin de la période de maintien de l’activité (L643-1).

L’art. L643-1 dispose : «le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non-échues. Toutefois, lorsque le tribunal autorise la poursuite de l’activité au motif que la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable, les créances non-échues sont exigibles à la date du jugement statuant sur la cession ou, à défaut, à la date à laquelle le maintien de l’activité prend fin.

Lorsque ces créances sont exprimées dans une monnaie autre que celle du lieu où a été prononcée la liquidation judiciaire, elles sont converties en la monnaie de ce lieu, selon le cours du change à la date du jugement ».

Les créanciers titulaires d’une sûreté bénéficient d’une faveur prévue par l’article L643-2com. Une fois leurs créances déclarées, ils peuvent exercer leur droit de poursuite individuelle même si leur créance n’a pas encore été admise, à condition que le liquidateur n’ait pas entrepris la vente des biens grevés de cette sûreté dans les 3 mois à compter du jugement d’ouverture. Toutefois, si le tribunal a décidé du maintien de l’activité en vue d’une cession, ce droit de poursuite individuelle ne peut être exercé qu’au terme du délai de dépôt des offres, à condition qu’aucune offre incluant ce bien n’ait été présentée (alinéa 2).

La vente des immeubles s’effectue soit sur adjudication amiable, soit de gré à gré dans le cadre d’une saisie immobilière.

A été aussi maintenu le principe d’un paiement provisionnel pour une quote-part d’une créance définitivement admise (L643-3). Il s’agit d’accélérer le paiement des créanciers. Chaque fois qu’une créance a été définitivement admise, le tribunal peut décider du paiement prévisionnel d’une quote-part des créances professionnelles mais ce paiement provisionnel peut être subordonné à la présentation d’une garantie émanant d’un établissement de crédit de la part du créancier (caution bancaire par exemple).

  1. les créances postérieures.

La même définition qu’en matière de sauvegarde ou redressement judiciaire a été adoptée à l’art. L641-13. Une distinction est faite entre les créances élues et les créances non-élues pour limiter le nombre et le montant des créances postérieures qui bénéficient d’un régime privilégié (droit d’être payées en priorité). Ce sont des créances nées après le jugement d’ouverture et utiles à la procédure (maintien pas poursuite // S ou RJ) ou au redressement de l’entreprise. Lorsque la liquidation intervient après une conversion, cela vise toutes les créances nées après la première procédure. Elles doivent être portées à la connaissance du liquidateur dans un délai de 6 mois (signifie pas exigence d’une déclaration). Délai plus bref car volonté d’accélérer la procédure de liquidation par rapport aux autres procédures. Ces créances sont payées normalement à leur échéance, sous réserve de fonds disponibles sinon elles font l’objet d’un classement (L622-17) primé par certaines catégories de créances antérieures :

– créances salariales super privilégiées

créances résultant du privilège de new money

– certaines créances antérieures garanties par des sûretés immobilières ou mobilières spéciales

frais de justices nés régulièrement après le jugement d’ouverture de la procédure (L641-13)

Les créances non-élues sont interdites de paiement sauf celles liées aux besoins de la vie courante du débiteur et les créances alimentaires. Ces créances non-élues sont soumises au régime des créances antérieures avec obligation de déclaration depuis la loi de 2005.

Section 3 : La clôture de la liquidation judiciaire.

La liquidation judiciaire prend fin par un jugement de clôture prononcé par le tribunal. La loi nouvelle de 2005 a conféré au tribunal le pouvoir de fixer un délai au terme duquel doit être prononcée la clôture(L623-9). Si elle ne peut pas être prononcée (les choses ne sont pas en l’état), le tribunal peut prononcer la prorogation du terme par une décision motivée. Dès l’ouverture de la procédure, le tribunal fixe le délai au terme duquel la clôture de la procédure devra être examinée. Pendant le déroulement de la procédure de liquidation, le tribunal a aussi le pouvoir d’anticiper cette clôture en se saisissant d’office ou en étant saisi par un organe de la procédure ou un créancier au terme d’un délai de 2 ans à compter du jugement d’ouverture. Cette clôture peut être prononcée en raison d’une insuffisance d’actif ou pour extinction du passif.

  • 1. La clôture pour insuffisance d’actif.

Fin du dessaisissement du débiteur :

Si le débiteur est une société, la clôture entraîne la disparition de la personne morale qui ne survivait jusque-là que pour les besoins de la liquidation (1844-8 al.3civ.). Si c’est une personne physique, cette clôture met fin au dessaisissement dont il était frappé depuis l’ouverture de la procédure. Il peut recommencer éventuellement une autre activité mais ce rétablissement du débiteur ne met pas fin aux sanctions éventuellement prononcées contre lui. Les créanciers ne retrouvent pas sauf exception leur droit de poursuite individuelle.

Principe de la perte du droit de poursuite individuelle :

Les créanciers titulaires de sûretés (L643-2) vont pour leur part retrouver leur droit de poursuite individuelle après la déclaration de créance (avant le jugement de clôture). Soit ils peuvent saisir les biens pour les faire vendre et se payer dessus, soit la vente du bien sur lequel portait leur sûreté a été organisée par le liquidateur lui-même (ils peuvent alors être payés et recouvrer tout ou partie de leurs créances), soit à la clôture de la procédure les créanciers titulaires de sûretés n’ont pas pu obtenir tout ou partie du paiement de leurs créances et se retrouvent alors dans la même situation que tous les autres créanciers (sans droit de poursuite individuelle).

Le débiteur retrouve ses pleins pouvoirs, ce qui lui permet de reconstruire une vie professionnelle (L1985). On considère qu’il ne faut pas empêcher indéfiniment un entrepreneur de reprendre une activité alors même qu’il a subi un échec antérieur. Cette solution a été critiquée sur le plan de la morale des affaires car on a craint que des entrepreneurs peu scrupuleux utilisent abusivement la procédure de liquidation judiciaire pour solder leur passif en cas d’échec de leur activité mais en pratique la plupart des créanciers n’attendent pas la clôture pour provisionner leurs pertes, ils le font souvent lorsqu’ils pressentent que le débiteur ne sera pas en mesure d’honorer les créances. Tout cela explique que la loi prévoie un certain nombre d’exceptions pour permettre au créancier dans certains cas de recouvrer son droit de poursuite individuelle.

  1. les exceptions à la perte du droit de poursuite individuelle.

Depuis la loi de 2005, ce n’est pas la dette qui est éteinte mais seulement le droit de poursuite qui est paralysé. Cette paralysie est considérée comme une exception purement personnelle au débiteur. Par exemple, toutes les cautions ou les codébiteurs peuvent être poursuivis par le créancier du débiteur principal. Si la caution ou le codébiteur sont poursuivis, ils peuvent se retourner contre le débiteur en dépit de la clôture pour insuffisance d’actif (L643-11) mais ce texte n’est que purement théorique (débiteur insolvable).

Dans d’autres cas, le droit de poursuite individuelle est recouvré en raison de la nature de la créance. Toutes les créances qui résultent d’une condamnation pénale du débiteur ou de droits attachés à la personne du créancier peuvent être poursuivies au-delà du jugement de clôture (préjudice corporel ou moral du créancier, créances alimentaires…). De même, le créancier alimentaire peut poursuivre le débiteur malgré la clôture de la procédure.

Le comportement frauduleux du débiteur peut aussi être à l’origine du recouvrement lorsque par exemple le débiteur a été antérieurement soumis (5 ans qui précèdent) à une liquidation judiciaire antérieure. De même, quand la fraude du débiteur a été caractérisée (mais il faut une décision du tribunal).

Lorsque le débiteur se trouve à l’étranger, rien n’interdit sa poursuite malgré la clôture pour insuffisance d’actif.

La clôture pour insuffisance d’actif n’est pas irréversible. Le tribunal peut rouvrir une procédure quand certains actifs n’ont pas été réalisés ou certaines poursuites pas engagées pendant la procédure par le débiteur.

  1. les modalités de reprise du droit de poursuite individuelle.

Les créanciers qui recouvrent leur droit de poursuite individuelle doivent disposer d’un titre exécutoire qui atteste de l’existence de leur créance. Plusieurs hypothèses sont envisageables :

la créance a été admise: ils peuvent alors demander le titre exécutoire au président du tribunal qui le délivre sur ordonnance

les créances n’ont pas été vérifiées: le créancier doit faire vérifier sa créance dans les conditions du droit commun

Désormais, les créances non-déclarées ne sont plus totalement éteintes, elles sont simplement déclarées inopposables au débiteur, ce qui permet aux créanciers de reprendre leurs poursuites si les conditions de cette reprise sont remplies mais en pratique, l’actif étant le plus souvent épuisé, la reprise des poursuites risque le plus souvent d’être vouée à l’échec.

  • 2. La clôture pour extinction du passif.

Il s’agit de l’hypothèse où le liquidateur dispose des sommes nécessaires pour désintéresser les créanciers alors même qu’une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte. Dans ce cas, le tribunal prononce un jugement de clôture qui rétablit le débiteur dans tous ses droits et le liquidateur cesse ses fonctions ; si les dirigeants de la société avaient fait l’objet de sanctions professionnelles (notamment faillite personnelle) celles-ci sont levées et l’entreprise peut reprendre son activité.

Quelle que soit la cause de la clôture, le liquidateur doit procéder à la reddition des comptes ie faire état des frais de la procédure et de l’état de l’entreprise. La clôture opère une suppression des mesures d’interdiction d’émettre des chèques.

Chapitre 2 : Les effets de la procédure.

La procédure de liquidation a pour effet de permettre la réalisation des actifs et d’apurer le passif. La loi nouvelle (2005 modifiée 2008) émet l’idée selon laquelle la liquidation judiciaire ne doit pas forcément aboutir à une disparition totale de l’entreprise. Sera ainsi conservée la possibilité de vendre les biens de manière isolée mais on a surtout insisté sur la possibilité d’une cession globale ou partielle du patrimoine de l’entreprise en vue de permettre la poursuite d’une partie ou de la totalité des activités de l’entreprise. Le régime du plan de cession est aujourd’hui organisé dans le cadre de la procédure de liquidation. Les dirigeants peuvent être condamnés à l’obligation aux dettes sociales.

Section 1 : La vente de biens isolés.

  • 1. Le droit commun.
  1. la réalisation des différentes catégories de biens.
  2. les immeubles.

Ils sont vendus selon une procédure longue et complexe de saisie immobilière qui se déroule à la barre du tribunal (L.642-18). Le juge commissaire va jouer un rôle déterminant puisque c’est lui qui, au cours de cette procédure, fixe la mise à prix, les conditions essentielles de la vente et les modalités de publicité, après avis des contrôleurs, du débiteur et du liquidateur.

Si une procédure de saisie immobilière a été engagée avant l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, celle-ci est suspendue par l’effet de cette procédure. C’est le liquidateur par la suite qui sera subrogé dans les droits du créancier l’ayant déclenchée. Il reprend tous les actes de procédure éventuellement déjà accomplis qui sont présumés avoir été effectués pour le compte du liquidateur puis la procédure reprend normalement.

Parfois, une cession amiable des immeubles peut être plus opportune. Soit on interrompt la saisie immobilière et on procède par adjudication amiable (organisée par un notaire, sur une mise à prix décidée par le juge commissaire, avec des mesures légales de publicité), soit on procède à une vente de gré à gré (sous le contrôle du juge commissaire). L’adjudication amiable offre plus de garanties aux créanciers inscrits sur l’immeuble en raison des règles de publicité de la vente et de la faculté de surenchère dont ils disposent éventuellement. Cette adjudication emporte purge des hypothèques qui pesaient sur cet immeuble. Cette garantie n’est pas retrouvée dans la vente de gré à gré où l’acquéreur de l’immeuble doit lui-même procéder à la purge des hypothèques (procédure coûteuse et longue).

  1. les meubles.

Pour la vente des meubles, le juge commissaire joue aussi un rôle déterminant(L642-19) puisque c’est lui qui va décider soit de la vente aux enchères publiques, soit de la vente de gré à gré, après avis des contrôleurs et du débiteur.

La vente de gré à gré est une vente de droit commun ; en revanche, la vente aux enchères publiques doit répondre à des conditions de procédures spéciales (L322-2, L322-4 et L322-7) avec notamment l’intervention d’un commissaire-priseur, d’un notaire ou d’un huissier. S’il s’agit d’un bien utile à la vie courante et de faible valeur, le juge-commissaire peut autoriser le débiteur ou un membre de sa famille de l’acquérir (L642-20).

Le bien visé par cette réalisation peut être retenu par un créancieren faisant jouer son droit de rétention, créant une situation de blocage. La situation peut se dénouer à l’initiative du liquidateur qui demande au juge commissaire d’autoriser l’arrêt de la rétention du bien. Cette autorisation est conditionnée par l’obligation de payer immédiatement le créancier rétenteur(L642-25). En revanche, l’autorisation du juge commissaire n’exige pas que le retrait soit nécessaire à la poursuite de l’activité. L’inclusion du bien dans un plan de cession suffit à justifier la demande de retrait du bien (L642-20-1).

Le liquidateur peut juger inopportun le retrait du bien et demander au juge commissaire la réalisation de celui-ci (vente). Le créancier qui détient le bien peut alors demander l’attribution judiciaire du gage plutôt que de voir honorer sa créance, à condition que celle-ci soit admise.

Si le liquidateur n’admet pas l’attribution judiciaire du gage, le bien est vendu avec l’autorisation du juge commissaire et le droit de rétention est de plein droit reporté sur le prix de vente, le créancier étant alors désintéressé avant tout autre créancier.

  1. le règlement des créanciers.
  2. les créanciers privilégiés.

Il tient compte de l’existence de sûretés immobilières ou mobilières qui vont jouer leur rôle dans ce cas, en matière de liquidation judiciaire et vont primer un certain nombre de créances postérieures dites utiles. En effet, l’art. L641-13 prévoit que les créanciers titulaires de sûretés mobilières ou immobilières priment les créances postérieures utiles (qui disposent normalement déjà d’un privilège). Les créanciers titulaires de sûretés dont la créance est admise, seront désintéressés en priorité et concourent aux répartitions des distributions de soldes qui précèdent la répartition du prix des immeubles par exemple. S’il reste des créanciers impayés, ils seront payés sur le prix des immeubles selon les sommes déjà perçues.

  1. les créanciers postérieurs et chirographaires.

S’il reste un reliquat, les créanciers postérieurs élus en bénéficient, puis les créanciers chirographaires. Si le prix des immeubles ne désintéresse que partiellement les créanciers titulaires de sûretés, dans les répartitions ultérieures, ces créanciers seront postérieurs (privilégiés dans les concours ultérieurs).

Les frais et dépens de la liquidation judiciaire sont également payés en priorité et des subsides prélevés sur les actifs sont accordés aux dirigeants. Le dirigeant peut demander à ce que lui soit accordé des subsides pour lui et sa famille.

En dernier lieu, les créanciers chirographaires sont payés à proportion de leurs créances. S’il reste encore de l’actif après le règlement de tous les créanciers, cette part de l’actif subsistant est mise en réserve pour le paiement des créanciers sur l’admission desquelles il n’a pas encore été statué (cf. texte).

  • 2. La liquidation judiciaire simplifiée.

Elle ne s’applique qu’aux entreprises de taille modeste qui ne disposent pas d’actifs immobiliers. Pour procéder aux répartitions entre créanciers, il faut savoir que l’ordonnance de 2008 a introduit 2 types de liquidations judiciaires simplifiées :

pour les TPE (CA < 300 000 € et max. 1 salarié), la liquidation judiciaire est de plein droit et dans ce cas, les ventes se font de gré à gré. Tous les biens mobiliers sont vendus de gré à gré dans les 3 mois de l’ouverture de la liquidation judiciaire.

pour les PME (CA > 750 000 € et < 5 salariés), la liquidation judiciaire simplifiée est possible. Le juge détermine les biens mobiliers qui vont être vendus de gré à gré dans les 3 mois de la décision et les autres vendus aux enchères publiques dans un délai plus long. Le produit de la vente va être réparti entre les créanciers mais pour éviter les complications inutiles, en pratique, on ne va vérifier que les créances susceptibles de venir en rang utile (susceptibles d’être honorées) et les créances salariales.

Cette forme de liquidation judiciaire ne concerne que les entreprises de taille modeste (qui ne dispose pas d’actif immobilier ou avec un CA inférieur ou égal à 750 000 € ou de moins de 5 salariés), ce qui représente la majorité des entreprises mises en liquidation judiciaire. Pour procéder aux répartitions, le tribunal autorise d’abord le liquidateur à céder de gré à gré les biens qu’il détermine dans les 3 mois du jugement d’ouverture. S’il reste des biens, ils seront vendus aux enchères publiques.

Une fois les biens vendus, on procède aux répartitions entre les créanciers mais on ne vérifie que les créances susceptibles de venir en rang utile (ie susceptibles d’être remboursées) : créances salariales, titulaires de sûretés etc.

Ensuite, on présente un projet de répartition au greffe du tribunal, avec publicité, que tout intéressé peut contester devant le juge commissaire. La clôture de la répartition doit intervenir au plus tard dans l’année qui suit le jugement d’ouverture (644-5 al.2). Cette procédure est très expéditive et dérogatoire à la procédure judiciaire de droit commun. Elle suppose qu’aucun contentieux n’en gèle le déroulement entre le débiteur et se créanciers. A tout moment, le tribunal peut, par une décision motivée, décider de revenir à une procédure de liquidation judiciaire habituelle (adoption d’un plan de cession etc.). Cette liquidation judiciaire peut se traduire également par la cession d’entreprise.

Section 2 : La cession d’entreprise.

La liquidation judiciaire n’est ici pas conçue comme une disparition de l’entreprise mais comme un moyen de la sauvegarder intégralement ou du moins une partie de son activité. La possibilité d’une cession existait déjà antérieurement mais a été approfondie par la loi nouvelle. Certains repreneurs préfèrent parfois pour des raisons spéculatives que l’entreprise soit en liquidation judiciaire pour faire une offre de reprise. Dans la discussion de la loi de 2005, on avait proposé de faire disparaître la possibilité de cession en cas de liquidation de l’entreprise mais la solution n’a pas été adoptée : on a considéré que pour certains entrepreneurs, le caractère infamant de la liquidation judiciaire devait laisser subsister la possibilité d’un redressement judiciaire. La loi de 2005 se propose de rationaliser la procédure en prévoyant que le plan de cession puisse être l’aboutissement logique d’une procédure de liquidation judiciaire.

  • 1. La procédure d’adoption du plan de cession.
  1. les offres de reprise.

Elles doivent répondre à des obligations légales pour éviter certains abus. Elles peuvent être formulées par des repreneurs dès l’ouverture de la procédure en cas de redressement judiciaire (L631-13). En cas de liquidation judiciaire, il faut d’abord que le tribunal estime que l’entreprise est viable et que la poursuite de l’activité est possible. Le tribunal fixe alors un délai pendant lequel ces offres peuvent être reçues. C’est le liquidateur (en cas de liquidation) ou l’administrateur (en cas de redressement) qui est chargé d’organiser la publicité de l’appel d’offre (par voie de presse ou électronique). Ces offres doivent répondre globalement à la finalité poursuivie par la cession en vertu de l’art. L642-1 qui énonce :

« La cession de l’entreprise a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles d’exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d’apurer le passif.

Elle peut être totale ou partielle. Dans ce dernier cas, elle porte sur un ensemble d’éléments d’exploitation qui forment une ou plusieurs branches complètes et autonomes d’activités ».

Il s’agit par la cession, d’assurer la continuité de tout ou partie de l’entreprise. L’offre déposée par le ou les repreneurs peut porter sur la totalité ou une partie seulement des activités de l’entreprise.

La cession, totale ou partielle, doit porter sur un ensemble d’exploitations qui forment une ou plusieurs branches complètes et autonomes d’activités. Il ne s’agit pas d’organiser un plan de cession qui aurait pour conséquence la dispersion du patrimoine de l’entreprise.

  1. la personne de l’offrant.

Le repreneur doit être un tiers par rapport à l’entreprise afin d’éviter que les dirigeants puissent racheter l’entreprise en obtenant des conditions favorables d’apurement du passif (par personne interposée). Ainsi, la loi a introduit toute une série de dispositions en vue d’interdire au chef d’entreprise ou aux membres de sa famille de racheter l’entreprise à des conditions favorables (pour éviter de payer les créanciers).

Il y a des incompatibilités entre la personne de l’offrant et les personnes liées de près ou de loin à l’entreprise (L642-3) : incompatibilités familiales, créanciers nommés contrôleurs etc. Il y a des cas limites que le juge devra apprécier. Ex : société constituée pour l’occasion par des associés tiers et anciens associés de l’entreprise.L’offrant devra être suffisamment indépendant.

  1. les modalités de l’offre.

Une entreprise en difficulté qui a un potentiel de biens important, attire un certain nombre de convoitises. Il s’agit d’éviter que les offres ne soient le résultat d’une démarche spéculative qui ne s’appuierait pas sur un véritable projet de poursuite de l’entreprise, de l’activité économique mais qui aurait pour résultat à terme un démantèlement de l’entreprise (ex : affaire Nike/Tapie). L’art. L642-2 précise une série d’indications que le repreneur doit mentionner dans son offre de reprise : les biens que l’on est disposé à reprendre, contrats à poursuivre, projets d’activités, conditions de financement de la reprise, date de cession envisagée, prix de cession etc.

L’offre est ensuite déposée au greffe du tribunal où tout intéressé peut en prendre connaissance (principe de transparence). Le tribunal organise une sorte de vente aux enchères entre les repreneurs potentiels pour que le meilleur prix soit obtenu au bénéfice des créanciers.

Une fois que l’offre est déposée, elle est intangible jusqu’à la décision du tribunal mais peut toujours être améliorée. Par exemple, le repreneur peut décider de proposer un prix plus élevé de la cession ou d’augmenter le nombre d’emplois sauvegardé. L’offre devient intangible jusqu’à la décision du tribunal qui peut être frappée d’appel, à la condition que pendant le délai d’appel seul le cessionnaire demeure lié par son offre (et pas les concurrents).

  1. la décision du tribunal.

Il s’agit de sélectionner la meilleure offre en fonction des objectifs de la loi qui, même en matière de liquidation, demeure la sauvegarde de l’entreprise. Le tribunal dans ce cas exerce une magistrature économique. Il se prononce en opportunité économique et non en fonction de critères strictement juridiques. Le paiement suffisant des créanciers dans l’offre de reprise ne peut constituer à lui seul un critère de décision (com.26/06/1990). Le tribunal statue contradictoirement après avoir entendu tous les acteurs de la procédure (repreneurs, liquidateur etc.).

La décision est susceptible de voies de recours mais de manière restrictive (L661-6§2 et 3) puisque seules certaines personnes peuvent faire appel et que c’est parfois limité au seul ministère public (appel suspensif dans ce cas) voire au seul cessionnaire.

L’appel-nullité a été confirmé par la jurisprudence de la Cour de cassation alors qu’il n’est pas prévu par la loi. C’est un assouplissement. Il s’agit de la possibilité d’interjeter appel d’une décision du tribunal lorsque cette décision est entachée d’une grave irrégularité (violation grave d’un principe de procédure, excès de pouvoir du juge etc.). Rien n’indique dans la nouvelle loi que cette jurisprudence, antérieure à la loi de 2005, ne soit pas reconduite.

  • 2. La mise en œuvre du plan de cession.

Il est mis en œuvre par les organes de la procédure (liquidateur/administrateur) (L642-8). Il est possible que tous les biens ne soient pas repris par le cessionnaire. En cas de difficulté d’exécution du plan de cession, une modification substantielle du plan de cession est possible sur autorisation concernant les objectifs et moyens du plan, à la demande du cessionnaire (L642-6). Par exemple, si un nouveau cessionnaire est désigné dans le cadre de cette modification, l’auteur de l’offre initialement désigné doit demeurer solidaire des engagements qu’il a souscrits (L642-9 al.3) : la substitution d’un cessionnaire à un autre ne doit pas être l’occasion pour le cessionnaire initial de « se défiler ».

Un seul élément du plan demeure intangible à savoir le montant du prix de cession, afin d’éviter les pressions d’un repreneur qui se serait engagé à la légère et qui puisse, dans le cadre d’une modification substantielle du plan, modifier le prix de cession.

  1. la cession des éléments compris dans le plan.

Le plan de cession ne comporte pas, en principe, la cession du passif. En effet, en contrepartie de l’acquisition, le cessionnaire paie un prix de cession qui normalement doit servir à désintéresser en tout ou en partie les créanciers de la procédure. La cession porte sur les biens et sur les contrats. En effet le débiteur (entreprise) va s’engager dans des liens contractuels et ces contrats font parties de l’actif.

  1. la cession des biens.

C’est le repreneur qui détermine les éléments de l’actif qu’il va reprendre dans son offre initiale déposée devant le tribunal. Ne peuvent être concernés que les biens qui servent à l’exploitation de l’entreprise cédée ou partie de l’entreprise cédée, et non les biens à usage privé (pour un débiteur personne privée) ou à usage domestique qui font l’objet d’une cession isolée.

Plusieurs situations à distinguer :

cession totale: l’ensemble des biens composant l’actif seront cédés sans autre particularité

cession partielled’actif : c’est la plus fréquente car en général le repreneur n’a pas besoin de tous les éléments d’actifs. Pour être décidée, elle viser des éléments d’actif formant une branche autonome d’activité (L642-1 al.2).

Si la cession partielle intervient dans le cadre d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, les autres actifs non-cédés sont laissés entre les mains du débiteur en vue d’une poursuite de son activité, sauf si ces autres biens font l’objet d’une cession isolée car ne ils font pas partie de l’activité de la branche cédée.

En cas de liquidation judiciaire, on peut aussi envisager une cession partielle, et les autres actifs résiduels ne servant pas à la poursuite de l’activité feront l’objet d’une réalisation à titre isolé, ou exceptionnellement pourront faire l’objet d’un autre plan de cession (s’ils constituent une autre branche autonome d’activité).

Concrètement, les biens faisant l’objet de la cession sont vendus au cessionnaire (contrat de vente). La question est donc de savoir si les règles du droit commun de la vente (surtout les garanties) doivent s’appliquer.

Le débiteur doit-il la garantie que doit tout vendeur? On considère que cette vente est une sorte de contrat judiciaire car elle ne peut intervenir que sur décision du tribunal. Le cédant n’assume donc pas d’obligation de garantie. La raison en est que le plan fait objet d’une décision judiciaire et le juge vérifie que les biens vendus ne comportent pas de vices cachés ou qu’ils n’appartiennent pas à quelqu’un d’autre. Ainsi, le tribunal va purger la vente de tous ses vices (pas de garantie des vices cachés ni d’éviction, com.22/10/1996).

La vente des biens au cessionnaire suppose un transfert de propriété qui s’opère à la date de passation des actes et non à la date du jugement adoptant le plan de cession. Que devient alors l’entreprise pendant ce temps plus ou moins long ? En attendant la cession, la gestion des biens cédés peut, par anticipation, être confiée au cessionnaire par le juge mais cela comporte le risque que le cessionnaire gère mal les biens dont il n’est pas encore propriétaire : le cessionnaire doit consigner le prix de cession, ou fournir une garantie égale au prix de cession (L642-8). Il gère ensuite les biens sous sa responsabilité.

Le juge peut aussi autoriser dans le cadre du plan de cession, la conclusion d’un contrat de location gérance, en attendant la passation des actes de cession. La cession effective doit intervenir dans les 2 ans du plan de cession (L642-13). Le contrat entrera en vigueur immédiatement et durera jusqu’à la cession effective. Il y a des adaptations par rapport aux articles relatifs à la location gérance dans le code de commerce.

  1. la cession des contrats.

Le plan de cession englobe les contrats dont le débiteur est titulaire et qui peuvent intéresser le repreneur. Ces contrats peuvent être nécessaires au maintien de l’activité. Lorsqu’il y a cession, il faut le consentement du cédant et du cessionnaire. La cession du contrat supposerait dans le cas d’une franchise l’accord du franchisé mais en liquidation ce n’est pas la peine, le repreneur doit lui consentir à la reprise et le franchiseur ? La loi prévoit la possibilité d’imposer la cession des contrats et donc de l’imposer au franchiseur, ceci quelles que soient les clauses contraires qui s’y opposeraient.

L’entreprise mise en liquidation judiciaire est une entreprise sans doute engagée dans différents contrats. Ces contrats en cours d’exécution peuvent intéresser le cessionnaire. Le régime de cession de ces contrats est dérogatoire : possibilité pour le tribunal d’imposer la cession d’un contrat nonobstant toute clause contraire.

  1. a) les contrats de travail.

Cette cession vise normalement le maintien de l’emploi (L1224-1CW) : en cas de changement de la situation juridique de l’employeur, il y a transmission des contrats de travail de plein droit au nouvel employeur donc le cessionnaire mais certains licenciements peuvent avoir été prévus dans le plan de cession, dans les mêmes conditions que pour le redressement judiciaire mais simplifié (L642-5 al.4 et L631-19). Ce régime dérogatoire prévoit la consultation de divers organes de la procédure (institutions représentatives du personnel, inspection du travail), préciser le nombre de licenciements, les catégories de salariés licencié etc. Le licenciement s’opère sur simple notification dans le mois qui suit la décision arrêtant le plan de cession, par le liquidateur.

  1. b) les contrats nécessaires au maintien de l’activité.

L’art. L642-7CW permet au juge d’imposer la cession de certains contrats, si ces contrats sont nécessaires au maintien de l’activité. Le tribunal dispose en la matière d’un pouvoir d’appréciation.

Certains contrats sont spécialement visés(contrat de crédit-bail, de location). Pour les contrats de fourniture de biens ou de services, le tribunal dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour en ordonner le transfert ou la cession.

Certains contrats échappent à ce pouvoir d’appréciation notamment lorsque le débiteur est propriétaire de valeurs mobilières qui matérialisent un contrat de société, le tribunal ne pouvant pas imposer le rachat. Il faudra donc les céder et le prix de cession concourra à l’apurement du passif. Pour les contrats conclus intuitu personae, le texte ne précise rien. Les juges du fond ne reconnaissent pas cette possibilité. En ce sens, les juges du fond ne se sont pas reconnus le pouvoir d’ordonner le transfert d’un contrat de distribution conclu intuitu personae (CA Paris 15/12/1992).

Lorsque la cession est décidée par le tribunal, avec ou sans accord du repreneur, il y a plusieurs problèmes. Le cocontractant se voit imposer un repreneur et est convoqué à l’audience : il peut faire valoir son point de vue mais le tribunal décide. S’il n’est pas d’accord avec la décision du tribunal, il peut faire appel de la partie du jugement qui emporte cession du contrat.

Le contrat cédé peut déjà avoir produit des dettes échues (antérieures), lesquelles sont considérées comme antérieures et réglées dans le cadre du plan d’apurement du passif (bail ; com.14/04/1992).

Le contrat une fois cédé et repris par le cessionnaire, doit être exécuté aux conditions en vigueur au jour de l’ouverture de la procédure de cession mais si le débiteur, pour l’exécution de ce contrat, bénéficiait d’une caution ou d’une garantie, le contrat cédé au repreneur n’en bénéficie pas. La caution n’est pas tenue de poursuivre sa garantie car elle n’a pas choisi le nouveau débiteur (com.1/10/1997) et donc la caution cesse dès la transmission du contrat. Question très controversée et dont la solution est loin d’être fixée car pas d’uniformité en jurisprudence.

Le contrat de bail bénéficie d’un régime particulier en la matière : le cessionnaire du contrat ne pourra lever l’option d’achat qu’à condition de payer les sommes restant dues à l’organisme de crédit (L642-7 al.4).

  1. les engagements contractés dans le plan par le repreneur.
  2. les obligations pécuniaires.

Le repreneur doit s’acquitter du prix de cession.L’art. L642-1 dispose que l’objectif d’apurement du passif n’est pas le premier objectif. Le prix versé par le repreneur en contrepartie de l’acquisition des actifs, est destiné à être réparti entre tous les créanciers.

Les créanciers titulaires de sûretés peuvent faire valoir leur droit de préférence. Le tribunal, dans le cadre du plan de cession, doit décider d’une valeur pour chaque bien cédé qui serait grevé d’une sûreté. Les créanciers qui disposent d’une sûreté spéciale sur un bien cédé exercent leur droit de préférence sur la quote-part du prix de cession affectée à ce bien : le prix de cession est décomposé partiellement pour chacun des biens grevés d’une sûreté. Ces créanciers ne disposent d’aucun pouvoir de contrôle sur la décision du tribunal concernant la valeur de la quote-part correspondant au prix du bien grevé d’une sûreté.

Le paiement complet du prix emporte purge des inscriptions grevant les biens compris dans la cession : le cessionnaire acquéreur est dispensé de se soumettre aux formalités de purge des inscriptions portant sur les sûretés. Ces formalités comportent normalement, au bénéfice des créanciers, un droit de surenchère qui n’existe pas ici. Si une quote-part n’a pas été honorée, ils deviennent de simples créanciers chirographaires. Cette raison est liée à l’existence même du plan de cession qui vise à sauver les actifs de l’entreprise en les faisant reprendre par un cessionnaire.

Par exception, la loi de 2005 a recherché une solution plus favorable en cas de crédit consenti à une entreprise (au débiteur). Normalement, le cessionnaire ne reprend pas le passif à sa charge ie le montant des échéances à verser à l’établissement de crédit, ce qui ne convient pas aux organismes de crédit.

Quand l’entreprise en liquidation judiciaire était engagée dans un contrat de prêt, le cessionnaire devait-il ou non reprendre le crédit ? La réponse est affirmative, l’art. L642-12 al.4 a prévu la possibilité, en cas de crédit consenti à une entreprise, pour le paiement d’un bien garanti par une sûreté, mobilière ou immobilière, de transmettre la charge de cette sûreté au cessionnaire qui convient avec le créancier quelles échéances il lui réglera. Cela ne porte que sur les échéances à venir à compter du transfert de propriété mais ne s’impose pas à l’organisme de crédit. Le tribunal n’a aucun pouvoir d’appréciation dans la mesure où le bien acheté à crédit a été transféré au cessionnaire (la charge du crédit est transférée de plein droit au cessionnaire). La loi prévoit cependant une possibilité pour le cessionnaire et le créancier titulaire de la sûreté de déroger à cette règle (report d’échéances).

Le cessionnaire ne prend pas à sa charge le passif du débiteur, qui doit être apuré en tout ou en partie par le prix de cession (dans le cas normal).L’esprit de la loi est plutôt hostile à la possibilité pour le cessionnaire de reprendre certaines dettes du cédant, impliquant qu’un créancier serait alors avantagé par rapport aux autres. Cela remettrait en cause le principe d’égalité entre créanciers. Cependant, les tribunaux se sont prononcés en faveur d’une telle reprise (com.3/01/1995) qui peut résulter d’une clause spéciale dans l’acte de cession l’engageant à payer une dette antérieure du cédant (reprise d’un cautionnement consenti par le débiteur cédant).

  1. les obligations non-pécuniaires.
  2. c) garantir le paiement du prix.

Le paiement du prix doit permettre l’apurement du passif. La seule garantie dont on dispose concernant le paiement du prix, hormis des sûretés consenties par le cessionnaire que pourrait exiger le tribunal, sont les biens qu’il a acquis. Il en résulte une inaliénabilité de tous les biens corporels et incorporels (acquis par le cessionnaire dans le cadre du plan de cession) qui figurent dans l’actif cédé tant que le prix de cession n’est pas intégralement payé (L642-9).

Les stocks échappent à cette règle car ils ont vocation à être aliénés.

L’inaliénabilité est un principe que le tribunal peut moduler. L’art. L642-10 prévoit la possibilité pour le tribunal d’imposer dans le plan de cession une clause d’inaliénabilité de tout ou partie des biens cédés (y compris les stocks) pour une durée qu’il fixe ou gel de l’actif cédé. Cette inaliénabilité peut aussi être levée par le tribunal qui peut autoriser, par exemple, l’utilisation de certains biens aux fins de garantie ou l’aliénation de tout ou partie des biens. Le créancier peut avoir intérêt économiquement à aliéner le bien et il devra donc demander l’autorisation du tribunal.

  1. d) assurer la pérennité de l’entreprise cédée.

La cession ne doit pas aboutir à la disparition de l’entreprise. Le cessionnaire peut être amené à prendre des engagements pour l’emploi, le financement de l’activité, l’exécution du plan etc. Ce sont là des engagements non-pécuniaires. Le tribunal se détermine en fonction notamment de ces engagements non pécuniaires pris par le cessionnaire dans son offre de reprise et pas seulement sur le prix de cession. S’ils sont homologués par le tribunal dans le cadre du plan de cession, ils doivent être respectés.

  1. l’inexécution du plan de cession.

L’exécution du plan de cession est soumise à un contrôle du plan régulier par le liquidateur. Normalement, le cessionnaire doit rendre compte au liquidateur des engagements qu’il a contractés. En cas d’inexécution par le cessionnaire, le tribunal peut prononcer la résolution judiciaire du plan, d’office ou à la demande des organes de la procédure ou même de tout intéressé (L642-11). La liquidation conduit à la disparition du débiteur.

Régime dérogatoire de la résolution car l’entreprise a disparu. Quelle que soit la bonne ou mauvaise exécution par le repreneur, la liquidation et le versement du prix demeure acquis ie que cette résolution n’entraîne pas une remise en cause de l’ensemble du plan de cession (sinon il devrait y avoir des restitutions de biens faites par le cessionnaire, or l’entreprise a disparu) et ne débouche pas sur l’ouverture d’une autre procédure. Le tribunal décide alors des actes passés qui seront eux-mêmes résolus (parfois restitution impossible, souplesse dans le dispositif). Seuls seront résolus les actes qui ne doivent pas entrainer la restitution de biens et ceux qui ne nécessitent pas de restitution. Plutôt que la résolution pure et simple du plan de cession, on peut envisager d’autres mesures : exécution forcée, action en responsabilité contre le repreneur.

Section 3 : L’action en comblement du passif.

Depuis l’ordonnance de 2008, la seule sanction qui existe contre les dirigeants, c’est l’action en comblement du passif, action en liquidation. C’est une action dirigée contre les dirigeants d’une entreprise et qui a pour objet de les condamner à combler le passif. L’obligation aux dettes sociales a été abrogée dans l’ordonnance de 2008.

  • 1. Le domaine de l’action en comblement du passif.

Peuvent être condamnés à combler le passif de l’entreprise, toutes les personnes morales à l’égard desquelles a été ouverte une procédure de liquidation judiciaire, tous les dirigeants de la personne morale (dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non, occultes ou apparents, retiré, …). Les salariés cadres dirigeants ne sont pas affectés. Attention, il ne faut pas confondre les organes de surveillance avec les membres de la personne morale qui ne peuvent pas se voir intenter une action en comblement du passif, hormis s’ils se sont immiscés dans la gestion de l’entreprise.

Pour les dirigeants de fait c’est le comportement qui est important. Il faut qu’ils se soient immiscés dans la gestion de la personne morale (ex : une société-mère qui s’immisce dans la gestion de sa filiale).

Les tribunaux sont d’une extrême prudence avec les dirigeants de fait. On peut agir contre un dirigeant retiré si on démontre que l’insuffisance d’actif résulte de l’époque où il était en fonction (1/07/1975). On pourrait actionner les héritiers qui recueillent l’actif et le passif du décédé (arrêt de 1980).

  • 2. Le régime juridique de l’action en comblement du passif.
  1. les conditions d’exercice de l’action.

Cette action ne peut intervenir qu’en cas de liquidation judiciaire et non pas en matière de sauvegarde ou de redressement judiciaire. C’est une action en responsabilité civile.

L’action nécessite un préjudice particulier qui est l’insuffisance d’actif (chaque fois qu’il y a insuffisance d’actif la société subit un préjudice).

Il faut ensuite démontrer une ou des fautes commises par le dirigeant poursuivi : faute de gestion (de commission ou d’omission ; ex :com.24/04/1981, un dirigeant s’était désintéressé de ses fonctions, cette faute d’omission constituant une faute de gestion). Une seule faute peut suffire mais le plus souvent ce sont plusieurs fautes qui sont relevées, imputables à plusieurs dirigeants. La gravité de la faute n’intervient pas forcément, ce qui compte c’est le lien de causalité entre la faute et l’insuffisance d’actif. Toutefois, depuis com.26/01/1976, le tribunal peut prendre en compte la gravité pour apprécier le montant de la condamnation.Enfin il faut un lien de causalité entre la faute et l’insuffisance d’actifs. Relativement facile à établir en cas de faute caractérisée.

Si ces conditions sont réunies, les organes de la procédure peuvent saisir le tribunal, le plus souvent c’est le liquidateur mais ce peut être le Ministère public. Le tribunal ne peut plus se saisir d’office pour alléger les risques encourus par les dirigeants. Le tribunal compétent est celui qui a ouvert la procédure, l’action se prescrit par 3 ans à compter jugement d’ouverture. L’art. L651-3 prévoit que la majorité des créanciers contrôleurs peuvent déclencher l’action quand le liquidateur a oublié de le faire.

Cette action n’a d’intérêt que si le dirigeant a un patrimoine conséquent. Il est donc utile de connaître la situation patrimoniale du dirigeant. C’est le tribunal qui charge un juge d’obtenir toute information sur sa situation. Aucun intérêt si le patrimoine n’a pas de répondant.

  1. le résultat de l’action.

Les dirigeants doivent supporter toute ou partie du passif social et ceci, contrairement au droit commun où seule la personne morale devrait assumer sa responsabilité. Le tribunal a un très large pouvoir d’appréciation et il n’est pas tenu de réparer l’intégralité du préjudice (« il peut »). S’il y a plusieurs dirigeants, ceux-ci peuvent tous être condamnés ou seulement certains d’entre eux. Une condamnation solidaire est possible.

La réparation qui est versée revient dans le patrimoine du débiteur et est répartie entre tous les créanciers au marc le franc.

Tous les créanciers sont-ils mis sur un même pied d’égalité ?

La formule le laisserait penser mais certains ont plaidé pour que le droit de préférence des créanciers privilégiés soit maintenu. La répartition au marc le franc s’effectue sans accorder un rang prioritaire aux créanciers privilégiés (com.20/04/1997).

La loi a prévu une disposition opportune : les dirigeants qui seraient à la fois créanciers de la société et condamnés à combler le passif ne peuvent pas participer aux répartitions jusqu’à concurrence des sommes pour lesquelles ils ont été condamnés (ils sont à la fois créanciers et débiteurs).

Le président du tribunal peut prévoir toute mesure conservatoire utile à l’égard des biens des dirigeants. Si les dirigeants ne paient pas, ils peuvent être condamnés à subir la faillite personnelle (653-6 : interdiction de diriger une entreprise). Cette condamnation au comblement du passif ne peut pas concerner les créanciers dispensateurs de crédit. L’art. L650-1 a institué depuis la loi de 2005, un principe d’irresponsabilité au bénéfice de cette catégorie de créanciers dispensateurs de crédits. Exceptions : la fraude, l’immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur et lorsque le créancier a pris des sûretés qui se trouvent être disproportionnées par rapport au montant des créances.

[1]Entreprise individuelle à responsabilité limitée créée en 06/2010