Droit des libéralités et des successions

DROIT DES SUCCESSIONS ET DES LIBERALITES

La réforme du droit des successions et des libéralités est entrée en vigueur en France le 1er janvier 2007. S’attachant à réformer un domaine complexe et sensible demeuré (quasi) inchangé depuis 1804, ces nouvelles règles ont eu pour double objectif de donner plus de souplesse et liberté pour organiser les successions et de faciliter leur règlement.

Une dernière loi en date du 22 août 2007 est venue compléter ce nouvel édifice en modifiant de manière radicale le montant des droits de successions. Les mesures significatives de cette réforme d’ampleur sont ici présentées, sans oublier l’épineuse question de la loi applicable. Voici le plan du cours de droit des successions et des libéralités sur www.cours-de-droit.net

  • · Présentation de la matière
  • · Le principe de l’héritage
  • · Les outils de la transmission : les successions et les libéralités
  • o La définition des termes de succession et de libéralité
  • o Les liens entre successions et libéralités

· PARTIE 1 :LES SUCCESSIONS

  • · Introduction
  • · La nature de la succession
  • · Les caractères du droit des successions

· TITRE PRELIMINAIRE : LES SOURCES ET L’EVOLUTION DU DROIT DES SUCCESSIONS

  • o Le droit romain
  • o L’Ancien droit
  • o Le droit intermédiaire, le droit révolutionnaire
  • o Le Code Civil
  • o Le droit contemporain
  • · Des réformes fragmentées
  • · Les réformes d’ensemble

Résultat de recherche d'images pour "droit des successions"

· TITRE 1 : LA DEVOLUTION DE LA SUCCESSION

  • o Sous-titre 1 : Les conditions de la succession
  • · CHAPITRE 1 : L’ouverture de la succession
  • o Section 1 : Les causes d’ouverture de la succession
  • · Section 2 : La date d’ouverture de la succession
  • o Les règles générales de fixation de la date d’ouverture de la succession
  • Les principes
  • Les enjeux attachés à la date de l’ouverture de la succession
  • o Le cas particulier du décès de plusieurs personnes dans un même événement
  • o Section 3 : Le lieu d’ouverture de la succession
  • Détermination du lieu de l’ouverture
  • Les enjeux liés ou attachés au lieu d’ouverture de la succession
  • · CHAPITRE 2 : Les qualités requises pour succéder
  • · La condition d’existence
  • · Ne pas être indigne de succéder
  • Les causes d’indignité
  • o Les causes d’indignité de plein droit
  • o Les causes d’indignité facultative
  • La mise en œuvre de l’indignité successorale
  • Les effets de l’indignité successorale
  • · L’exclusion de la succession par rapport à l’indigne lui-même
  • · Les effets de l’indignité par rapport aux enfants de l’indigne
  • · CHAPITRE 3 : La preuve de la qualité d’héritier
  • o La preuve non contentieuse de la qualité d’héritier
  • L’acte de notoriété
  • Les autres modes de preuves de la qualité d’héritier
  • o La preuve contentieuse de la qualité d’héritier
  • Les conditions d’exercice de l’action
  • Les effets de l’action
  • o Sous-titre 2 : Les modalités de la dévolution de la succession
  • · CHAPITRE 1 : La dévolution légale
  • o Sous-chapitre 1 : La succession ordinaire
  • o Section 1 : Les droits des parents en l’absence de conjoint successible
  • o Sous-section 1 : Les principes de dévolution : la règle de l’ordre et du degré
  • · Le classement par ordre
  • o La présentation des 4 ordres
  • Les enfants et leurs descendants
  • Les père et mère, les frères et sœurs et leurs descendants (= neveu, nièce…)
  • Les ascendants autres que les père et mère que l’on qualifie d’ascendants ordinaires c’est-à-dire les grands-parents, arrières grands-parents …
  • Les collatéraux ordinaires (= autres que les frères et sœurs et leurs descendants) tel que les cousins germains
  • o L’articulation hiérarchique des ordres
  • · Le classement par degré
  • o La ligne directe
  • o La ligne collatérale
  • o Sous-section 2 : Les correctifs
  • · La représentation
  • o L’objectif de la représentation
  • o Le domaine de la représentation
  • Les successions qui sont concernées
  • Les bénéficiaires de la représentation
  • · Les conditions relatives au représenté
  • · Les conditions relatives au représentant
  • o Les effets de la représentation
  • · La fente successorale
  • o Le cas des ascendants
  • o Le cas des collatéraux ordinaires
  • o Section 2 : Les droits du conjoint successible
  • o Sous-section 1 : La qualité d’héritier du conjoint
  • · La notion de conjoint
  • o La situation du concubin
  • o La situation du partenaire
  • · La qualité de successible
  • o Sous-section 2 : Les droits du conjoint successible
  • · Les droits du conjoint successible dans la succession du défunt
  • o Sous. I. Le contenu des droits du conjoint dans la S
  • o La vocation successorale de droit commun du conjoint
  • Les hypothèses de concours
  • · Le concours avec les enfants ou leurs descendants
  • o a1. Les enfants tous issus des 2 époux
  • Les termes de l’option –
  • Le régime juridique de l’option successorale du conjoint –
  • o a2. Les enfants qui ne sont pas tous issus des 2 époux
  • · Le concours du conjoint avec des ascendants privilégiés (= père et mère du défunt)
  • L’absence de concours : les hypothèses de monopole successoral
  • · Les collatéraux privilégiés
  • · Les ascendants ordinaires et les collatéraux ordinaires
  • o Le droit d’habitation viager sur le logement
  • Les conditions de ce droit viager
  • L’exercice du droit viager
  • o Sous II. La liquidation des droits du conjoint survivant
  • o La liquidation des droits en propriété
  • La détermination de la masse de calcul
  • La détermination de la masse d’exercice
  • o La liquidation des droits en usufruit
  • o Le cas particulier des libéralités faites au conjoint et du droit viager sur le logement
  • Les libéralités faites au conjoint
  • L’imputation du droit viager sur le logement
  • · Les droits du conjoint contre la succession
  • o Le droit temporaire de jouissance gratuite
  • Les conditions d’attribution du droit de jouissance
  • Les effets du droit de jouissance gratuite
  • o Le droit à pension contre la succession
  • Les conditions du droit à pension
  • o Sous-chapitre 2 : Les successions particulières ou anomales
  • o Section 1 : La prise en compte de l’origine du bien
  • o Sous-section 1 : Le droit de retour des père et mère
  • · Les conditions du droit de retour des parents du défunt
  • o Les conditions relatives aux personnes
  • o Conditions relatives aux biens
  • · L’exercice du droit de retour
  • o Les conditions d’exercice du droit de retour
  • o Les modalités d’exercice du droit de retour
  • o Sous-section 2: Le droit de retour des collatéraux privilégiés
  • · Les conditions du droit de retour des collatéraux privilégiés
  • o Les conditions relatives aux personnes
  • o Les conditions relatives aux biens
  • · L’exercice du droit de retour
  • o Sous-section 3 : le droit de retour légal dans la famille de l’adopté simple
  • · Les conditions du droit de retour dans la famille de l’adopté simple
  • · Les effets du droit de retour
  • o Section 2 : Les successions anomales fondées sur la nature du bien
  • o Sous-chapitre 3 : Les successions dévolues à l’Etat
  • · CHAPITTRE 2 : La dévolution volontaire de la succession
  • o Section 1 : Les libéralités, instrument de dévolution volontaire des successions
  • · La dévolution par acte unilatéral
  • · La dévolution par contrat
  • o La dévolution contractuelle entre vifs
  • o Le dévolution contractuelle à cause de mort
  • Les caractères des pactes sur succession futures
  • Les pactes sur successions futures autorisés par la loi
  • · Les contrats successoraux entre époux
  • · Les contrats successoraux entre les autres héritiers
  • o Section 2 : La limite au pouvoir de la volonté : la réserve héréditaire
  • · Les héritiers réservataires
  • o Les descendants réservataires
  • o Le conjoint réservataire
  • · La détermination de la réserve
  • o La réserve des descendants
  • La quotité disponible ordinaire en l’absence de libéralité faites au conjoint
  • · L’enfant pré décédé
  • · L’enfant renonçant
  • · L’enfant indigne
  • La quotité disponible spéciale entre époux (= hypothèse de libéralité faites au conjoint)
  • · Le contenu de la quotité disponible spéciale entre époux
  • · Les mesures de protection en faveur des descendants
  • o La réserve du conjoint

· TITRE 2 : La transmission de la succession

  • · CHAPITRE 1 : L’option successorale
  • o Section 1 : Le régime de l’option successorale
  • · Les titulaires de l’option
  • o Les titulaires directs de l’option : les successibles
  • o L’exercice de l’option par les créanciers personnels de l’héritier
  • · Les caractères de l’option
  • o L’option est un acte juridique volontaire
  • o L’option est un acte successoral
  • L’option est soumise à la prohibition des pactes sur succession futures
  • L’option doit être pure et simple
  • L’option est libre
  • L’option est indivisible
  • L’option est irrévocable
  • L’option est transmissible
  • L’option est rétroactive
  • · Le délai d’exercice de l’option
  • o Section 2 : Le contenu de l’option
  • · L’acceptation pure et simple
  • o Sa forme
  • o Les effets de l’acceptation pure et simple
  • L’obligation au passif
  • Le gage des créanciers
  • · Le principe de la confusion des patrimoines
  • · Le tempérament : la séparation des patrimoines
  • · L’acceptation à concurrence de l’actif net
  • o Les conditions de l’acceptation à concurrence de l’actif net
  • o Les effets
  • La séparation des patrimoines
  • · Séparation des patrimoines et l’obligation au passif
  • · Séparation des patrimoines et conservation d’un bien
  • La gestion de l’actif successoral
  • Le règlement du passif successoral
  • · La renonciation à la succession
  • o Les formes de la renonciation
  • o Les effets de la renonciation
  • S’agissant du renonçant lui-même
  • S’agissant des tiers
  • · CHAPITRE 2 : L’appréhension de la succession
  • · Les successeurs saisis
  • o Les héritiers légaux
  • o Les héritiers testamentaires
  • Le légataire non héritier
  • Le légataire héritier
  • · Les successeurs non saisis

· TITRE 3 : L’administration de la succession

  • · CHAPITRE 1 : L’administration par les héritiers
  • · L’indivision légale
  • o Les pouvoirs des indivisaires
  • Les pouvoirs des indivisaires en fonction de la qualification de l’acte
  • · Les actes accomplis par un indivisaire seul
  • · Les actes accomplis à la majorité des 2/3
  • · Les actes à l’unanimité
  • Les mesures de crise
  • o Les droits des indivisaires
  • · L’indivision conventionnelle
  • · CHAPITRE 2 : L’administration par un mandataire
  • o Section 1 : Le mandat à effet posthume
  • · la formation du mandat
  • o Les parties au mandat
  • o Les conditions du mandat
  • Les conditions de fond
  • Les conditions de forme
  • · Les effets du mandat
  • o Section 2 : Les mandats conventionnel et judiciaire
  • · Le mandat conventionnel
  • · Le mandat judiciaire
  • o La désignation du mandataire successoral
  • o Les pouvoirs du mandataire successoral
  • Le contenu des pouvoirs
  • Les limites aux pouvoirs du mandataire

· TITRE 4 : Le partage de la succession

  • · Section 1 : Le droit au partage et ses tempéraments
  • · Le sursis au partage
  • · Le maintien judiciaire de l’indivision
  • · Attribution éliminatoire
  • · La convention d’indivision

· PARTIE 2 : Les libéralités

  • · CHAPITRE 1 : Les règles communes aux libéralités
  • · Section 1 : Les règles générales de validité
  • · Le consentement
  • o L’insanité d’esprit
  • o Les vices du consentement
  • · La capacité
  • o Le moment de l’appréciation de la capacité
  • Dans le cas des legs
  • Dans le cas des donations
  • o Libéralités et droit commun des incapacités
  • La capacité de disposer à titre gratuit
  • · Le cas du mineur
  • · Le cas du majeur
  • La capacité de recevoir
  • · Les personnes existantes
  • · La personne doit être identifiable
  • · La mise en œuvre de la capacité de recevoir
  • o Les incapacités spéciales
  • · L’objet des libéralités
  • · La cause
  • · Section 2 : Les modalités des libéralités
  • · La libéralité avec charge
  • · La libéralité assortie de condition
  • o La clause d’inaliénabilité
  • o Les clauses de célibat ou de viduité
  • · La révision des charges et des conditions
  • · Section 3 : La reconnaissance des libéralités graduelles ou résiduelles
  • · Les libéralités graduelles
  • o Les conditions de la libéralité graduelle
  • La forme
  • Les conditions relatives au bénéficiaire
  • Les conditions relatives aux biens
  • o Les effets de la libéralité graduelle
  • · La libéralité résiduelle
  • o Les conditions de la libéralité résiduelle
  • o Les effets de la libéralité résiduelle
  • · CHAPITRE 2 : Les testaments
  • · Section 1 : Le testament olographe
  • · La forme manuscrite du testament olographe
  • o Un texte manuscrit
  • o Un texte écrit de la main du testateur
  • o Les modifications
  • · La signature manuscrite
  • · La date manuscrite
  • · Section 2 : Le testament authentique
  • · Les personnes intervenant à l’acte
  • · La procédure
  • · Section 3 : Le testament mystique

Cette matière constitue un outil juridique précieux pour le monde des vivants. C’est grâce à une maitrise parfaite des règles du droit des successions et des libéralités que pourra s’organiser au mieux la vie des vivants qui représente ce que l’on peut avoir de plus cher à savoir son conjoint et ses enfants.

C’est une matière qui a une dynamique mécanique : l’art du professionnel, le notaire, consistera à mettre en œuvre les stratégies les plus adaptées aux objectifs poursuivis.

Présentation de la matière

Le droit des successions et des libéralités organise juridiquement l’aspiration des hommes à transmettre leur patrimoine. Les successions et les libéralités : donations, testaments sont 2 modes de transmission de la propriété. Deux outils utilisés concurremment pour transmettre un héritage, transmettre ses biens d’une génération à l’autre : ce qui pose au préalable la question même de l’héritage.

1. Le principe de l’héritage

La notion d’héritage a été longtemps critiquée et l’est encore. La question est de savoir si l’héritage doit exister et s’il existe un droit d’hériter.

Et 2 tendances s’affrontent sur cette question :

  • la première conteste la possibilité même de l’héritage. Cette contestation trouve sa justification sur une critique du principe même de propriété qui est remis en cause ce qui conduit fort logiquement à remettre en cause également son prolongement c’est-à-dire la possibilité pour une personne de transmettre ses biens après son décès. Au delà de la critique du droit de propriété lui même, les opposants à la théorie de l’héritage font valoir un certain nombre d’arguments moraux. Ils considèrent que l’héritage instaure des inégalités injustifiées car elles ne sont fondées ni sur le talent ni sur le mérite individuel. La morale peut accepter des inégalités qui résultent du travail mais pas de la naissance. L’aboutissement de cette conception critique de l’héritage devrait alors conduire à une suppression de la propriété privée, suppression qui pourrait se réaliser en douceur par une expropriation privée différée à la mort du défunt. Pour les tenants de cette conception, l’héritage n’a pas lieu d’être et c’est l’Etat qui devrait appréhender les biens de la succession pour les utiliser dans l’intérêt commun.

  • la seconde au contraire repose sur une reconnaissance, une admission du droit de propriété. Et dans ces conditions le caractère absolu du droit de propriété doit autoriser son titulaire à disposer de son patrimoine après son décès. Le droit français n’a pas remis en cause la faculté de transmettre ses biens par succession. L’un des arguments essentiel retenu pour justifier la transmission successorale de la propriété est un critère économique. En effet, l’une des critiques formulées à l’encontre de la disparition de la transmission de la propriété par succession tenait à son impact négatif lié à un amoindrissement du droit de liberté. Une propriété qui ne transmettrait pas par succession transformerait les comportements qui deviendraient des comportements de simple usufruitier des biens sans égard pour la conservation de leur valeur économique. Le principe de transmissibilité successorale de la propriété est donc conservé. Et la seule question qui subsiste encore aujourd’hui est celle de savoir s’il existe encore un droit à l’héritage pour les héritiers. Le problème étant alors circonscrit à la question de la répartition de l’héritage. Concernant ce problème de répartition, la question posée et compte tenu de l’affaiblissement de la cohésion familiale, la volonté de l’individu ne devrait-elle pas primée et permettre à l’individu de disposer de ses biens comme il l’entend et au profit de qui il veut.

Une fois admis le principe de l’héritage et son corolaire, la faculté de transmettre son patrimoine. Il reste à préciser ses outils : les successions et les libéralités.

2.Les outils de la transmission : les successions et les libéralités

La coexistence des 2 outils de la transmission de l’héritage rend nécessaire de préciser ces 2 notions avant de voir ensuite le lien qui les unies.

a. La définition des termes de succession et de libéralité

Le terme de successionest un terme qui possède dans le langage juridique un double sens :

  • dans son sens propre : le terme de succession désigne la transmission du patrimoine d’une personne décédée à une ou plusieurs personnes vivantes. La succession sera qualifiée de succession légale ou «ab intestat» (= lorsqu’elle est organisée par la loi en l’absence de testament). Lorsqu’elle sera organisée par testament, on parlera de succession volontaire ou testamentaire. La succession constitue en ce sens un mode d’acquisition à cause de mort et à titre gratuit de la propriété et c’est dans ce sens que le terme de succession est employé par le code civil lorsqu’il envisage la succession comme un mode d’acquisition de la propriété parmi d’autres. En effet, l’ensemble des règles régissant les successions figure dans la partie du Code civil intitulé « des différentes manières dont on acquière la propriété et dont le premier article est l’article 711 qui énonce la propriété des biens qui s’acquière par succession, donation entre vifs ou testamentaire ou par l’effet des obligations.

    La succession en tant que mode de transmission de la propriété établit un lien entre 2 personnes : la personne dont les droits sont transmit, l’auteur, et la personne qui recueille les biens transmis, l’ayant cause. Les termes d’auteur et d’ayant cause sont en quelque sorte des termes génériques qui reçoivent une terminologie particulière dans la relation successorale. L’auteur c’est-à-dire le défunt, sera dénommé de manière usuel le de cujus, l’ayant cause c’est-à-dire le successeur sera qualifié suivant les cas d’héritier ou de légataire selon l’origine précise de la naissance de ses droits.

  • dans un sens pratique, le terme de succession est également utilisé pour désigner l’ensemble des biens transmis.

Définition des libéralités : elles recouvrent quant à elles un ensemble particulier d’actes à titre gratuit. Les donations qui sont les conventions par lesquelles une personne, le donateur transmet à titre gratuit des biens ou des droits à une autre personne, le donataire. Le testament, lui est un acte juridique unilatéral par lequel une personne dispose de ses biens à cause de mort.

Dans les 2 cas successions et libéralités sont des modes de transmission gratuite de la propriété mais la succession est un mode légal de transmission alors que la donation et le testament sont des modes volontaires de transmission.

b. Les liens entre successions et libéralités

Les successions et libéralités sont 2 matières qui sont liées. D’une part, elles appartiennent toutes les 2 à un même ensemble constitué par les transmissions à titre gratuit. D’autre part, le lien entre succession et libéralité découle directement de la lettre de l’article 721 du Code civil qui déclare que la succession est dévolue selon la loi lorsque le défunt n’a pas disposé de ses biens par des libéralités.

En effet, les libéralités incluent le testament et les donations qui tout deux interviennent dans le règlement successoral.

  • le testament qui détermine le sort du patrimoine du défunt est un acte successoral.

  • les donations qui s’inscrivent généralement dans une anticipation successorale font intervenir deux institutions majeures du droit des successions : la réserve et le rapport des libéralités. La réserve est une institution qui permet d’éviter que certains héritiers soient dépouillés par l’effet des libéralités adressées à d’autres. Le rapport qui oblige l’héritier à rapporter à la succession ce qu’il à pu recevoir du défunt par donation.

Ainsi, même si les successions peuvent être organisées sans que le défunt ait consenti de libéralités dès lors que des libéralités auront été consenties, celles-ci auront nécessairement une influence sur la succession.

Elles risquent, en effet, de rompre l’équilibre par rapport à la répartition voulue par la loi et devront donc être nécessairement prises en compte par les règles du droit de la succession. C’est le droit des successions qui fixe le cadre des libéralités, qui assure l’équilibre entre ces 2 modes de transmission et qui fixe les limites au pouvoir de la volonté. La transmission du patrimoine du défunt est orchestrée à la fois au travers du droit des successions et des libéralités et résulte finalement de la place respective reconnue à la loi et à la volonté pour la transmission. C’est le droit des successions qui fixe les limites au pouvoir de la volonté en restreignant notamment dans certains cas la fraction des biens dont une personne peut disposer. Restriction opérée au moyen de deux mécanismes: la réserve héréditaire et le mécanisme du rapport des libéralités. Et le droit des libéralités utilisera quant à lui la place que lui laisse le droit des successions pour assurer la transmission gratuite et volontaire du patrimoine. On dit que les libéralités sont subordonnées au droit des successions.

Exemple : en droit français, il y a possibilité de rien faire, de rien prévoir (= pas de testament) ou de faire un testament (= être maître de la répartition de son patrimoine). En France, il y a une institution phénoménale la réserve héréditaire c’est-à-dire que l’héritier est protégé par la loi, les parents peuvent pas déshériter leurs enfants.

Les deux matières sont donc inter dépendantes mais le droit des successions étant celui qui fixe le cadre des libéralités la première partie de l’étude sera les successions et la deuxième les libéralités.

PARTIE 1 : LES SUCCESSIONS

Introduction : Deux questions se posent : la nature et le caractère du droit des successions.

1. La nature de la succession

Une fois admis le principe de transmissibilité successorale, on peut s’interroger sur la question de savoir comment doit être organisée cette transmission, qui est compétent pour fixer la dévolution de ces biens? Certes, la succession règle le problème de la transmission des biens du défunt mais l’autre question est celle de savoir qui doit désigner les successeurs?

L’alternative est la suivante : est-ce la loi qui doit désigner les successeurs en s’appuyant sur la notion de devoirs familiaux ou bien est-ce le de cujus lui-même qui doit désigner ses successeurs en fonction de ses affections. Il existe en effet, plusieurs modèles successoraux concevables articulés autour de l’option entre la succession légale, la dévolution des biens est réglée par le législateur et la succession volontaire ou la dévolution est organisée à l’avance par le de cujus.

Les arguments en faveur de la succession légale reposent sur le fait que la succession doit être fondée sur les devoirs familiaux qui ne laissent aucune place à la volonté du défunt. La dévolution de la succession doit donc être réglée par la loi. L’héritage est conçu, ici, comme un moyen de renforcer la cohésion familiale. Les biens doivent revenir à la famille et y être distribués conformément aux principes qui régissent le groupe familial et tenir compte notamment des affections présumées du défunt envers ses parents les plus proches. On considère, ici, que donner un rôle à la volonté pourrait se révéler perturbateur et introduire la désunion et la discorde notamment si le défunt était libre de transmettre l’ensemble de ses biens à l’un de ses enfants en particulier. La volonté pourrait avoir un effet perturbateur mais par ailleurs donner un rôle à la volonté pourrait aboutir à ce qu’elle soit utilisée de façon totalement arbitraire et devenir un instrument de tyrannie domestique qui soumettrait la liberté des plus jeunes au pouvoir économique des anciens (= si tu fais ça, je te déshérite).

A l’inverse, si la succession est conçut effectivement comme un corolaire du droit de propriété, la transmission successorale doit pouvoir être décidée par le défunt lui-même. Elle doit s’opérer par les effets de la volonté individuelle grâce aux instruments de dévolution à titre gratuit tel que le testament ou les instruments de dévolution à titre gratuit entre vifs : les donations.

La succession volontaire est alors la manifestation ultime de la volonté du défunt et le prolongement des prérogatives de son droit de propriété. Le caractère absolu du droit de propriété commande que le propriétaire puisse disposer de ses biens comme il l’entend et que soit donc favorisée la succession volontaire.

La position du droit français sur cette question est une position de compromis entre succession légale et succession volontaire. Les deux modes de dévolution coexistent et sont le résultat d’une longue évolution historique.

2. Les caractères du droit des successions

Le droit des successions est à la fois un droit dépendant et technique.

Un droit dépendant : le droit des successions a pour fonction de régler les conséquences de la mort sur la transmission du patrimoine du défunt. Et dans cette perspective, le règlement successoral sera amené à mettre en œuvre d’autres parties du droit tel que le droit de la famille ou le droit du patrimoine qu’il s’agisse du droit des obligations ou du droit des biens.

Un auteur imminent de la Doctrine a pu dire à propos du droit des successions que c’était « la clé de voûte de la cathédrale juridique du droit civil ».

l dépendance à l’égard du droit de la famille : peut s’agir à l’égard du droit extra patrimonial ou patrimonial de la famille. S’agissant du droit extra patrimonial, il est important de noter que la détermination des personnes appelées à hériter repose presque totalement sur la parenté ce qui impliquera une maitrise parfaite des règles de filiation. Par ailleurs, il ne faut pas négliger le fait que la notion de famille a aujourd’hui évoluée, que la détermination des personnes pourra être fondée aussi sur l’alliance et il faudra donc avoir une maitrise parfaite de la notion de conjoint et il faudra aussi avoir une connaissance précise des différentes structures de couples (= classiquement, le couple est fondé sur le mariage mais il existe aussi sur le pacs ou les concubins). S’agissant du droit patrimonial de la famille, lorsque le défunt sera marié, il sera nécessaire de tenir compte de son régime patrimonial car la liquidation de sa succession s’inscrira à la suite de la liquidation de son régime patrimonial. Une démarche similaire devra être conduite pour les couples pacsés.

l enfin concernant cette dépendance du droit des successions par rapport aux différentes branches du droit : il ne faudra pas oublier l’interférence du droit des biens et maitriser notamment de manière parfaite les techniques de démembrement du droit de propriété (= droit en propriété ou en usufruit pour le conjoint).

Le droit international privé aura aussi sa place car il pourra y avoir des successions qui comporteront un élément d’extranéité (= on peut être propriétaire de biens en France et avoir des biens à l’étranger est posera le problème de l’application des règles de droit international privé pour le règlement successoral.

La fiscalité des successions est un élément aussi fondamental en amont au niveau des conseils qui pourront être donnés.

TITRE PRELIMINAIRE : LES SOURCES ET L’EVOLUTION DU DROIT DES SUCCESSIONS

Le droit des successions actuel réalise, aujourd’hui, un compromis entre succession légale et volontaire et l’aboutissement d’une évolution progressive qui puise ses racines dans l’histoire. Cette évolution se décompose en plusieurs étapes :

  • le droit romain,

  • l’Ancien Droit,

  • le droit intermédiaire

  • le Code Civil

  • le droit contemporain

I. Le droit romain

Le droit romain connaissait à la fois la succession testamentaire et la succession ab intestat. La succession testamentaire prédominait et était régit par un principe de liberté.

La pater familias pouvait décider du sort de l’ensemble de ses biens et le léguer librement à la personne de son choix. La liberté qui lui était reconnue pouvant conduire à une exhérédation totale d’un proche parent, un garde fou lui fut imposé par le biais d’une action spécifique accordée au proche du défunt anormalement exhérédé. Cette action était une action en réduction qui leur permettait d’obtenir une part de la succession qui correspondait au quart de ce qu’ils auraient pu obtenir ab intestat d’où son nom de quart légitime.

A défaut de testament, la succession était dévolue sans considération d’âge ou de sexe au nom du principe d’égalité entre les héritiers. Cette dévolution était organisée sur la base des règles du droit romain issu des Novelles de Justinien et cette dévolution reposait sur la proximité du lien de parenté.

Le système de dévolution étant organisé entre 4 ordres différents :

  • les descendants

  • les ascendants

  • les collatéraux privilégiés (= frères et sœurs ou leur enfant s’ils sont morts) et les autres collatéraux (= cousins…).

  • le conjoint

L’articulation entre ces 4 ordres étaient régit par les principes suivants : l’ordre le plus proche était préféré aux autres, à l’intérieur de chaque ordre le parent le plus proche était préféré au plus éloigné, le conjoint venait en dernier qu’à défaut de représentant dans le dernier ordre. Mais un correctif était prévu pour prendre en compte la situation du conjoint : en effet en présence d’un héritier dans l’un de ces 4 ordres, le conjoint bénéficiait de la QUARTE du conjoint pauvre qui équivalait à un quart de la succession en pleine propriété. Le conjoint avait toujours une vocation subsidiaire.

II. L’Ancien droit

L’Ancien droit se caractérise par son absence d’uniformité liée à l’opposition entre les pays de droit écrit et les pays coutumier :

  • dans les pays de droit écrit (= pays du Sud) prédominait le principe de la dévolution testamentaire qui s’inscrivait dans la tradition romaine et garantissait le respect de la volonté du testateur.

  • dans les pays de coutume (= pays du Nord), l’inspiration germanique, la dévolution légale était prépondérante. La dévolution était prédominée par le souci de conserver les biens dans les familles. Le système se caractérisait par l’absence d’unité du patrimoine du défunt et un principe de dévolution qui était fonction de la nature du bien et de l’origine du bien. Il y avait ainsi un fractionnement de la succession qui était marqué par la distinction entre meuble et immeuble (= nature du bien). Le fractionnement était combiné dans certains cas à la prise en compte de l’origine :

les immeubles provenant de la famille et dénommés propres devaient être dévolus à la famille pour les 4/5ème. C’était la réserve des 4 quints qui revenait en principe aux descendants. A défaut de descendants, on faisait alors intervenir le critère de l’origine du bien et les biens devaient retourner aux ascendants et collatéraux qui les avaient légués. Les biens provenant de la lignée paternelle retournaient dans la lignée paternelle et idem du coté maternel.

les meubles et les acquêts (= biens acquis par le défunt) étaient quant à eux soumis au principe de la liberté testamentaire et suivaient une dévolution analogue à celle du droit romain c’est-à-dire qu’à défaut de testament ses biens étaient dévolus aux parents les plus proches.

L’enfant naturel quant à lui n’avait aucun droit successoral et ne pouvait prétendre qu’à des aliments. Le conjoint était pris en compte dans la succession et le droit coutumier lui attribuant une certaine part, une dote sur la succession du défunt.

III. Le droit intermédiaire, le droit révolutionnaire

Il réalise l’unification des règles applicables à l’ensemble du territoire et instaure un ordre social nouveau et égalitaire. La loi du 17 Nivôse an 2 (= 6 janvier 1994) consacre le principe d’unité de la succession, organise la dévolution successorale fondée sur la parentèle et limite la liberté testamentaire. Le principe d’unité de la succession est consacré par l’article 62 qui déclare que la loi ne reconnaît plus aucune différence dans la nature de biens ou leur origine pour régler la succession. Et qu’il n’y a plus lieu de distinguer s’il s’agit de biens meubles ou immeubles ou de biens propres ou acquêts.

  • le système de la parentèle est organisé autour de 4 ordres de succession : les descendants, les frères et sœurs du défunt et leurs descendants, les pères et mères et les autres collatéraux et ascendants.

  • la liberté testamentaire est limitée à une quotité minimale à savoir 1/10 de la succession en présence de parents en ligne directe et 1/6 en présence de collatéraux.

IV. Le Code Civil

A l’issu de la codification, le principe d’unité de la succession est maintenu ainsi que l’idéologie égalitaire. Les règles de dévolution sont empruntées au droit romain et la dévolution s’opère selon la proximité du lien de parenté dans l’ordre suivant :

  • les descendants

  • les pères et mères et les collatéraux privilégiés (= frères et sœurs)

  • les ascendants ordinaires

  • collatéraux ordinaires

Le cercle de famille n’est plus illimité et le droit de succéder s’arrête au 12ème degré. Le sort, les droits du conjoint étant conditionnés par la présence d’héritiers dans les 4 ordres successifs se trouvent donc améliorés par cette limitation du droit d’accéder au 12 ème degré.

Quant aux enfants naturels, ils n’ont quant à eux que des droits très limités et amoindrit par rapport à ceux qui sont reconnus aux enfants issus du mariage. Leur vocation successorale est diminuée de moitié.

V. Le droit contemporain

Le droit contemporain des successions est caractérisé par une succession de réformes fragmentées avant une réforme d’ensemble de la matière réalisée au travers de 2 lois fondamentales :

  • loi du 3 décembre 2001

  • loi 23 juin 2006

1. Des réformes fragmentées

Les retouches apportées progressivement au droit des successions reflètent l’évolution de la famille contemporaine. Le cercle des parents appelé à la succession va être restreint et le seuil de successibilité va être ramené du 12ème degré au 6ème degré par une loi du 31 décembre 1917. Par ailleurs, prenant acte des transformations de la famille et notamment de la reconnaissance de l’importance donnée au couple et aux enfants, le législateur va être conduit à améliorer à la fois les droits du conjoint et les droits des enfants naturels.

  • S’agissant des droits du conjoint, il va se voir reconnaître des droits successoraux au travers de la loi du 9 mars 1891 puis de l’ordonnance du 23 décembre 1958 qui vont lui reconnaître implicitement la qualité d’héritier en supprimant l’obligation de demander la vérification de ses droits pour pouvoir appréhender la succession grâce à la saisine légale qui lui est reconnue.

  • S’agissant de l’enfant naturel, il se verra reconnaître la qualité d’héritier par une loi de 1896 et ses droits seront placés à égalité avec ceux de l’enfant légitime (= issu du mariage) lors de la réforme de la filiation de 1972. Cette loi va ainsi posée le principe d’égalité de statut entre les enfants légitimes et naturels, tout en édictant néanmoins en présence d’enfants adultérins un certains nombre de règles tendant à protéger la famille légitime. La loi de 1972 maintient une discrimination à l’égard de l’enfant adultérin, ses droits dans la succession ab intestat n’étant que de la moitié de ceux à quoi il aurait eu droit s’il avait été légitime dès lors qu’il était en concours avec le conjoint ou les enfants légitimes.

Ces retouches ponctuelles connaitront leur aboutissement avec les réformes d’ensemble accomplis par les lois de 2001 et 2006.

2. Les réformes d’ensemble

La volonté de modifier le droit des successions pour l’adapter aux nouvelles réalités économiques et sociales est apparue à partir des années 80. La famille s’est transformée et elle a continué progressivement à donner plus d’importance aux couples et aux enfants. Et plusieurs projets de réforme destinés à prendre en compte cette réalité vont être élaborés mais ces projets n’aboutiront jamais. Il faudra attendre la pression de l’opinion réclamant l’élargissement des droits du conjoint et la condamnation de la France par la CEDH dans l’arrêt MAZUREK pour avoir une législation qui limitait de façon discriminatoire les droits de l’enfant adultérin pour qu’enfin la législation successorale connaisse une première modification d’ensemble avec la loi du 3 décembre 2001. Cette loi améliore de façon significative la vocation successorale du conjoint survivant et met fin à la discrimination concernant les droits des enfants adultérins.

Cinq ans plus tard, c’est la loi du 23 juin 2006 qui bouleverse le droit des successions et des libéralités. Loi qui est le fruit de la prise en compte de deux séries de facteur :

  • en premier lieu, la prise en compte du vieillissement de la population, de l’allongement de la durée de vie et donc le fait que des retraités hériteront de retraités, la prise en compte aussi du conjoint survivant et l’augmentation des familles recomposées conduit le législateur à mettre en place une nouvelle stratégie de législation où on pourra cantonner ses droits, renoncer à ses droits voire sauter une génération.

  • en second lieu, la succession est envisagée, aujourd’hui, dans sa dimension économique comme un réel prolongement de la propriété. Et le législateur, dans sa loi de 2006, a pris le parti de donner au propriétaire les outils nécessaires pour aménager par avance sa succession que ce soit au moyen de pacte de famille ou de libéralité ou en mettant en place le mandat posthume.

D’un point de vue technique, la loi nouvelle marque le couronnement de la volonté individuelle, augmente le pouvoir d’anticipation successoral grâce à une réforme profonde des libéralités et marque aussi un recul certain de l’ordre public en matière successorale.

Plusieurs questions vont être étudiées :

  • Qui recueille le patrimoine du de cujus? C’est la question de la dévolution.

  • Comment le patrimoine est-il transmis à ceux qui sont appelés à l’accueillir? C’est la question de la transmission.

  • L’administration, la gestion de la Succession?

  • Déterminer les droits et les obligations du successeur, liquider la succession et partager.

TITRE 1 : LA DÉVOLUTION DE LA SUCCESSION

La dévolution de la succession consiste à savoir qui recueille la succession c’est-à-dire qui sont les héritiers et quelle est la part qui leur est reconnue? La question de savoir qui recueille la succession suppose au préalable de se pencher sur les conditions de la succession (= sous-titre 1) avant de voir les différentes modalités de la succession (= sous-titre 2).

Sous-titre 1 : Les conditions de la succession

CHAPITRE 1 : L’ouverture de la succession

L’ouverture d’une succession soulève 3 questions :

  • quelles sont les causes d’ouverture?

  • à quel date s’ouvre-t-elle?

  • le lieu de l’ouverture.

Section 1 : Les causes d’ouverture de la succession

Au terme de l’article 720 du Code civil, les successions s’ouvrent par la mort au dernier domicile du défunt. C’est la mort qui déclenche l’ouverture de la succession et la mort civile ayant été abolit depuis 1854, seule la mort naturelle ouvre aujourd’hui la succession d’une personne. Le constat de mort donne lieu à l’établissement d’un acte de décès dressé par l’officier d’état civil dans les conditions inscrites à l’article 78 du Code civil. Constat effectué sur la base d’un certificat médical de décès. Dans certains cas particuliers, l’établissement de cet acte de décès ne sera pas toujours possible. Le constat matériel de mort ne pouvant être effectué, c’est l’hypothèse de la disparition. Dans le cas de l’absence, le décès de la personne résultera du jugement déclaratif d’absence qui emporte les effets d’un décès conformément à l’article 128 alinéa 1 du Code civil. Dans le cas de la disparition, au sens juridique du terme, c’est le jugement déclaratif de décès prononcé en cas de disparition d’une personne dans des circonstances de nature à mettre sa vie en danger, quand son corps n’a pu être retrouvé tiendra lieu de mort.

Section 2 : La date d’ouverture de la succession

Elle pose la question de sa fixation dans le cas général mais aussi dans le cas particulier où plusieurs personnes décèdent dans un même événement.

I. Les règles générales de fixation de la date d’ouverture de la succession

A. Les principes

La date d’ouverture de la succession obéit à des règles différentes selon la cause d’ouverture :

  • décès matériellement constaté dans un acte de décès.

  • lié au cas particulier de l’absence ou de la disparition.

Dans le cas du décès constaté dans un acte de décès, la date du décès qui marque l’ouverture de la succession est énoncée dans l’acte conformément aux prescriptions inscrites à l’article 79 du Code civil qui prévoit que l’acte de décès énonce l’heure et le jour du décès.

Dans le cas de l’absence, le décès résultant du jugement déclaratif d’absence qui emporte les effets du décès à compter de sa transcription sur les registres de l’état civil, c’est la date de transcription du jugement qui ouvre la succession.

Dans le cas de la disparition, c’est la déclaration judiciaire qui fixe la date du décès et donc la date de l’ouverture de la succession en tenant compte des présomptions tirées des circonstances de la cause.

B. Les enjeux attachés à la date de l’ouverture de la succession

La date à laquelle s’ouvre la succession emporte des conséquences importantes :

  • c’est cette date qui fixe la vocation successorale. C’est à cette date que l’on apprécie la successibilité de celui qui est appelé à hériter et c’est à cette date que l’on se place pour apprécier si un héritier a les qualités légales pour hériter.

  • cette date permet aussi de savoir quelle loi est applicable à la succession en cas de conflit de loi dans le temps. Le principe en la matière est que la loi successorale applicable est celle qui est en vigueur au jour de l’ouverture de la succession sous réserve des dispositions de droit transitoire contenues dans les lois successorales récentes qui d’une manière générale prévoit des dispositions différentes de l’application de la loi nouvelle pour permettre au praticien de maitriser de nouvelles règles. Ou bien encore règle de façon particulière l’entrée en vigueur de certaines dispositions notamment lorsque ces dispositions améliorent les droits des successions.

  • cette même date interviendra aussi de façon déterminante dans les différentes étapes du règlement successoral notamment quand il s’agira d’apprécier la date du transfert des biens à l’héritier, quand il s’agira de fixer la date de naissance de l’indivision successorale, lorsque l’on devra fixer la date d’évaluation en valeur des biens ou la date d’exercice de l’option successorale.

II. Le cas particulier du décès de plusieurs personnes dans un même événement

Concernant la date du décès fixant la vocation successorale, des difficultés peuvent survenir lorsque plusieurs personnes meurent dans un même événement alors qu’elles sont appelées à la succession des unes des autres.

Exemple : une famille complète décède dans un accident de voiture : savoir qui est mort en premier? Problème.

Grâce aux énonciations des actes de décès, les constatations médicales qui ont pu être faites pour procéder à l’établissement de ces actes de décès et dans ce cas là il n’y aura aucune difficulté particulière. Les successions vont être réglées en suivant l’ordre qui aura pu être établit.

A l’inverse, si l’ordre des décès ne peut pas être établit même par tous moyens, la difficulté est de savoir qui succède à qui? L’enjeu est fondamental car c’est le dernier décédé qui a vocation à recueillir tous les biens.

Pour régler ce problème, à l’origine le code civil avait prévu de régler la difficulté grâce à la théorie des co-mourants. Cette théorie était basée sur des présomptions de survie qui étaient fondées sur l’âge, sur le sexe. Présomptions qui indiquaient qui était supposé avoir survécu à l’autre et qui permettait d’établir de façon artificielle l’ordre des décès.

Exemple : quand 2 personnes décédées dans un même événement avaient moins de 15 ans, on partait du principe que la plus âgée était supposée avoir survécu à la plus jeune. Autre exemple, à âge égal, l’homme était censé avoir survécu à la femme.

Ces présomptions étaient totalement artificielles et donc critiquables et difficiles à mettre en œuvre. Ce qui explique l’abrogation de cette théorie des co-mourants dans la loi du 3 décembre 2001 et son remplacement par de nouvelles dispositions beaucoup plus simples inscrites à l’article 725 du Code civil. Au terme de cet texte, lorsque 2 personnes dont l’une avait vocation à succéder à l’autre périssent dans le même événement, l’ordre des décès est établit par tous moyens. Si cet ordre ne peut pas être déterminé, la succession de chacune d’elle est dévolue sans que l’autre y soit appelée. Toutefois, si l’un des co-décédés laisse des descendants ceux-ci peuvent représenter leur auteur dans la succession de l’autre lorsque la représentation est admise. L’application de ce texte conduit à considérer en fait que lorsque 2 personnes ont péri dans un même événement et que l’un des co-mourants avait vocation à recueillir la succession de l’autre, 2 hypothèses devront être envisagées :

  • soit l’ordre des décès peut être établit et dans ce cas, les successions sont réglées dans l’ordre établit

  • soit l’ordre des décès ne peut être établit et dans ce cas, la règle subsidiaire qui est inscrite à l’article 725 alinéa 2 du Code civil conduit à considérer que les 2 succession seront dévolues indépendamment l’une de l’autre. On présume que les 2 personnes sont mortes simultanément et par conséquent qu’elle n’hérite pas l’une de l’autre. Par exception à cette règle, le texte prévoit dans son alinéa 3 une hypothèse où les successions ne seront pas réglées indépendamment l’une de l’autre, l’hypothèse qui est visée est celle où l’un des co-décédés laisse des descendants. Dans ce cas, les descendants pourront représenter leur auteur dans la succession de l’autre lorsque la représentation est admise.

Exemple pratique : soit une famille composée d’un père et de ses 2 fils et personne d’autre dans la famille. Si le père et l’un de ses fils décède dans le même accident de voiture sans que l’on puisse déterminer l’ordre des décès l’application de l’article 725 alinéa 2 aboutit au résultat suivant : la succession du père est dévolue entièrement au fils survivant sans que le fils co-mourant y soit appelé. La succession du fils va entièrement à son frère sans que le père co-mourant y soit appelé.

Soit une famille composée d’un père M. Dupont et de ses 2 fils Pierre et Jean (= Jean a un fils prénommé Julien). Si Dupont, le père, et Jean, son fils, décèdent dans un même accident sans que l’on puisse savoir qui est mort le premier, la solution sera la suivante : Julien, fils de Jean recueille toute la succession de son père Jean et à cette part va s’ajouter la moitié de la succession de son grand père Dupont, succession qui se partage entre Pierre (= le fils survivant) et Julien (= le petit fils qui a la succession en représentation de son père Jean). Cette dernière solution résulte de l’application de l’article 725 alinéa 3 car en effet, Jean l’un des co-décédés laisse un descendant Julien qui peut représenter son père dans la succession de Dupont.

Section 3 : Le lieu d’ouverture de la succession

I. Détermination du lieu de l’ouverture

L’article 720 du Code civil prévoit que le lieu d’ouverture de la succession est fixé au dernier domicile du défunt. Les notions de lieu d’ouverture de la succession et lieu du domicile sont différentes.

La notion juridique du « domicile » correspond au lieu de son principal établissement au jour du décès au sens de l’article 102 du Code civil et non au lieu de son décès tel qu’indiqué par l’acte de décès.

II. Les enjeux liés ou attachés au lieu d’ouverture de la succession

C’est ce lieu qui va commander, conditionner un certain nombre de règles de compétence.

Ce lieu d’ouverture de la succession fixe la compétente territoriale de la juridiction qui sera amenée à connaître des litiges intéressant la succession notamment les demandes formées entre héritiers, par les créanciers du défunts, relative à l’exécution des dispositions à cause de mort.

Ce lieu fixe également le lieu où seront faite les déclarations d’acceptation de la succession à concurrence de l’actif net ou encore de renonciation à la succession, ces déclarations devant être faite au greffe du TGI du dernier domicile du défunt.

Dans les successions qui comportent un élément d’extranéité c’est-à-dire les successions internationales, les règles de droit international privé déterminent la loi applicable à la succession autour de 2 grands principes :

  • la succession immobilière est régie par la loi du lieu de situation des immeubles.

  • en revanche, la succession mobilière est régie elle par la loi du dernier domicile du défunt

CHAPITRE 2 : Les qualités requises pour succéder

Il y a 2 qualités qui sont requises pour pouvoir recueillir une succession :

  • il faut exister au moment de l’ouverture de la succession

  • il ne faut pas être indigne de succéder

I. La condition d’existence

Le principe selon lequel il faut exister pour succéder est posé à l’article 725 du Code civil qui déclare « pour succéder, il faut exister à l’instant de l’ouverture de la succession ou ayant déjà été conçu et naitre viable ».

Ce texte envisage 2 hypothèses :

  • l’existence à l’ouverture de la succession

  • la conception à l’ouverture de la succession.

Lorsque le texte vise la condition d’existence à l’ouverture de la succession c’est l’existence juridique c’est-à-dire la personnalité juridique. La personnalité juridique n’étant reconnue qu’aux enfants nés vivant et viable, on peut en déduire que les enfants morts nés ne peuvent pas avoir la qualité de successible ni les enfants nés vivant mais non viable. La viabilité de l’enfant qui conditionne sa qualité de successible est traditionnellement définit comme le fait d’être doté d’une constitution qui permet à l’enfant de survivre c’est-à-dire le fait de posséder les organes essentiels à l’existence.

La viabilité est présumée mais c’est une présomption simple qui peut être renversée par la preuve contraire. Il est donc possible de prouver par tous moyens qu’un enfant n’est pas né viable. Sur le plan pratique, la preuve de la viabilité ou non de l’enfant est capital car elle conditionne la qualité de successible. Ainsi, si une mère décède en donnant naissance à son enfant et que l’enfant meurt à son tour peu après, sa viabilité conditionne à la fois ses droits dans la succession de sa mère mais aussi les droits de ses propres héritiers.

Exemple : la mère décède en laissant outre l’enfant décédé tout de suite après, le père de l’enfant et d’autres enfants. Dans ce cas, si l’enfant était viable, il a eu le temps d’hériter de sa propre mère et dans un second temps puisqu’il a hérité de sa propre mère sa propre succession à lui sera dévolue suivant les règles légales et sera répartit entre son père et ses frères et sœurs. A l’inverse, si l’enfant n’était pas viable donc ne pouvant être successible il n’a pas pu hériter de sa mère et dans ce cas, il n’y a qu’une seule succession à régler la succession de la mère. Et là, l’enjeu est très important notamment dans l’hypothèse où les parents n’auraient pas été mariés ensemble car alors la succession reviendra entièrement aux descendants de la mère (= frères et sœurs de l’enfant décédé).

S’agissant des enfants simplement conçut au moment de l’ouverture de la succession, ils sont admis à succéder dès lors qu’ils naissent ensuite vivant et viable (= qualité de successible). S’agissant de la date de conception qui est essentielle pour déterminer si un enfant a été conçu au jour de l’ouverture de la succession c’est-à-dire au jour du décès, celle-ci se calcule selon la présomption légale de la durée de grossesse édictée à l’article 311 du Code civil et sauf preuve contraire sera réputé conçu à la date du décès du de cujus, l’enfant qui sera né moins de 300 jours après la date du décès.

L’intéressé peut choisir de placer la date de conception où il veut (= à une date lui permettant d’hériter) puisque la conception est présumée avoir eu lieu à un moment quelconque de la période légale de conception selon ce qui est demandé dans l’intérêt de l’enfant. Il s’agit d’une présomption simple et tout intéressé pourra rapporter la preuve que l’enfant ne peut pas hériter faute d’avoir pu être conçu à la date d’ouverture de la succession. Cela concerne l’hypothèse de l’enfant prématuré dont on tenterait de soutenir qu’il était déjà conçu à la date du décès située dans le cas extrême 299 jours plus tôt. Ce sont des enjeux importants.

L’article 725 après avoir posé dans son alinéa 1er le principe de l’existence de la conception au moment de l’ouverture de la succession règle ensuite dans son alinéa 2 le problème posé par la situation particulière de l’absent dont l’existence par définition soulève un doute. Le Code Civil règle ceci : peut succéder celui dont l’absence est présumée. La personne présumée absente peut recueillir une succession car ce qui caractérise la présomption d’absence c’est que l’absent est présumé vivant.

II. Ne pas être indigne de succéder

L’indignité peut être définie comme une peine privée qui consiste à exclure un héritier de la succession en raison de comportements ou d’agissements qu’il a pu avoir envers la personne du défunt. La réforme de 2001 a modifié le régime de l’indignité successorale, elle en a assoupli les règles en donnant notamment un certain pouvoir d’appréciation aux juges. L’indignité pouvant aujourd’hui soit être de plein droit soit facultative.

3 questions se posent à propos de l’indignité successorale :

  • la détermination des causes de l’indignité

  • la mise en œuvre de l’indignité

  • les effets de l’indignité

A. Les causes d’indignité

Il en a 2 :

  • des indignités de plein droit

  • des indignités facultatives

1. Les causes d’indignité de plein droit

Elles sont inscrites à l’article 726 du Code civil qui vise 2 situations où la personne sera déclarée indigne de succéder.

La première situation vise celui qui est condamné comme auteur ou complice à une peine criminelle pour avoir volontairement tenté de donner ou donné la mort au défunt.

La seconde situation vise celui qui est condamné comme auteur ou complice à une peine criminelle pour avoir volontairement porté des coups ou commis des violences ou voie de fait ayant entraînée la mort du défunt sans intention de la donner.

Dans les 2 cas car il s’agit d’indignité de plein droit c’est le jugement de condamnation de l’auteur des faits qui entraîne l’indignité successorale sans qu’il y ait besoin de la prononcer expressément.

2. Les causes d’indignité facultative

L’article 727 du Code civil qui prévoit que l’indignité pourra cette fois-ci être déclarée à la fois en présence d’une condamnation de l’auteur des faits (= cause d’indignité) mais également dans l’hypothèse où l’auteur des faits n’aura pas pu être condamné. Cette absence de condamnation concerne l’auteur des faits constitutifs d’une cause d’indignité qu’il n’a pas pu être condamné pénalement en raison de l’extinction de l’action publique liée à son décès.

Ces causes facultatives sont au nombre de 5 :

Les 2 premier cas d’indignité facultative reprennent les mêmes hypothèses que celles figurant dans les causes d’indignité de plein droit à la différence néanmoins que la peine prononcée n’est pas une peine criminelle mais une peine correctionnelle.

S’ajoute à ces 2 premier cas, 3 autres hypothèses :

  • Celui qui est condamné pour témoignages mensongères à l’égard du défunt dans une procédure criminelle.

  • Celui qui est condamné pour s’être volontairement abstenu d’empêcher soit un crime soit un délit contre l’intégrité corporelle du défunt d’où il est résulté la mort alors qu’il pouvait le faire sans risque pour lui ou pour les tiers.

  • Celui qui est condamné pour dénonciations calomnieuses contre le défunt lorsque pour les faits dénoncés une peine criminelle était en cours.

L’ensemble de ces 5 causes constitue des causes d’indignités facultatives qui peuvent donc être prononcées ou non dès lors qu’il y a condamnation de l’auteur des faits. En revanche, lorsqu’aucune condamnation n’a pu être prononcée du fait de l’extinction de l’action publique suite au décès de l’auteur de faits, seule les 2 causes d’indignité les plus graves (= celles visées dans les hypothèses 1 et 2) peuvent être prononcées.

Ces causes sont le fruit de la réforme 3 décembre de 2001, la loi devant entrée en vigueur que le 1er juillet 2002 : elle améliore le sort de l’auteur des faits car elle admet que dans certains cas on n’est pas obligé de prononcer l’indignité successorale. Cette loi de 2001 a prévu expressément dans une disposition de droit transitoire (= que les hypothèses de dignité facultative inscrites au 1erement et 5èmement de l’article 727 du Code civil entend que cet article a rendu facultative la déclaration d’indignité sont applicable à des faits commis avant le 1er juillet 2002) destiné à permettre aux auteurs de faits relevant des cas d’indignité facultative de pouvoir bénéficier de ces cas d’indignité facultative. Donc applicable rétroactivement à des faits antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi.

B. La mise en œuvre de l’indignité successorale

Les conditions de mise en œuvre dépendent s’il s’agit d’une indignité de plein droit ou facultative.

Dans le cas de l’indignité de plein droit, aucun jugement particulier n’est nécessaire c’est le jugement de condamnation qui entraine automatiquement la déchéance de l’héritier. Et ce n’est que si la cause d’indignité est contestée que l’intervention du juge sera nécessaire pour qu’il constate l’existence de la cause de l’indignité.

Dans l’hypothèse de l’indignité facultative, les conditions de mise en œuvre de l’indignité sont réglées par l’article 727-1 du Code civil. La déclaration d’indignité pourra être prononcée par le TGI qui peut aussi ne pas la prononcer. Au niveau des titulaires de l’action, la demande peut être formée par un autre héritier et en l’absence de demande formulée par un autre, la demande peut être formée par le Ministère Public. Cette demande d’indignité doit être formée dans un délai de 6 mois. Et s’agissant du point de départ de ce délai, il faut envisager 2 cas :

  • Le délai sera de 6 mois à compter du décès si la condamnation est antérieure au décès.

  • le délai sera de 6 mois à compter de la décision de condamnation si elle intervient postérieurement au décès.

C. Les effets de l’indignité successorale

Elle a pour effet d’exclure l’indigne de la succession. La portée de cette exclusion doit, néanmoins, être relativisée dans la mesure où la loi de 2001 a prévu que cette exclusion n’était pas absolue et que l’héritier indigne pouvait être en quelque sorte relevé de son indignité par la volonté du de cujus. L’article 728 du Code civil dispose, en effet, n’est pas exclut de la succession, le successible frappé d’une cause d’indignité prévue aux articles 726 et 727 du Code civil lorsque le défunt postérieurement aux faits et à la connaissance qu’il en a eu, a précisé par une déclaration expresse de volonté qu’il entend le maintenir dans ses droits héréditaires ou lui a fait une libéralité universelle ou à titre universel. Le de cujus est donc autorisé à relever le successible de l’indignité qu’il encourt soit de plein droit soit de manière facultative. Cette faculté de pardon est soumise à 2 conditions :

  • une condition de forme : c’est que la victime des faits à l’origine de l’indignité ait fait une déclaration de volonté expresse en la forme testamentaire ou une déclaration de volonté tacite en lui accordant une libéralité universelle ou à titre universel.

  • une condition de fonds : il faut que le de cujus ait eu connaissance des faits commis à son encontre par le successible frappé d’une cause d’indignité. Ce qui suppose bien évidement que la manifestation de volonté, le pardon soit exprimé après les faits. On ne peut pas pardonner des faits non encore commis. En l’absence de pardon, l’indignité entraine alors l’exclusion effective de l’héritier de la succession, exclusion dont la porté doit être envisagée à la fois par rapport à l’indigne lui-même mais aussi par rapport aux enfants de l’indigne.

1. L’exclusion de la succession par rapport à l’indigne lui-même

3 points sont à développer :

  • le domaine

  • l‘effet relatif

  • la rétroactivité

— Le domaine de l’indignité : seule la succession ab intestat (= succession légale) est concernée. L’indignité n’exclut l’indigne que de la succession ab intestat et par conséquent, si l’héritier est légataire, ce legs ne sera pas remis en cause par l’indignité. Il pourra, en revanche, être remis en cause par la voie de la révocation pour ingratitude. Ce qui est une procédure différente.

— L’effet relatif de l’indignité : l’indignité est limitée à la succession de la victime d’où 2 conséquences :

  • dans une succession ultérieure, l’indigne peut venir en représentation de celui auquel il a été indigne de succéder. Exemple : on peut imaginer l’hypothèse de l’enfant indigne qui tue son père : il est frappé d’indignité et est donc exclut de la succession de son père (= sa victime). Si postérieurement au décès de son père meurt le père de son père c’est-à-dire son grand-père, l’indigne succédera à son grand père par représentation de son propre père auquel il avait été indigne de succéder.

  • l’indigne peut recueillir, ensuite, la succession d’une personne qui avait bénéficié de son exclusion et bénéficié ainsi indirectement cette fois-ci de tout ou partie des biens de sa victime. Exemple : soit un père ayant 2 fils X et Y eux-mêmes sans enfants : X tue son père il est indigne, et exclu de la succession de son père et par conséquent c’est son frère Y qui va recueillir la totalité de la succession de son père. Si par la suite Y décède sans autre parent que son frère X, c’est X qui recueillera l’intégralité de la succession de son frère incluant les biens provenant de la succession du père.

— La rétroactivité : les effets de l’indignité rétroagissent au jour du décès et par conséquent l’indigne n’ayant jamais été héritier doit restituer tous les fruits et revenus dont il aurait eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession.

2. Les effets de l’indignité par rapport aux enfants de l’indigne

Cette question est réglée par l’article 729-1 du Code civil qui prévoit que les enfants de l’indigne ne sont pas exclus par la faute de leur auteur soit qu’ils viennent à la succession de leur propre chef soit qu’ils viennent à la succession par l’effet de la représentation.

Les enfants de l’indigne sont placés à égalité par la loi qu’ils aient été conçus avant ou après l’ouverture de la succession dont l’indigne a été exclu. Par conséquent, les enfants nés ou conçus avant l’ouverture de la succession dont l’indigne est exclu, devront rapporter à la succession de l’indigne les biens qu’ils auront recueillis en ses lieu et place dès lors qu’ils viennent ensuite en concours avec des enfants conçus après l’ouverture de la succession dont l’indigne a été exclu. Exemple : Père X qui a 2 enfants A et B, X tue son propre père Y, X est indigne et exclu de la succession de Y. Par conséquent, la succession de Y va être recueillit par A et B, enfants de X. Par la suite, il a un troisième enfant C le jour où X meurt, A et B devront rapporter à la succession de X les biens qu’ils auront recueillis à sa place dans la succession de Y pour qu’on respecte l’égalité entre les 3enfants.

L’indignité étant sans effet sur les enfants de l’indigne, le législateur a voulu éviter que l’indigne ne profite indirectement des biens de la succession dont il est écarté par l’effet du droit de jouissance légal reconnu aux parents sur les biens de leur enfant mineur. L’article 729-1 prévoit ainsi in fine que l’indigne ne peut en aucun cas réclamer sur les biens de la succession le droit de jouissance que la loi accorde aux pères et mères sur les biens de leurs enfants.

CHAPITRE 3 : La preuve de la qualité d’héritier

L’héritier doit être non seulement apte à hériter c’est-à-dire exister et ne pas être indigne mais il doit également rapporter la preuve de sa qualité d’héritier. Il doit prouver sa qualité d’héritier pour pouvoir appréhender les biens de la succession.

Cette preuve s’inscrit le plus souvent en dehors de tout litiges (= preuve non contentieuse) mais cette preuve pourra aussi s’inscrire dans un contexte contentieux lorsque l’héritier se trouvera en présence d’une autre personne se prétendant elle aussi héritière.

I. La preuve non contentieuse de la qualité d’héritier

La détermination des héritiers est indispensable pour le règlement de la succession de la personne décédée. L’importance de cette question apparaît tant du point de vue de la protection des autres héritiers que du point de vue de la protection des tiers. Lorsque l’héritier est amené à prouver sa qualité d’héritier en dehors de tout litige le principe est simple, c’est celui de la liberté de la preuve inscrit à l’article 730 du Code civil qui déclare que la preuve de la qualité d’héritier s’établit par tous moyens. On vise le terme héritier au sens large.

Pour les héritiers testamentaires, aucunes difficultés particulières, la preuve de leur qualité d’héritier sera rapportée par la production de l’acte qui les institue comme héritiers (= la production du testament).

Pour les héritiers légaux, la question est plus délicate. Dans la mesure où les héritiers légaux sont déterminés par la loi en fonction du lien de parenté ou d’alliance qui existe entre eux et le défunt. La preuve de leur qualité d’héritier découlera donc normalement des actes juridiques qui constatent cette parenté ou cette alliance telle que les actes de naissance ou l’acte de mariage. Pour faciliter techniquement cette preuve, la pratique, en particulier, la pratique notariale avait élaboré d’autres procédés de preuves signalétiques à savoir l’acte de notoriété, l’intitulé d’inventaire, le certificat d’hérédité.

Le législateur consacre en 2001, la pratique de l’acte de notoriété étant précisé que cet acte continue, néanmoins, à coexister avec les autres modes de preuves (= intitulé d’inventaire, le certificat d’hérédité).

A. L’acte de notoriété

Avant de préciser ce qu’est cet acte, il faut garder à l’esprit que le principe relatif à la preuve de la qualité d’héritier reste le principe de la liberté de la preuve (= article 730).

Qui établit l’acte de notoriété? Cet acte est établi au terme de l’article 730-1 par le notaire à la demande d’un ou plusieurs ayants droit. Son établissement est, aujourd’hui, de la compétence exclusive du notaire ayant été mis en place par la loi de simplification du droit du 23 décembre 2007 alors qu’auparavant l’acte pouvait être établi aussi par le greffier en chef du TI du lieu d’ouverture de la succession.

Quel est le contenu de cet acte? Il est précisé à l’article 730 -1 alinéas 2 et 3 du Code civil : cet acte doit viser l’acte de décès de la personne dont la succession est ouverte, faire mention des pièces justificatives qui auront été produites pour établir la qualité d’héritier (= acte d’état civil, acte de naissance…) ainsi que les documents concernant les libéralités à cause de mort qui peuvent avoir une influence sur la dévolution successorale. L’acte relatera la déclaration faite par les héritiers qu’ils ont vocation à recueillir la succession du défunt. La loi a prévu aussi une mesure de publicité particulière car effectivement il sera à la charge du notaire de demander la mention en marge de l’acte de décès de cet acte de notoriété.

Quels sont les effets de cet acte? Cet acte fait présumer la qualité d’héritier mais il ne fait foi que jusqu’à preuve contraire. Grâce à l’acte de notoriété, les héritiers désignés dans l’acte ou leur mandataire commun sont réputés à l’égard des tiers avoir le pouvoir de disposer des biens et s’il s’agit de fonds avoir le pouvoir de disposer librement de ces fonds. Cette présomption de pouvoir facilitera les relations des héritiers avec les tiers notamment les organismes bancaires ou financiers qui tiennent les comptes du défunt et cette présomption de pouvoir constituera aussi une sécurité pour ces tiers qu’elle mettra à l’abri de tout recours.

B. Les autres modes de preuves de la qualité d’héritier

L’intitulé d’inventaire, c’est la partie introductive de l’acte d’inventaire du contenu de la succession. C’est une mention qui se trouve au début de l’inventaire dans laquelle le notaire indique quels sont les héritiers qui lui ont demandé de faire un inventaire et le notaire indiquera aussi dans l’acte à quel titre le successeur intervient en se basant sur les documents qui lui auront été produit à savoir les actes d’état civil ou le testament du défunt dans certains cas.

Le certificat d’hérédité, il y en a 2 types :

  • celui issu de la pratique administrative qui est établi par le maire à la demande d’un héritier (= établit sur production de pièces) et il est gratuit. Mais, ce certificat va concerner des domaines marginaux (= pour les toutes petites successions et les successions ayant aucun biens immobiliers).

  • en revanche, il y a le certificat d’hérédité pratiqué en droit Alsacien-Lorrain qui a été mis en place par le droit local. Et ce certificat est en fait le pendant de l’acte de notoriété établi par le notaire de la vieille France. Il va être délivré par le juge du TI du lieu de l’ouverture de la succession au vue d’un acte notarié d’affirmation sur la foi du serment fait par les héritiers.

II. La preuve contentieuse de la qualité d’héritier

Elle intervient lorsqu’un héritier se trouve confronté à une autre personne qui se prétend héritière. Dans ce cas, l’héritier contestant qui veut faire valoir ses droits sur la succession devra exercer l’action en pétition d’hérédité (= c’est l’action par laquelle un héritier, ici, légal, ou un légataire universel ou à titre universel tend à faire reconnaître sa qualité de successeur à l’encontre d’un tiers qui se comporte également en successeur de tout ou partie des biens successoraux). Cette action n’est règlementée par aucun texte et les règles qui gouvernent cette action ont été établies à la fois par la Jurisprudence et la Doctrine tant en ce qui concerne les conditions d’exercice de l’action que les effets de cette action.

A. Les conditions d’exercice de l’action

Le demandeur à l’action, c’est toute personne qui est en mesure de faire valoir une vocation successorale et il peut donc s’agir aussi bien d’héritiers ab intestat (= légaux) que de légataires universel ou à titre universel (= testamentaire). S’agissant du défendeur à l’action, l’action en pétition d’hérédité s’exerce à l’encontre de la personne qui se comporte comme successeur du défunt.

L’objet de l’action est de faire reconnaître sa vocation successorale et par conséquent, il faudra faire attention de bien distinguer l’action en pétition d’hérédité de l’action en revendication d’un bien qui obéit à des règles différentes et qui concerne quant à elle l’héritier qui est confronté à une personne, un tiers qui se prétend non pas héritier mais propriétaire du bien.

Le demandeur à l’action qui se prétend héritier devra justifier de sa vocation successorale. Il devra donc faire la preuve de son lien de parenté avec le défunt lorsqu’il s’agira d’un héritier légal. C’est la parenté qui résultera de la preuve du lien de filiation ou alors il devra faire la preuve de ses droits et produire le testament quand il s’agira d’un héritier qui invoque la qualité de légataire.

B. Les effets de l’action

Lorsque l’action en pétition d’hérédité aboutit dès lors que celle-ci a pour objet de permettre à l’héritier de recouvrer ses droits, 2 types d’effets doivent être distingués :

  • les effets entre les parties (= l’héritier contestant et l’héritier contesté) : le succès de l’action en pétition de l’hérédité va entrainer une obligation de restitution des biens successoraux au véritable héritier. Cette obligation de restitution prendra en compte la bonne ou la mauvaise foi du défendeur à l’action (= l’héritier contesté). Si le défendeur à l’action était de bonne foi, il doit restituer les biens dans l’état où ils se trouvent et sans être responsable de leur éventuelle détérioration. Si les biens ont été vendus, il doit en restituer le prix perçu. Concernant les fruits, il est admis que si l’héritier apparent était de bonne foi, il n’est pas tenu de restituer les fruits ainsi que les fruits qu’il a pû percevoir jusqu’à l’introduction de l’instance en pétition d’hérédité. S’il était de mauvaise foi, il doit restituer tous les fruits et il est responsable de toutes les détériorations subis par les biens.

  • les effets à l’égard des tiers : les tiers sont protégés, pour les biens mobiliers par la règle « en fait de meuble, la possession vaut titre » (= article 2276 du Code civil). Et concernant les autres biens, s’il y a eu des actes de disposition sur ces biens, la jurisprudence considère dans un souci de sécurité des transactions que les actes faits par l’héritier apparent sont valables même s’il s’agit d’actes de disposition.

Sous-titre 2 : Les modalités de la dévolution de la succession

La question des modalités de la dévolution de la succession repose sur le choix qui est opéré entre 2 types de dévolution :

  • une dévolution fondée sur la volonté du défunt
  • une dévolution organisée par la loi

L’histoire démontre l’admission concurrente de ces 2 types de dévolution. La prédominance de l’une ou de l’autre pouvant varier selon les époques et selon les différents systèmes législatifs qui se sont succédés. Mais, l’une n’a jamais réellement évincée l’autre. Cette coexistence historique de ces 2 types de dévolution se retrouve dans les règles prévues aujourd’hui dans le code civil et qui constituent le droit positif. C’est ainsi que l’article 721 alinéa 1er du Code civil prévoit que « les successions sont dévolues selon la loi lorsque le défunt n’a pas disposé de ses biens par des libéralités ». Il résulte donc de ce texte que l’individu peut soit s’en remettre à la loi et se reposer par conséquent sur les règles de dévolution légale soit au contraire organiser lui-même la dévolution de ses biens à son décès en préparant ou en anticipant sa succession en utilisant la technique des libéralités. Effectivement, le défunt peut préparer sa succession par testament voir l’anticiper par des libéralités entre vifs en procédant de son vivant à des donations. On a vu, néanmoins, que la liberté de l’individu n’est jamais totale, que les libéralités sont subordonnées aux règles légales qui en fixent le cadre et que certaines dispositions légales ont un caractère impératif relevant de la notion d’ordre public successoral. Les règles légales de dévolution fixant le cadre de la dévolution volontaire, nous envisagerons donc d’abord l’hypothèse de la dévolution légale dans le cadre de la succession ab intestat avant de voir, ensuite, l’hypothèse de la dévolution volontaire de la succession.

CHAPITRE 1 : La dévolution légale

Lorsque le défunt n’a pris aucune disposition à cause de mort pour organiser la dévolution de sa succession, la succession est dite ab intestat. Elle est alors, conformément aux dispositions inscrites à l’article 721, dévolue selon la loi et c’est donc la loi qui va déterminer qui sont les héritiers. Les dispositions légales qui vont s’appliquer ont un caractère supplétif d’une volonté qui ne s’est pas exprimée et vont se traduire par des règles de dévolution fondées sur une volonté présumée du défunt correspondant en principe à ses affections présumées.

Les affections présumées du défunt allant normalement vers sa famille (= c’est-à-dire incluant les membres de la parenté mais aussi le conjoint), cela explique le choix du législateur d’organiser la dévolution sur le système de la parenté et de l’alliance. La dévolution selon la parenté ou l’alliance n’est, cependant, pas le seul principe de dévolution.

En effet, l’évolution du droit des successions et notamment la codification avait conduit à l’adoption du principe de l’unité de la succession. Ce principe figurait à l’article 732 de l’ancien du Code civil qui prévoyait que la loi ne considère ni la nature ni l’origine du bien pour en régler la succession. L’adoption de cette règle signifiait la fin de la distinction fondée sur la nature meuble ou immeuble des biens ainsi que celle fondée sur l’origine du bien (= maternelle ou paternelle). Le problème qui se pose, aujourd’hui, est celui de savoir ce qu’il est advenu de ce principe d’unité de la succession. En effet, lors des dernières réformes et notamment celle de 2001, le code civil n’a pas repris de façon expresse l’ancien article 732 qui énonçait le principe d’unité de la succession. La question qui se pose est celle de savoir si ce principe subsiste en dehors de tout texte ou si au contraire cette omission procède d’une disparition du principe.

Les positions sur cette question sont diverses. La majorité des auteurs considèrent que le principe est maintenu et qu’il résulte implicitement de la rédaction des textes qui prévoient l’organisation des règles de dévolution des biens selon le lien de parenté voir d’alliance sans faire référence à l’origine ou à la nature du bien. D’autres auteurs, en revanche, considèrent que cette omission est volontaire et correspond en faite à la prise en compte des nombreuses entorses apportées au principe d’unité de la succession par les règles actuelles et dérogatoires qui sont applicables à certaines succession qualifiées d’« anomale » ou de spéciale. Il existe, en effet, aujourd’hui un certain nombre d’hypothèses de succession spéciales qui échappent aux règles ordinaires de la dévolution de succession en raison soit de la nature du bien (= droit au bail…) ou encore de l’origine du bien (= les biens reçu par donation ou par lègs …).

Quelle position retenir? Il faut admettre que la règle reste celle du principe de l’unité de la succession mais que cette règle va coexister avec des règles spéciales applicables aux successions particulières qui seront elles soumises à des règles de dévolution spécifique. Ce qui explique que l’on sera amené à distinguer entre la succession que l’on qualifiera d’ordinaire par opposition à celle que l’on qualifiera de succession particulière.

Qu’il s’agisse des successions ordinaires ou particulières, les héritiers, ont un lien de parenté ou d’alliance avec le défunt. En revanche, dans certains cas particuliers, c’est l’État qui appréhendera la succession non pas en qualité d’héritier mais au titre de sa souveraineté lorsque la famille sera défaillante.

Sous-chapitre 1 : La succession ordinaire

La succession ordinaire qui est fondée sur les affections présumées du défunt consacre un principe de dévolution inscrit à l’article 731 du Code civil qui déclare que « la succession est dévolue par la loi aux parents (= sens large) et au conjoint successible du défunt ».

Le Code Civil envisage donc 2 sortes de successibles :

  • les parents
  • le conjoint.

L’héritier légal est donc lié au défunt soit par un lien de parenté soit par un lien d’alliance.

La question des droits des héritiers va être nécessairement conditionnée par la place respective qui est accordée aux parents et au conjoint et va poser la question très délicate de l’articulation des droits du conjoint avec ceux qui sont reconnus aux parents. Le Code Civil règle ce problème en envisageant ces 2 hypothèses de façon successive. Il distingue, en effet, dans une 1ère section les droits des parents en l’absence de conjoints successibles et règle ensuite seulement dans une 2ème section, la question des droits des héritiers en présence d’un conjoint successible. La présence du conjoint successible étant susceptible de modifier ces droits.

Section 1 : Les droits des parents en l’absence de conjoint successible

Les règles de dévolution en l’absence de conjoint successible sont organisées selon un principe hiérarchique reposant sur la proximité du lien de parenté déterminée selon la règle de l’ordre et du degré. La portée de ce principe hiérarchique devra, néanmoins, être relativisée car dans certains cas, la loi avantagera parfois d’autres héritiers que les plus proches. Elle dérogera à la règle de l’ordre et du degré grâce à des mécanismes correcteurs institués dans un souci de justice et d’équité. Ces mécanismes étant au nombre de 2 :

  • la représentation successorale

  • la technique de la fente.

Sous-section 1 : Les principes de dévolution : la règle de l’ordre et du degré

La détermination des héritiers en l’absence de conjoint successible est essentiellement guidée par un souci de conservation des biens dans la famille. Elle repose sur le système de l’ordre successoral qui est censé refléter l’ordre des affections présumées du défunt. Cet ordre allant donc des parents les plus proches au plus éloignés.

La dévolution est donc organisée de façon hiérarchique et s’appuie sur un classement des héritiers par ordre. Ce classement s’établit de façon successive : on classe, d’abord, les héritiers par ordre (= par catégorie) et en cas de pluralité d’héritiers à l’intérieur d’un même ordre, d’une même catégorie leur classement se fera par degré. L’objectif est d’assurer la dévolution des biens au parent le plus proche. Proximité issue de l’ordre le plus proche d’une part, proximité issue ensuite du degré le pus proche au sein de chaque ordre.

I. Le classement par ordre

L’ordre est une catégorie qui est déterminée par la loi et qui regroupe plusieurs membres de la famille. Les ordres sont précisés à l’article 734 du Code civil qui prévoit 4 ordres différents :

  • les enfants et leurs descendants

  • les pères et mères, les frères et sœurs et les descendants de ces derniers

  • les ascendants autres que les pères et mères

  • les collatéraux autres que les frères et sœurs et les descendants de ces derniers

Le texte de l’article 734 du Code civil après avoir énuméré les 4 ordres différents se conclut ensuite par l’affirmation du principe de leur classement hiérarchique.

A. La présentation des 4 ordres

1. Les enfants et leurs descendants

Le premier ordre visé par le texte est celui des enfants et de leurs descendants, cet ordre réunit donc tous les parents en ligne directe descendante c’est-à-dire les enfants, les petits-enfants, arrière petits-enfants …

L’article 735 précise, ensuite, concernant cet ordre que les enfants ou leurs descendants succèdent à leur père et mère ou autre ascendant sans distinction de sexe ni primogéniture même s’ils sont issus d’union différente.

Le fait que le premier ordre de successible visé par le texte concerne les enfants et leurs descendants correspond au sens même de la succession qui est comme le souligne le professeur Malaurie de se succéder de génération en génération. La succession est tournée vers l’avenir et l’avenir c’est la descendance.

S’agissant des dispositions inscrites à l’article 735 au terme desquelles la succession aux père et mère se fait sans distinction de sexe ou de primogéniture. Elle vient rappeler le principe d’égalité entre les enfants consacré par l’abolition de tous les privilèges qui caractérisaient certaines succession aristocratiques dans l’Ancien Droit ou sévissait les privilèges de primogéniture (= droit d’aînesse…). L’évolution historique du droit des successions s’est faite dans le sens de la suppression des inégalités entre les enfants. Les dernières inégalités qui pouvaient résulter de la nature du lien de filiation qui unissait les parents à leur enfant étant elles aussi abolies aujourd’hui par les nouvelles règles inscrites à l’article 733 du Code civil qui prend soin de rappeler que la loi ne distingue pas selon les modes d’établissement de la filiation pour déterminer les parents appelés à succéder. L’alinéa 2 poursuivant les droits résultant de la filiation adoptive sont réglés au titre de l’adoption.

Les règles contenues dans ce texte appellent 2 séries de remarques :

  • le principe d’égalité des filiations : en premier lieu ce texte pose clairement le principe d’égalité des enfants quelque soit le mode d’établissement de leur filiation. Il y a égalité de statut successoral pour tous les enfants qu’il s’agisse d’enfant « naturel », d’enfant issu du mariage voir enfant adultérins. La question des droits des enfants est, aujourd’hui, distincte de la structure du couple qui leur a donné naissance, couple marié ou non et leurs droits ne doivent pas subir les conséquences des fautes qui ont pu être accomplies par l’un des parents dans le cas de l’enfant adultérin. L’idéologie contemporaine est fondée sur la stricte égalité des enfants même si concrètement il sera toujours possible d’avantager l’un de ces enfants par des libéralités grâce à la fraction des biens dont les parents peuvent disposer librement et qui constitue la quotité disponible. Dans ce cas, il y a certes rupture d’égalité entre les enfants mais non pas à raison du statut des enfants, de la nature de sa filiation mais uniquement à raison de la marge de manœuvre laissée par le législateur sur une fraction des biens (= la fameuse quotité disponible). Au delà de cette hypothèse particulière, il faut néanmoins reconnaître que l’égalité des enfants quelque soit leur statut n’est pas totalement parfaite et qu’il demeure aujourd’hui un cas d’inégalité : la seule qui subsiste concerne les enfants incestueux nés d’un inceste absolu. Cet enfant né d’un inceste absolu est celui qui est né d’un homme et d’une femme qui sont frappés d’une interdiction de se marier ensemble en vertu d’un empêchement à mariage insusceptible de dispense. Cette catégorie d’enfants incestueux se voit interdire la possibilité d’établir son double lien de filiation car l’établissement du double lien de filiation qui les rattacheraient à la fois au père et à la mère révélerait l’inceste. Ils ne pourront faire valoir qu’une seule vocation successorale dans la succession du parent à l’égard duquel le lien juridique de filiation aura pu être établit.

  • le cas particulier des enfants adoptés : dans le cas de l’adoption, la vocation successorale de l’enfant adopté présente des particularités qui sont liées à la forme de l’adoption dont est issu leur lien de filiation puisque le système français connaît effectivement deux formes d’adoption :

adoption plénière : l’enfant rompt tout lien avec sa famille biologique. Cette rupture entraîne donc logiquement la disparition de toute vocation successorale dans sa famille par le sang alors que dans sa famille adoptive, il aura exactement les mêmes droits qu’un enfant dont la filiation est établie par l’effet de la loi d’une reconnaissance ou de la possession d’état.

adoption simple : à l’inverse, l’enfant conservant son lien de filiation avec sa famille par le sang cumule une double vocation successorale. Il conserve ses droits héréditaires dans sa famille d’origine et il ajoute à ces droits sa vocation successorale dans sa famille adoptive étant précisé néanmoins que l’adopté et ses descendants n’ont pas la qualité d’héritier réservataire à l’égard des ascendants de l’adoptant (= cf. article 368 alinéa 2 du Code civil).

2. Les père et mère, les frères et sœurs et leurs descendants (= neveu, nièce…)

D’un point de vue terminologique, on parlera à propos de cet ordre des ascendants privilégiés pour les père et mère et les collatéraux privilégiés pour les frères et sœurs et leurs descendants.

Ces ascendants et collatéraux sont qualifiés de privilégiés tout simplement car ils accèdent au 2ème ordre de successibles par opposition aux autres ascendants et aux autres collatéraux visés respectivement au 3ème et 4ème ordre.

Ce 2ème ordre de successibles vise 2 catégories différentes. C’est un ordre mixte dans lequel plusieurs situations doivent être envisagées selon qu’il existe à l’ouverture de la succession des représentants de chacune de ces 2 catégories ou selon qu’il n’y ait au contraire que des représentants de l’une de ces 2 catégories. Différentes hypothèses :

  • Il n’y a que des ascendants privilégiés : les père et mère, dans ce cas là, ont vocation à recueillir chacun la moitié de la succession. Cette règle se retrouve à l’article 736 du Code civil.

  • Il n’y a que des collatéraux privilégiés donc pas d’ascendants privilégiés : les collatéraux privilégiés ont vocation à recueillir la totalité de la succession (= article 737 du Code civil : lorsque les père et mère sont décédés avant le défunt…).

  • Il y a à la fois des ascendants privilégiés et des collatéraux privilégiés : 2 cas de figures envisageables :

il y a à la fois le père et la mère et des collatéraux privilégiés : dans ce cas, chacun des père et mère recueille ¼ de la succession et les collatéraux privilégiés se partagent l’autre moitié.

Il reste uniquement le père ou la mère et des collatéraux privilégiés : dans ce cas, le parent survivant unique recueille ¼ de la succession et les collatéraux privilégiés vont se partager les ¾.

3. Les ascendants autres que les père et mère que l’on qualifie d’ascendants ordinaires c’est-à-dire les grands-parents, arrières grands-parents …

Dans ce cas, à défaut de père et mère, de frères et sœurs et de leurs descendants, la succession du défunt est recueillie par les ascendants ordinaires comme le prévoit l’article 739 du Code civil.

4. Les collatéraux ordinaires (= autres que les frères et sœurs et leurs descendants) tel que les cousins germains

Ils recueillent, eux, la succession à défaut de descendant ou d’ascendant privilégié ou ordinaire et de collatéraux privilégiés.

B. L’articulation hiérarchique des ordres

Les héritiers étant classés par catégorie, par ordre, chacun de ces 4 ordres d’héritiers constitue un ordre qui exclut les suivants (= article 734 alinéa dernier). Par application de ce principe, dès lors qu’il existe un parent figurant dans un ordre d’un rang préférable à celui des autres parents, il exclut les autres parents et c’est lui qui a vocation à recueillir la succession. Un problème peut, néanmoins, se poser lorsque plusieurs parents font parti de cet ordre. Ce problème est réglé par un 2ème classement entre les parents appartenant au même ordre, on va appliquer un classement interne à cet ordre classement fondé sur le degré.

II. Le classement par degré

A l’intérieur de chaque ordre de successibles intervient un 2ème classement fondé sur le degré de parenté. La successibilité est alors déterminée par la proximité du lien de parenté et à l’intérieur d’un même ordre les parents les plus proches du défunt excluent les parents les plus éloignés et héritent sous réserve des correctifs issus du jeu de la représentation et de la fente qui seront vu plus tard.

La proximité de parenté résulte du nombre de générations qui sépare le défunt des héritiers d’un même ordre. A chaque génération s’applique un degré. Le degré peut donc être défini comme l’intervalle qui sépare 2 générations successives c’est-à-dire le nombre de générations qui sépare le défunt de son parent. La suite des degrés forme ce que l’on appelle la ligne. Cette ligne pouvant être soit directe soit collatérale.

A. La ligne directe

On appelle ligne directe la suite des degrés entre personnes qui descendent l’une de l’autre. Cette ligne peut être soit ascendante ou descendante. La ligne directe descendante, c’est celle qui relie une personne à ceux qui descendent de lui. La ligne directe ascendante est celle qui relie une personne à ceux de qui elle descend. S’agissant des degrés en ligne directe, on compte autant de degrés qu’il y a de générations entre les personnes. Le fils sera au 1er degré par rapport à son père.

B. La ligne collatérale

C’est lorsque 2 lignes sont reliées par un ancêtre commun. Donc, c’est la suite des degrés entre personnes qui ne descendent pas les unes des autres mais qui descendent d’un auteur commun. S’agissant du décompte des degrés en ligne collatérale, les degrés se comptent par génération depuis l’un des parents jusqu’à l’auteur commun et depuis celui-ci jusqu’à l’autre parent.

La successibilité en ligne collatérale comporte une limite inscrite à l’article 745 qui prévoit que les collatéraux ne peuvent succéder que jusqu’au 6ème degré.

Dès lors que l’on a établit le nombre de degrés qui sépare le défunt de ses parents au sein de l’ordre qui est appelé à hériter 2 règles corrélatives vont avoir vocation à s’appliquer :

  • la règle de proximité du degré : au terme de l’article 744 alinéa 1er, le parent le plus proche en degré exclut le parent le plus éloigné. C’est ainsi que le fils du défunt exclut ses propres descendants car c’est lui le plus proche en degré.

  • la règle de l’égalité des héritiers d’un même degré : à égalité de degré, les héritiers d’un même ordre se partagent la succession par tête et donc à égale portion. Si le défunt laisse 3 enfants, ils ont droit à la même part donc reçoit 1/3 de la succession chacun.

La détermination des héritiers qui se fait donc en principe par l’utilisation de ce double classement par ordre et par degré pourra être corrigée par l’application de correctifs issus de la technique de la représentation et de la fente.

Sous-section 2 : Les correctifs

Sans contredire le principe, selon lequel effectivement dans chaque ordre le parent le plus proche exclut le parent le plus éloigné et sans contre dire non plus le principe de l’égalité de droit à égalité de degré, le code civil apporte toutefois 2 correctifs à ce principe.

I. La représentation successorale

La représentation successorale est définie par l’article 751 du Code civil qui prévoit que la représentation est une fiction juridique qui a pour effet d’appeler à la succession les représentants aux droits du représenté. La représentation successorale correspond en faite à un souci de justice et d’équité.

A. L’objectif de la représentation

C’est de corriger à la fois la règle de la priorité selon le degré et la règle de l’égalité de droit à égalité de degré.

Exemple : on peut envisager l’hypothèse d’une personne qui décède en laissant un enfant et un petit fils né d’un autre enfant pré décédé. Si on applique les règles de l’ordre successoral et du degré de manière stricte, la personne qui est normalement appelée à succéder est l’enfant survivant du défunt qui devrait donc recueillir la succession en totalité. Effectivement, l’enfant du défunt appartient au 1er ordre de successibles (= visé par l’article 734 du Code civil) et lorsque l’on examine la situation, on voit que dans cet ordre successoral les enfants et leurs descendants, on a plusieurs personnes parce qu’il y a l’enfant mais il y a aussi le petit-fils. Si on applique la règle ensuite du degré qui est applicable, il a donc vocation à recueillir la succession et a vocation à recueillir toute la succession selon la règle du degré car il est le plus proche en degré. Et par conséquent, il exclut complètement l’enfant né de l’enfant pré décédé du défunt. Mais il a semblé injuste et difficile d’admettre que le petit fils qui était issu d’un fils pré décédé soit exclu de la succession de son grand-père par son oncle qui est plus proche en degré. C’est pourtant le résultat auquel conduit l’application stricte des 2 règles.

Faut-il souffrir du pré décès de son parent du fait de la règle du degré? Réponse négative et a conduit à la mise en place de la technique de la représentation qui va permettre concrètement au petit fils de venir à la succession de son grand-père en représentation de son père et en concurrence avec son oncle.

La représentation permet donc, ici, d’apporter un 1er correctif à la règle du degré. Elle corrige la priorité selon le degré et permet qu’un héritier d’un degré plus éloigné concours avec un héritier d’un degré plus proche.

La technique de la représentation va apporter un 2ème correctif qui va permettre de déroger à la règle de l’égalité des droits à égalité de degré.

Exemple : soit un défunt qui laisse à sa succession 2 enfants E1 et E2, tous 2 prédécédés. E1 laissant lui-même 2 enfants e1 et e2 et E2 laissant lui-même un enfant e’2. Sans la technique de la représentation, la règle selon laquelle il y a égalité de droits des héritiers à égalité de degré conduirait au résultat suivant : les petits enfants e1, e2 et e’2 étant tous héritiers au 2ème degré et étant seuls successibles du fait du pré décès de leurs parents si l’on appliquait la règle d’égalité des droits à égalité de degré chacun devrait recevoir 1/3 de la succession du grand-père. Et bien non.

Grâce à la représentation, chaque petit enfant venant en représentation de son auteur, les petits enfants se partageront respectivement la part qui devait normalement revenir à leur auteur. En l’espèce chaque enfant E1 et E2 aurait du recevoir la moitié de la succession mais ils sont pré décédés donc leurs parts théoriques va revenir à leurs descendants donc e1 et e2 se partageront la moitié donc auront chacun ¼ de la succession et e’2 enfant unique de E2 reçoit la moitié. L’application de la règle de la représentation s’explique par un principe d’égalité de devoir envers les souches auxquelles le défunt avait donné naissance.

Par la technique de la représentation, les petits enfants vont d’une part se hisser au même degré que l’enfant en prenant la place de leur mère ou père pré décédé et recueillir exactement les droits qu’auraient du recueillir leur auteur pré décédé.

B. Le domaine de la représentation

1. Les successions qui sont concernées

La représentation ne joue que pour les successions ab intestat. Elle est exclut pour les successions testamentaires.

2. Les bénéficiaires de la représentation

Si on reprend la définition de la représentation telle qu’elle figure à l’article 751, on constate que la représentation est une fiction qui appelle à la succession les représentants aux droits du représenté.

a. Les conditions relatives au représenté

Deux questions se posent :

  • quelles sont les catégories d’héritiers qui peuvent être représentés?

  • et dans quel cas cette catégorie d’héritiers pourra-t-elle être représentée?

— La représentation va jouer dans 2 cas :

  • dans les successions dévolues aux descendants

  • aux successions dévolues aux collatéraux privilégiés.

  • En premier lieu, effectivement la représentation joue au profit des descendants, la règle est prévue à l’article 752 alinéa 2 du Code civil. Ce texte prévoit qu’« elle est admise dans tous les cas, soit que les enfants du défunt concourent avec les descendants d’un enfant pré décédé soit que tous les enfants du défunt étant morts avant lui, les descendants desdits enfants se trouvent entre eux en degré égaux ou inégaux ».S’agissant du jeu de la représentation au profit des descendants, l’alinéa 1er de ce même texte prévoit que « la représentation a lieu à l’infini dans la ligne directe descendante » c’est-à-dire sans limitation de degré.

  • En second lieu, la représentation au profit de ligne collatérale privilégiée c’est-à-dire au profit des descendants des frères et sœurs du défunt ainsi que cela résulte de l’article 752-2 du Code civil qui prévoit que « en ligne collatérale, la représentation est admise en faveur des enfants et des descendants des frères ou sœurs du défunt soit qu’ils viennent à la succession concurremment avec des oncles ou tantes soit que tous les frères et sœurs du défunt étant pré décédé la succession se trouve dévolue à leurs descendants en degré égaux ou inégaux ».

A priori, la représentation en ligne collatérale ne devrait jouer que jusqu’au 6ème degré puisque l’article 745 du Code civil prévoit que les parents collatéraux visés de façon générale ne succèdent pas au delà du 6ème degré.

Deux catégories d’héritiers peuvent bénéficier de la représentation. En revanche, la représentation ne profite ni aux ascendants privilégiés ou ordinaires (= article 752-1 du Code civil) ni aux collatéraux ordinaires (= article 752-2 : réservant expressément la représentation aux enfants et descendants des frères et sœurs du défunt c’est-à-dire les collatéraux privilégiés).

— Les hypothèses de représentation : la représentation permet d’appeler à la succession les représentants aux droits du représenté et elle va donc permettre à un héritier de prendre la place d’un héritier plus rapproché. La question de savoir dans quels cas un héritier peut être amené à prendre la place d’un autre plus rapproché? La réponse est directement conditionnée par l’objectif de la représentation. L’objectif, c’est d’assurer l’égalité entre les souches. Pour qu’il y ait effectivement une pleine égalité entre les souches, il faut, lorsqu’un enfant ou alors un frère ou une sœur du défunt qui ne vient pas lui-même à la succession que ses descendants puissent prendre sa place. Dans les exemples que nous avons vus, l’hypothèse était toujours celle du pré décès de l’héritier qui était normalement appelé à la succession. Or les hypothèses où un enfant ou un frère ou une sœur du défunt ne vienne pas à la succession sont beaucoup plus nombreuses. Ces hypothèses visent le pré décès mais pas uniquement. Il y a d’autres hypothèses telles que le cas où cet héritier est vivant et ne peut pas ou ne veut pas recueillir la succession. Ces hypothèses ont été prises en compte par le législateur. A l’origine, la représentation était limitée au seul cas du pré décès de l’héritier? Lors de la réforme de 2001, le législateur a complété une première fois cette hypothèse en ajoutant le cas de l’héritier qui était non pas pré décédé mais co décédé (= le co-mourant) et le cas de l’indigne.

Le cas de l’indigne est visé à l’article 755 du Code civil qui prévoit que la représentation est admise en faveur des enfants et des descendants de l’indigne encore que celui-ci soit vivant à l’ouverture de la succession.

La seule catégorie d’héritiers qui restait exclut de la représentation à l’issu de la reforme de 2001 réforme de 2001 était la catégorie de l’héritier renonçant qui ne recueillait pas la succession non pas parce qu’il ne le pouvait pas mais parce qu’il ne le voulait pas. Cette dernière source d’exclusion de la représentation a disparu lors de la réforme du 23 juin 2006 qui a admis la représentation de l’héritier renonçant. Pourquoi a-t-on admis cela? La justification de l’admission de la représentation du renonçant est rappelée dans l’exposé des motifs de la loi de 2006 : il est exposé que l’admission de la représentation du renonçant était le corolaire indispensable dans le cas de la succession ab intesta de la possibilité ouverte par le projet de loi en matière de libéralité, de procédés à des donations trans générationnelles au profit des petits enfants. La prise de position globale s’inscrit dans la logique de la réforme opérée en 2006 qui est de permettre la transmission des patrimoines aux plus jeunes. Aujourd’hui, on peut représenter aussi un renonçant en ligne directe et en ligne collatérale qui résulte aujourd’hui de l’article 754 du Code civil. Admettre la possibilité de représenter un renonçant au profit des descendants et des collatéraux privilégiés, c’est là encore permettre la pleine égalité des souches dans les domaines où la représentation est admise.

b. Les conditions relatives au représentant

Qui peut représenter l’héritier appelé normalement à la succession? Il faut donc s’interroger sur le lien de parenté entre le représentant et la catégorie d’héritiers qu’il représente.

Pour venir à une succession par représentation, il faut être un descendant du représenté. Pourquoi? Le mécanisme de la représentation s’explique par la notion de souche. La notion de souche intervient lorsque le défunt avait plusieurs descendants et/ou plusieurs frères et sœurs. Dans ce cas, chaque descendant ou chaque collatéral privilégié a pu faire souche en ayant lui-même des descendants. Il suffit que l’un seul des enfants ou des frères et sœurs ait fait souche pour que la représentation soit justifiée et s’applique. Le mécanisme de la représentation est directement lié à cette notion de souche, il faut que le de cujus ait eu plusieurs enfants ou plusieurs frères et sœurs et que l’un d’entre eux ait eu lui-même un ou plusieurs descendants car la souche prend naissance lorsque l’un au moins des enfants ou l’un au moins des frères et sœurs du défunt a eu lui-même des descendants. Dans ce cas, il y a souche donc il y a représentation. L’application de cette règle permet de distinguer les hypothèses dans lesquelles la représentation va jouer des hypothèses où la représentation sera exclut. On peut ainsi préciser dans quel cas la représentation sera admise.

De manière concrète, en cas de pré décès d’un descendant (= enfant) ou d’un frère ou d’une sœur, la représentation sera admise dans les cas suivants :

  • lorsque les enfants du défunt sont en concours avec les descendants d’un enfant prédécédée ou lorsque les frères et sœurs du défunt sont en concours avec les descendants d »un frère ou d’une sœur pré décédé.

  • lorsque tous les enfants ou tous les frères et sœurs du défunt sont pré décédés et que leurs enfants concourent entre eux.

Les cas d’exclusion de la représentation :

  • elle est exclue lorsque le défunt ne laisse pour seul héritier que des enfants issus d’un même enfant pré décédé, les autres enfants éventuels du défunt étant tous pré décédés sans postérité, les descendants viennent alors à la succession de leur propre chef et non pas par représentation. Il n’y a aucun concours.

  • lorsque le défunt est décédé sans postérité et ne laisse pour héritier que les enfants issus d’un frère ou d’une sœur unique pré décédé. Les enfants hériteront de leur propre chef.

Il sera important de savoir distinguer selon que l’on hérite par représentation ou de son propre chef lorsque se posera le problème du rapport des donations à la succession.

En conclusion, la représentation va permettre à un héritier de prendre la place d’un héritier plus rapproché qui ne vient pas lui-même à la succession soit parce qu’il ne le peut plus (= il est décédé) soit parce qu’il en est exclu (= il est indigne) soit parce qu’il ne le veut plus (= il est renonçant).

C. Les effets de la représentation

La représentation a pour effet de faire entrer le représentant dans le degré et les droits qu’aurait eu le représenté. Cette règle découle directement de la définition même de la représentation (= article 751 : la représentation appelle à la succession les représentants aux droits du représenté).

Le représentant venant aux droits du représenté, il en résulte 3 conséquences :

  • le représentant accède au degré du représenté

  • le représentant devra rapporter à la succession les libéralités qui auront été consenties par le défunt au représenté

  • le représentant prenant la place du représenté dans la succession, le partage s’opérera par souche comme si c’était le représenté qui venait à la succession. Et à l’intérieur d’une même souche voire d’une subdivision de souche le partage se fera par tête.

DEFUNT

1ère hypothèse :

½ S

1/6e chacun

Enfant B décédé

Enfant A

b1

b2

b3

2 souches constituées par les enfants A et B. B étant pré décédé, b1, b2 et b3 viennent à la succession du défunt par représentation.

A reçoit ½ de la succession. B devrait recevoir ½ mais B étant « pré décédé », ce sont ses enfants qui le représentent.

A l’intérieur de la souche issu de B, le partage se fait alors par tête. B1, b2 et b3 se partage la ½ qui reviendrait à B c’est-à-dire 1/6e chacun. Grâce au mécanisme de la représentation, b1, b2 et b3 viennent en concours avec A.

Deuxième

Z DE CUJUS

Frère A

Frère B

décédé

Hypothèse subdivision de souche : défunt Z qui avait 2 frères A et B. Z est le défunt, A existe est vivant mais B est pré décédé en laissant 3 enfants B1 et B2 et B3. B1 étant lui-même aussi pré décédé en laissant quant à lui 4 enfants.

Il y a 2 souches et chacune reçoit un demi.

II. La fente successorale

Elle va permettre d’assurer l’égalité entre les branches paternelle et maternelle. On parle de la subdivision par branche dans le Code.

L’objectif de la fente successorale, c’est d’assurer l’égalité entre les lignes paternelle et maternelle. La parenté se divise en 2 branches selon qu’elle procède du père ou de la mère. Cette règle de la division par branche est issue de l’article 746 du Code civil. Le Code Civil prévoit ensuite 2 hypothèses où va s’appliquer le mécanisme de la fente, hypothèses qui figurent aux articles 747 et 749 du Code civil qui prévoit la division par branche au profit des ascendants d’une part et des collatéraux ordinaires d’autre part.

A. Le cas des ascendants

L’application de la division par branche est inscrite à l’article 747 du Code civil qui déclare que lorsque la succession est dévolue à des ascendants, elle se divise par moitié entre les ascendants de la branche paternelle et ceux de la branche maternelle.

La division suppose donc 2 choses :

  • c’est que la succession soit dévolue aux ascendants, ce qui suppose que ce soit les ascendants qui soient appelés à recueillir la succession.

  • c’est qu’il y ait des héritiers dans les 2 branches.

Si tel est le cas, les modalités de division sont précisées elles à l’article 748 qui prévoit 3 points :

  • dans chaque branche, c’est l’ascendant le plus proche en degré qui succède.

  • en cas de pluralité d’ascendants à un même degré, le partage se fait alors par tête.

  • à défaut d’ascendants dans l’une des 2 branches, il n’y a pas lieu de diviser et ce sont les ascendants de l’autre branche qui recueillent l’intégralité de la succession.

1/4

1/4

1/2

Voici, l’intérêt de la fente car sans ce mécanisme, la succession aurait été répartie égalitairement entre les 3 grands parents vivants qui auraient recueillit chacun 1/3 de la succession alors que grâce au mécanisme de la fente, le grand père maternel reçoit la moitié dévolue à sa branche alors que les grands parents paternel se partagent ½ c’est-à-dire ¼ chacun.

On remarque donc que dans cette hypothèse le mécanisme de la fente permet d’assurer l’égalité entre les branches paternelle et maternelle sans remettre en cause le classement par ordre dans la mesure où effectivement les seuls parents successibles appartiennent à l’ordre des ascendants ordinaires c’est-à-dire les ascendants autres que les père et mère qui appartiennent eux à l’ordre des ascendants privilégiés.

La question qui peut se poser est celle de savoir si la fente doit jouer lorsqu’il y a présence simultanée d’ascendants privilégiés et d’ascendants ordinaires.

En effet, dans une telle hypothèse l’application du principe hiérarchique du classement par ordre devrait conduire à évincer les ascendants ordinaires. Telle n’est pas la solution qui a été retenue. Et la solution a été précisée de manière expresse par loi de 2006 qui a introduit une règle spécifique pour régler le problème : règle inscrite à l’article 738-1 du Code civil.

Au terme de ce texte, lorsque seul le père ou la mère survit et que le défunt n’a ni postérité ni frères et sœurs ni descendants de ces derniers mais laisse un ou des ascendants de l’autre branche que celle de son père ou de sa mère survivant, la succession est dévolue pour moitié au père ou à la mère survivant et pour l’autre moitié aux ascendants de l’autre branche.

En présence du père ou de la mère dans une ligne et d’un ascendant autre que le père ou la mère dans l’autre ligne, la succession sera dévolue de la manière suivante :

l la moitié à la mère ou le père survivant

l la moitié aux ascendants de l’autre ligne

DE CUJUS

Grâce au mécanisme de la fente, les grands parents paternels recueillent ensemble la moitié de la succession alors que sans le mécanisme de la fente la mère du défunt qui appartient à un ordre et un degré plus proche aurait évincé les grands parents paternels par l’application de la règle de l’ordre et du degré.

La succession se divise entre la branche paternelle et maternelle mais cette division a lieu une seule fois, il n’y a jamais de refente. La succession qui s’est divisée entre la branche paternelle et maternelle ne se divise pas une seconde fois entre la branche du grand-père et de la grand-mère dans une même ligne.

B. Le cas des collatéraux ordinaires

L’application du mécanisme de la fente est prévue par l’article 749 du Code civil. Il prévoit que lorsque la succession est dévolue à des collatéraux autres que les frères et sœurs et leurs descendants, elle se divise par moitié entre ceux de la branche paternelle et maternelle. Ainsi, lorsque le défunt ne laisse pour recueillir sa succession que des collatéraux ordinaires appartenant aux 2 lignes paternelle et maternelle, on partage la succession en 2. Chaque ligne recevant une moitié.

La mise en œuvre de cette règle est précisée à l’article 750 qui prévoit 3 points :

  • dans chaque branche, c’est le collatéral le plus proche en degré qui succède à l’exclusion de tout autre

  • les collatéraux au même degré se succèdent par tête

  • à défaut de collatéral dans une branche, les collatéraux de l’autre branche recueillent l’intégralité

Soeur vivante

½ S

Les règles de dévolution qui viennent d’être rappelées sont celles qui sont applicables dans l’hypothèse d’une succession où ne sont appelés à succéder que des parents du défunt.

Au terme de l’article 731 du Code civil, la succession est certes dévolue aux parents mais aussi au conjoint successible du défunt. La présence d’un conjoint successible va influencer les règles de dévolution fondées sur la parenté dans la mesure où le conjoint va bénéficier de droits concurrentiels sur la succession.

Section 2 : Les droits du conjoint successible

Sous-section 1 : La qualité d’héritier du conjoint

I. La notion de conjoint

Le conjoint est un membre de la famille qui est issu non de la parenté mais de l’alliance, alliance fondée l’institution du mariage. La vocation successorale du conjoint est conditionnée par le mariage, seul le mariage donne une vocation successorale au conjoint.

En l’état actuel du droit, le statut du conjoint survivant ne concerne que les époux mariés et n’est pas applicable aux autres formes de couples qu’il s’agisse des concubins ou des partenaires liés par un PACS. Cela ne signifie pas que ces autres formes de couples ne se voient reconnaître aucuns droits au décès de leur compagnon mais les droits qui leurs sont reconnu sont limités et inscrits dans des dispositions expresses et particulières.

A. La situation du concubin

Les concubins forment un couple ne reposant sur aucune structure juridique, ils n’ont donc pas la qualité d’héritiers et ils n’ont aucune vocation successorale réciproque. Les seuls droits qui leurs sont reconnus ne découlent pas d’un véritable statut successoral mais résulte uniquement de dispositions législatives particulières ou encore de l’utilisation de techniques juridiques particulières par la jurisprudence pour permettre de leur reconnaître certains droits dans certaines circonstances.

Au titre des dispositions légales, la situation du concubin survivant est notamment prise en compte sur la législation des baux (= loi de 1989 qui reconnaît un droit à la continuation du bail). Le concubin se voit aussi reconnaître le bénéfice de la créance de salaire différée.

Concernant la jurisprudence, la prise en compte du concubin survivant reposera essentiellement sur l’application de la théorie de l’enrichissement sans cause sous réserve que le concubin établisse qu’il a procuré un enrichissement à son compagnon du fait d’une collaboration non rémunérée et qu’en contre partie, il en a subi un appauvrissement corrélatif. Il faut souligner que ces règles ont le mérite d’exister mais sont d’un maniement totalement aléatoire et elles n’offrent aucune sécurité ni garantie au concubin dans la mesure où l’utilisation des techniques par exemple l’enrichissement sans cause reposeront sur l’appréciation du juge et non sur des règles de droit. La seule possibilité est d’utiliser la technique des libéralités (= entre vifs …) mais c’est défavorable pour le concubin car aucun lien juridique de parenté avec son compagnon. Donc, il sera considéré comme étranger par le droit fiscal et ces libéralité auront à subir des mutations applicables (= taxation de 60%).

B. La situation du partenaire

C’est plus favorable du fait de l’existence d’un cadre juridique qui est donné au couple. Le partenaire survivant bénéficiera à ce titre de certains des droits reconnus au conjoint survivant mais ces droits restent quand même limités. Les droits qui lui sont reconnus visent essentiellement à garantir son droit au maintien de son cadre de vie, qui est garantie à la fois par la législation sur les baux qui lui reconnaît un droit à la continuation du bail ou encore par la reconnaissance du droit de jouissance gratuite du logement et du mobilier qui le garnit pendant 1 an à l’instar de ce qui est prévu pour le conjoint survivant.

Le partenaire bénéficiera lui aussi de la créance du salaire différé comme le concubin et donc comme le conjoint et le point sur lequel la situation du partenaire a connu une réelle amélioration relève de la prise en compte de son statut particulier par la législation fiscale. En effet, la loi TEPA du 21 Août 2007 a exonéré le partenaire des droits de mutation par décès pour les successions ouvertes à compter de l’entrée en vigueur de la loi. Et elle a également aligné les droits de mutation dus en cas de donation sur les règles applicables au conjoint notamment en ce qui concerne les règles relatives aux abattements.

Seul le conjoint marié se voit reconnaître la qualité de successible mais les concubins et partenaires ont des droits partiels et relèvent de dispositions ponctuelles.

II. La qualité de successible

L’article 731 envisage la vocation successorale du conjoint successible. Cette notion de conjoint successible étant préciser à l’article 732 qui déclare « être conjoint successible, le conjoint survivant non divorcé ».

Plusieurs remarques à faire de ce texte :

  • la lettre du texte n’exclut donc de la qualité de successible que le conjoint divorcé. Cette rédaction issue de la loi de juin 2006 marque une évolution notable car dans sa rédaction antérieure l’article 732 visait lui comme conjoint successible, le conjoint non divorcé contre lequel n’existait pas de jugement de séparation de corps ayant force de chose jugée.

  • peu importe aujourd’hui qu’il y ait séparation de corps dès lors que lien matrimonial subsiste. La seule hypothèse où le conjoint séparé de corps sera exclut de la succession sera celle qui résultera de la volonté des époux eux-mêmes lorsque dans une séparation de corps par consentement mutuel, ils auront inclut dans leur convention de manière expresse une renonciation aux droits successoraux qui leurs sont conférés par les règles légales c’est-à-dire les articles 756 à 757-3 …

Sous-section 2 : Les droits du conjoint successible

Les droits ont connus une amélioration nette depuis la loi de décembre 2001 et elle est complétée par celle de 2006. La prise en compte de la situation particulière du conjoint survivant est le résultat d’une prise de conscience à la fois de sa place dans la famille actuelle mais aussi de l’insuffisance de sa protection en cas de décès. Insuffisance de droit longtemps masquée par l’existence des droits que pouvaient lui conférer son régime matrimonial.

Le conjoint, par définition, même marié pouvait voire sa situation patrimoniale garantie par le choix de son régime matrimonial ou encore par le jeu des mécanismes propres à la technique des régimes matrimoniaux, mécanismes liés à la notion d’avantage matrimonial ou donation entre époux.

On a pendant longtemps considéré que le régime matrimonial le plus courant (= réduit au acquêt) préservait suffisamment le conjoint car au moment du décès de l’autre époux, le conjoint survivant avait vocation à recueillir la moitié de la communauté. Tout ça était illusoire dans la mesure où la communauté pouvait être pauvre.

C’est pour toutes ces raisons que la nécessité de protéger le conjoint s’est imposée et a conduit le législateur à lui reconnaître 2 types de droits lors du décès de l’autre époux :

  • il va recueillir d’une part des droits dans la succession du défunt

  • des droits contre la succession du défunt

I. Les droits du conjoint successible dans la succession du défunt

Cela va poser 2 séries de problèmes :

  • le contenu de ces droits

  • la liquidation de ces droits

Sous I. Le contenu des droits du conjoint dans la succession

Le conjoint survivant donc successible va bénéficier à la fois d’une vocation successorale de droit commun et d’un droit d’habitation viager sur le logement occupé à la date du décès.

A. La vocation successorale de droit commun du conjoint

Lorsque le défunt était marié, la présence du conjoint survivant va venir perturber les règles de dévolution de la succession au sein de la parenté.

En effet, les droits reconnus au conjoint survivant vont venir en concurrence avec ceux qui sont attribués par la loi aux parents successibles. Cette hypothèse de concurrence des droits du conjoint découle directement de l’article 756 du Code civil qui déclare que le conjoint successible est appelé à la succession soit seul soit en concours avec les parents du défunt.

De manière plus précise, le conjoint va venir en concours avec 2 catégories de parent du défunt :

  • les parents les plus proches du défunt c’est-à-dire les enfants et leurs descendants

  • ou alors les parents du défunt c’est-à-dire les ascendants privilégiés.

En revanche, s’agissant des autres parents visés dans les 4 ordres de successibles, le conjoint va l’emporter sur les parents plus éloignés et primer à la fois sur les collatéraux privilégiés, les ascendants ordinaires et les collatéraux ordinaires.

1. Les hypothèses de concours

a. Le concours avec les enfants ou leurs descendants

Cette hypothèse de concours est envisagée à l’article 757 du Code civil qui déclare que si l’époux pré décédé laisse des enfants ou des descendants, le conjoint recueille à son choix l’usufruit de la totalité des biens existant ou la propriété d’un ¼ des biens lorsque tous les enfants sont issus des 2 époux et la propriété du ¼ en présence d’un ou plusieurs enfants qui ne sont pas issus des 2 époux (= il suffira qu’il ait un enfant non commun pour supprimer l’option).

La lecture du texte montre immédiatement que le concours entre le conjoint survivant et les enfants du défunt obéit à des règles différentes selon que le conjoint est en concours avec des enfants qui soient tous issus des 2 époux ou alors avec des enfants pas tous issus des 2 parents.

a1. Les enfants tous issus des 2 époux

Lorsque le texte vise l’hypothèse où tous les enfants sont issus des 2 époux, il vise l’hypothèse des enfants qui bénéficient d’un lien de filiation à l’égard de chacun des 2 époux. Ceci permet de comprendre que l’on a admis qu’il fallait assimiler à la notion d’enfant issu des 2 époux le cas de l’enfant d’un époux adopté par son conjoint. La notion d’enfant issu des 2 époux étant circonscrite, il apparaît à la lecture de l’article 757 que dans ce cas de figure, le conjoint successible se voit reconnaître une option successorale dont il va falloir préciser les termes et le régime.

– Les termes de l’option –

Option articulée autour de 2 idées :

  • usufruit de la totalité des biens existants

  • pour des droits en pleine propriété : ¼ des biens

Cette faculté de choix offerte au conjoint pose la question de l’intérêt de la balance des avantages entre usufruit et propriété ainsi que leurs inconvénients.

— S’agissant du choix de l’usufruit, il va effectivement être guidé par une balance d’avantages et d’inconvénients.

Avantages de l’usufruit :

  • avantage matériel objectif : le choix de l’usufruit va permettre au conjoint de maintenir ses conditions de vie antérieures. Grâce à l’usufruit, il va pouvoir continuer à avoir la jouissance des biens de la succession sans entraver la dévolution de la nu propriété du bien aux autres héritiers (= enfants et leurs descendants) qui à terme bénéficieront de la reconstitution des droits en plein propriété au décès de l’usufruitier.

  • avantage fiscaux : avantage immédiat concernant les droits de succession qui sont du respectivement par l’usufruitier et les nu propriétaires. En effet, si le conjoint choisi l’usufruit, les droits de mutation qu’il devra acquitter seront peu importants car ils seront calculés sur la valeur de l’usufruit qui est faible si le conjoint est âgé et de manière symétrique les droits qui devront être acquittés par les nu propriétaires seront tels aussi puisqu’ils seront diminués de la valeur de l’usufruit et que la nu propriété a une valeur moindre que la pleine propriété. Du coté du conjoint et des droits à percevoir au titre de la succession sur l’usufruit, cet avantage évident existait effectivement jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi TEPA. Depuis la loi TEPA dans la mesure où il est exonéré de droits de succession de son coté, de toute façon cela ne présente plus aucun intérêt mais l’avantage pour le nu propriétaire lui subsiste. Mais, l’avantage fiscal va aussi se prolonger lors du règlement de la succession de l’époux usufruitier parce qu’à ce moment là, la reconstitution des droits en pleine propriété au décès de l’usufruitier ne déclenchera pas l’exigibilité de droit de mutation.

Ces avantages indiscutables de l’usufruit ne doivent pas néanmoins occulter ses inconvénients :

Par rapport à la personne de l’usufruitier, l’usufruit peut se révéler paradoxalement inadapté dans le cas du conjoint âgé du fait notamment de la complexité des relations juridiques entre l’usufruitier et les nu propriétaires notamment en ce qui concerne la question de la répartition des obligations respectives de l’usufruitier (= entretien) et des nu propriétaires concernant les réparations (= article 605 du Code civil : les grosses réparations). Cette clé de répartition va poser un problème de qualification dans certains cas : que décider notamment dans le cas des dépenses qui vont être générées par des travaux d’adaptation du bien à l’âge de l’usufruitier.

— S’agissant du choix des droits en pleine propriété, celui-ci présente des avantages et des inconvénients.

Avantages de la pleine propriété :

  • conférer au conjoint des droits disponibles car il est propriétaire.

  • évite les relations avec les autres héritiers.

Inconvénient :ce choix est désavantageux pour les autres héritiers sur le plan fiscal car ces biens donneront lieu à une double taxation successive. Les biens sont taxés sur une valeur maximale lors de leur transmission au décès du 1er époux et seront ensuite taxés une deuxième fois lorsqu’ils seront transmis aux héritiers lors du décès du 2ème époux.

Le choix entre les 2 termes de l’option peut se révéler délicat. Mais, la portée réelle de ce choix sera tempérée par l’existence de mécanismes juridiques qui permettront d’assurer les droits à la fois du conjoint mais aussi des autres héritiers.

– Le régime juridique de l’option successorale du conjoint –

L’option successorale du conjoint soulève le problème de la nature de sa preuve et de son exercice.

— S’agissant de la nature de cette option successorale, 2 points méritent d’être soulignés :

  • La place de l’option du conjoint au regard de l’option successorale de droit commun qui est reconnu à chaque héritier : l’option qui est reconnu au conjoint par les articles 757 et suivant du Code civil est en faite un accessoire de l’option successorale reconnu aux héritiers d’une succession. En effet, dès lors que des héritiers sont successibles, ils peuvent succéder mais ils ne sont pas obligés de succéder. Leur choix de succéder se manifestera par l’exercice de l’option successorale qui leur est reconnu. Concernant le conjoint, l’option particulière qui lui est reconnu correspond au contenu de l’option successorale générale recueilli par le conjoint survivant qui peut lui aussi choisir de succéder ou non. Par conséquent, seul le conjoint qui acceptera la succession recueillera cette fameuse option offrant le choix entre propriété et usufruit. Donc, l’option successorale du conjoint s’articule en 2 temps : option générale (= décision d’accepter ou non la succession) et ensuite option particulière (= option entre les droits en propriété ou en usufruit).

  • les caractéristiques propres de l’option successorale du conjoint successible : cette option constitue un droit personnel au conjoint survivant. Le caractère personnel de ce droit résulte des 2 caractéristiques qui sont attachées au régime de l’option du conjoint. Cette option est incessible (= article 758-1 du Code civil qui prévoit que lorsque le conjoint survivant a le choix de la propriété ou de l’usufruit, ses droits sont incessibles tant qu’il n’a pas exercé son option). Cette option est en plus intransmissible, ce qui ressort directement de l’article 758-4 du Code civil qui prévoit que le conjoint est réputé avoir opté pour l’usufruit s’il est décédé avant d’avoir exercé son option.

— S’agissant la preuve de l’option : d’après l’article 758-2 du Code civil, la preuve de l’option par le conjoint entre usufruit et propriété se fait par tous moyens.

La loi n’impose aucun formalisme au conjoint pour manifester son choix entre les 2 termes de l’option. L’option pourra ainsi être verbale voire même tacite et résulter par exemple de l’attitude du conjoint survivant lorsque celui-ci se comporte après le décès comme s’il avait la jouissance de l’ensemble des biens de la succession, cette attitude pouvant s’analyser comme un choix tacite en faveur de l’usufruit.

— S’agissant de l’exercice de cette option successorale : l’exercice de cette option implique de se demander quand cette option doit s’exercer et de s’interroger sur le portée de l’option qui aura été exercée.

Concernant le délai de l’option, le texte qui prévoit l’existence de cette option successorale au profit du conjoint survivant ne mentionne aucun délai. Par conséquent, pour éviter que les descendants du défunt dont les droits sont conditionnés par l’option du conjoint ne restent trop longtemps dans l’incertitude, la loi a prévu que les héritiers peuvent inviter le conjoint par écrit à exercer son option. L’intérêt de cette mesure résulte dans le fait qu’à défaut d’avoir pris parti dans un délai de 3 mois le conjoint sera réputé avoir opté pour l’usufruit. Il y a une autre hypothèse où il y a également usufruit, c’est lorsque le conjoint sera décédé avant d’avoir exercé son option.

Concernant la portée de l’option : elle doit être relativisée dans le cas où le conjoint opterait pour des droits en usufruit. En effet, le choix de droits en usufruit peut finalement se révéler non satisfaisant aussi bien pour le conjoint mais aussi pour les autres héritiers. Et le choix initial de droit à l’usufruit pourra dans certains cas déboucher sur une transformation des droits en usufruit en rente viagère ou en capital. L’usufruit peut être difficile à gérer par le conjoint lorsque celui-ci est âgé et cet usufruit finalement ne garantit pas des revenus certains à l’usufruitier c’est-à-dire le conjoint. Pour les héritiers, le choix de l’usufruit pose le problème de la privation de jouissance de l’ensemble des biens sur une durée qui peut être longue et soulève aussi le problème de la conservation de la valeur économique des biens. Le législateur a prévu la possibilité de demander la conversion de cet usufruit en rente viagère ou en capital. La conversion de l’usufruit peut être amiable c’est-à-dire résulter d’un accord entre le conjoint et les autres héritiers. Mais à défaut d’accord, elle peut même être imposée par une des parties au règlement successoral dans le cadre d’une action judiciaire en conversion forcée. Lorsque la conversion est amiable, elle peut s’opérer soit en rente viagère soit en capital. En revanche, lorsque la conversion de l’usufruit est forcée, cette conversion sera soumise à une triple limite :

  • elle ne pourra donner lieu qu’à une conversion en rente viagère. La conversion en capital est elle nécessairement subordonnée à l’existence d’un accord entre le conjoint et les héritiers ainsi que cela résulte clairement de l’article 761 du Code civil.

  • la conversion forcée de l’usufruit en rente viagère ne pourra pas être imposée au conjoint sur le logement qu’il occupe à titre de résidence principale ni sur le mobilier qui garnit ce logement (= article 760 alinéa dernier du Code civil).

  • la demande judiciaire de conversion de l’usufruit devra nécessairement être introduite avant que le partage soit devenu définitif.

Dans le cadre de la conversion judiciaire lorsque le juge décidera d’accéder à la demande de conversion, celui-ci étant libre de l’accorder ou non, c’est lui qui fixera le montant de la rente ainsi que les garanties à fournir par les autres héritiers pour palier à tout risque d’insolvabilité des débiteurs de la rente. Et c’est lui aussi qui fixera le type d’indexation propre à maintenir l’équivalence entre la rente et l’usufruit. Concrètement, cette équivalence s’estime en revenu permettant au conjoint de survivre.

Cette faculté de conversion de l’usufruit est un droit d’ordre public qui ne peut pas être écarté par le défunt et auquel on ne peut pas renoncer (= article 759 du Code civil).

Cette faculté de conversion de l’usufruit qui est à la fois un instrument de protection du conjoint et des autres héritiers soulève un problème pratique au niveau de sa mise en œuvre. Il est en effet difficile techniquement de liquider des droits en usufruit dont la valeur est en faite incertaine. Et la loi qui prévoit la faculté de conversion ne prévoit aucune règle permettant de calculer la valeur de l’usufruit pour ensuite le convertir en rente viagère.

Concrètement, les parties pourront s’inspirer des règles fiscales qui prévoient un barème indiquant les valeurs complémentaires de l’usufruit et de la nue propriété pour calculer les droits exigibles en cas de mutation. Ce barème qui figure à l’article 669 du Code Général des Impôts prévoit ainsi selon que l’usufruitier a moins de 51, 61, 71 ou 81 ans son usufruit vaut respectivement 60, 50, 40 ou 30% de la valeur de la nue propriété. La conversion s’analyse comme une opération de partage mais elle ne produit pas d’effet rétroactif afin d’éviter les problèmes des comptes de restitution relatifs au revenu produit par l’usufruit entre la date d’ouverture de la succession et la date de conversion.

a2. Les enfants qui ne sont pas tous issus des 2 époux

Dans cette hypothèse, lorsque les enfants ne sont pas tous issus des 2 époux, il n’y a plus d’option. Les droits du conjoint survivant sont obligatoirement des droits en pleine propriété c’est-à-dire ¼ en pleine propriété. Cette règle a vocation à jouer dès lors qu’il y a un enfant non commun aux 2 époux et joue aussi quand il y a à la fois des enfants communs et non communs.

Dans tout ces cas, le bénéfice de l’option est supprimé. La suppression de l’option entre propriété et usufruit se justifie par l’existence du second mariage.

Le législateur a considéré dans ce cas que l’usufruit était inadapté en cas de remariage du défunt avec un conjoint plus jeune car cela risquait de priver pendant trop longtemps les enfants du lit précédent de la jouissance des biens de la succession.

Par ailleurs, les droits en usufruit sont écartés pour une autre raison, le législateur a voulu éviter aussi tout conflit pouvant résulter du fonctionnement du démembrement de propriété.

Mais, il faut quand même souligner que l’option est supprimée dans le cadre de règles de dévolution ab intestat. Mais que cela n’exclut pas l’hypothèse que l’usufruit écarte par les règles de dévolution ab intestat et que soit accordé au conjoint dans le cadre d’une donation de biens à venir que lui aurait consenti son conjoint ou dans le cadre d’un legs par testament.

b. Le concours du conjoint avec des ascendants privilégiés (= père et mère du défunt)

Il y a 2 cas de figure :

  • conjoint en concours avec père et mère du défunt : cette situation est visée à l’article 757-1 du Code civil qui prévoit que si à défaut d’enfants ou de descendants, le défunt laisse ses père et mère, le conjoint survivant recueille la moitié des biens et l’autre moitié étant dévolue pour ¼ à la mère et pour ¼ au père.

  • conjoint en concours avec père ou mère du défunt : si le père ou la mère et pré décédé et le conjoint survivant n’est en concours qu’avec un seul des parents, la part qui serait revenu au parent pré décédé lui échoit conformément à l’article 757-1 alinéa 2.

Les droits du conjoint survivant en l’absence de descendants par définition sont assortis d’un mécanisme compensateur au profit des ascendants privilégiés. Mécanisme tiré du droit de retour légal qui leur est reconnu par l’article 738-2 du Code civil qui prévoit que lorsque les père et mère ou l’un d’eux survivent au défunt et que celui-ci n’a pas de postérité, ils peuvent dans tous les cas exercer un droit de retour à concurrence des quotes-parts fixées au 1er alinéa de l’article 738 sur les biens que le défunt avaient reçu d’eux par donation. Cette règle qui prévoit ce droit de retour légal au profit des ascendants privilégiés figure techniquement dans la section du Code civil qui réglemente les droits des parents en l’absence de conjoint successible mais il est admis que ce droit de retour légal doit jouer également lorsque l’on est en présence du conjoint successible. Le contenu et le régime de ce droit de retour légal qui est fondé sur l’origine des biens rentrent dans l’hypothèse des règles de dévolution particulière fondées sur l’origine des biens et par conséquent le droit de retour légal des ascendants sera vu lorsque l’on étudiera les successions anomales, les successions particulières.

En dehors des cas où le conjoint est en concours avec les parents les plus proches du défunt, le conjoint va bénéficier d’une situation encore plus favorable, assimilable à une sorte de monopole successoral.

2. L’absence de concours : les hypothèses de monopole successoral

Face à des parents plus éloignés appartenant aux autres catégories de successibles, le conjoint se voit reconnaître non plus des droits concurrentiels et donc limités par le contenu des droits reconnus aux parents les plus proches mais des droits exclusifs qui le mettent dans une situation de monopole successoral. Ainsi, si le défunt ne laisse ni descendants ni ascendants privilégiés, le conjoint a vocation à recueillir la totalité de la succession en pleine propriété. C’est-à-dire qu’il va évincer les frères et sœurs du défunt (= les collatéraux privilégiés), les ascendants ordinaires et les collatéraux ordinaires. Cette éviction résulte de l’article 757-2 du Code civil qui déclare qu’en l’absence d’enfants ou de descendants du défunt et de ses père et mère, le conjoint survivant recueille toute la succession.

La règle est donc bien celle de l’éviction des autres parents du défunt qui sont écartés de la succession. Mais, cette règle compte tenu de l’importance de ces implications comporte au profit de certaines catégories de parents évincés de la succession des mécanismes compensateurs destinés à leur reconnaître certains droits.

a. Les collatéraux privilégiés

Les collatéraux privilégiés sont évincés que depuis la loi du 3 décembre de 2001. Le conjoint va primer. Le législateur a assorti cette éviction d’un mécanisme compensateur qui consiste à reconnaître aux collatéraux privilégiés un droit de retour légal.

Ce droit de retour légal est inscrit à l’article 757-3 qui prévoit que par dérogation à l’article 757-2 (= texte qui évince les collatéraux privilégiés de la succession en cas de pré décès des mère et père) les biens que le défunt avaient reçu de ses ascendants par succession ou donation et qui se retrouvent en nature dans la succession sont en l’absence de descendants dévolus pour moitié aux frères et sœurs du défunt ou leurs descendants eux mêmes, descendants du ou des parents pré décédés à l’origine de la transmission. Là encore, il s’agit d’un droit de retour légal qui est fondé sur l’origine des biens puisqu’on vise les biens reçus des ascendants qui en modifie donc les règles de dévolution et qui constitue une nouvelle fois une hypothèse de succession anomale fondée sur l’origine du bien qui déroge au principe d’unité de la succession et qui sera elle aussi développée à la partie concernant les successions anomales.

b. Les ascendants ordinaires et les collatéraux ordinaires

Dans les 2 cas, le conjoint a vocation à recueillir la totalité de la succession mais ces 2 catégories de parents ne subissent pas tout à fait le même traitement au niveau de l’éviction.

S’agissant des ascendants ordinaires, ils sont bien au terme de l’article 757-2 évincés de la succession mais là aussi cette éviction est assortie d’un correctif dans la mesure où le législateur reconnaît aux ascendants ordinaires le bénéfice d’une créance d’aliment contre la succession du défunt. Cette créance alimentaire est prévue à l’article 758 du Code civil qui prévoit que lorsque le conjoint recueille la totalité ou les ¾ des biens, les ascendants du défunt autres que les père et mère qui sont dans le besoin bénéficient d’une créance d’aliment contre la succession du pré décédé.

  • Les conditions d’existence de la créance d’aliment : cette créance est due dès lors que le conjoint recueille soit la totalité des biens (= plus de père ni de mère) soit les ¾ de la succession (= hypothèse où le défunt laisse un ascendant privilégié père ou mère et des ascendants ordinaires dans l’autre branche). Dans ces 2 cas, les ascendants ordinaires n’ont aucune vocation successorale mais ils ont, en revanche, une créance d’aliment à faire valoir contre la succession. Cette créance alimentaire est exclusivement réservée aux ascendants ordinaires. Et compte tenu de sa nature alimentaire, elle est subordonnée à la condition que les ascendants ordinaires soient dans un état de besoin. Les ascendants privilégiés n’ont quant à eux aucune créance alimentaire contre la succession. Solution qui se justifie par le fait qu’ils ont, eux, des droits dans la succession et par le fait que l’obligation alimentaire qui pèse sur les enfants à l’égard de leur père et mère s’éteint au décès de leur débiteur. Une fois cette existence de la créance d’aliment au profit des ascendants ordinaires établie, elle est soumise à un régime juridique spécifique qui précise le délai dans lequel elle peut être exercée et les modalités de son exercice.

  • Régime juridique de cette créance alimentaire: s’agissant du délai d’exercice de la créance d’aliment, l’article 758 du Code civil prévoit que le délai est d’un an à partir du décès ou du moment à partir duquel les héritiers concernés ont cessé d’acquitter les prestations qu’ils fournissaient auparavant aux ascendants, délai qui se prolonge en cas d’indivision jusqu’à l’achèvement du partage. Concernant les modalités d’exercice de cette créance, c’est une créance contre la succession et non pas une créance contre le conjoint. C’est la succession qui est débitrice de la créance et cette créance sera acquittée sur l’actif net successoral. Par conséquent, si le passif absorbe l’actif les ascendants n’auront rien. Si le droit de créance peut effectivement s’exercer sur la succession, cette créance sera prélevée sur l’hérédité et supportée par tous les héritiers à proportion de leur part. Ce seront d’abord les héritiers universels ou à titre universel, les légataires quant à eux ne seront sollicités qu’en cas d’insuffisance et à proportion des droits qu’ils ont recueillis.

S’agissant des collatéraux ordinaires, dans leur cas ils ne se voient reconnaître aucun mécanisme correcteur et sont exclut de la succession.

B. Le droit d’habitation viager sur le logement

Lors du décès de l’un des conjoints, l’objectif 1er du législateur a été de permettre au survivant de maintenir ses conditions de vie antérieures. Cet objectif qui peut être réalisé lorsqu’il y a option de l’usufruit de la succession va aussi pouvoir être atteint grâce à la reconnaissance d’un droit viager d’habitation sur le logement. Ce droit viager figure à l’article 764 du Code civil qui prévoit que sauf volonté contraire du défunt, exprimée dans les conditions de l’article 971 du Code civil, le conjoint successible qui occupait effectivement à l’époque du décès à titre d’habitation principale un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, a sur ce logement jusqu’à son décès un droit d’habitation et un droit d’usage sur le mobilier compris dans la succession le garnissant.

La mise en œuvre de ce texte pose la question des conditions d’existence de ce droit et ses modalités d’exercice.

1. Les conditions de ce droit viager

Le droit d’habitation viager est conditionné en premier lieu par une occupation effective du logement à titre d’habitation principale et ne peut donc profiter qu’au conjoint successible qui occupait effectivement ce logement à la date du décès.

Ce droit viager ne peut être revendiqué que si le logement occupé était un bien qui appartenait aux 2 époux ou encore qui dépendait totalement de la succession. C’est-à-dire que le droit viager n’est envisageable que si le logement était assuré que par des droits en propriété qu’il s’agisse soit d’un bien commun aux 2 époux soit d’un bien indivis entre les 2 époux soit d’un bien propre ou personnel à l’un des 2 époux. Si les droits sont assurés par un bail, dans ce cas là, ce sont les dispositions spécifiques à la législation sur les baux qui s’appliquent c’est-à-dire soit la continuation du bail prévu au profit du conjoint en cas de décès de l’autre soit la mise en œuvre de son droit personnel sur le bail qui est reconnu aux 2 époux. Et le seul droit viager qui pourra être reconnu au conjoint survivant, c’est le droit d’usage sur le mobilier compris dans la succession et garnissant le logement (= article 765-2).

Dès lors que ces conditions sont remplies, le droit viager d’habitation a vocation à pouvoir être exercé encore faut-il qu’il puisse être effectivement invoqué car ce droit est soumis à un risque; ce n’est pas un droit d’ordre public et il peut avoir été écarté par la volonté contraire du défunt.

Par conséquent, il résulte clairement de ce texte que le défunt peut avoir expressément prévu de priver le conjoint survivant de ce droit viager.

Cette faculté qui est reconnue d’exclure le droit viager au profit du conjoint survivant est encadrée de façon stricte par le législateur car conformément au texte la privation du droit viager ne pourra résulter que d’un testament public, authentique. C’est une décision qui doit être mûrement réfléchie, éclairée, c’est ce qui explique ce formalisme.

Cette hypothèse qui consiste à priver le conjoint de son droit viager d’habitation ne sera envisageable qu’à la condition que le défunt soit titulaire de droits exclusifs sur le logement c’est-à-dire qu’il s’agisse d’un bien personnel ou d’un bien propre. On ne voit pas comment juridiquement le défunt pourrait priver le conjoint de ses droits personnels sur le bien (= bien commun ou indivis).

A supposer que toutes les conditions soient réunies pour priver le conjoint de son droit d’habitation viager, le Code civil prend soin de préciser que la privation du droit par le défunt est sans incidence sur les droits d’usufruit que le conjoint survivant retire en vertu de la loi ou d’une libéralité et qui continuent à obéir à leurs règles propres.

2. L’exercice du droit viager

C’est un droit facultatif pour le conjoint survivant qui, s’il veut en profiter, doit en faire la demande. Il dispose au terme de l’article 765-1 du Code civil d’un délai d’un an pour manifester sa volonté de bénéficier de ces droits d’habitation et d’usage. Ce délai d’un an correspond en faite à la période d’un an pendant laquelle le conjoint bénéficie d’un droit de jouissance gratuite sur le logement, droit qui sera précisé dans le développement relatif au droit du conjoint contre la succession.

Si le conjoint demande le bénéfice de ce droit, cela n’a rien à voir avec l’usufruit. Ce droit sera régi par les règles particulières qui régissent les droits d’habitation et d’usage qui figurent aux articles 627, 631, 634 et 635 du Code civil.

Le bénéficiaire de ce droit devra en jouir en bon père de famille, c’est lui qui devra effectuer les opérations d’entretien et régler les attributions à ce bien mais en revanche il ne pourra ni céder son droit ni louer le bien. Cette dernière règle qui interdit au conjoint de louer le bien objet du droit d’habitation viager comporte un tempérament dans la mesure où le législateur a pris en compte l’hypothèse où le logement ne serait plus adapté aux besoins du conjoint. Dans ce cas, il est prévu de pouvoir déroger à l’interdiction de louer le bien et effectivement le bien pourra être loué mais uniquement à un usage autre que commercial ou agricole afin de dégager les ressources nécessaires aux nouvelles conditions d’hébergement.

Cette dérogation est soumise à 2 conditions strictes :

  • le logement ne doit plus être adapté aux besoins du conjoint
  • les loyers doivent obligatoirement être affectés au financement de son relogement

Conclusion :

Ce droit n’est pas gratuit, la valeur de ce droit va s’imputer sur le montant de ses droits successoraux et posera donc le problème de la liquidation et de l’imputation de ce droit viager d’habitation.

Sous II. La liquidation des droits du conjoint survivant

Elle soulève des difficultés particulières liées à la nature différente des droits que le conjoint peut être amené à recueillir dans la succession. On a vu, en effet, que le conjoint pouvait recueillir soit des droits en pleine propriété soit des droits en usufruit dans le cadre de sa vocation successorale de droit commun mais aussi un droit viager d’habitation sur le logement qui n’est pas gratuit et s’impute sur le montant de ses droits successoraux. Se pose donc la question de la méthode de liquidation de ses droits selon qu’il s’agisse de droits en propriété ou de droit en usufruit et se pose aussi la question de l’interférence et de l’articulation à la fois de son droit viager d’habitation mais aussi l’interférence de libéralité dont a pu profiter le conjoint de la part du défunt. Le conjoint n’empile pas des droits, tout va s’imputer sur le montant des droits successoraux.

A. La liquidation des droits en propriété

Le conjoint recueille ce droit en propriété dans 2 cas :

  • en concours avec des ascendants privilégiés, des enfants pas issus des 2 époux ou des enfants issus des 2 époux
  • et qu’il décide d’opter pour des droits en pleine propriété.

Le conjoint recueille une quote part de droit, la liquidation des droits en propriété du conjoint est réglée par l’article 758-5 du Code civil : le calcul des droits en pleine propriété du conjoint prévu aux articles 757 et 757-1 sera opéré sur une masse faite sur tous les biens existant au décès de son époux auxquels seront réunis fictivement ceux dont il aurait disposé soit par acte entre vifs soit par acte testamentaire au profit de successible sans dispense de rapport. Le conjoint ne pourra exercer son droit que sur les biens dont le défunt n’aura disposé ni par acte entre vifs ni par acte testamentaire et sans préjudicier au droit de réserve et de retour.

Cela permet de constater que la liquidation des droits du conjoint en pleine propriété va se faire sur la base de la distinction entre la masse de calcul (= alinéa 1er) de ses droits sur laquelle vont être calculés ses droits théoriques et la masse d’exercice de ces droits (= alinéa 2) qui sera celle sur laquelle il pourra effectivement exercer ses droits.

Cette distinction permet grâce à la masse de calcul de donner une assiette relativement importante pour le calcul des droits théoriques. Et la masse d’exercice, elle montre la limite qui est donnée aux droits du conjoint à qui on ne veut pas permettre que ces droits en propriété puissent s’exercer à l’encontre des droits acquis c’est-à-dire des libéralités entre vifs ou testamentaire faite par le défunt ni à l’encontre des droits familiaux protégés par la réserve héréditaire et des droits de retour reconnus à certaines catégories d’héritiers.

Il va donc falloir distinguer quels sont les biens qui entrent dans la masse de calcul et ceux qui rentrent dans la masse d’exercice.

1. La détermination de la masse de calcul

D’après la lettre du texte la masse de calcul va se composer de 2 catégories de biens :

l biens existants au décès de l’époux

l auxquels on réuni fictivement ceux qu’il aurait disposés par acte entre vifs ou testamentaire au profit de successibles sans dispense de rapport

Concernant la première catégorie de biens (= biens existants au décès de l’époux), elle vise les biens présents dans le patrimoine du défunt à son décès dont seront exclus :

l les biens légués (= legs présumé non rapportable)

l les biens objet d’un droit de retour légal ou conventionnel

l les biens donnés à des non successibles

l les biens objet de donations non rapportables

Concernant des biens qui font l’objet d’une réunion fictive à la masse de calcul, seront réunis :

l les donations faites sans dispense de rapport

l les libéralités faites au conjoint (= article 758-6)

l les legs quand ils sont expressément soumis au rapportable

l les legs fait au conjoint

De cette masse de calcul, on déduira les dettes car les droits du conjoint ne s’exercent que sur l’actif net successoral.

Une fois la masse de calcul établie cela va permettre de calculer les droits théoriques du conjoint en retenant pour la valeur du bien, sa valeur au jour du partage. Le montant des droits théoriques du conjoint étant quantifié, il faut alors dans un deuxième temps établir la masse d’exercice de ces droits.

2. La détermination de la masse d’exercice

La masse d’exercice est différente de la masse de calcul pour éviter que les droits du conjoint ne puissent nuire aux droits acquis par des tiers. Ces droits ne pouvant s’exercer que sur des biens libres.

Concrètement la masse d’exercice au terme de l’article 750-5 va comprendre les biens existants, les libéralités faites au conjoint (= qui figurent à la fois dans la masse de calcul et d’exercice).

Sont, en revanche, exclus de la masse d’exercice, les biens qui constituent la réserve héréditaire parce que le principe même de la réserve, c’est que les biens doivent passer aux héritiers réservataires libres de toutes charges.

La deuxième catégorie de biens exclue de la masse d’exercice est toutes les libéralités rapportables qui sont aussi exclus étant précisé, ici, que lorsque l’on vise les libéralités rapportables, on retranchera uniquement la fraction de la libéralité rapportable qui s’impute sur le disponible et non sur la réserve car sinon mathématiquement on retrancherait 2 fois la réserve.

Les droits du conjoint en propriété ne pourront s’exercer que sur le disponible et donc uniquement s’il reste du disponible.

B. La liquidation des droits en usufruit

Au terme de l’article 757, le conjoint peut opter pour l’usufruit de la totalité des biens existants. Dans cette hypothèse, à l’inverse de ce qui est prévu pour la liquidation des droits en propriété, le texte ne fait aucune différence entre masse d’exercice et masse de calcul et ne procède à aucune exclusion qu’il s’agisse de la réserve, des libéralités ou des biens objet d’un droit de retour.

Ce défaut de précision du texte amène à s’interroger sur les droits du conjoint en présence des différents biens.

Différentes solutions sont admises :

  • s’agissant des biens donnés dans le cadre de libéralités : ces biens sont exclus de l’exercice de l’usufruit qui ne porte que sur les biens existants c’est-à-dire les biens que le défunt laisse à sa mort à l’exclusion des biens donnés même si ces biens doivent faire l’objet d’un rapport à la succession. L’usufruit ne porte que sur des biens libres et ne porte pas sur les biens donnés.
  • concernant la réserve : depuis la réforme de 2001, la loi ne vise la réserve héréditaire que pour l’exclure des droits en propriété. La Doctrine majoritaire admet donc en conséquence que l’usufruit peut s’exercer sur la réserve et que les héritiers ne bénéficient alors que d’une réserve en nue propriété.
  • concernant les biens légués : la Doctrine admet aussi que l’usufruit pourra s’exercer sur la fraction des legs rapportables imputables sur la réserve et non sur les autres legs.
  • concernant les biens objet d’un droit de retour : l’article 757 déterminant les droits du conjoint en présence de descendants, hypothèse où il peut être amené à recueillir des droits en usufruit, et dans ce cas là, il n’y a pas d’hypothèse de retour légal. Et la seule hypothèse envisageable concerne des droits de retour conventionnels et dans ce cas le conjoint ne pourra pas exercer ses droits en usufruit sur ces biens car les donations assorties d’un droit de retour conventionnel sont rétroactivement anéantis lorsque ce droit de retour est amené à jouer et les biens qui en sont l’objet sont donc exclus des biens existants.

Ces règles de liquidation (=A et B) sont des règles générales qui constituent le principe mais elles vont devoir se combiner avec l’hypothèse où le conjoint aurait bénéficié de libéralité de la part du défunt et avec l’hypothèse que ce conjoint aurait recueilli le droit viager d’habitation sur le logement.

C. Le cas particulier des libéralités faites au conjoint et de l’imputation du droit viager sur le logement

Indépendamment de ses droits successoraux légaux en usufruit ou en propriété, le conjoint peut avoir reçu des libéralités du défunt, ce qui posera le problème de la combinaison des droits tirés de sa qualité d’héritier légal et de sa qualité de gratifié. D’autre part, la reconnaissance au profit du conjoint d’un droit viager sur le logement posera elle aussi un problème de combinaison et plus précisément d’imputation sur ses droits légaux.

1. Les libéralités faites au conjoint

Lorsque le conjoint a reçu des libéralités : est-ce que ces libéralité se cumulent avec ses droits légaux (= ab intestat) ou non? La solution qui est retenue, aujourd’hui, exclut le cumul et prévoit au contraire de combiner ces libéralités avec ses droits successoraux en retenant le principe de leur imputation sur le montant de ses droits. Dès lors que le défunt a fait des libéralités à son conjoint, ces libéralités vont s’imputer sur ses droits successoraux. Ce principe d’imputation est expressément prévu à l’article 758-6 du Code civil qui déclare que les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s’imputent sur les droits de celui-ci dans la succession.

Par cette disposition, le législateur n’a donc pas voulu ajouter des droits légaux aux libéralités mais uniquement attribuer un droit successoral en quelque sorte minimal au conjoint survivant pour le cas où l’époux pré décédé n’aurait pas pensé à prendre de son vivant des dispositions en sa faveur.

L’article 758-6 prévoit que lorsque les libéralités reçues sont inférieures aux droits définis aux articles 757 et 757-1, le conjoint peut en réclamer le complément sans jamais néanmoins recevoir une portion de biens supérieure à la quotité définie par l’article 1094-1. Ce dernier texte vise la quotité disponible spéciale entre époux qui est un peu plus large que la quotité disponible ordinaire.

Ce texte signifie de manière symétrique que si les droits excèdent la quotité disponible spéciale, ils seront réduits.

2. L’imputation du droit viager sur le logement

Au terme de l’article 765 du Code civil, les droits d’habitation et d’usage viager s’imputent sur la valeur des droits successoraux recueillie par le conjoint. Dans ce cas, si la valeur de ces droits est inférieure à ses droits successoraux, le conjoint pourra prendre le complément sur les biens existants.

En revanche, si la valeur des droits d’habitation et d’usage est supérieure à celle de ses droits successoraux, le conjoint n’est pas tenu de récompenser la succession en raison de l’excédant.

C’est une règle protectrice qui aura un intérêt certain lorsque les droits successoraux du conjoint survivant seront faibles en raison des libéralités faites par le défunt.

II – Les droits du conjoint contre la succession

Le conjoint survivant se voit reconnaître 2 types de droits contre la succession :

l un droit annuel de jouissance sur le logement (= article 763 du Code civil)

l un droit à pension (= article 767 du Code civil)

A. Le droit temporaire de jouissance gratuite

Ce droit est inscrit à l’article 763 qui prévoit que si à l’époque du décès le conjoint successible occupe effectivement à titre d’habitation principale un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, il a de plein droit pendant une année, un droit de jouissance gratuite de ce logement ainsi que du mobilier compris dans la succession qui le garnit.

Si son habitation était assurée au moyen d’un bail à loyer ou d’un logement appartenant pour partie indivise au défunt et à des tiers, ces loyers ou l’indemnité d’occupation lui en sont remboursés par la succession pendant l’année au fur et à mesure de leur acquittement. Les droits prévus au présent article sont réputés effet direct du mariage et non des droits successoraux.

Le premier constat du texte : il s’agit bien de droit contre la succession et non pas de droit dans la succession. Ces droits n’étant pas qualifiés de droits successoraux, il s’agit donc d’un droit matrimonial et non pas successoral. C’est un droit de créance contre la succession qui constituera donc une charge à inscrire au passif de la succession.

1. Les conditions d’attribution du droit de jouissance

Ce droit de jouissance est attribué au conjoint successible par définition i.e. au conjoint non divorcé. Par conséquent, ce conjoint peut en bénéficier même s’il y a séparation de fait, instance de divorce ou séparation de corps dès lors que les autres conditions sont réunies, étant rappelé que l’attribution de ce droit de jouissance est subordonné à une condition d’habitation effective du logement à titre d’habitation principale.

Donc peu importe que ce logement soit le domicile commun des époux, peu importe que le logement appartienne aux 2 époux ou dépende totalement de la succession et peu importe qu’il soit loué.

En définitive, peu importe aussi de la nature des droits par lequel le logement est assuré qu’il s’agisse d’un logement détenu en propriété ou d’un logement occupé au titre d’un bail.

2. Les effets du droit de jouissance gratuite

Ce droit de jouissance porte à la fois sur le logement mais aussi sur le mobilier compris dans la succession et qui le garnit.

Ce droit de jouissance est un droit d’ordre public. Par conséquent l’époux ne peut pas en être privé ni directement ni indirectement. Le conjoint ne pourrait pas avoir décidé de l’en priver par testament. Par ailleurs, le conjoint ne peut pas renoncer à ce droit par avance.

Concrètement ce droit temporaire sera opposable au légataire qui verra ses droits suspendus sur le logement objet du legs pendant l’année d’exercice de ce droit.

C’est un droit de jouissance gratuite et le fait qu’il s’agisse d’un droit de jouissance gratuite, cela va emporter les conséquences suivantes :

  • si le logement dépendait totalement de la succession parce qu’il s’agissait d’un bien propre personnel à l’époux pré décédé, l’occupation est gratuite et le conjoint survivant ne doit aucune indemnité d’occupation. Idem si le logement appartenait aux 2 époux.
  • si le logement est loué, le conjoint doit payer les loyers mais lui sont remboursés au fur et à mesure qu’ils sont acquittés.
  • si le logement était indivis entre le défunt et des tiers, le survivant peut rester dans le logement et l’indemnité d’occupation qui est due au tiers sera réglée par la succession.

Ce droit est un droit temporaire et sa durée est d’un an à compter de l’ouverture de la succession c’est-à-dire du décès.

Il s’agit d’un droit de jouissance mais ce n’est pas un usufruit. Et par conséquent, le conjoint doit occuper lui-même le logement, il ne pourrait pas le louer.

B. Le droit à pension contre la succession

Le bénéfice du droit à pension est prévu à l’article 767 du Code civil qui déclare que la succession de l’époux pré décédé doit une pension au conjoint survivant qui est dans le besoin.

1. Les conditions du droit à pension

Il y a 2 conditions :

l être conjoint successible

l le conjoint doit être dans un état de besoin. État qui sera apprécié au jour du décès et en fonction des ressources au jour de la succession.

S’agissant d’une créance contre la succession, les héritiers ne seront pas tenus sur leurs biens personnels. Ce droit à pension, c’est aussi une charge de la succession qui apparaîtra au passif successoral.

Ce droit à pension pour son exercice est subordonné à une condition de délai. Ce délai est d’un an à partir du décès ou du moment où les héritiers cessent d’acquitter les prestations qu’ils fournissaient auparavant au conjoint.

En cas d’indivision successorale, le délai sera prolongé jusqu’au partage. La pension sera prélevée sur l’hérédité et supportée par tous les héritiers et en cas d’insuffisance, sur les légataires particuliers proportionnellement à leurs droits reçus sous réserve des legs préférentiels déclarés par le défunt.

Concernant le montant de la pension, elle est de nature alimentaire uniquement destinée à satisfaire les besoins du survivant et non pas à lui assurer une situation identique à celle que lui procurait les revenus du pré décédé.

Sous-chapitre 2 : Les successions particulières ou anomales

C’est lorsque qu’elles dérogent au principe de l’unité de la succession. Ce principe d’unité de la succession anciennement inscrit de manière expresse dans le code civil prévoyait que la dévolution des biens de la succession devait se faire sans considération de la nature ou de l’origine du bien.

Les successions anomales se distinguent des successions ordinaires car lorsqu’une succession anomale et une succession ordinaire sont recueillies par un même héritier, elles constituent 2 successions différentes qui offrent normalement une double option successorale à l’héritier.

L’étude des règles de dévolution des successions ordinaires nous a permis de constater que certains biens étaient soumis à des règles de dévolution particulière en raison de leur origine familiale.

Et à ces hypothèses de dévolution fondées sur l’origine du bien, on constatera que vont s’ajouter certaines hypothèses de dévolution particulière fondées sur la nature du bien.

Section 1 : La prise en compte de l’origine du bien

Elle se manifeste dans l’hypothèse des droits de retour légaux dont nous avons pu relever déjà 2 illustrations dans l’étude des droits du conjoint successible :

l droit de retour légal des père et mère sur les biens donnés au défunt

l droit de retour légal des frères et sœurs et de leurs descendants sur les biens que le défunt avait reçus de ses ascendants par succession ou donation

Et à ces 2 hypothèses va s’ajouter une troisième qui concerne le droit de retour légal dans la succession de l’adopté simple.

Sous-section 1 : Le droit de retour des père et mère

Ce droit de retour légal figure à l’article 738-2 du Code civil. Lorsque les père et mère ou l’un d’eux survive au défunt et que celui-ci n’a pas de postérité, ils peuvent dans tous les cas exercer un droit de retour à concurrence des quotes-part fixées au 1er alinéa de l’article 738 sur les biens que le défunt avait reçus d’eux par donation.

La valeur de la portion des biens soumis au droit de retour s’impute en priorité sur les droits successoraux des père et mère. Et lorsque le droit de retour ne peut s’exercer en nature, il s’applique en valeur dans la limite de l’actif successoral.

Le fondement de ce droit de retour reconnu aux parents du défunt est essentiellement destiné à compenser la suppression de la réserve des ascendants et l’absence de créances alimentaires de nature successorale celle-ci étant exclusivement réservée aux ascendants ordinaires.

Le droit de retour des père et mère soulève des questions.

I. Les conditions du droit de retour des parents du défunt

Ce droit de retour des parents distingue 2 sortes de conditions :

l relative aux personnes

l relative aux biens objet du droit de retour

A. Les conditions relatives aux personnes

Le droit de retour est réservé exclusivement aux père et mère du défunt et est donc exclu aux autres ascendants. S’agissant d’un droit de nature successoral, les parents ne peuvent en bénéficier qu’à la condition de remplir les qualités requises pour pouvoir succéder.

Ce droit de retour ne joue au profit des parents du défunt qu’à la condition que celui-ci soit décédé sans postérité. Le défunt ne doit donc pas laisser de descendants.

S’il y a un conjoint survivant, une question se pose celle de savoir s’il y a un droit de retour? C’est une maladresse de rédaction et on admet que le droit de retour va jouer même en présence d’un conjoint survivant.

B. Conditions relatives aux biens

Ce droit de retour ne joue que pour les biens que le défunt avait reçus par donation à l’exclusion des biens recueillis par succession dans l’hypothèse où l’un des parents serait pré décédé.

II. L’exercice du droit de retour

A. Les conditions d’exercice du droit de retour

Pour que le droit de retour s’exerce, il ne faut pas que les parents renoncent à ce droit car c’est un droit facultatif. Il faut préciser que la renonciation éventuelle au droit de retour ne pourrait intervenir qu’après l’ouverture de la succession. Et donc qu’elle est impossible avant parce qu’elle tomberait sous le coup des pactes sur succession futures qui sont en principe interdites.

Ce droit de retour est un droit d’ordre public. On admet cela du fait même de la rédaction de l’article 738-2 qui prévoit que ce droit de retour peut s’exercer dans tous les cas. Par conséquent, le défunt ne pourrait pas décider de les priver de ce droit de retour notamment en prévoyant l’attribution de l’intégralité de ses biens à un tiers, voire en disposant des biens concernés de son vivant.

Le législateur ayant d’ailleurs expressément prévu qu’à défaut de pouvoir s’exercer en nature, le droit pourrait alors s’exercer en valeur. Cette règle ne signifie pas que les biens ne puissent pas être légués mais que s’ils ont été légués à un tiers le retour s’opérera en valeur.

On s’est demandé si les parents titulaires du droit de retour bénéficiaient de 2 options distinctes concernant d’une part le droit de retour légal et d’autre part leurs autres droits successoraux.

La question peut se poser légitimement. La réponse a été la suivante : partant du principe que le texte qui instaure ce droit de retour prévoit que la valeur des biens objet du droit de retour s’impute sur leurs droits successoraux, on en déduit que les parents ne disposent pas d’une option distincte pour le droit de retour et qu’il n’y aura donc pas 2 succession se réglant de manière autonome l’une de l’autre.

Cette caractéristique du droit de retour légal des parents explique que la Doctrine considère qu’il ne s’agit pas réellement d’un cas de succession anomale au sens classique car il n’y a pas de succession se réglant de façon indépendante l’une de l’autre.

B. Les modalités d’exercice du droit de retour

Dès lors que les conditions d’exercice du droit de retour sont réunies, il va s’exercer soit en valeur soit en nature.

Il s’exercera en nature, lorsque le bien donné aura été conservé dans le patrimoine du défunt jusqu’à son décès.

A l’inverse, ce droit de retour sera amené à s’exercer en valeur dans tous les cas où les biens donnés ne se retrouveraient pas en nature dans la succession soit qu’ils aient été aliénés, donnés ou légués. Cette réserve du droit de retour en valeur permet d’empêcher le défunt qui a été gratifié par ses parents de faire échec au droit de retour des ses parents.

Le problème particulier que soulève le droit de retour des père et mère concerne le montant de ce droit de retour. En effet, l’article 738-2 prévoit que les père et mère peuvent exercer leur droit de retour à concurrence des quotes-parts fixées par l’article 738 alinéa 1er (= la formulation a soulevé un problème d’interprétation).

Effectivement les quotes-parts prévues par ce texte sont de ¼ pour chacun des père et mère. La question est la suivante : faut-il comprendre que ce droit de retour porte sur le quart de la masse successorale ou faut-il au contraire comprendre que ¼ seulement des biens donnés fasse l’objet de ce droit de retour.

Les opinions doctrinales sont divergentes sur cette question :

l avis de Madame LEROYER (= avis qui va à l’encontre de la théorie retenue par les professionnels). Elle estime que le droit de retour des parents doit porter sur le quart de la masse successorale sur le quart de l’actif net successoral. Pour justifier son opinion, elle se fonde sur le fait que cette interprétation permet aux père et mère d’avoir plus de chances de conserver les biens qu’ils avaient donnés que s’il ne leur est reconnu qu’un droit de retour portant sur un quart de la valeur de biens donnés.

l dans l’opinion inverse soutenue par Madame LEVILAIN Notaire (= JCP 23 mars 2007 p.22), on met en avant 2 arguments du texte pour justifier la solution selon laquelle l’assiette du droit de retour est de ¼ sur la valeur des biens donnés :

tiré de la lettre de l’article 738-2 : vise la portion de la valeur des biens donnés par les parents.

tiré du dernier alinéa 738-2 qui prévoit que ce droit de retour s’exécute dans la limite de l’actif net successoral précision qui selon Mme LEVILAIN serait inutile si on admettait que la valeur des biens objet du droit de retour porte sur le quart de la succession car dans ce cas mathématiquement comment la valeur des biens pourrait-elle excéder l’actif net successoral si elle était limitée à ce quart d’actif.

l d’autres auteurs sont nuancés.

Ce droit de retour légal des parents s’impute sur leurs droits successoraux mais ne s’ajoute pas.

Sus-section 2: Le droit de retour des collatéraux privilégiés

Les frères et sœurs du défunt (= qui sont évincés de la succession par le conjoint survivant) se voient reconnaître effectivement à titre de compensation un droit de retour légal inscrit à l’article 757-3 du Code civil : « Par dérogation à l’article 757-2, en cas de pré décès des père et mère, les biens que le défunt avait reçus de ses ascendants par succession ou donation et qui se retrouvent en nature dans la succession sont, en l’absence de descendants, dévolus pour moitié aux frères et sœurs du défunt ou à leurs descendants, eux-mêmes descendants du ou des parents pré décédés à l’origine de la transmission ».

Il s’agit d’un droit de retour qui est fondé sur l’origine des biens (= les biens que le défunt a reçu par donation ou par succession), ce qui explique qu’on le rattache à la catégorie des successions anomales.

I. Les conditions du droit de retour des collatéraux privilégiés

A. Les conditions relatives aux personnes

Pour que le droit de retour puisse s’exercer, il faut que les parents soient pré décédés et que le défunt ne laisse pas de descendants. Ce droit de retour est réservé aux frères et sœurs du défunt ou leurs descendants; eux-mêmes descendants du ou des parents pré décédés à l’origine de la transmission.

Cette précision du texte vise l’hypothèse des familles recomposées (= frères germains, consanguins et utérins).

Par conséquent, l’application de ce texte va conduire à :

  • s’il s’agit de frères et sœurs germains, le droit de retour s’exerce indifféremment sur les biens provenant à la fois des ascendants paternel et maternel car ils appartiennent aux 2 lignes.
  • s’il s’agit de frères et sœurs consanguins, le droit de retour s’exerce que sur les biens provenant des ascendants paternels.
  • s’il s’agit de frères et sœurs utérins, le droit de retour s’exerce que sur les biens provenant de la ligne maternelle.

B. Les conditions relatives aux biens

Le droit de retour va s’exercer sur les biens que le défunt a reçu de ses ascendants par donation ou succession (= bien reçu à titre gratuit).

Le terme d’ascendant a été substitué au terme « d’eux » qui visait uniquement les parents. Cette modification apportée en 2006 s’explique une fois de plus par le vieillissement de la population, la multiplication des libéralités faites aux petits enfants et s’explique aussi par l’instauration dans la loi de 2006 des donations transgénérationelles qui permettent effectivement de faire des donations en sautant une génération et ces nouvelles libéralités justifient donc l’instauration du droit de retour lorsque les biens proviennent des ascendants.

Ces biens doivent se retrouver en nature dans la succession du défunt. La conséquence de cette exigence est double : d’une part les biens ne doivent pas avoir été aliénés par le défunt et d’autre part ces biens ne doivent pas avoir été légués par le défunt. Ce n’est pas un droit d’ordre public. Il ne faut pas que ces biens aient été détruits.

Dans tout ces cas, l’exigence de la conservation des biens en nature exclut la subrogation qui permettrait au droit de retour de s’exercer sur le prix perçu ou sur les indemnités perçues. On ne retrouve pas la possibilité d’exercer le droit de retour en valeur.

Problème qui se posera de savoir ce qu’il advient des donations portant sur des sommes d’argent. L’argent c’est consomptibles d’où le problème.

Autre difficulté soulevée par le droit de retour des frères et sœurs, c’est dans l’hypothèse où ce droit de retour a vocation à s’exercer sur un bien qui constituait le logement des époux car on s’est demandé si dans une telle hypothèse le droit de retour était compatible avec le droit viager sur le logement reconnu au conjoint survivant par l’article 764 du Code civil.

Cette question a fait l’objet d’une réponse : aucune incompatibilité entre les 2 droits. La Garde des Sceaux a estimé que ce droit de retour ne faisait en aucun cas obstacle au droit viager d’habitation dès lors que le conjoint en remplissait les conditions pour pouvoir en bénéficier. Par conséquent, dans ce cas particulier les collatéraux privilégiés auront vocation à la moitié du logement en propriété mais ce droit ne pourra pas mettre en échec l’exercice du droit viager du conjoint survivant et concrètement les droits des collatéraux privilégiés seront suspendus jusqu’au décès du conjoint survivant.

II. L’exercice du droit de retour

Lorsque leur droit de retour peut s’exercer, les collatéraux privilégiés recueilleront la moitié des biens transmis au défunt par ses ascendants à condition de remplir les conditions requises pour succéder car il s’agit d’une vocation successorale.

Dans ce cas particulier, il y aura bien 2 dévolutions distinctes :

  • l’une portera sur la succession ordinaire du défunt (= biens autres que les biens de famille)
  • l’autre portant sur les biens de famille dévolus conformément à l’article 757-3.

Sous-section 3 : le droit de retour légal dans la famille de l’adopté imple

Il est inscrit à l’article 368-1 du Code civil figurant dans la partie du Code civil consacrée aux effets de l’Adoption Simple : « Dans la succession de l’adopté, à défaut de descendants et de conjoint survivant, les biens donnés par l’adoptant ou recueillis dans sa succession retournent à l’adoptant ou à ses descendants, s’ils existent encore en nature lors du décès de l’adopté, à charge de contribuer aux dettes et sous réserve des droits acquis par les tiers. Les biens que l’adopté avait reçus à titre gratuit de ses père et mère retournent pareillement à ces derniers ou à leurs descendants.

Le surplus des biens de l’adopté se divise par moitié entre la famille d’origine et la famille de l’adoptant ».

L’objet de cette règle inscrit à cet article, c’est de prévoir le retour des biens reçus à titre gratuit dans la famille de laquelle ils sont issus.

Le droit de retour particulier concernant la succession de l’adopté simple se justifie par ailleurs par l’existence de ce double lien de filiation dont bénéficie l’adopté simple.

I. Les conditions du droit de retour dans la famille de l’adopté simple

Ce droit de retour n’a vocation à jouer qu’en l’absence de descendants et de conjoint.

Ce droit de retour ne concerne que les biens reçus à titre gratuit (= le texte vise les biens reçus par succession ou les biens donnés).

Les biens objet du droit de retour doivent se retrouver en nature dans la succession pour qu’il puisse jouer. Cette exigence exclue là aussi l’hypothèse d’une subrogation lorsque les biens auraient été donnés, aliénés ou détruits.

Par ailleurs, cette exigence se justifie aussi par l’objectif premier de la succession anomale qui est de garantir la conservation des biens dans la famille.

II. Les effets du droit de retour

Le droit de retour présente un caractère successoral. Les bénéficiaires doivent remplir les conditions pour pouvoir être successibles (= pas être indigne …).

Il s’agit véritablement d’une succession particulière, anomale ce qui va entrainer les conséquences suivantes :

les bénéficiaires du droit de retour devront exercer une option spécifique pour accepter ou renoncer à cette succession particulière dans le cas du décès de l’adopté. Il y a 2 successions distinctes :

la succession ordinaire de l’adopté

la succession particulière fondée sur le droit de retour. Dans la mesure où il y a bien 2 succession distinctes, chacune de ces succession va être dévolue indépendamment l’une de l’autre et lorsqu’un héritier est appelé aux 2 Successions, il peut choisir d’accepter l’une et de refuser l’autre car il bénéficie de 2 options successorales indépendantes.

le bénéficiaire du droit de retour dès lors qu’il acceptera la succession particulière sera obligé aux dettes dans cette succession particulière à concurrence de la part qu’il reçoit.

ce droit de retour prévu à l’article 368-1 au profit des parents de l’adopté s’ajoute et se combine avec le droit de retour légal prévu au profit des père et mère par l’article 738-2. La combinaison de ces 2 droits de retour présentera un intérêt lorsque les biens ne se retrouvent pas en nature dans la succession de l’adopté car dans ce cas on pourra utiliser l’article 738-2 qui permet au droit de retour de s’exercer en valeur. Seulement l’avantage de l’article 368 c’est que c’est l’ensemble des biens donnés, il n’est pas question de quote part.

Ce droit de retour dans la famille de l’adopté simple correspond bien au critère de la succession anomale car les biens de la famille échappent à la succession de droit commun et aux règles de dévolution ordinaire pour être soumit à des règles de dévolution particulière qui garantissent la conservation des biens dans la famille.

Ce droit de retour légal offre une double option successorale, il y a à la fois la succession ordinaire et la succession particulière.

Ces caractéristiques le distingue donc des autres droits de retour, celui des père et mère de l’article 738-2 et celui des collatéraux privilégiés qui eux sont intégrés dans la catégorie des successions anomales mais ne répondent pas complètement à ces critères.

Pour le droit de retour des père et mère fondé sur l’article 738-2, nous avons vu que leurs droits s’imputaient sur leurs droits successoraux ordinaires sans faire l’objet d’une dévolution particulière ni d’une double option successorale et qu’il n’y avait pas de succession indépendante l’une de l’autre.

Concernant le droit de retour des collatéraux privilégiés, ce n’est pas non plus un droit de retour classique car seul la moitié des biens reçus des ascendants est l’objet du droit de retour, ce qui ne garantie pas la conservation des biens dans la famille. Et dès lors que ces droits ne portent que sur la moitié des biens de famille, il y aura naissance d’une indivision entre le conjoint survivant et les frères et sœurs du défunt qui là encore pourra se solder par une sortie des biens de la famille en cas de licitation des biens objet de l’indivision.

Section 2 : Les successions anomales fondées sur la nature du bien

Certains biens, compte tenu de leur nature particulière, sont soumis à des règles de dévolution spécifique. Les particularités de ces biens imposent en faite de pouvoir les transmettre à certaines catégories de personnes.

Cette catégorie de succession particulière fondée sur la nature des biens sera vue de façon brève à travers l’hypothèse des souvenirs de famille.

La qualification de souvenir de famille appliquée à un bien va lui donner un statut successoral particulier, statut successoral qui ne relève pas de règles légales mais de la jurisprudence. Donc, c’est une théorie prétorienne.

La mise en œuvre de ce statut particulier étant subordonnée à la qualification de souvenir de famille, il est nécessaire de préciser les critères qui permettront de retenir cette qualification de souvenir de famille.

Pour qu’un bien soit qualifié de souvenir de famille, il faut que ce bien ait une valeur morale au regard de l’histoire de la famille à laquelle il appartient.

Le critère retenu pour apprécier cette valeur morale résulte de l’existence d’un rapport direct entre ce bien et la famille. Critère qui ne doit pas être confondu avec le fait que ce bien soit détenu simplement depuis une très longue durée par une même famille.

Pour illustrer cette notion de rapport direct avec la famille, l’exemple le plus simple concerne le tableau de famille qui représente un membre de la famille. Dans ce cas, le rapport direct avec l’histoire familiale est évident. Autres exemples, les décorations attribuées à des membres de la famille ou encore les correspondances familiales.

L’enjeu est important car il va obéir à des règles de dévolution spécifique. En effet, dès lors qu’un bien sera qualifié de bien de famille, on considèrera que le défunt dont on règle la succession n’était en faite que le dépositaire de ce bien et que ce bien relève en faite d’une sorte de co propriété familiale.

Ceci explique qu’au décès du dépositaire du bien, à défaut d’accord familial, c’est le juge qui désignera le membre de la famille qui sera jugé le plus apte, le plus qualifié pour recevoir ce bien particulier mais là encore uniquement à titre de dépôt.

Autre exemple particuliers : toutes les œuvres de l’esprit (= propriété intellectuelle), tout le problème des concessions funéraires, des sépultures et des urnes.

Sous-chapitre 3 : Les successions dévolues à l’Etat

Les droits de l’État en matière successorale ont vocation à jouer pour une catégorie particulière de succession : les successions en déshérence qui ne doivent pas être confondu avec les successions vacantes qu’il peut être amené à administrer.

Les successions vacantes sont définies à l’article 809 du Code civil « La succession est vacante :

  • 1° Lorsqu’il ne se présente personne pour réclamer la succession et qu’il n’y a pas d’héritier connu ;
  • 2° Lorsque tous les héritiers connus ont renoncé à la succession ;
  • 3° Lorsque, après l’expiration d’un délai de six mois depuis l’ouverture de la succession, les héritiers connus n’ont pas opté, de manière tacite ou expresse ».

La déclaration de vacance d’une succession ne confère pas de droit à l’Etat mais elle va soumettre cette succession à la gestion de l’Etat dans le cadre de ce que l’on appelle la curatelle à la succession vacante. Ce n’est qu’à l’issu de cette curatelle qui n’aura qu’un temps que l’Etat pourra réclamer la succession sur le fondement de sa déshérence conformément à l’article 810-12 du Code civil.

S’agissant de la déshérence celle-ci est expressément prévue à l’article 539 du Code civil qui déclare que les biens des personnes qui décèdent sans héritiers ou dont les successions sont abandonnées appartiennent à l’Etat. Le fondement des droits de l’Etat sur ces successions ne correspond pas à la reconnaissance de la qualité d’héritier pour l’Etat. S’il a des droits sur cette S, ce n’est pas en qualité d’héritier mais en vertu de sa qualité d’Etat souverain et il recueille la succession au titre de cette souveraineté et non en qualité d’héritier.

Cette précision est importante car elle exclue la possibilité d’exhérédation de l’Etat (= ce qui veut dire priver de ses droits dans l’hérédité). La thèse fondant les droits de l’Etat sur sa souveraineté a été consacré par la Cour de Cassation dans une décision de 1965 qui a considéré que la clause d’un testament qui exhérédait qui que ce soit des ayants droit de sa succession était nul à l’égard de l’Etat (= l’Etat n’est pas un ayant droit).

Le régime des successions en déshérence est précisé aux articles 811 et suivants du Code civil qui précise d’une part dans quel cas la succession sera en déshérence et les formalités à accomplir par l’Etat pour appréhender la succession en déshérence.

La succession sera en déshérence :

  • soit lorsque la personne décède sans héritiers qu’il s’agisse d’héritiers légaux ou testamentaires
  • soit lorsqu’il y a une clause d’exhérédation générale de tout héritier sous réserve de la présence d’héritier réservataire (= que l’on ne peut pas exhéréder).
  • et dernière hypothèse, la succession sera en déshérence lorsqu’elle est abandonnée parce que tous les héritiers ont renoncé à la succession.

Lorsque la succession est en déshérence, elle revient à l’État qui doit alors remplir 2 formalités pour pouvoir appréhender cette succession :

  • d’une part, il devra se faire envoyer en possession au TGI du lieu d’ouverture de la succession
  • d’autre part, il devra faire établir un inventaire estimatif par les domaines pour le cas où la déshérence prendrait fin notamment grâce à la découverte ultérieure d’un testament

Dès lors qu’il aura été envoyé en possession, l’État pourra appréhender les biens de la succession qui relèveront de son domaine privé.

CHAPITRE 2 : La dévolution volontaire de la succession

L’article 721 du Code civil prévoit que la dévolution de la succession se fait selon la loi lorsque le défunt n’a pas disposé de ses biens par des libéralités. Il résulte de ce texte que la loi n’a pas le monopole pour désigner les bénéficiaires d’une S, son rôle est purement supplétif mais que la volonté individuelle a également un rôle, rôle qui est le corolaire direct du droit de propriété qui prit dans son caractère absolu commande que le propriétaire titulaire de l’abusus puisse disposer de ses biens comme il l’entend.

La volonté individuelle est donc un mode concurrent de la loi pour la dévolution des biens, volonté qui va se manifester à travers les libéralités. L’utilisation des libéralités va permettre la transmission du patrimoine et donc de la succession. Si la dévolution peut s’exercer par l’effet de la volonté individuelle grâce aux libéralités, cette volonté n’est néanmoins pas sans limite.

En effet, ce même article 721 après avoir posé le principe de dévolution par les libéralités en introduit immédiatement la limite en énonçant dans son dernier alinéa « elles (= les Successions) peuvent être dévolues par les libéralités du défunt mais dans la mesure compatible avec la réserve héréditaire ».

Section 1 : Les libéralités, instrument de dévolution volontaire des successions

Ces libéralité sont définit à l’article 893 du Code civil issu de la loi du 23 juin 2006 qui déclare que la libéralité est l’acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne. Il ne peut être fait de libéralité que par donation entre vifs ou par testament ».

Les libéralités, telles qu’elles sont définit par législateur, autorisent donc la personne de disposer de ses biens et de ses droits à titre gratuit de son vivant grâce aux donations entre vifs ou à cause de mort grâce au testament.

L’intérêt des libéralités est à la fois de favoriser et d’optimiser l’anticipation successorale, l’idée étant que le droit des successions doit faciliter la transmission du patrimoine par le propriétaire des biens et des droits lui-même.

Cette liberté de plus en plus grande laissée au propriétaire procède d’un renforcement de la théorie du droit de propriété comme fondement du droit de succession et de la transmission. Mais, cette liberté de plus en plus grande va révéler aussi un recul certain de l’ordre public successoral et une remise en cause des solidarités familiales.

Les libéralités telle qu’elles sont définit à l’article 893 peuvent être distinguées selon le critère classique c’est-à-dire selon qu’elles produisent leurs effets du vivant de leur auteur, c’est l’hypothèse des libéralités entre vifs ou selon qu’elles produisent leurs effets au décès de leur auteur, c’est l’hypothèse des libéralités à cause de mort.

Toutefois, compte tenu de l’évolution récente de la législation et de la multiplication des contrats successoraux, un autre critère de distinction peut être utilisé critère qui va consister à opposer les hypothèses de dévolution par volonté unilatérale aux hypothèses de dévolution par contrat.

I. La dévolution par acte unilatéral

La dévolution du patrimoine sur le fondement d’un acte unilatéral de volonté correspond à l’hypothèse du testament. Le testament est définit par l’article 895 comme étant l’acte par lequel le testateur dispose pour le temps où il n’existera plus de tout ou partie de ses biens ou de ses droits et qu’il peut révoquer.

Le testament est acte solennel et révocable par lequel une personne exprime ses dernières volontés non seulement quant à la dévolution de ses biens par des legs mais le testament peut aussi contenir d’autres vœux de la part du testateur tel que par exemple la désignation d’un exécuteur testamentaire voire la reconnaissance d’un enfant dans un testament authentique.

Si l’on se place d’un point de vue patrimonial, le legs est le vecteur privilégié de la dévolution successorale. Ce legs sera dit universel lorsqu’il porte sur l’universalité des biens légués par le testateur. Ce legs sera dit à titre universel quand il portera sur une quote-part de ces biens. Ce legs sera dit particulier ou à titre particulier lorsqu’il aura pour objet un ou plusieurs biens déterminés. On ne va pas, ici, développer la question du testament (= authentique, holographe, international …).

L’acte juridique unilatéral n’est pas le seul instrument de transmission volontaire. Celle-ci peut également s’opérer par contrat.

II. La dévolution par contrat

Cette dévolution contractuelle peut avoir lieu soit entre vifs soit à cause de mort.

A. La dévolution contractuelle entre vifs

L’instrument privilégié de la dévolution contractuelle entre vifs, c’est la donation. La donation étant un contrat par lequel le donateur se dépouille actuellement, irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l’accepte (= article 894 du Code civil).

Lorsque cette donation est consentit à un héritier, elle sera qualifiée de donation en avancement de part successorale si elle respecte l’égalité du partage entre les héritiers. Cette donation sera donc rapportable au jour du règlement de la succession.

Lorsque la donation est faite à un tiers ou à un héritier et qu’elle est destinée à l’avantager, elle sera qualifiée de donation hors part successorale ou de donation préciputaire.

B. Le dévolution contractuelle à cause de mort

La dévolution contractuelle à cause de mort va avoir pour support les contrats successoraux que l’on qualifie aussi de pactes sur succession futures.

En principe, les pactes sur succession futures sont prohibés et il n’est donc théoriquement pas possible d’organiser la transmission de sa succession au moyen d’un contrat conclu entre le défunt et l’un des ses héritiers présomptifs ou conventionnellement choisi (= article 1130 alinéa 2 du Code civil + texte remanié en 2006 : cette prohibition est aussi précisé à l’article 722 du Code civil).

S’agissant de l’article 1130 alinéa 2 : « on ne peut pas renoncer à une succession non encore ouverte ni faire aucune stipulation sur une pareille succession même avec le consentement de celui de la succession duquel il s’agit. On ne peut le faire que dans les conditions prévues par la loi ». On voit clairement apparaître que la prohibition du pacte sur les successions futures est bien le principe et que la conclusion de tels pactes relève de l’exception.

Cette analyse est confirmée par l’article 722 du Code civil qui prévoit lui que les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur tout ou partie d’une succession non encore ouverte ou d’un bien en dépendant ne produisent d’effet que dans les cas où elles sont autorisées par la loi.

Pourquoi est ce que l’on prohibe ces pactes sur succession futures? Cette prohibition de principe des pactes sur succession futures se justifiait traditionnellement par le fait que ce genre de pacte par définition fait sur des successions non encore ouvertes pouvait susciter le désir de mort des contractants.

Autre raison de la prohibition, procédait elle de la prise en compte du risque de marchandage suspect autours de la succession. Mais, la raison essentielle de la prohibition de ces pactes réside dans le fait que ce pacte aliène en partie la liberté testamentaire du défunt.

Malgré cette prohibition de principe, il existe des pactes sur succession futures autorisés mais uniquement dans des hypothèses strictement encadrées par la loi et il est important de souligner qu’alors même que la loi de 2006 a réduit le champ de la prohibition, elle n’a pas remis en cause le principe de cette prohibition. Il va être important de savoir reconnaître un pacte sur succession futures donc il va falloir en préciser ses caractères.

1. Les caractères des pactes sur succession futures

Ils figurent à l’article 722 du Code civil car il résulte de ce texte que :

  • le pacte est en principe une convention
  • qu’il s’agit en second lieu d’une convention qui porte sur une succession non encore ouverte
  • et que ce pacte, c’est une convention qui confère des droits.

Donc 3 critères qu’il faut préciser.

L’article 722 utilise expressément le terme de « convention ». Malgré l’emploi de ce terme de convention, on admet que la prohibition a en faite pour objet un « pacte » c’est-à-dire une notion beaucoup plus large que celle de convention, une notion qui peut donc inclure tout acte juridique et notamment les actes juridiques unilatéraux tel que des actes de renonciation.

Le pacte doit porter sur une succession non encore ouverte. Pour que l’on puisse parler de pacte sur succession futures, l’acte doit obligatoirement concerner la succession d’une personne qui n’est pas encore décédée.

Ce pacte doit conférer des droits. Par cette expression, il faut comprendre que ce pacte doit entrainer une modification des règles de dévolution légale, modification qui peut avoir 2 objets différents :

  • cette modification peut soit emporter la modification des héritiers normalement bénéficiaires de la succession en instituant un héritier en particulier ou un tiers
  • cette modification peut porter aussi sur l’étendue des droits des héritiers c’est-à-dire en modifiant notamment la composition de leur lot.

2. Les pactes sur successions futures autorisés par la loi

Parmi les pactes sur succession futures autorisés, on va distinguer les contrats successoraux entre époux et les autres héritiers.

a. Les contrats successoraux entre époux

Ils peuvent viser soit à assurer la protection du conjoint survivant soit à assurer la protection du défunt.

Les pactes qui sont destinés à assurer la protection du conjoint survivant sont l’institution contractuelle et la clause commerciale.

S’agissant de l’institution contractuelle, c’est une libéralité par laquelle le disposant, l’instituant, confère au gratifié le droit de prendre dans sa succession ce que l’on appelle les biens à venir c’est-à-dire les biens que le donateur laissera à son décès. Ce terme d’institution contractuelle correspond en faite à ce que l’on appelle aujourd’hui les donations entre époux de biens à venir ou encore les donations au dernier vivant (= stipulées de façon réciproque dans ce cas). Cette institution contractuelle est irrévocable lorsqu’elle est consentit par contrat de mariage et librement révocable si conclu pendant le mariage (= article 1096 du Code civil).

S’agissant de la clause commerciale, c’est celle par laquelle les époux stipulent qu’à la dissolution du mariage par le décès de l’un d’eux, le survivant aura la faculté d’acquérir ou de se faire acquérir dans le partage certains biens personnels du pré décédé à charge d’en tenir compte à la succession. La clause commerciale qui est prévue dans le contrat de mariage permet ainsi au survivant des 2 époux de conserver le fonds de commerce ou alors un autre bien qu’il s’agisse d’une exploitation agricole ou d’une clientèle civile qu’ils exploitaient ensemble lorsqu’il vivait. La clause commerciale est prévue à l’article 1390 du Code civil. Et cette clause commerciale a vu son champs d’application élargit lors de la réforme du 23 juin 2006 puisqu’il est désormais prévu dans un nouvel alinéa rajouté au texte que cette clause peut autoriser le conjoint à se faire consentir par les héritiers un bail portant sur l’immeuble dans lequel l’entreprise attribuée ou acquise est exploitée.

On constate que le but poursuivit par ces 2 types de pactes sur succession futures, c’est la protection du conjoint survivant. Pourtant, il y a un cas où l’objet du pacte sera non pas d’assurer la protection du survivant mais de protéger le défunt lui-même. Cette hypothèse figure à l’article 301 du Code civil qui concerne la séparation de corps conventionnelle : « en cas de décès de l’un des époux séparés de corps, l’autre époux conserve les droits que la loi accorde au conjoint survivant. Lorsque la séparation de corps est prononcée par consentement mutuel, les époux peuvent inclure dans leur convention une renonciation aux droits successoraux qui leur sont conférés par les articles 756 à 757-3 et 764 à 766». Cette convention constitue bien un pacte sur succession futures car il y a renonciation aux droits successoraux du vivant des époux séparés de corps avant l’ouverture de la succession.

b. Les contrats successoraux entre les autres héritiers

Cette catégorie de pactes sur succession futures entre les autres héritiers a pour objectif la protection du gratifié ou des ses ayant cause. Entre dans cette catégorie, la Renonciation Anticipée à l’action en Réduction prévue à l’article 929 du Code civil. Ce texte permet ainsi à tout héritier réservataire alors même que la succession n’est pas encore ouverte de renoncer de façon anticipée à exercer une action en réduction (= c’est la RAR). Cette renonciation peut porter sur tout ou partie de la réduction, la réduction sanctionnant les atteintes à la réserve. Est visée une atteinte qui peut porter soit sur la totalité de la réserve soit sur une fraction de cette réserve. Le pacte qui comporte cette renonciation doit être obligatoirement réalisé au profit d’une personne déterminée avec le consentement du disposant (= le futur défunt). Le Code civil prévoyant qu’elle n’engage le renonçant que du jour où elle a été acceptée par celui dont il a vocation à hériter. Par ailleurs, cette renonciation doit obligatoirement être reçue par acte authentique c’est-à-dire devant notaire pour garantir la réalité du consentement de l’héritier renonçant.

Outre la Lettre Recommandé avec Accusé de Réception, on verra que l’on retrouvera aussi cette notion de pactes sur succession futures autorisée dans l’hypothèse des donations-partages transgénérationelles dans lesquelles l’héritier qui vient normalement en rang utile à une succession renoncera par avance à la part de réserve qu’il aurait pu recueillir pour en faire bénéficier un héritier de rang subséquent (= exemple : renonciation du fils au profit du petit-fils). Ce même mécanisme sera évoqué lors de l’étude des libéralités graduelles où le grevé sera réservataire et pourra accepter là encore que la charge de conserver et de transmettre le bien donné grève tout ou partie de sa réserve.

Section 2 : La limite au pouvoir de la volonté : la réserve héréditaire

C’est l’article 721 du Code civil qui prévoit que la dévolution des successions se fait par la loi lorsque le défunt n’a pas disposé de ses biens par des libéralités donc reconnaît certes le pouvoir de la volonté dans la dévolution des biens de la succession mais il a assorti immédiatement ce pouvoir d’une limite lorsqu’il déclare dans son alinéa 2 « elles peuvent être dévolues par les libéralités du défunt dans la mesure compatible avec la réserve héréditaire ».

Par conséquent, même si elle est capable de disposer à titre gratuit, une personne peut voire sa liberté de faire des donations ou des legs réduite en raison de la réserve dont bénéficient certains successibles. Les libéralités ne sont pas indépendantes des règles légales de dévolution, elles doivent se combiner avec la limite posée par la notion de réserve héréditaire. La liberté de faire des libéralités est encadrée et plafonnée dès lors que le disposant laisse à sa succession certains héritiers proches. La réserve héréditaire est une manifestation de l’ordre public successoral qui vise à protéger certaines catégories d’héritiers et les règles relatives à la réserve sont donc d’ordre public.

La réserve relève de manière directe du droit des libéralités dans la mesure où elle restreint le droit de gratifier mais c’est après l’ouverture de la succession qu’il faudra rechercher si la réserve a été entamée et s’il faut le cas échéant réduire les libéralités excédentaires.

Seule sera étudiée la question des héritiers réservataires, ici.

L’objet de la réserve étant de protéger certains héritiers en restreignant la faculté de disposer de ses biens à titre gratuit, la question qui se pose est celle de savoir quels sont ces héritiers protégés par la réserve?

L’étude des règles légales de la dévolution a permis de constater que ces règles donnaient une place privilégiée aux descendants et au conjoint successible. Et effectivement, cette place privilégiée qui leurs est donnée par les règles légales va se voire renforcée par le mécanisme de la réserve héréditaire, mécanisme spécifique des civilisations, des sociétés qui continuent à donner une place importante à la famille.

La protection issue de la réserve va garantir à ces catégories privilégiées d’héritiers la dévolution d’une part incompressible de la succession, cette part correspondant à la réserve et l’autre fraction des biens de la succession constituant quant à elle la quotité disponible qui sera seule laissée à la libre disposition du défunt.

La définition de la réserve figure à l’article 912 du Code civil qui prévoit que « la réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent.

La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités ».

Réserve + Quotité disponible = masse successorale

I. Les héritiers réservataires

La détermination des héritiers réservataires est étroitement conditionnée par les fondements de la réserve.

Historiquement, la réserve avait un double fondement :

  • d’une part, elle consacrait un devoir de famille et devait permettre de protéger la famille contre les libéralités excessives faites à des tiers
  • d’autre part, la réserve avait aussi pour objectif d’assurer l’égalité successorale dans la répartition des biens au sein même de la famille et protégeait ainsi les héritiers dit réservataires contre les libéralités qui auraient pu être consentit à l’un d’entre eux et qui aurait eu pour conséquence de l’avantager par rapport aux autres. En ce sens, la réserve était conçue alors comme un instrument égalitaire de répartition des biens.

La qualité de réservataire est donc étroitement liée à la notion de famille, ce qui explique que celle-ci a connu une évolution identique à celle de la notion de famille. On constate ainsi que compte tenu de l’évolution sociologique des familles, certains successibles ont perdu leur droit à la réserve (= les ascendants) alors que d’autres membres de la famille ont accédé à la qualité de réservataire et c’est l’hypothèse du conjoint.

Sont donc, aujourd’hui réservataires deux catégories d’héritiers : les descendants d’une part et le conjoint survivant en l’absence de descendants d’autre part.

Sont donc, désormais, exclu de cette catégorie les ascendants qui ont été privés de leur réserve héréditaire par la loi du 23 juin 2006. Cette exclusion s’explique par le rétrécissement, aujourd’hui, de la famille autours des descendants et du conjoint. Comme le relève M. SAUVAGE « la réserve se ressert autours du noyau familial, elle est accordée à ceux à qui le de cujus a donné la vie et à celui auprès duquel il a passé une partie de sa vie ».

A. Les descendants réservataires

La réserve des descendants est précisée par les articles 913 et 913-1 du Code civil : « Les libéralités, soit par actes entre vifs, soit par testament, ne pourront excéder la moitié des biens du disposant, s’il ne laisse à son décès qu’un enfant ; le tiers, s’il laisse deux enfants ; le quart, s’il en laisse trois ou un plus grand nombre.

L’enfant qui renonce à la succession n’est compris dans le nombre d’enfants laissés par le défunt que s’il est représenté ou s’il est tenu au rapport d’une libéralité en application des dispositions de l’article 845 » et « Sont compris dans l’article 913, sous le nom d’enfants, les descendants en quelque degré que ce soit, encore qu’ils ne doivent être comptés que pour l’enfant dont ils tiennent la place dans la succession du disposant ».

Ces 2 textes permettent de dégager la notion de descendants réservataires. Tous les descendants sont réservataires. Concrètement, tous les parents en ligne directe descendante sont réservataires quelque soit leur degré de parenté avec le défunt et la réserve profite donc aussi bien aux enfants, aux petits-enfants ou aux arrières-petits enfants. La seule condition concernant les descendants autres que les enfants (= c’est-à-dire au 1er degré) est qu’ils doivent être en rang utile à la succession au regard des règles de classement selon le degré de parenté puisque c’est toujours le plus proche en degré qui succède par préférence aux parents les plus éloignés.

Compte tenu du principe d’égalité des filiations, tous les descendants sont réservataires qu’ils soient issus de parents mariés ou non. Peu importe leur degré de parenté du moment qu’ils sont en rang utile.

Peu importe également qu’il s’agisse d’une filiation biologique ou adoptive. L’enfant adopté est réservataire à la fois dans la succession de ses père et mère biologiques et dans la succession de ses parents adoptifs qu’il s’agisse d’une AP ou d’une AS. La seule réserve à apporter ici, concerne le principe selon lequel on est réservataire quelque soit le degré de parenté en ligne descendante. En effet, dans le cas particulier de l’adopté simple, celui-ci n’est pas réservataire dans la succession des ascendants de l’adoptant y compris lorsque l’adopté simple vient par représentation de l’adoptant à la succession. Cette restriction s’explique par le fait que l’on a pas voulu imposer aux père et mère de l’adoptant un héritier qui disposerait d’une réserve dans leur succession et limiterait par conséquent leur liberté testamentaire.

Pour que le descendant soit réservataire, il doit accepter la succession pour que sa qualité de réservataire puisse jouer. Selon l’article 913 du Code civil, « l’enfant doit accepter la succession ». Donc l’héritier renonçant ne pourra pas réclamer sa réserve puisqu’il sera réputé avoir aucun droit dans la succession. Cette règle ne concerne que le renonçant lui-même. Mais, sa part de réserve sera prise en compte lorsqu’il sera représenté.

B. Le conjoint réservataire

Le conjoint survivant s’est vu reconnaître la qualité d’héritier réservataire lors de la réforme de 2001, cette qualité ne jouant que lorsque le défunt ne laisse pas de descendants. En terme simples, le conjoint survivant ne peut être réservataire que s’il n’y pas d’autres héritiers réservataires. Ce principe découle de l’article 914-1 relatif à la réserve du conjoint, texte qui prévoit que les libéralités par actes entre vifs ou par testament ne pourront excéder les ¾ des biens si à défaut de descendants le défunt laisse un conjoint survivant non divorcé. A la condition d’absence de descendants s’ajoute la condition que le conjoint soit non divorcé. Le fait qu’il soit séparé de corps ou de fait n’a aucune incidence sur la qualité de réservataire et idem si une procédure de divorce est engagée à ce moment.

La reconnaissance de qualité de réservataire à l’égard du conjoint survivant a suscité beaucoup de critiques. On a estimé que le maintien de cette qualité de réservataire pouvait conduire à multiplier les cas de divorce.

II. La détermination de la réserve

La présence d’héritiers réservataires ayant pour effet de limiter la liberté du défunt de disposer de ses biens par des libéralités pour la fraction des biens incompressibles qui doit être transmise aux réservataires, la question qui se pose est celle de savoir quelle est cette fraction de biens qui échappe à la liberté du défunt?

Le montant de la réserve n’est pas fixé de manière directe par les textes. En effet, les textes précisent l’assiette des libéralités qui pourront être consentit par le défunt librement en déterminant la quotité disponible et par conséquent le montant de la réserve va se déduire et va dépendre du montant de la quotité disponible.

Dans la mesure où il y a 2 catégories de réservataires différents, la question du montant de la réserve va être conditionnée par les bénéficiaires de cette réserve qui sont donc soit les descendants soit le conjoint étant rappelé qu’il ne peut y avoir qu’une catégorie de réservataires à la fois.

A. La réserve des descendants

Elle n’est pas uniforme. Pourquoi? Le montant de la réserve se calcule par rapport au montant de la quotité disponible et le montant de cette quotité disponible varie selon le destinataire des libéralités faites par le défunt et de façon plus précise selon que le destinataire des libéralités est le conjoint ou un tiers qu’il s’agisse d’un enfant ou d’un autre gratifié.

Lorsque la libéralité est faite à une personne autre que le conjoint, la quotité disponible sera la quotité disponible qualifiée d’ordinaire.

En revanche, lorsque la libéralité sera faite au conjoint, la quotité disponible sera différente et il s’agira de la quotité disponible spéciale entre époux dont on verra qu’elle est plus large que la quotité disponible ordinaire.

Dans l’hypothèse où il y aurait à la fois des libéralités en faveur du conjoint mais aussi à d’autres gratifiés, les 2 quotités disponibles étant en concours, il faudra alors les combiner.

1. La quotité disponible ordinaire en l’absence de libéralité faites au conjoint

Le montant de la quotité disponible ordinaire en présence de descendants est prévu à l’article 913 du Code civil et elle dépend du nombre d’enfant du défunt.

Cette quotité est de moitié lorsqu’il y a un enfant, elle est d’un 1/3 lorsqu’il y a 2 enfants et d’1/4 lorsqu’il y a 3 enfants ou plus.

Le montant de la quotité disponible ordinaire permet de déduire celui de la réserve qui sera donc respectivement de moitié lorsqu’il y a un enfant, de 2/3 lorsqu’il y a 2 enfants et de ¾ lorsqu’il y a 3 enfants ou plus.

Cette quotité disponible ordinaire et donc la réserve dépendant du nombre d’enfant, cette notion doit être précisée au regard de ce qui est prévu par l’article 913-1 du Code civil. Sont compris dans l’article 913-1 sous le nom « d’enfant », les descendants en quelque degré que ce soit encore qu’ils ne doivent être comptés que pour l’enfant dont ils tiennent la place dans la succession du défunt.

Cela (= enfant dont on teint la place) renvoi au cas particulier où effectivement des descendants autres que les enfants (= 1er degré) du défunt peuvent être appelés à la succession en lieu et place de leur auteur ce qui correspond aux hypothèses de l’enfant pré décédé, de l’enfant indigne et de l’enfant renonçant.

a. L’enfant pré décédé

Dans l’hypothèse du pré décès de l’enfant du défunt, dès lors que celui-ci avait des descendants, ces derniers seront appelés à la succession à sa place soit par représentation soit de leur propre chef.

Dans ce cas, conformément à la règle prévue par l’article 913-1, ils ne compteront que pour l’enfant dont ils tiennent la place. Concrètement, dans l’hypothèse de la représentation, si le défunt avait plusieurs enfants dont l’un est pré décédé en laissant lui-même des descendants peu importe le nombre de petits enfants, ils ne comptent que pour un enfant c’est-à-dire leur père ou leur mère pré décédé. De la même manière, lorsque les descendants autres que les enfants viennent à la succession de leur propre chef. C’est le cas lorsqu’il y a un enfant unique pré décédé, peu importe le nombre de petits enfants, ils compteront également pour un.

b. L’enfant renonçant

Dans le cas de l’enfant renonçant, la solution est prévue par l’article 913 alinéa 2 : le renonçant ne sera compris dans le nombre d’enfants laissés par le défunt que s’il est représenté ou s’il est tenu au rapport d’une libéralité.

c. L’enfant indigne

La solution antérieurement adoptée consistait à prendre en compte le nombre d’enfants au décès sans tenir compte de l’indignité. La jurisprudence décidant que l’indignité était sans incidence sur la réserve et on comptait l’indigne pour le calcul de la réserve.

Depuis la réforme de 2006, il y a un doute quant à la solution à retenir concernant l’indigne, doute provenant du fait qu’à l’inverse de ce qui est prévu expressément pour le renonçant le législateur n’a rien exprimé concernant l’indigne.

Néanmoins, compte tenu du fait que l’article 913-1 ne fait aucune réserve concernant la notion d’enfant dont le descendant tient la place, on peut envisager de maintenir la prise en compte de l’indigne pour le calcul de la réserve dès lors qu’il est représenté.

Concernant le nombre d’enfants permettant d’arrêter le montant de la réserve, ce calcul va dégager une réserve globale qui sera soit de moitié soit des 2/3 soit des ¾.

Cette réserve globale va ensuite se répartir entre les réservataires étant précisé que la part individuelle de chacun des successibles sera déterminée par l’application des règles de dévolution légales c’est-à-dire partage par souche dans les cas de représentation ou partage par tête.

Exemple : soit un défunt qui avait 2 enfants dont l’un est pré décédé en laissant lui-même 2 petits enfants. L’enfant survivant va recevoir la moitié de la réserve globale qui est de 2/3 (= donc 1/3) tandis que les 2 petits enfants se partageront l’autre 1/3 et recevront donc chacun 1/6e.

La quotité disponible ordinaire n’a vocation à jouer qu’en présence de libéralités faites à une personne autre que le conjoint.

En revanche, dès lors que le défunt aura consentit des libéralités à son conjoint, la quotité disponible sera différente et il faudra prendre en compte, dans ce cas là, la quotité disponible spéciale entre époux.

2. La quotité disponible spéciale entre époux (= hypothèse de libéralité faites au conjoint)

En instituant la quotité disponible spéciale entre époux, le législateur a voulu permettre aux époux d’avantager le survivant plus que toute autre personne. Cette quotité disponible spéciale est donc beaucoup plus large que la quotité disponible ordinaire, ce qui peut être très lourd de conséquences pour les descendants.

Cela explique que le législateur a pris soin d’assortir l’extension du disponible d’un certain nombre de mesures destinées à assurer la protection des descendants. Le but recherché est donc de permettre effectivement d’avantager le conjoint au delà de ce qui est permit pour les autres gratifiés mais sans pour autant léser les descendants.

a. Le contenu de la quotité disponible spéciale entre époux

C’est ce que prévoit l’article 1094-1 du Code civil : « pour le cas où l’époux laisserait des enfants ou descendants, issus ou non du mariage, il pourra disposer en faveur de l’autre époux, soit de la propriété de ce dont il pourrait disposer en faveur d’un étranger, soit d’un quart de ses biens en propriété et des trois autres quarts en usufruit, soit encore de la totalité de ses biens en usufruit seulement ». Le conjoint survivant peut donc au terme de cet article bénéficier soit du disponible ordinaire soit de tout l’usufruit soit du ¼ en propriété et du ¾ en usufruit.

L’existence de ces 3 QDS entre époux, lorsque le défunt laisse des enfants pose la question de l’option entre ces 3 quotités.

Deux hypothèses sont envisageables :

  • soit c’est le disposant lui-même qui aura opté : l’intérêt pour le disposant d’opter se présentera notamment en présence d’enfants issus d’un premier lit. Lorsque le disposant souhaitera laisser au conjoint des droits en usufruit et non pas des droits en propriété comme c’est normalement la règle dans un tel cas au regard des règles légales de dévolution. Dans un tel cas, les droits successoraux légaux du conjoint quand il y avait des enfants non communs étaient uniquement des droits en propriété à l’exclusion des droits en usufruit.
  • soit il aura laissé son conjoint choisir : à l’inverse le disposant peut déléguer à son conjoint la faculté de choisir entre les 3 quotités soit par une délégation expresse dans l’acte soit par une délégation tacite et cette liberté de choix permettra au survivant d’opter au mieux de ses intérêts en fonction des circonstances à l’époque du décès.

Cette QDS offre au conjoint survivant des droits extrêmement étendus dès lors qu’il n’opte pas pour la QDO. D’une part, le montant des droits résultant des 2 autres branches de l’option (= usufruit du tout ou ¼ en propriété et ¾ en usufruit) est invariable quelque soit le nombre d’enfants et d’autre part, les droits qui en résulte sont beaucoup plus importants quantitativement.

  • lorsque le conjoint optera pour la totalité en usufruit, la réserve des descendants ne sera plus que de la nue propriété de la succession donc des droits très étendus.
  • si le conjoint opte pour le ¼ en propriété et les ¾ en usufruit, la quotité va excéder du ¼ en nue propriété la quotité de l’usufruit.
  • en présence de plus de 3 enfants, le disponible entre époux va ajouter au disponible ordinaire qui n’est théoriquement que de ¼ et ¾ en usufruit.

b. Les mesures de protection en faveur des descendants

L’importance des conséquences de cette QDS explique que d’une part le législateur ait permit au conjoint de cantonner son émolument (= le montant de ses droits) et qu’il ait prévu d’autre part des mesures de protection en faveur des descendants. Le cantonnement de l’émolument du conjoint est en quelque sorte une mesure de protection indirecte qui sera laissée à l’initiative du conjoint. Les autres mesures de projection étant quant à elles laissées à l’initiative des descendants eux-mêmes.

— 1ère hypothèse : le cantonnement de l’émolument

La loi de 2006 prévoit à l’alinéa 2 de l’article 1094-1 que « sauf stipulation contraire du disposant, le conjoint peut cantonner son émolument sur une partie des biens dont il a été disposé en sa faveur. Ce cantonnement, cette limitation ne peut être considérée comme une libéralité faite aux autres successibles ». C’est-à-dire cette faculté de cantonnement qui consiste pour le conjoint à limiter ses droits permet au conjoint survivant d’augmenter les droits des enfants sur les biens du défunt et sans que cet accroissement des droits des enfants ait un coût pour eux car le texte précise que cette limitation ne peut pas s’analyser comme une libéralité.

— 2ème hypothèse : les mesures de protection à l’initiative des descendants

Le législateur a prévu diverses mesures pour protéger les intérêts de descendants lors de l’exécution des libéralités faites au conjoint.

Il y a des mesures concernant les libéralités faites en usufruit et des autres, des libéralités faites en propriété en présence d’enfant d’un premier lit :

  • concernant les libéralités en usufruit, si le défunt a gratifié son conjoint en usufruit, les descendants auront la faculté de demander la conversion de cet usufruit en rente viagère et d’autre part ils pourront demander l’établissement d’un inventaire des meubles et des immeubles ainsi que la mise en place de mesures conservatoires sur les sommes d’argent et les valeurs mobilières.
  • concernant les libéralités faites en propriété, l’article 1098 du Code civil accorde une protection particulière au profit des enfants qui ne sont pas issus des 2 époux en leur offrant la possibilité de demander la substitution à l’exécution de cette libéralité de l’abandon de l’usufruit de leur part de la succession qu’il aurait recueillit en l’absence de conjoint survivant. Cette faculté de substitution se justifie par le fait que face à des droits en propriété l’enfant qui n’est pas issu des 2 époux n’aura aucune vocation successorale dans la succession de son beau père ou de sa belle mère, il ne recueillera rien dans cette succession.

Les enfants du seul conjoint pré décédé peuvent ainsi préférer une exécution de la libéralité en usufruit plutôt qu’en propriété pour ne pas être privé définitivement d’une part de la succession de leur auteur.

— 3ème hypothèse : la combinaison des quotités

Face à ces 2 quotités disponibles ordinaire ou spéciale entre époux, le dernier problème qui peut se poser concerne l’hypothèse où il y aura à la fois eu des libéralités faites au conjoint mais aussi des libéralités faites à d’autres gratifiés que le conjoint : c’est le problème de la combinaison des quotités. Ce problème doit répondre à la question de savoir quelle quotité disponible est applicable lorsqu’il y a à la fois des libéralités faites au conjoint et à des tiers? Faut-il appliquer le disponible ordinaire ou spécial?

La réponse a été précisée par la jurisprudence dans un arrêt du 26 avril 1984 « DREUIL ».

La première règle applicable en cas de concurrence des 2 quotités disponibles est que l’on ne peut en aucun cas cumuler les 2 quotités. Elles ne s’additionnent pas ce qui signifie concrètement que l’ensemble des libéralités (= toutes confondues) qui auront été faites par le disposant à la fois à son conjoint et à des tiers ne peut pas dépasser la quotité la plus étendue. La quotité la plus étendue correspond au disponible ordinaire auquel va s’ajouter la partie du disponible spécial qui dépasse la QDO. Concrètement, le disponible spécial ajoute toujours au disponible ordinaire l’usufruit de la réserve.

En conclusion, le plafond qui ne devra jamais être dépassé, c’est la QDO majorée de l’usufruit de la réserve.

Deuxième règle, chaque personne gratifiée ne peut pas recevoir plus que ce que la loi ne lui permet de recevoir. Personne ne peut recevoir plus que ce qui était disponible pour lui et par conséquent chaque gratifié ne pourra pas recevoir plus que sa propre quotité disponible.

Troisième règle qui permet de combiner les quotités disponibles et faire la répartition entre les gratifiés, respecter un système d’imputation précis et un ordre d’imputation précis.

Concernant le système d’imputation, on distingue d’abord les libéralités faites au conjoint qui s’imputent de manière différentes selon qu’elles sont faites en usufruit ou en propriété.

Les libéralités faites en usufruit vont s’imputer en priorité sur l’usufruit de la réserve alors que celles qui sont faites en propriété vont s’imputer principalement sur le disponible ordinaire.

Pour ce qui est des libéralités faites au tiers, elles s’imputent toujours sur le disponible ordinaire et les libéralités qui sont faites aux tiers qui sont en même temps héritiers réservataires (= c’est-à-dire les enfants), elles s’imputeront en priorité sur la réserve lorsqu’elles sont faites en avancement de parts successorales. L’excédant de ces libéralité s’imputant alors sur le disponible alors que celles qui sont faites hors part successorale, elles s’imputeront uniquement sur le disponible.

Concernant, l’ordre d’imputation, il est définit à l’article 923 du Code civil qui prévoit que l’on impute en premier les donations par ordre d’ancienneté (= les plus anciennes imputées les premières) et on impute ensuite seulement les legs de manière concurrente.

B. La réserve du conjoint

Elle est déterminée à l’article 914-1 qui en pose le principe et le montant : « les libéralités par acte entre vifs ou par testament ne pourront excéder les ¾ des biens si à défaut de descendants le défunt laisse un conjoint non divorcé ». La quotité disponible étant du ¾, la réserve du conjoint est du ¼ et dans tous les cas quelque soit la qualité de la personne gratifiée par le défunt, ce qui simplifie le problème.

Conclusion :

Les règles de dévolution qu’elles soient légale ou volontaire ont permit de déterminer qui va recueillir la succession ainsi que l’étendue de la vocation successorale des personnes appelées à recueillir cette succession. Se pose alors dans un 2ème temps, la question de savoir selon quelles modalités ces droits vont-ils être transmis aux héritiers, comment va s’opérer la transmission de la succession ?

TITRE 2 : La transmission de la succession

Elle s’opère de plein droit au profit des héritiers mais elle n’est pas imposée aux successibles qui bénéficient d’une option successorale (= chapitre 1).

Toutefois, si l’acquisition des droits du défunt se fait immédiatement, l’exercice de ces droits peut dans certains cas nécessiter l’accomplissement de certaines formalités selon la qualité des successeurs selon qu’ils sont saisit ou non (= chapitre 2).

CHAPITRE 1 : L’option successorale

Les successibles désignés par les règles dévolution pour recevoir la succession ne sont pas obligés d’accepter cette succession. Ils ont le droit d’hériter mais ils ne sont pas obligés d’hériter.

La loi leur offre une option successorale inscrite à l’article 768 du Code civil qui prévoit que l’héritier a 3 choix ; accepter purement et simplement la succession ou y renoncer. Il peut également accepter la succession à concurrence de l’actif net lorsqu’il a une vocation universelle ou à titre universel. « Est nulle l’option conditionnelle ou à terme ».

Au terme de ce texte, l’héritier a donc le choix entre 3 parties qui relèvent du contenu de l’option successorale. Mais, l’option successorale en tant que telle est soumise à un régime général commun à toutes les branches de l’option. On envisagera donc successivement le régime de l’option successorale et les différents termes de l’option.

Section 1 : Le régime de l’option successorale

I. Les titulaires de l’option

L’exercice de l’option successorale par l’héritier peut être très lourd de conséquences pour ses créanciers personnels, l’héritier pouvant décider d’accepter ou non la succession.

C’est pourquoi, la question des titulaires de l’option doit être posée non seulement par rapport à ses titulaires naturels (= les héritiers) mais également par rapport aux créanciers personnels de l’héritier.

A. Les titulaires directs de l’option : les successibles

D’après l’article 768 du Code civil, c’est l’héritier qui est titulaire de l’option. L’utilisation de ce terme « d’héritier » désigne de manière générale tout successible quelque soit son titre. Cela peut donc être l’héritier légal mais aussi le légataire.

L’option exercée par l’héritier suppose sa capacité, ce qui pose le problème particulier des personnes protégées. Si l’héritier est une personne protégée, l’option et son exercice sont soumis aux règles qui le protègent. Et lorsqu’une personne est protégée, c’est son représentant légal qui peut être amené à exercer cette option.

2 cas à distinguer :

  • pour le mineur : l’exercice de l’option dépend du régime sous lequel il est placé. Dans le cadre de l’administration légale pure et simple, ce sont les 2 parents qui peuvent ensemble accepter purement et simplement la succession ou y renoncer. A défaut d’accord, des 2 parents ensemble c’est le juge des tutelles qui autorise l’option. En revanche, l’un ou l’autre des parents peut accepter seul la succession à concurrence de l’actif net. Dans l’administration légale sous contrôle judicaire, le parent autorisé à exercer l’autorité parentale seul est nécessairement autorisé par le juge pour l’acceptation pure et simple ou pour la renonciation alors qu’il peut accepter seul la succession à concurrence de l’actif net.
  • pour le majeur protégé : l’exercice de l’option va dépendre du régime de protection mis en place selon qu’il s’agit d’une tutelle, d’une curatelle ou d’une sauvegarde de justice.

o sous tutelle : les règles prévues pour le mineur sous tutelle sont applicables. Le tuteur pourra accepter seul la succession qu’à concurrence de l’actif net et la renonciation à la succession ne pourra être faite qu’avec l’autorisation du Conseil de Famille ou à défaut du juge. S’agissant de l’acceptation pure et simple, c’est le juge qui peut autoriser le tuteur à accepter purement et simplement la succession lorsque l’actif dépasse manifestement le passif (= c’est-à-dire aucun risque).

o sous curatelle : le majeur peut accepter seul la succession à concurrence de l’actif net et en revanche être autorisé pour accepter ou refuser purement et simplement la succession.

o sous sauvegarde de justice : le majeur exerce seul l’option car le majeur sous sauvegarde conserve sa capacité juridique.

B. L’exercice de l’option par les créanciers personnels de l’héritier

Le fait de renoncer à la succession ou de s’abstenir d’accepter peut entrainer des conséquences préjudiciables pour les créanciers de l’héritier. Cela explique la prise en compte du sort des créanciers de l’héritier par le législateur qui prévoit à l’article 779 du Code civil que les créanciers personnels de l’héritier qui s’abstient d’accepter ou qui renonce à la succession au préjudice de leurs droits peuvent être autorisés à accepter la succession du chef de leur débiteur en ses lieux et place. Le texte ajoute ensuite que l’acceptation a lieu qu’en faveur de ses créanciers et jusqu’à concurrence de leur créance, elle ne produit pas d’autres effets à l’égard de l’héritier.

Le texte vise donc 2 hypothèses permettant aux créanciers d’intervenir dans l’exercice de l’option :

  • l’héritier qui renonce à la succession : il est évident que la renonciation à une succession a pour conséquence un appauvrissement de l’héritier désigné par les règles de dévolution. La faculté qui est offerte aux créanciers d’agir en justice pour être autorisé à accepter la succession en lieu et place de leur débiteur est alors une application de l’action paulienne qui protège les créanciers d’une action frauduleuse de leur débiteur. Dans le cas de la renonciation à la succession, le préjudice des créanciers sera facilement caractérisé par l’insolvabilité avérée du successeur face à une succession solvable.
  • celui qui s’abstient à la succession : dans ce cas, la solution s’explique par le fait que les créanciers de l’héritier ne bénéficient pas de l’action interrogatoire et de la faculté qui leur est reconnu d’agir pour être autorisé à accepter la succession à la place de l’héritier leurs évite d’attendre l’expiration du délai de prescription de l’option qui est de 10 ans et qui est préjudiciable à leurs droits. Lorsque les créanciers décident d’agir, il résulte clairement de l’article 779 qu’il s’agit d’une action judicaire, que l’exercice de l’option ne sera pas de droit pour les créanciers et que seuls les créanciers personnels de l’héritier peuvent agir, ce qui exclu les créanciers du défunt. Lorsqu’elle aboutit, l’action a pour effet que l’acceptation ne vaut qu’à l’égard des créanciers qui ont exercés l’action et uniquement à concurrence de leurs créances. L’acceptation ne produira aucune autre conséquence à l’égard de l’héritier.

II. Les caractères de l’option

L’option successorale est à la fois un acte juridique unilatéral et un acte successoral.

Elle présente, par conséquent, un certain nombre de caractères liés à son caractère d’acte juridique volontaire et des caractères spécifiques liés à son caractère successoral.

A. L’option est un acte juridique volontaire

En tant qu’acte juridique volontaire, l’option doit être exempte de tout vice de consentement. L’article 777 prévoit ainsi que l’erreur, le dol et la violence sont des causes de nullité de l’option successorale. La sanction des vices de consentement se traduira par une action en nullité qui devra être exercée dans un délai de 5 ans à partir du jour où l’erreur ou le dol a été découvert ou du jour où la violence a cessé.

On s’est posé la question de savoir s’il pouvait y avoir d’autres causes et notamment au regard de la lésion. La lésion ne constitue pas une cause d’annulation de l’option successorale. Comme le souligne MALAURIE, la règle est qu’une renonciation ne peut pas être rescindée pour le motif que la succession est plus conséquente qu’elle n’apparaissait et à l’inverse une acceptation ne pourra pas être reconsidérée lorsque la découverte d’un passif inconnu la rend désavantageuse.

Néanmoins, le législateur a prévu en quelque sorte un pendant à la règle de la lésion lorsque sans remettre en cause l’option, il prévoit dans son article 786-1 que l’héritier acceptant pourra demander judiciairement à être déchargé de tout ou partie de son obligation à une dette successorale, qu’il avait des motifs légitimes d’ignorer au moment de son acceptation lorsque l’acquittement de cette dette aurait pour effet d’obérer gravement son patrimoine (= exemple : la découverte d’un cautionnement donné par le défunt et ignoré par les héritiers).

B. L’option est un acte successoral

1. L’option est soumise à la prohibition des pactes sur succession futures

En tant qu’acte successoral, l’option dont bénéficient les héritiers tombe sous le coup de la prohibition des pactes sur succession futures et ne peut en aucun cas être exercée avant l’ouverture de la succession.

Cette interdiction est expressément prévue dans l’article 770 du Code civil qui déclare que l’option ne peut pas être exercée avant l’ouverture de la succession même par contrat de mariage.

2. L’option doit être pure et simple

Elle doit être pure et simple donc elle ne doit en aucun cas être conditionnelle ou à terme. Ce principe est posé à l’article 768 alinéa 2 du Code civil et cela signifie que l’héritier ne pourrait pas prévoir par exemple que sa propre acceptation serait conditionnée par l’acceptation des autres co héritiers. Si tel était le cas, l’option serait nulle dans son ensemble.

3. L’option est libre

La liberté de l’option garantit à chaque héritier la faculté de choisir à sa convenance l’un des 3 termes de l’option proposée par la loi.

Néanmoins, si la liberté est le principe, ce principe va pouvoir être remis en cause au titre de la sanction du comportement du titulaire de l’option. Quel comportement va appeler ce type de sanction ? La liberté d’option va être remise en cause dans le cas particulier du recel successoral.

Cette notion est prévue à l’article 778 du Code civil qui envisage 2 cas de recel :

  • de biens et de droits
  • de personnes

« Sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier. Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part. L’héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession ».

Dans le cas de recel de biens ou de droits, il y a recel de biens ou de droits lorsque l’héritier se livre à des manœuvres pour avoir plus que ce qui lui reviendrait normalement dans la succession, il va ainsi dissimuler des biens par exemple pour rompre l’égalité du partage (= exemple : détourner des biens successoraux qui se trouvaient chez le défunt).

Dans le cas du recel d’héritier, ce type de recel peut survenir lorsque l’héritier dissimule l’existence d’un autre héritier (= exemple : détruire un testament).

La sanction du recel successoral va consister à priver l’héritier de sa liberté d’opter, sanction qui va revêtir un double aspect puisqu’il va d’une part être obligé d’accepter purement et simplement la succession avec toutes les conséquences que cela comporte au niveau de l’obligation au passif mais en plus, il va être privé de droit sur les biens recélés qui se partageront sans lui. Ainsi, dans le cas du recel de bien ou de droit, l’héritier est réputé accepter purement et simplement la succession, il perd ses droits sur les biens recélés. En revanche, il conserve ses droits sur les autres biens dont il peut être appelé à hériter.

Dans le cas du recel de personnes, il est réputé accepter purement et simplement la succession, il n’aura aucun droit sur la part recélée et il devra restituer les fruits et revenus perçus depuis l’ouverture de la succession.

4. L’option est indivisible

L’option porte nécessairement sur la totalité de la succession, on ne pourrait en aucun cas prévoir une option partielle limitée à certains biens de la succession. L’héritier qui accepte ou qui renonce le fait nécessairement pour le tout.

Le caractère indivisible de l’option ne remet pas en cause la faculté qui est reconnue à l’héritier qui bénéficie de plusieurs vocations successorales d’exercer des options distinctes pour chacune de ces vocations successorales. Dans ce cas, il n’y a pas remise en cause du principe d’indivisibilité de l’option mais exercice de droit distinct.

5. L’option est irrévocable

L’option doit être faite sans aucune réserve mais elle doit également être ferme et définitive sous peine de compromettre la sécurité du règlement successoral. On ne peut donc pas en principe revenir sur le choix qu’on aura fait lors de l’exercice de l’option. Ce principe d’irrévocabilité de l’option comporte certains tempéraments selon les termes de l’option initialement retenus.

Dans le cas de l’option qui aura été acceptée purement et simplement, l’option est vraiment irrévocable (= on ne peut plus renoncer).

En revanche, lorsque l’héritier a accepté à concurrence de l’actif net, on va lui permettre de revenir sur sa décision lui permettant d’accepter purement et simplement la succession mais en aucun cas, il ne pourra renoncer.

Lorsque l’héritier a renoncé et que dans l’intervalle personne d’autre n’a accepté la succession et que le délai pour opter n’est pas prescrit, dans ce cas uniquement, peut accepter purement et simplement.

6. L’option est transmissible

Lorsqu’un héritier décède après l’ouverture de la succession mais avant d’avoir pris parti, son droit d’option est transmit à ses héritiers (= article 775 alinéa 2 : chacun des héritiers exerce l’option séparément et chacun pour sa part).

7. L’option est rétroactive

Quelque soit l’option retenue, celle-ci a un effet rétroactif, solution inscrite à l’article 776 du Code civil. Et l’héritier est censé avoir pris parti au jour du décès.

Par conséquent, son acceptation pure et simple ou à concurrence de l’actif net consolide sa qualité de propriétaire acquise dès l’ouverture de la succession.

S’agissant de la renonciation, l’héritier renonçant est censé n’avoir jamais été héritier.

II. Le délai d’exercice de l’option

L’option conditionnant la transmission de la succession aux héritiers et par conséquent leurs droits sur cette S, il est essentiel de déterminer les conditions qui s’appliquent à l’exercice de cette option au regard du problème de délai.

L’héritier qui ne peut exercer son option qu’à compter de l’ouverture de la succession va bénéficier d’un délai de réflexion au terme duquel s’il n’a pas opté, il pourra être sommé de la faire dans le cadre d’une action interrogatoire.

Dès lors que la succession est ouverte, le code civil dans son article 771 alinéa 1er accorde à l’héritier un délai de 4 mois pendant lequel l’héritier ne peut pas être contraint d’opter. Ce délai de réflexion qui est accordé à l’héritier est destiné en faite à lui permettre de recueillir l’ensemble des éléments nécessaires pour prendre la décision compte tenu des conséquences de l’option qu’il va exercer et de son caractère en principe irrévocable.

A l’issu de ce délai de 4 mois, l’héritier qui n’a pas opté pourra être sommé de la faire dans le cadre d’une action interrogatoire dont le but est de pallier à l’inertie de l’héritier, inertie qui a pour effet de bloquer le règlement de la succession. Cette action interrogatoire (= article 771 alinéa 2) pourra être exercée soit par un créancier de la succession soit par un co héritier soit par un héritier subséquent ou encore par l’Etat. Concrètement, elle se traduira par une sommation qui sera adressée à l’héritier par acte extra judiciaire soit par exploit d’huissier soit même par LRAR.

A compter de cette sommation, l’héritier doit soit prendre partie soit solliciter un délai supplémentaire auprès du juge à condition de justifier de motifs sérieux et légitimes. Cette demande sera portée devant le Président du TGI qui statuera en référé. A l’expiration d’un délai de 2 mois à compter de la sommation ou du délai supplémentaire accordé par le juge, l’héritier sera réputé avoir accepté purement et simplement la succession.

Indépendamment de l’hypothèse où l’héritier peut être sommé d’opter dans le cadre de cette action interrogatoire, le législateur soucieux d’accélérer le règlement des successions a prévu que la faculté d’option se prescrit désormais à l’expiration d’un délai de 10 ans à compter de l’ouverture de la succession, prescription prévue à l’article 780 alinéa 1 du Code civil. Au terme de ce texte, si l’héritier n’a pas exercé son option dans ce délai de 10 ans, il est réputé renonçant sous réserve de dérogations tirées de circonstances particulières prévues aux alinéas 3 et 4 de ce texte.

Section 2 : Le contenu de l’option

L’option successorale comporte 3 branches distinctes :

  • l’acceptation pure et simple
  • l’acceptation à concurrence de l’actif net
  • la renonciation

En principe, l’héritier titulaire de l’option a le choix entre les 3 termes de l’option mais la lecture de l’article 768 du Code civil révèle qu’en fait le contenu de l’option varie selon qu’il s’agit de successeur universel ou particulier.

Bénéficie ainsi de l’option complète, toute personne appelée à recueillir la succession dès lors qu’il s’agit d’un successeur universel ou à titre universel qu’il soit héritier ou légataire. Cette solution découle de la lettre même du texte qui réserve l’une des branches de l’option successorale en l’occurrence l’acceptation à concurrence de l’actif net à une catégorie particulière d’héritier celui qui a une vocation universelle ou à titre universel.

Par conséquent, l’héritier qui n’a pas de vocation universelle ou à titre universel ne peut lui qu’accepter purement et simplement ou renoncer. Et n’ont pas de vocation universelle ou à titre universel, le légataire particulier ou le donataire à titre particulier qui ne peuvent donc quant à eux qu’accepter ou refuser la libéralité.

I. L’acceptation pure et simple

C’est la forme la plus fréquemment utilisée. Elle est en principe volontaire sous la seule réserve du cas de recel successoral (= auquel cas elle sera forcée).

A. Sa forme

D’après l’article 782 du Code civil, l’acceptation pure et simple peut être soit expresse soit tacite. Elle est expresse lorsque le successible prend le titre ou la qualité d’héritier acceptant dans un acte authentique ou sous seing privé. Concrètement, cela suppose donc une déclaration formelle de l’héritier.

A l’inverse, elle peut être tacite et il y aura acceptation tacite de la succession lorsque le successible fait un acte qui suppose nécessairement son intention d’accepter et qu’il n’aurait le droit de faire qu’en qualité d’héritier.

L’acceptation pouvant être tacite, le législateur s’est préoccupé de protéger les héritiers contre le risque d’être considérés comme acceptants au travers de certains actes urgents. La loi nouvelle a donc pris soin de préciser la liste des actes qui entrainent nécessairement acceptation pure et simple et définit à l’inverse, ceux qui n’entrainent pas acceptation tacite.

S’agissant des actes entrainant l’acceptation pure et simple, ils sont énumérés de façon limitative par l’article 783 du Code civil et il concerne la cession à titre gratuit ou onéreux à un héritier de tout ou partie de ses droits ou encore la renonciation faite par un héritier au profit d’un ou plusieurs de ses co héritiers de ses droits de cette renonciation gratuite ou à titre onéreux.

S’agissant des actes qui n’emportent pas l’acceptation tacite, au terme de l’article 784, les actes purement conservatoires ou de surveillance et les actes d’administration provisoire peuvent être accomplit par le successible sans emporter acceptation de la succession dès lors que ces actes ne sont pas accomplit en prenant la qualité ou le titre d’héritier.

Après avoir posé le principe selon lequel ces 2 catégories d’actes (= purement conservatoire ou de surveillance et les actes d’administration provisoire) n’entraine pas acceptation tacite, le texte prend soin de préciser ensuite la liste des actes qui seront réputés purement conservatoires et le texte prend soin de définir les actes qui sont réputés être des actes d’administration provisoire.

En dehors de ces actes, le texte précise que tout autre acte que requière l’intérêt de la succession et que l’héritier veut accomplir sans prendre la qualité de l’acceptant devra être autorisé par le juge.

B. Les effets de l’acceptation pure et simple

L’acceptation pure et simple entraine l’obligation au passif et la confusion des patrimoines du défunt et des successeurs.

1. L’obligation au passif

L’héritier qui accepte purement simplement la succession va devoir répondre indéfiniment des dettes et des charges qui dépendent de la succession.

S’agissant des dettes de la succession (= les dettes du défunt), par exception au principe selon lequel l’héritier va en répondre indéfiniment, l’article 785 alinéa 2 du Code civil prévoit que l’héritier pourra néanmoins demander à être déchargé d’une dette successorale, qu’il avait des motifs légitimes d’ignorer cette dette. Dès lorsque les conditions posées par l’article 785 alinéa 2 seront établies, le juge aura le pouvoir de modérer l’obligation indéfinie au passif successoral en déchargeant effectivement l’héritier de tout ou partie de la dette.

S’agissant des charges de la succession (= les dettes nées après la mort du défunt et qui en sont la conséquence directe), l’héritier acceptant est tenu de ces charges de la même manière que les dettes du défunt.

Cette obligation au passif de l’héritier acceptant va être étroitement conditionnée par le gage des créanciers.

2. Le gage des créanciers

Le 2ème effet de l’acceptation pure et simple, c’est celui de la confusion des patrimoines. Ce qui signifie que le gage des créanciers successoraux est étendu aux biens personnels de l’héritier acceptant. Les créanciers successoraux vont donc se trouver en concours avec les créanciers personnels de l’héritier acceptant, tel est le principe.

a. Le principe de la confusion des patrimoines

Il présente à la fois des intérêts mais aussi des inconvénients pour les créanciers de la succession.

L’avantage va résider dans le fait qu’en cas d’insolvabilité du défunt, ils pourront saisir le patrimoine de l’héritier.

A l’inverse, cette confusion peut leur être préjudiciable dans le cas de l’insolvabilité de l’héritier car ils seront alors en concours avec les créanciers personnels de l’héritier même sur les biens successoraux.

Pour éviter cet inconvénient, le législateur offre aux créanciers successoraux la possibilité de demander la séparation des patrimoines.

b. Le tempérament : la séparation des patrimoines

Ce principe va permettre au créancier d’être privilégié sur une masse particulière de biens. Ce privilège qui était jusqu’en 2006 réservé aux seuls créanciers successoraux a été bilatéralisé par la loi de 2006 et étendu aux créanciers personnels de l’héritier. Article 878 du Code civil : « Les créanciers du défunt et les légataires de sommes d’argent peuvent demander à être préférés sur l’actif successoral à tout créancier personnel de l’héritier. Réciproquement, les créanciers personnels de l’héritier peuvent demander à être préférés à tout créancier du défunt sur les biens de l’héritier non recueillis au titre de la succession. Le droit de préférence donne lieu au privilège sur les immeubles prévu au 6° de l’article 2374 et il est sujet à inscription conformément à l’article 2383».

Cette bilatéralisation a pour conséquence de faire de l’actif successoral le gage préférentiel des créanciers successoraux et du patrimoine personnel de l’héritier le gage prioritaire de ses créanciers personnels.

Ce privilège est donc soumit à certaines conditions procédurales précisées à l’article 879 « Ce droit peut s’exercer par tout acte par lequel un créancier manifeste au créancier concurrent son intention d’être préféré sur un bien déterminé ». Ce droit de préférence s’exerce par tout acte par lequel un créancier manifeste à un créancier concurrent son souhait d’être préféré sur un bien déterminé. Cette manifestation de volonté pourra se faire soit par LRAR soit par exploit d’huissier.

La demande de séparation des patrimoines est individuelle et elle doit donc être invoquée par chaque créancier à propos de chaque bien successoral.

Si la demande de séparation porte sur un meuble, elle doit être exercée dans les 2 ans à compter de l’ouverture de la succession (= article 881). Si la demande de séparation concerne un immeuble, une formalité supplémentaire est requise car le privilège de séparation des patrimoines devra être inscrit dans un délai de 4 mois à compter de l’ouverture de la succession (= article 2383 du Code civil). A défaut d’inscription de ce privilège, la demande peut être faite tant que les immeubles demeurent entre les mains de l’héritier. Mais dans ce cas, le privilège ne vaut que comme une simple hypothèque et ne prend donc rang qu’à sa date d’inscription alors que l’inscription dans les 4 mois produit un effet rétroactif (= à l’ouverture de la S).

Les créanciers privilégiés sur les biens successoraux disposent d’un droit de préférence sur les biens de la succession qui les autorise de se faire payer avant les créanciers personnels de l’héritier.

Inversement, les créanciers personnels de l’héritier disposent eux d’un droit de préférence sur les biens personnels de l’héritier qui les autorise de se faire payer avant les créanciers de la succession.

II. L’acceptation à concurrence de l’actif net

Elle est régit par les articles 787 et suivants et elle a pour objectif de dresser une sorte d’état des lieux financiers en cas de doute sur la solvabilité du patrimoine du défunt. Elle représente une solution intermédiaire entre l’acceptation pure et simple qui risquerait de ruiner les héritiers et la renonciation qui risquerait de ruiner les créanciers successoraux.

A. Les conditions de l’acceptation à concurrence de l’actif net

Elle va être soumise à 2 conditions :

· doit obligatoirement faire l’objet d’une déclaration formelle

· un inventaire doit être dressé

S’agissant de la déclaration, l’acceptation à concurrence de l’actif net ne peut pas être tacite. Elle doit obligatoirement faire l’objet d’une déclaration au greffe du TGI du lieu d’ouverture de la succession, déclaration qui sera publié au BODACC ainsi que dans un journal d’annonces légales diffusé dans le ressort du tribunal compétent. Concernant cette forme de publicité, elle a été vivement critiquée car on a estimé que cette publicité était problématique au droit au respect de la vie privé.

S’agissant de l’inventaire, il doit être destiné à faire connaître la consistance et l’estimation de l’actif et du passif. Cet inventaire peut être dressé soit par un commissaire priseur, soit par un huissier de justice ou soit par un notaire. Et doit être dressé dans un délai de 2 mois à compter de la déclaration d’acception sauf prorogation accordée par le juge.

La sanction de l’absence d’inventaire ou du dépôt tardif de cet inventaire au greffe du TGI est très lourde parce que dans ce cas l’héritier sera réputé avoir accepté purement et simplement la succession. Cet inventaire devra lui aussi être publié dans les mêmes conditions que la déclaration d’acceptation.

B. Les effets

Cette forme d’acceptation entraine 3 effets principaux :

  • la séparation des patrimoines du défunt et de l’héritier
  • une gestion encadrée de l’actif successoral
  • un règlement organisé du passif successoral

L’acceptation à concurrence de l’actif net par un des héritiers va entrainer la soumission de tous les autres héritiers à cette procédure (= article 792-2 du Code civil).

1. La séparation des patrimoines

Elle entraine la coexistence de 2 patrimoines distincts, ce qui va rejaillir sur le principe de l’obligation au passif de l’héritier mais cette coexistence de 2 patrimoines distincts pourra être tempérée par la faculté qui va être reconnu à l’héritier de demander à conserver un bien.

a. Séparation des patrimoines et l’obligation au passif

L’acceptation à concurrence de l’actif net limite l’obligation qui pèse sur l’héritier de régler le passif successoral. Car effectivement, celui-ci (= l’héritier) ne peut être poursuivit que sur les biens successoraux à l’exclusion de ses biens personnels compte tenu de la séparation des patrimoines. Seuls les actifs de la succession répondront du passif de la succession sans que le créancier successoral puisse poursuivre les biens personnels de l’héritier.

L’autre conséquence de la séparation des patrimoines, c’est que l’héritier conserve les droits qu’il pouvait avoir contre le défunt. L’héritier qui était créancier avant la mort du défunt le reste après sa mort.

b. Séparation des patrimoines et conservation d’un bien

L’une des innovations de la loi de 2006 a été d’introduire l’idée que l’assiette du gage des créanciers résultant de la séparation des patrimoines était une assiette une valeur et non pas en nature. Par conséquent, la loi reconnaît à l’héritier la faculté de demander la conservation d’un bien à charge d’en verser la valeur fixée dans l’inventaire.

La mise en œuvre de cette faculté de conservation d’un bien est soumise à une formalité de déclaration au greffe du TGI qui en assure la publication au BODACC.

2. La gestion de l’actif successoral

L’héritier demeure propriétaire des biens successoraux malgré la séparation des patrimoines. Il va donc gérer le patrimoine successoral en tant que propriétaire et il pourra à ce titre faire à la fois des actes de disposition et d’administration sur ces biens. L’héritier peut ainsi vendre les biens de la succession à charge d’en verser le prix d’aliénation.

Cette faculté de vendre de gré à gré des biens de la succession est une innovation de la loi de 2006car jusqu’à la loi de 2006 la seule possibilité de vente possible était la vente formalisée (= vente aux enchères sur autorisation du tribunal). La déclaration d’aliénation d’un bien de la succession est notifiée dans les mêmes conditions que la déclaration de conservation du bien (= greffe TGI + publication BODACC).

Compte tenu de cette particularité de verser le prix d’aliénation et non le prix fixé dans l’inventaire, on reconnaît au créancier le droit de contester la valeur d’aliénation et de démontrer que la valeur du bien est supérieure au prix qui a été perçu. Si c’est avéré l’héritier devra réintroduire dans la cagnotte la différence (= sur son patrimoine).

L’héritier doit rendre compte de sa gestion aux créanciers successoraux dans les conditions prévues dans l’article 800 du Code civil. Et dans le cadre de cette administration, l’héritier engage sa responsabilité et doit répondre des fautes graves qu’il pourrait commettre.

3. Le règlement du passif successoral

Au terme de l’article 796 du Code civil c’est l’héritier qui règle le passif de la succession. Il paye les créanciers inscrits selon le rang de la sûreté assortissant leur créance, les autres créanciers eux qui ont déclaré leur créance sont désintéressés dans l’ordre des déclarations.

Les legs et sommes d’argent sont délivrés après le paiement des créances. On constate qu’à compter de la publication de la déclaration d’acceptation à concurrence de l’actif net, les créanciers titulaires de créances non assorties de sûretés et qui doivent déclarer leurs créances disposent d’un délai de 15 mois pour faire la déclaration de leur créance. Cette obligation de déclarer ces créances ne concernent que les créances non assorties de sûreté réelle mais pratiquement ce sera aussi de l’intérêt des créanciers munis de sûretés de déclarer également leurs créances. Car s’ils ne sont pas totalement désintéressés par l’exécution de leur sûreté, ils deviennent chirographaires pour le surplus et ne pourront réclamer le paiement de cette fraction non réglée au titre de cette sûreté que s’ils ont satisfait à leur obligation de déclaration. Ce délai de 15 mois pour effectuer la déclaration ne fait pas obstacle au règlement des créances. Le texte de l’article 796 alinéa 3 prévoit bien que les créanciers sont désintéressés dans l’ordre des déclarations c’est-à-dire que le paiement sera le prix de la course. La sanction du délai de 15 mois est lourde car l’absence de déclaration entraine l’extinction de la créance.

III. La renonciation à la succession

La renonciation est un acte unilatéral par lequel l’héritier renonce à ses droits successoraux. Cette renonciation n’est pas fréquente (= environ 5% des S). Et les raisons qui peuvent pousser un héritier à renoncer sont généralement d’échapper à un passif qui apparaît d’embler excédentaire mais le but peut être autre, il peut être de favoriser certains co héritiers notamment depuis que le renonçant peut être représenté (= moyen de faire sauter une génération).

A. Les formes de la renonciation

Au terme de l’article 804 du Code civil, la renonciation à une succession ne se présume pas. La renonciation opérée par l’héritier doit être adressée ou déposée au tribunal dans le ressort duquel la succession s’est ouverte. Le texte pose donc clairement l’exigence d’une déclaration expresse, la renonciation ne peut en aucun cas être tacite à l’inverse de ce qui est admis pour l’acceptation pure et simple.

Cette renonciation va être enregistrée par le greffe du TGI du lieu d’ouverture de la succession qui va procéder à la renonciation de la succession dans un registre tenu à cet effet et en donner un récépissé au déclarant (= article 1339 du Code Procédure civile). Cette obligation de déclarer la renonciation ne concerne que l’héritier universel ou à titre universel qui sont seuls visés par le texte. Le légataire à titre particulier ne sera pas soumis à cette formalité pour renoncer.

Cette déclaration de renonciation est prescrite uniquement dans un souci d’opposabilité aux tiers et non de validité de la renonciation elle-même. Une renonciation qui ne sera pas déclarée au greffe sera valable mais pas opposable aux créanciers tant qu’elle n’aura pas été déclarée.

B. Les effets de la renonciation

1. S’agissant du renonçant lui-même

L’article 805 du Code civil prévoit que l’héritier qui renonce est censé n’avoir jamais été héritier. Cette renonciation a un effet général et l’héritier est privé de tout droits dans la succession et de toutes obligations. Mais, une réserve néanmoins, concernant le passif, l’article 806 du Code civil prévoit que le renonçant n’est pas tenu au paiement des dettes et des charges de la succession mais qu’il est toutefois tenu à proportion de ses moyens au paiement des frais funéraires de l’ascendant ou du descendant à la succession duquel il renonce.

S’agissant de actes que le renonçant peut avoir accomplis (= conservation, surveillance …) sur le fondement de l’article 784, ces actes restent valables et ils sont opposables aux tiers.

2. S’agissant des tiers

La renonciation ayant un caractère rétroactif, dans la mesure où l’héritier renonçant est censé n’avoir jamais été héritier sa part va revenir aux autres co héritiers sous réserve du cas où il serait représenté (= part reviendrait à ses représentant). La renonciation n’est pas irrévocable et le renonçant peut revenir sur sa décision mais à condition qu’aucun autre héritier n’ait entre temps accepté la succession et que la prescription de 10 ans ne soit pas acquise.

CHAPITRE 2 : L’appréhension de la succession

L’exercice de l’option successorale a pour effet de consolider la transmission de la succession aux héritiers acceptants. La transmission qui s’opère de plein droit consacre l’acquisition immédiate et de plein droit des droits du de cujus par les héritiers et les successeurs deviennent effectivement sans autres formalités et par le seul effet du décès du de cujus titulaires des droits qui leurs sont dévolus. Dès le décès, ils sont propriétaires des biens et aucune rupture ne se produit en raison du décès dans la titularité des droits. Cette immédiateté de la transmission des droits est le corolaire du principe de la continuation de la personne du défunt. Toutefois, la titularité des droits qui est immédiate doit être dissociée de la question de l’exercice de ces droits. Ce n’est pas parce que le successeur (= devient successeur lorsque l’on a accepté l’option) est devenu titulaire des droits qu’il a effectivement le pouvoir d’exercer les prérogatives attachées à ce droit. Le successeur a certes la propriété du patrimoine du défunt mais n’en a pas la possession. La mise en possession c’est-à-dire l’appréhension matérielle des biens héréditaires sans formalité ni contrôle préalable va dépendre d’une institution particulière celle de la saisine héréditaire. La saisine peut se définir comme l’aptitude reconnue à certains héritiers de se comporter de plano (= automatiquement) comme possesseur de l’hérédité sans qu’il soit nécessaire de procéder à une formalité préalable ni de vérifier la régularité de leur titre. Seuls les héritiers bénéficiant de la saisine pourront bénéficier de cette appréhension immédiate et automatique des biens de la succession et il va par conséquent falloir déterminer quels sont les successeurs saisis et les non saisis.

I. Les successeurs saisis

La saisine conférant la possession du patrimoine du défunt sans contrôle préalable, cela justifie le fait que cette saisine soit accordée aux héritiers dont il n’apparaît pas nécessaire de vérifier la régularité de leur titre successoral.

L’attribution de la saisine est donc fondée sur la vraisemblance du titre successoral à qui on peut accorder sans aucun risque le pouvoir d’appréhender matériellement la succession.

Elle va donc dépendre de la qualité des successeurs et va conduire à différencier les héritiers légaux (= ab intestat) et les héritiers testamentaires (= les létaires).

A. Les héritiers légaux

En principe, tous les héritiers légaux sont bénéficiaires de la saisine (= article 724 alinéa 1er: les héritiers désignés par la loi sont saisi de plein droit des biens, droits et actions du défunt).

Par conséquent, tous les héritiers légaux y compris le conjoint sont saisit de plein droit. Si tous les héritiers légaux sont saisit de plein droit encore faut il qu’ils soient en rang utile.

Concernant les héritiers subséquents ils ne bénéficient que d’une saisie virtuelle et ce n’est que si l’héritier en rang utile renonce que la saisine passe à eux.

B. Les héritiers testamentaires

Il faut distinguer entre les légataires héritiers et les légataires non héritiers.

1. Le légataire non héritier

L’article 724 prévoit que les légataires et donataires universels sont saisit dans les conditions prévues au titre II du présent livre. Font donc parti des successeurs saisit, le légataire universel mais en l’absence d’héritiers réservataires ainsi que cela résulte de l’article 1006 du Code civil qui attribue la saisine de plein droit au légataire universel dès lors qu’il n’est pas en présence d’héritier réservataire.

La saisine automatique du légataire universel dépend non seulement de la présence ou non de réservataire mais aussi de la forme du testament.

Si le légataire est institué par un testament authentique, la saisine est dotée d’une efficacité totale et donc aucunes formalités ne s’imposent au légataire pour exercer ses prérogatives et cette solution se justifie en raison de la régularité et de la sincérité de son titre attaché au caractère authentique du titre.

Cette solution découle à contrario de l’article 1008 du Code civil qui prévoit que dans le cas du testament mystique (= rédigé et mis dans une enveloppe cacheté déposé chez un notaire) ou holographe (= rédigé de la main du testateur daté et signé chez soi : reste un acte solennel), le légataire sera tenu de se soumettre à une formalité particulière l’envoie en possession qui sera demandé au Président du TGI qui vérifiera la validité du testament qu’il institue.

2. Le légataire héritier

Il est saisit de plein droit. Cette solution découle du caractère indivisible de la saisine attaché à sa qualité d’héritier. Quelque soit sa vocation universelle ou non ou de la présence ou non de réservataires.

Position assez discutée.

II. Les successeurs non saisis

C’est soit des légataires soit l’Etat.

Deux catégories de légataires :

  • les légataires universels lorsqu’ils sont en présence d’héritiers réservataires
  • les légataires à titre universel et à titre particulier qui doivent toujours demander la délivrance de leur legs c’est-à-dire la vérification de leur titre.

Cette demande de délivrance est faite aux successeurs saisit et peut être amiable ou judiciaire selon qu’il y a accord ou non.

L’effet de la délivrance, c’est de permettre aux légataires d’appréhender son legs matériellement. S’agissant des fruits, le légataire particulier n’a droit aux fruits qu’à compter de la délivrance alors que le légataire universel ou à titre universel a droit aux fruits à compter du décès.

Dans le cas particulier de l’Etat, il faut qu’il se fasse envoyer en possession dans les conditions prévues à l’article 1354 du Code de Procédure civile.

TITRE 3 : L’administration de la succession

L’administration de la succession recouvre l’ensemble des opérations qui jusqu’au jour du partage concourent à la remise définitive de leur du aux l’ayant droit.

Elle concerne donc la gestion de l’actif successoral jusqu’au partage et concerne concrètement l’hypothèse des successions qui sont dévolues à une pluralité d’héritiers.

Les héritiers qui sont devenus propriétaire de la succession par le seul effet du décès vont pouvoir décider soir de l’administrer eux-mêmes soit de confier l’administration de cette succession à un mandataire.

CHAPITRE 1 : L’administration par les héritiers

Lorsque la succession est dévolue à une pluralité d’héritiers, ces derniers sont en indivision sur l’ensemble de la succession.

Il y a en effet concours de plusieurs droits de même nature sur une même masse de biens sans qu’il y ait encore division matérielle (= des parts) sur les biens.

Cette masse successorale indivise va devoir être gérée jusqu’au partage qui permettra seul d’aboutir à l’attribution exclusive d’une part de l’indivision à chaque indivisaire.

I. L’indivision légale

Le régime a été réaménagé par loi du 23 juin 2006. Ce régime ayant pour objet de limiter les situations de blocage dans l’administration des successions.

Ce régime soulève 2 problèmes :

  • les pouvoirs des indivisaires
  • les droits et obligations des indivisaires

A. Les pouvoirs des indivisaires

Ils sont en principe conditionnés par la qualification de l’acte à accomplir mais ces pouvoirs vont pouvoir connaître des aménagements judiciaires pour pallier aux situations de crise.

1. Les pouvoirs des indivisaires en fonction de la qualification de l’acte

La loi de 2006est venu assouplir les règles de l’indivision en évitant le recours systématique à la règle de l’unanimité et en prévoyant que certains actes pourront désormais être accomplit à la majorité des 2/3 alors que jusqu’à présent la loi de 1976qui régissait l’indivision posait elle en principe la règle de l’unanimité, les actes relatifs à l’indivision ne pouvant donc être accomplit qu’avec le consentement de tous les co-indivisaires ce qui pouvait paralyser la gestion des biens indivis puisqu’il était impossible de prendre une décision lorsque l’accord de tous les indivisaires était requit.

Aujourd’hui, certains actes peuvent être accomplit par un co-indivisaire seul d’autres actes ne peuvent être accomplit qu’à la majorité des 2/3 et seuls les actes les plus graves restent soumis à la règle de l’unanimité.

a. Les actes accomplis par un indivisaire seul

Dans le système antérieur à 2006, il était déjà admis qu’un indivisaire puisse accomplir seul un acte conservatoire. La nouveauté apportée par la loi de 2006réside dans le fait qu’aujourd’hui le régime a été assouplit même pour ces actes conservatoires car la condition d’urgence posée par l’ancien texte a été supprimée.

Cette catégorie d’actes a été précisée par l’article 815-2 alinéa 1er « Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence ».

Constituent des actes conservatoires, selon l’opinion communément admise, tous les actes qui ont pour but d’éviter la perte matérielle d’une chose ou la disparition juridique d’un droit. Mais également, les actes accomplis sur un bien qui n’est pas immédiatement menacé de dépérissement dès lors que l’acte est nécessaire. L’acte qui aura été accomplis valablement par l’indivisaire seul engagera les co-indivisaires.

b. Les actes accomplis à la majorité des 2/3

Jusqu’à la réforme de 2006, tous les actes d’administration et de disposition devaient obligatoirement être décidés à l’unanimité. Ce qui équivalait à reconnaître à chaque co-indivisaire un véritable droit de véto.

Aujourd’hui, peuvent être décidés à la majorité des 2/3, les actes les moins graves énumérés à l’article 815-3 du Code civil «Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité : 1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ; 2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ; 3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ; 4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal. Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers. Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°. Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

La seule obligation qui pèse sur les auteurs de la décision prise à la majorité des 2/3, c’est une obligation d’information, ils doivent effectivement informer les autres co-indivisaires de la décision. La sanction de cette obligation d’information étant l’inopposabilité de la décision aux co-indivisaires minoritaires.

c. Les actes à l’unanimité

Règle de l’unanimité maintenue pour les actes les plus graves (= article 815-3 du Code civil) qui vise tout actes qui ne ressorti pas à l’exploitation normal des bien indivis et tout acte de disposition autre que ceux visés à l’article 815-3 3°.

2. Les mesures de crise

Trois cas peuvent susciter problème dans le fonctionnement de l’indivision :

  • indivisaire hors d’état de manifester sa volonté
  • indivisaire qui oppose un refus qui va à l’encontre de l’intérêt commun
  • mesures urgentes qui peuvent s’imposer

Le législateur a pris en compte ces 3 situations de crise qui sont réglées par les articles 815-4, -5 et -6.

  • S’agissant du 1er cas, cette hypothèse revoie au problème de l’indivisaire incapable, indivisaire absent au sens juridique du terme ou encore à l’hypothèse de l’éloignement de l’un des co-indivisaires. Dans ce cas, la loi prévoit la faculté pour le juge d’autoriser l’un des co-indivisaire à le représenter d’une manière générale ou alors pour certains actes particuliers.
  • S’agissant du 2ème cas, la solution réside dans le recours à l’autorisation judiciaire. Et le juge pourra autoriser l’un des co-indivisaires à passer l’acte qu’il s’agisse d’un acte d’administration ou de disposition, acte qui sera opposable à celui qui a refusé son consentement.
  • S’agissant du 3ème cas, là encore le juge pourra interdire, imposer ou autoriser toutes mesures urgentes que requière l’intérêt commun (= article 815-6 alinéa 1er).

B. Les droits des indivisaires

Ils portent sur 3 points :

  • droit de jouissance personnelle sur les biens qui les autorise à en user dès lors que cette utilisation est conforme à la destination du bien et ne porte pas atteinte aux droits des autres co-indivisaires. Alors dans certains cas, un co-indivisaire peut se voir reconnaître par les autres un droit exclusif de jouissance sur un bien déterminé mais dans ce cas, l’indivisaire devra une indemnité à l’indivision.
  • ils ont droit aux fruits et aux revenus qui accroissent l’indivision.
  • chaque indivisaire peut céder tout ou partie de sa part héréditaire à un autre indivisaire ou même à un tiers dans les conditions prévues par l’article 815-14 du Code civil qui prévoit un droit de préemption des co-indivisaires en cas de vente amiable à une personne étrangère à l’indivision.

II. L’indivision conventionnelle

Les co-indivisaires peuvent choisir une indivision conventionnelle (= article 1873-2 et suivants du Code civil). Elle nécessitera l’accord unanime de tous les co-indivisaires et devra être passée par écrit à peine de nullité. L’intérêt de la convention d’indivision, c’est de faciliter la gestion de l’indivision.

En effet, les co-indivisaires peuvent décider de confier la gestion de l’indivision à un gérant qui peut être soit l’un d’entre eux soit un tiers. Et les pouvoirs de ce gérant seront alors calqués sur les pouvoirs des époux sur les biens communs tels que ces pouvoirs sont régit par le Code Civil.

CHAPITRE 2 : L’administration par un mandataire

Innovation majeur de la loi de 2006 réside dans la mise en place du mandat à effet posthume qui s’joute aux 2 autres formes classiques de mandat (= mandat conventionnel et judiciaire).

Section 1 : Le mandat à effet posthume

La mise en place du mandat à effet posthume par la loi de 2006marque un infléchissement de la théorie de la succession envisagée traditionnellement comme une succession à la personne et no une succession aux biens.

Dans la logique de la succession à la personne, c’est l’héritier qui administre normalement la succession à la différence des théories de succession aux biens où le patrimoine est confié à la gestion d’un tiers. L’héritier étant alors dessaisit de l’administration de la succession. Le mandat à effet posthume porte aussi atteinte au principe de la saisine héréditaire dont l’effet principal est normalement d’habiliter l’héritier à appréhender matériellement les biens du défunt et exercer tous les droits du défunt sur ces biens.

Désormais, le de cujus peut confier à un tiers la gestion de l’hérédité et maintenir ses héritiers à l’écart de la succession qui leur est pourtant échue.

I. la formation du mandat

Ce mandat à effet posthume est régit par les articles 812 et suivants du Code civil «Toute personne peut donner à une ou plusieurs autres personnes, physiques ou morales, mandat d’administrer ou de gérer, sous réserve des pouvoirs confiés à l’exécuteur testamentaire, tout ou partie de sa succession pour le compte et dans l’intérêt d’un ou de plusieurs héritiers identifiés. Le mandataire peut être un héritier. Il doit jouir de la pleine capacité civile et ne pas être frappé d’une interdiction de gérer lorsque des biens professionnels sont compris dans le patrimoine successoral. Le mandataire ne peut être le notaire chargé du règlement de la succession ».

A. Les parties au mandat

Le mandant est le futur défunt dont le mandataire va tenir son pouvoir.

Concernant ce mandant, une remarque s’impose. En effet, d’après l’article 1984 du Code civil qui régit le droit commun du mandat. Le mandant est celui de qui le mandataire tient son pouvoir et pour le compte de qui il agit. Appliqué au mandat posthume, la règle suscite une interrogation car si le mandataire tient bien son pouvoir du de cujus il agit pour le compte des héritiers et non du mandant. Dans le mandat à effet posthume, le mandataire agit donc non pas pour le compte du mandant mais pour le compte des héritiers et finalement l’objet de ce mandat à effet posthume c’est en fait de dessaisir l’héritier de tenir l’héritier à l’écart de la gestion des biens objet de ce mandat à effet posthume.

Cette mise à l’écart de l’héritier s’explique par la volonté du futur défunt d’organiser sa succession et d’anticiper les difficultés éventuelles de gestion du patrimoine successoral lorsqu’une entreprise est en jeu ou lorsque certains héritiers sont mineurs ou atteint d’un handicap.

Concernant le mandataire, s’il s’agit d’une personne physique ce peut être un héritier mais aussi un tiers non successible ou un professionnel à l’exclusion du notaire chargé du règlement de la succession. Le mandataire peut être aussi une personne morale comme une association.

B. Les conditions du mandat

1. Les conditions de fond

Le mandat doit être accepté par le mandataire du vivant du mandant. Le mandat à effet posthume doit être motivé par un intérêt légitime et sérieux qui peut être soit un intérêt personnel soit un intérêt réel.

Le mandat justifié à raison d’un intérêt personnel sera motivé soit par l’âge soit par l’incapacité soit la prodigalité de l’héritier, de la mésentente avérée des co-héritiers

Le mandat peut être justifié par la consistance du patrimoine qui peut se révéler difficile à gérer en raison de la nature des biens qui le compose.

Cette exigence que le mandat soit justifié par un intérêt légitime est fait pour éviter que l’héritier soit « frappé d’une incapacité d’exercice fulminé du fond du tombeau par un père despotique ».

Ce mandat ne peut être que temporaire compte tenu du dessaisissement qui s’impose aux héritiers. Sa durée maximale est de 2 ans et de 5 ans par exception lorsque le mandat est justifié par l’âge de l’héritier ou la nature professionnelle des biens.

2. Les conditions de forme

C’est un contrat solennel qui doit être passé par acte authentique à peine de nullité (= article 812-1-1 alinéa 3).

Le mandat doit être précisément motivé et mentionné l’intérêt légitime et sérieux qui le justifie. C’est prévu de manière expresse par l’article 812-1-1 alinéa 1er in fine.

Ce mandat doit être inscrit au fichier des dernières volontés afin d’éviter qu’il soit ignoré.

II. Les effets du mandat

Jusqu’à l’ouverture de la succession, le mandat peut être révoqué par l’une ou l’autre des parties. La loi ne précise rien quant aux formes de la révocation et la seule précision apportée par l’article 812-1-1 alinéa dernier concerne l’obligation pour celui qui renonce au mandat de notifier sa décision à l’autre partie sans que d’ailleurs cette exigence ne soit assortie d’aucune sanction particulière.

A l’ouverture de la succession, le mandat qui n’a pas été révoqué va produire ses effets, effets qui seront différents selon que l’on se place avant l’acceptation de la succession ou après l’acceptation de la succession.

Tant que l’héritier n’a pas accepté la succession, les pouvoirs du mandataire sont limités et il ne peut accomplir que les actes qui n’emportent pas acceptation tacite. Le CC prend soin de préciser que les actes accomplis par le mandataire sont sans effet sur l’option héréditaire (= article 812-1-2 du Code civil) et le CC ajoute à l’article suivant que tant qu’aucun héritier visé par le mandat n’a accepté la succession, le mandataire ne dispose que des pouvoirs reconnus aux successibles par l’article 784 (= vise les actes n’emportant pas acceptation tacite).

La période antérieure à l’acceptation est la seule traitée par le CC et on admet par conséquent qu’à partir du moment où l’héritier a accepté la succession il y a lieu d’appliquer la règle générale inscrite à l’article 812-1-4 qui renvoie aux dispositions des articles 1984 à 2010 c’est-à-dire au droit commun des mandats.

Ce mandat est en principe gratuit sauf quand il sera confié à un professionnel. Si tel est le cas une rémunération peut être prévue mais elle est strictement règlementée par l’article 812-2 alinéa 2 du Code civil.

Section 2 : Les mandats conventionnel et judiciaire

I. Le mandat conventionnel

C’est ce que prévoit l’article 813 « Les héritiers peuvent, d’un commun accord, confier l’administration de la succession à l’un d’eux ou à un tiers. Le mandat est régi par les articles 1984 à 2010. Lorsqu’un héritier au moins a accepté la succession à concurrence de l’actif net, le mandataire ne peut, même avec l’accord de l’ensemble des héritiers, être désigné que par le juge. Le mandat est alors régi par les articles 813-1à 814 ».

Il découle de la lecture combinée des alinéas 1 et 2 : c’est réservé à la seule hypothèse où tous les héritiers ont accepté purement et simplement la succession. Le mandat est régit par les règles du droit commun du mandat.

A l’inverse, si un au moins des héritiers a accepté la succession en concurrence de l’actif net, le mandat ne peut plus être conventionnel puisque dans ce cas le mandataire ne peut être désigné que par le juge.

Un auteur souligne le caractère critiquable d’un point de vue technique de l’introduction de ce type de mandat conventionnel. Il relève à cet égard le manque de cohérence de la loi nouvelle qui en créant ce nouveau mandat n’a pas tenu compte des règles de l’indivision.

Ce mandat conventionnel s’ajoute à la possibilité (= article 815-3 du Code civil) pour les indivisaires qui sont titulaires d’au moins 2 / 3 des droits indivis de donner à l’un d’entre eux ou à un tiers un mandat général d’administration. Mandat qui selon la Doctrine Notariale est alors également soumis aux dispositions de droit commun du mandat.

II. Le mandat judiciaire

Hors mis l’hypothèse visée précédemment du mandat judiciaire obligatoire à concurrence de l’actif net par les héritiers, il peut arriver dans certains cas des situations de blocage. Pour remédier à ces situations, la loi nouvelle a donné la possibilité de désigner un mandataire successoral en justice.

Hypothèse déjà consacrée par la jurisprudence mais réglementée aujourd’hui de façon spécifique par les articles 813-1 à 814-1 qui précisent à la fois les conditions de désignation de ce mandataire successoral et ses pouvoirs.

A. La désignation du mandataire successoral

La demande de nomination peut être demandée par un héritier, par un créancier, par le ministère public ou encore par toutes personnes qui assuraient pour le compte de la personne décédée l’administration de tout ou partie de son patrimoine de son vivant. A cette liste vient s’ajouter hypothèse particulière visée à l’article 814-1 qui prévoit la nomination d’un mandataire successoral à la demande de l’héritier qui a accepté la succession à concurrence de l’actif net pour le substituer dans la charge d’administration et de liquidation de la succession.

La désignation sera motivée pour :

· soit par inertie, la carence ou la faute d’un ou plusieurs héritiers dans l’administration de la succession.

· soit par la mésentente des héritiers entre eux

· soit par une opposition d’intérêts entre les héritiers que cette opposition d’intérêts soit conflictuel ou non. Exemple : succession qui serait dévolue à la fois à un héritier mineur et à son tuteur.

· soit par la complexité de la situation successorale. Notion qui relève de l’appréciation du juge et cette complexité découle de la composition du patrimoine successoral, soit de la multitude d’héritier.

B. Les pouvoirs du mandataire successoral

Ils sont déterminés et comportent certaines limites.

1. Le contenu des pouvoirs

Dans la situation ou aucun héritier n’a encore accepté la succession, dans ce cas, le mandataire successoral ne peut accomplir que les actes visés par l’article 784 du Code civil. C’est-à-dire les actes qu’un héritier peut faire sans qu’il emporte accord tacite de la succession. Là encore, il est prévu que les actes accomplis par le mandataire n’ont aucun effet sur l’option. Deuxième hypothèse : l’un au moins des héritiers a accepté la succession soit purement et simplement soit à concurrence de l’actif net. Dans ce cas, le juge peut autoriser le mandataire successoral à effectuer l’ensemble des actes d’administration de la succession et il peut l’autoriser à tout moment à réaliser les actes nécessaires à la bonne administration de la succession et à en déterminer les prix et conditions (= tous les actes qui concernent l’administration). A ces pouvoirs spécifiques, pouvoir de représentation et sous réserve des pouvoirs expressément attribués par le juge, le mandataire représente par ailleurs l’ensemble des héritiers pour tous les actes de la vie civile et les actions en justice.

2. Les limites aux pouvoirs du mandataire

Le mandataire exerce un pouvoir subsidiaire, il ne peut s’exercer que sous réserve des pouvoirs déterminés à d’autres qu’il s’agisse du mandataire à effet posthume, de l’exécuteur testamentaire nommé par le défunt ou de l’administrateur judiciaire nommé dans l’intérêt de l’indivision en application du nouvel article 816-6 du Code civil.

A quel contrôle le mandataire est-il soumis ? Il devra rendre des comptes à la fois au juge et aux héritiers. Ainsi, les héritiers peuvent à tout moment demander communication des documents relatifs à l’administration de la succession par le mandataire et le Président du TGI peut d’office ou sur demande des héritiers convoquer le mandataire et lui demander toutes informations sur le déroulement de sa mission (= article 1357 du Code civil).

L’exécuteur testamentaire auquel il est fait référence est la personne désignée par le défunt dans son testament pour veiller à la bonne exécution du testament c’est-à-dire à l’exécution de ses volontés.

TITRE 4 : LE PARTAGE DE LA SUCCESSION

Le partage, c’est l’opération qui va mettre fin à l’indivision successorale et substituer aux quotes-parts indivises des droits privatifs.

La loi du 23 juin 2006 a réaménagé certaines règles du partage pour en faciliter l’application tout en préservant les droits des héritiers mais en maintenant le principe d’égalité.

Néanmoins l’intérêt de la nouvelle loi est de poser un principe d’égalité en valeur et non plus en nature.

L’objectif du législateur est de ne pas nuire à l’exploitation économique d’un bien et cet objectif influe directement sur les règles du partage qui sont désormais envisagées essentiellement dans une dimension économique.

Section 1: Le droit au partage et ses tempéraments

Le principe du droit au partage est affirmé à l’article 815 du Code civil relatif à l’indivision qui déclare que nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention.

Ce droit au partage est l’un des derniers droits discrétionnaires qui existe aujourd’hui, c’est un droit insusceptible d’abus. Si le droit au partage est le principe, ce principe comporte néanmoins des tempéraments comme le prévoit l’article 815 in fine lorsqu’il déclare « à moins qu’il n’y ait été sursis par convention ou jugement ».

Les tempéraments à ce droit vont se traduire à travers 4 hypothèses :

· le sursis au partage

· le maintien judiciaire de l’Indivision

· l’attribution éliminatoire

· la convention d’indivision

I. Le sursis au partage

Il est régit par l’article 820 du Code civil qui prévoit qu’il peut avoir sursis au partage dans 2 cas. Si la réalisation immédiate du partage risque de porter atteinte à la valeur du bien indivis ou si l’un des indivisaires ne peut reprendre l’exploitation agricole, industrielle, commerciale, artisanale ou libérale qu’à l’expiration de ce délai.

Ce sursis peut s’appliquer à l’ensemble des biens indivis ou à l’un d’entre eux.

II. Le maintien judiciaire de l’indivision

La loi a élargie ces hypothèses. Antérieurement ce maintien ne pouvait être demandé que sous certaines conditions et pour 3 catégories de biens qui aient fait l’exploitation agricole, le local professionnel et les objets mobiliers servant à l’exercice de la profession et le local d’habitation.

Aujourd’hui, le maintien dans l’indivision pourra être demandé pour toute entreprise agricole mais aussi industrielle, commerciale, artisanale ou libérale, le droit d’exploitation était assuré par le défunt ou son conjoint voir même aujourd’hui sur certains droits sociaux.

Concernant le local d’habitation, le maintien de l’indivision est étendu aux objets mobiliers garnissant ce local.

Le juge ordonnera le maintien dans l’indivision sur les biens nécessaires à la fois à la continuation de la vie familiale et à ceux nécessaires à la continuation de l’exploitation économique.

Lorsque le défunt laisse des enfants mineurs, la demande de maintien dans l’indivision peut être faite par le conjoint, le représentant légal du mineur.

Lorsqu’il n’y a pas d’enfant mineur, la demande pourra être faite par le conjoint à la condition qu’il soit copropriétaire du bien ou qu’il l’ait été soit qu’il le soit devenu du fait du décès.

Le maintien judiciaire ne pourra pas excéder 5 ans, renouvelable jusqu’au décès du conjoint ou … Le maintien est une mesure temporaire.

III. Attribution éliminatoire

Lorsque des indivisaires souhaitent demeurer dans l’indivision alors que l’un d’entre eux souhaite le partage et donc la fin de l’indivision, le mécanisme de l’attribution éliminatoire permet à un copartageant de se voir attribuer sa part dans la masse indivise.

Il est à noter concernant cette attribution que l’article 824 vise a priori une attribution de sa part en valeur dans la mesure où le texte vise uniquement le versement d’une somme. Ce principe d’un versement en valeur correspond en fait au principe qui consiste aujourd’hui à privilégier l’égalité en valeur dans le partage.

IV. La convention d’indivision

C’est la volonté de tous les co-indivisaires de rester en indivision en concluant une convention d’indivision.

PARTIE 2 : Les libéralités

L’un des objectifs de la loi de 2006 a été d’adapter le droit des libéralités aux évolutions de la société, au phénomène du vieillissement. L’étude des règles de dévolution volontaire a permis de montrer que l’un des obstacles à la liberté de disposer de ses biens par des libéralités était constitué par la réserve héréditaire qui fait échapper au pouvoir de la volonté une fraction des biens du disposant dès lors qu’il existe des héritiers réservataires.

La loi nouvelle désireuse de diminuer l’impact de la notion de réserve héréditaire a ainsi diminué le nombre des héritiers réservataires en supprimant la réserve des ascendants.

Par ailleurs, la réserve étant garantit par la possibilité offerte aux héritiers de demander la réduction des libéralités excessives qui portaient atteinte à leur réserve.

La loi nouvelle permet, désormais, aux héritiers de renoncer par avance à leur action en réduction c’est-à-dire de renoncer à tout ou partie de leur part de réserve dans les conditions prévues à l’article 929 du Code civil. La renonciation anticipée à l’action en réduction faisant partie des nouveaux pactes sur successions futures autorisés. Ces mesures ont permis d’augmenter le pouvoir du disposant sur ces biens.

S’agissant l’adaptation du droit des libéralités à l’évolution de la société. Cette adaptation s’est traduite par l’instauration de nouvelle forme de libéralité qui permet la prise en compte de l’allongement de la durée de vie des donations par tranches transgénérationelles qui ont permis de sauter une génération. Le législateur s’est intéressé au problème des familles recomposées en autorisant une nouvelle forme de donation partage qui permet de faire des donations partages non seulement au profit des enfants communs mais aussi non communs.

L’adaptation du droit des libéralités s’est également traduite par la reconnaissance des libéralités graduelles et résiduelles qui vont permettre dans un même acte de désigner deux gratifiés différents de manière successive remettant ainsi en cause l’ancienne prohibition des substitutions fidéicommissaires.

Quelques soit leur forme, les libéralités sont définies aujourd’hui à l’article 893 du Code civil qui déclare que « la libéralité est l’acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne, il ne peut être fait de libéralité qu’entre vifs ou testament ».

On constate que la libéralité se caractérise par deux éléments :

  • un élément matériel qui va consister dans le transfert d’un bien, d’un immeuble, d’une somme d’argent ou d’un droit, d’un usufruit, d’une nue propriété ou le droit de percevoir des revenus dans le cas des droits d’auteur
  • un élément intentionnel : l’intention libérale qu’il s’agisse de l’animus donandi ou l’animus testandi.

La loi ajoute qu’il n’y a que deux formes de libéralités, les donations et les testaments. Les donations ayant un effet immédiat et en principe irrévocable alors que les testaments sont en principe révocables et produisent effet à la mort du défunt.

Au delà de ces différences, les libéralités sont soumises à des conditions communes. Nous verrons les règles communes aux libéralités (= chapitre 1) avant de voir les règles particulières au testament et donation (= chapitre 2).

CHAPITRE 1 : Les règles communes aux libéralités

Section 1 : Les règles générales de validité

Les règles de l’article 1108 imposent 4 conditions de validité au contrat qui s’appliquent aussi aux actes unilatéraux :

– le consentement – la cause

– la capacité – l’objet

I. Le consentement

Comme pour tout acte juridique, il doit exister et être exempt de vices. Cette règle classique est reprise à l’article 901 qui déclare que « pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit et la libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l’erreur, le dol ou la violence ».

La référence aux vices du consentement a été ajoutée par la loi de 2006. L’ancien texte de l’article 901 ne visant que l’insanité d’esprit, cette référence spécifique aux vices du consentement spécifique aux libéralités consacre la jurisprudence antérieure qui appliquait le droit des contrats aux libéralités et étendait de façon plus large ses conditions pour les libéralités que pour les actes à titre onéreux.

A. L’insanité d’esprit

Elle vise toutes les variétés d’infections mentales par l’effet desquelles l’intelligence du disposant a été obnubilée ou sa faculté de discernement déréglée étant précisée qu’une simple diminution ne saurait à elle seule justifier une demande de nullité.

La charge de la preuve de l’insanité d’esprit pèse sur celui qui l’invoque. Cette preuve peut être intrinsèque en présence de disposition incohérente ou extrinsèque lorsque le disposant étant en état habituel de démence.

La charge de la preuve bascule sur celui qui au contraire soutiendrait la validité de l’acte c’est-à-dire en principe le gratifié qui devra alors prouver que l’acte a été fait dans un intervalle lucide.

B. Les vices du consentement

Trois vices du consentement sont prévus, il s’agit de l’erreur, du dol et de la violence.

a. L’erreur.

Concernant l’erreur, deux types d’erreurs pourront être pris en compte au niveau des libéralités.

Celle-ci pourra porter en premier lieu sur la personne du gratifié, et sera alors une cause de nullité, puisque la libéralité, par définition, est faite intuitu personae.

L’erreur pourra également porter sur la cause de la libéralité: ce sera l’exemple du testament qui aura été fait par le disposant dans la croyance erronée de celui-ci de l’absence de famille (l’hypothèse du testateur qui pense ne pas avoir d’héritier). La cause s’analysera ici comme le motif impulsif et déterminant qui a animé le disposant lorsqu’il aura fait la libéralité. La jurisprudence considère dans ce cas particulier que l’erreur sur la cause pourra enlever toute valeur à la manifestation de volonté du disposant. La libéralité sera donc sans cause, à condition néanmoins que l’on puisse établir que le disposant n’aurait effectivement pas disposé de ses biens comme il l’a fait dans la libéralité s’il avait connu la vérité.

b. Le dol.

Au niveau du dol, celui-ci va résulter ici d’une manœuvre qui aura déterminé le consentement du disposant, et qui pourra consister à provoquer une haine injustifiée à du disposant à l’égard de ses héritiers, et réciproquement qui aura conduit à une affection immodérée pour le gratifié. La jurisprudence précise que les juges vont alors mener une appréciation in concreto, notamment en prenant en compte la sensibilité du disposant. Le dol a toutefois un domaine plus large pour les libéralités que dans le droit commun des obligations, dans la mesure où on va sanctionner le dol qui émanera d’un tiers, c’est-à-dire d’une autre personne que celle disposant de la libéralité.

c. La violence.

La violence pourra elle de façon classique être physique ou morale. Il faudra de même raisonner de manière concrète (appréciation in concreto).

La sanction d’un vice du consentement sera la nullité relative. Mais ce qu’il faut souligner ici c’est que cette nullité relative sanctionnera également l’insanité d’esprit, qui est elle une hypothèse d’absence de consentement. Cette décision de sanctionner cette absence de consentement comme un vice de consentement date d’un arrêt Cour de cassation 11 janvier 2005.

II. La capacité

Elle s’apprécie tant dans la personne du disposant que celle du bénéficiaire. L’article 902 prévoit que « toutes personnes peuvent disposer et recevoir soit par donation entre vifs, soit par testament, excepté celles que la loi en déclare incapables ».

La capacité est la règle est l’incapacité est l’exception. Il pourra y avoir une incapacité d’exercice ou de jouissance.

La question des libéralités pose la question de savoir à quel moment il faut se placer pour apprécier cette capacité.

A. Le moment de l’appréciation de la capacité

La capacité s’apprécie différemment qu’il s’agisse d’un legs ou d’une donation.

1. Dans le cas des legs

Elle doit s’apprécier du côté du testateur et du légataire c’est-à-dire à la fois de la capacité de disposer et celle de recevoir :

· du côté du testateur, la capacité est exigée au moment de la rédaction de l’acte. Par conséquent, le testament rédigé par une personne capable devenue incapable avant son décès demeure valable. Si le testateur est incapable lors de la rédaction de son testament, celui-ci est nul même s’il retrouve sa capacité.

· du côté du légataire, peu importe sa capacité lors de la rédaction du testament. C’est uniquement au décès du testateur que la question va se poser car le légataire devant accepter le legs s’il est affecté d’une incapacité de jouissance (= surtout pour les incapacités spéciales), il ne pourra pas recevoir de legs. S’il est uniquement frappé d’une incapacité d’exercice, il conviendra de rechercher qui va le représenter ou l’assister.

2. Dans le cas des donations

La donation étant un contrat, la capacité s’apprécie au moment du consentement.

B. Libéralités et droit commun des incapacités

L’article 902, cette règle renvoie au droit commun des incapacités qui distingue deux catégories d’incapables :

  • les mineurs
  • les majeurs protégés

Cette règle distingue par ailleurs :

1. La capacité de disposer à titre gratuit

a. Le cas du mineur

Il est réglé par les articles 903 et 904 : il faut distinguer selon que l’on a à faire à un mineur non émancipé ou émancipé.

♦ Concernant le mineur non émancipé: il est frappé d’une incapacité générale d’exercice et cette incapacité de principe trouve son prolongement naturel dans les libéralités.

S’agissant des libéralités qui peuvent être consenties par le mineur même si du fait de son incapacité d’exercice ne peut en principe pas disposer de ses biens à titre gratuit, ce principe comporte deux tempéraments :

  • l’un qui concerne les libéralités faites par contrat de mariage : concernant ces libéralités faites par contrat de mariage, l’article 1095 prévoit que le mineur peut par contrat de mariage avec le consentement et l’assistance de ceux dont le consentement est requis pour la validité de son mariage disposer en faveur de son futur conjoint de tout ce que la loi permet à l’époux majeur de donner à son conjoint.
  • l’autre qui concerne le testament : concernant le testament, l’article 904 alinéa 1er prévoit que le mineur qui a atteint l’âge de 16 ans peut disposer de la moitié des biens que la loi permet au majeur de disposer. La sanction de cette règle se traduira non pas par la nullité mais par la réduction des libéralités testamentaires des mineurs non émancipés de plus de 16 ans qui excèderaient la quotité dont ils pouvaient disposer.

♦ Concernant les mineurs émancipés: il est capable comme un majeur de tous les actes de la vie civile mais le principe doit être nuancé.

En tant que titulaire de la capacité d’exercice, il peut consentir des libéralités sous réserve des libéralités faites par contrat de mariage pour lesquels, il faut l’accord des personnes devant consentir au mariage (= articles 1098 et 413-6 du Code civil).

Concernant le testament du mineur émancipé, le problème est réglé à l’article 903 qui énonce formellement que le mineur de moins de 16 ans ne pourra aucunement disposer sauf ce qui est prévu au chapitre 9 du présent titre (= qui ne vise que les libéralités faites par contrat de mariage et pour le reste le texte est général et ne distingue en aucun cas selon que le mineur a été émancipé ou non).

b. Le cas du majeur

L’incapacité du majeur dépend du régime de protection qui lui est applicable et qui est en principe proportionné à la gravité de l’altération de ses facultés intellectuelles.

La loi du 5 mars 2007 guidée par le souci de limiter au maximum l’incapacité du majeur et de favoriser au maximum son autonomie a aménagé le régime d’incapacité du majeur dans le sens d’une libéralisation des libéralités.

Parmi les 3 régimes de protection, les seuls qui altèrent la capacité sont la tutelle et la curatelle. La sauvegarde de justice n’altère par la capacité car le majeur a une capacité totale, il est seulement protégé a postériori.

♦ Concernant le majeur sous tutelle pour les libéralités consenties, il faut distinguer entre les donations et les legs :

· Pour les donations, dans le système antérieur, le majeur sous tutelle ne pouvait faire de donation qu’au profit de personnes déterminées, descendants, conjoints… et avec l’autorisation préalable du Conseil de Famille. Aujourd’hui, le majeur peut consentir des donations à toutes personnes que ce soit dès lors que l’acte est autorisé par le juge ou le Conseil de Famille. Ce sont des donations qu’il pourra faire avec l’assistance de son tuteur ou en étant représenté par lui (= article 476 du Code civil).

· Pour le testament, c’est un acte éminemment personnel. La loi de 2007 précise dans l’article 476 « qu’il ne peut y avoir de testament rédigé par représentation et ajoute que le tuteur ne peut pas assister le majeur à cette occasion, le majeur sous tutelle peut rédiger seul son testament, la seule mesure de protection résidant dans l’exigence d’une autorisation préalable du juge ou du Conseil de Famille ». Il peut révoquer seul son testament

♦ Concernant le majeur sous curatelle, il est assisté pour les actes graves. Les solutions sont symétriques mais varient selon la gravité de l’acte :

· Pour le testament (= article 470 alinéa 1er), le majeur sous curatelle peut librement tester seul sous la seule réserve de l’insanité d’esprit et du caractère personne du testament.

· Les donations sont faites avec l’assistance du curateur.

2. La capacité de recevoir

C’est le problème de l’existence de la personne. La libéralité en tant qu’acte juridique ne peut intervenir qu’entre des personnes existantes, des personnes physiques ou morales, le gratifié pouvant être une personne morale.

a. Les personnes existantes

Cette question concerne uniquement la capacité de recevoir. Cette condition est réglée par l’article 906 « pour être capable de recevoir entre vifs, il suffit d’être conçu au moment de la donation. Pour être capable de recevoir par testament, il suffit d’être conçu à l’époque du décès du testateur ».

Le texte conclu en précisant que « néanmoins, la donation ou le testament n’auront leur effet qu’autant que l’enfant sera né viable ».

b. La personne doit être identifiable

On ne peut pas consentir de libéralités à une personne incertaine. La jurisprudence est souple concernant les libéralités faites aux pauvres qui ne sont pas une personne déterminée.

La jurisprudence dit que ce ne sont pas des libéralités incertaines et qu’elles peuvent être reçues par les associations qui ont pour objet la bienfaisance et l’assistance.

c. La mise en œuvre de la capacité de recevoir

Concernant le mineur non émancipé compte tenu de sa capacité d’exercice, les libéralités ne pourront être acceptées que par les représentants du mineur et la question des pouvoirs des représentants légaux va être conditionnée par la nature de la libéralité. Et les exigences varieront selon qu’il s’agira de libéralité avec ou sans charge de legs universel ou à titre universel selon qu’il y aura acceptation pure et simple, renonciation ou à concurrence de l’actif net.

Concernant le mineur émancipé: il peut accepter seul une libéralité.

Concernant les libéralités reçues par le majeur: aucune question ne se pose pour le majeur sous sauvegarde de justice car il conserve sa pleine capacité.

La seule question qui se pose concerne les majeurs sous tutelle ou les majeurs sous curatelle. Il n’y a qu’une seule règle spéciale pour les deux cas. C’est celle de l’article 935 du Code civil qui prévoit que la donation faite à un majeur protégé devra être acceptée par son tuteur conformément à l’article 463 ancien du Code civil. Ce texte prévoyait que le tuteur pouvait accepter seul les donations et les legs particuliers obtenus à moins qu’ils ne soient grevés de charge.

Le principe directeur est le suivant : les solutions devront être modulées en fonction de l’importance du risque et qu’il faudra adapter la protection du majeur selon qu’il risque ou non de devoir supporter un passif ou inversement qu’il refuse inconsidérément une libéralité qui lui serait patrimonialement profitable.

Cf. voir p.729 du Code civil.

C. Les incapacités spéciales

Parallèlement aux incapacités de droit commun, il existe des incapacités spéciales qui sont en fait des incapacités de défiance à l’égard de celui qui va s’enrichir et des incapacités de protection à l’égard de celui qui va s’appauvrir.

Ces incapacités qui sont sanctionnées par la nullité de l’acte correspondent à des cas limitativement énumérés par la loi et sont fondées sur la spécificité de la relation qui peut exister entre le disposant et le bénéficiaire de la libéralité. Ces incapacités reposent en fait sur une sorte de présomption de captation qui peut résulter du lien particulier qui unit le disposant au gratifié et de l’emprise que le gratifié peut exercer sur le disposant.

L’article 909 alinéa 1er du Code civil dispose que les membres des professions médicales et de pharmacie ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu’elles auraient faites en leur faveur pendant le cour de celle-ci.

A cette première catégorie, le Code en ajoute une seconde, les mandataires à la protection des majeurs, les personnes morales au nom desquelles elles exercent leurs fonctions ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires que les personnes dont ils assurent leur protection quelque soit la date de la libéralité.

Quand on lit ce texte on constate que la personne doit avoir prodiguée des soins au disposant et que la libéralité ait été réalisée pendant la dernière maladie sous réserve des mandataires à la protection des majeurs pour lesquels l’incapacité joue d’une manière générale et quelque soit la date de la libéralité.

Pour garantir l’efficacité de cette incapacité, le législateur a pris soin de prévoir dans son article 911 l’hypothèse de l’interposition de personne ou de déguisement de l’acte dans le but de contourner l’incapacité de recevoir de ses catégories de personnes.

L’article 911 prévoit que toute libéralité au profit d’une personne physique frappée d’une interdiction de recevoir à titre gratuit est nulle quelle soit déguisée sous la forme d’un contrat onéreux ou quelle soit faite au nom de personne interposée qu’il s’agisse de personne physique ou morale. Sont présumés interposés, les pères et mères, les enfants et descendants ainsi que l’époux de la personne incapable.

III. L’objet des libéralités

Comme pour tout acte juridique, la libéralité que ce soit un legs ou une donation doit avoir un objet licite et déterminé. Cet objet doit être dans le commerce juridique et lorsque l’on dit que l’objet doit être déterminé ou déterminable, cela n’exclut pas le caractère alternatif de l’objet de la libéralité qui lui est utilisé.

On peut, ainsi, par exemple tout à fait valablement léguer une chose déterminée en lui laissant le choix de l’objet.

IV. La cause

La cause des libéralités au sens des conditions de validité de l’acte doit être distinguée de la cause critère de qualification de l’acte constituée par l’intention libérale du disposant et elle doit être comprise comme les motifs qui ont déterminé le disposant au profit du gratifié. Ce qui signifie que la cause au niveau des conditions de validité de la libéralité correspond à la cause impulsive et déterminante qui pourra varier d’un disposant à l’autre. La cause de la libéralité doit être à la fois licite et morale et la cause devant précisément être licite et morale, le problème qui s’était posé concernait les libéralités faites au concubin lorsqu’elles étaient motivées par l’instauration, la reprise ou la continuation des relations entre le disposant et le concubin. La jurisprudence actuelle est claire sur cette question ; les libéralités guidées par ce type de motivation ne sont plus nulles. En revanche, a été considéré comme nulle pour cause illicite et immorale le legs qui avait été fait par un père à ses neveux et nièces, legs portant sur la QD au motif que ce legs avait était fait par souci de vengeance à l’égard de ses 2 filles qui ne lui avaient pas pardonné les pratiques incestueuses dont elles avaient fait l’objet pendant leur minorité.

Section 2 : Les modalités des libéralités

Le disposant peut tout à fait assortir sa libéralité de modalités particulières c’est-à-dire l’assortir de charge ou de condition dès lors que ces charges et conditions ne sont ni immorales, ni illicites et ces conditions peuvent faire l’objet d’une révision.

I. La libéralité avec charge

Les charges qui assortissent une libéralité consistent en une obligation que le disposant impose au bénéficiaire de la libéralité.

L’hypothèse la plus fréquente est celle de la charge qui est constituée dans l’intérêt du disposant lui-même.

Exemple : une libéralité faite à charge d’entretenir le disposant durant sa vie. Le problème des charges faites dans l’intérêt du disposant provient du fait que ces charges peuvent finalement aboutir à donner un caractère onéreux à la libéralité en diminuant l’avantage que le gratifié retire de la libéralité.

Dans le cas où la charge serait finalement équivalente à la valeur de la libéralité, l’acte sera disqualifié et relèvera alors de la catégorie des actes à titre onéreux.

II. La libéralité assortie de conditions

Classiquement sont retenue sous les conditions : la clause d’inaliénabilité ou les clauses de célibat ou de viduité.

A. La clause d’inaliénabilité

Elle est visée par l’article 900-1 du Code civil et n’est valable qu’à deux conditions :

· elles doivent être temporaires

· elles doivent être justifiées par un intérêt légitime et sérieux

S’agissant du caractère temporaire, on a admit qu’une clause d’inaliénabilité fixée à la durée de vie du gratifié était nulle car elle était considérée comme perpétuelle.

S’agissant de l’intérêt légitime et sérieux, il peut consister dans un intérêt moral qu’il peut y avoir à conserver un bien dans la famille notamment lorsqu’un droit de retour conventionnel aura été stipulé.

B. Les clauses de célibat ou de viduité

Ces clauses qui peuvent être insérées dans un testament ou dans une donation interdisent au gratifié de se marier ou de se remarier.

Ces clauses pour être valables ne doivent pas être abusives et ne doivent pas être dictées par une motivation immorale procédant notamment d’une sorte de jalousie postulée.

La Doctrine contemporaine estime que l’ensemble de ces clauses de célibat et de viduité devrait dans tous les cas être annulées car elles portent atteinte à la liberté du mariage.

La sanction de la validité des conditions est prévue à l’article 900 du Code civil qui dispose que dans toute disposition entre vifs ou testamentaire les conditions impossibles celles qui seront contraires aux lois et aux bonnes mœurs seront réputées non écrites.

III. La révision des charges et des conditions

Tout gratifié peut demander que soit révisé en justice les conditions ou charges grevant les donations ou legs qu’il a reçu lorsque par suite du changement de circonstance l’exécution en est devenue pour lui soit extrêmement difficile, soit sérieusement dommageable.

La révision se fera dans le respect de l’intention initiale du disposant. Cette action en révision sera portée devant le TGI et n’est recevable que 10 ans après le décès du disposant ou en cas de demande successive, 10 ans après le jugement qui aura ordonné la précédente révision.

Le juge va disposer des pouvoirs les plus larges et va pouvoir réduire en quantité ou en périodicité les prestations grevant la libéralité ou alors même modifier l’objet de ces charges et conditions en respectant la volonté du disposant.

Section 3 : La reconnaissance des libéralités graduelles ou résiduelles

Dans le cadre des libéralités, il peut arriver qu’une personne souhaite gratifier une personne déterminée mais avec l’obligation pour cette personne gratifiée de transmettre l’objet de la libéralité à son décès à une autre personne. Cette hypothèse relève de la notion de substitution et traditionnellement les substitutions étaient prohibées. L’article 96 ancien du Code civil disposait que les substitutions sont prohibées et toute disposition par laquelle le donataire, l’héritier institué ou le légataire sera chargé de conserver ou de rendre à un tiers sera nulle même à l’égard du donataire de l’héritier institué. Les substitutions sont abrogées par la loi du 23 juin 2006 qui autorise désormais certaines substitutions.

Deux hypothèses de substitutions subsistent aujourd’hui :

· les libéralités graduelles

· les libéralités résiduelles

I. Les libéralités graduelles

C’est ce que prévoit l’article 1048 du Code civil. Une libéralité peut être grevée d’une charge comportant l’obligation pour le donataire ou le légataire de conserver les biens ou droits qui en sont l’objet et de les transmettre à son décès à un second gratifié désigné dans l’acte.

Il s’agit donc d’une libéralité qui va être consentie sur une double charge :

· la charge de conserver les biens

· la charge de les transmettre lors de sa mort à un second gratifié

A. Les conditions de la libéralité graduelle

Les conditions vont concerner sa forme, la personne du bénéficiaire et les biens objet de la libéralité.

1. La forme

La libéralité graduelle va pouvoir prendre la forme d’une donation ou d’un testament et par conséquent elle obéira selon qu’elle est consentie entre vifs, par donation ou à cause de mort, par testament aux conditions régissant la donation ou le testament.

Dans le cadre de la donation graduelle, celle-ci devra être acceptée à la fois par le grevé et par le second gratifié. En effet, pour qu’une donation soit valide, il faut qu’elle soit acceptée à la fois par le donateur et par le donataire car la donation étant une convention il y a un échange de consentement. Cette règle résulte de l’article 932 du Code civil qui est une règle spécifique aux donations qui prévoit que la donation entre vifs n’engage le donateur et ne produira aucun effet que du jour où elle aura été acceptée en terme exprès.

L’acceptation pourra être faite du vivant du donateur par un acte postérieur et authentique dont il restera minute mais alors la donation n’aura effet à l’égard du donateur que du jour où l’acte qui constatera cette acceptation lui aura été notifié. Les donateurs et donataires doivent être vivants.

Compte tenu de ce problème d’acceptation, le législateur a introduit une règle particulière inscrite à l’article 1055 alinéa 1er du Code civil. L’auteur d’une donation graduelle peut la révoquer à l’égard du second gratifié tant que celui-ci n’a pas notifié dans les formes requises en matière de donation, son acceptation à l’égard du donateur.

Par dérogation à l’article 932 du Code civil, la donation graduelle peut être acceptée par le second gratifié après le décès du donateur.

Au terme de ce texte, le donataire en second qui doit notifier son acceptation au donateur qui jusque là peut révoquer sa désignation comme le prévoit le texte, le donataire en second peut néanmoins s’il n’a pas accepté du vivant du donateur, accepter encore la donation graduelle après son décès.

2. Les conditions relatives au bénéficiaire

La liberté du disposant est totale. La libéralité graduelle va pouvoir profiter à toute personne qui a la capacité de recevoir qu’il s’agisse du grevé ou du second gratifié.

Le premier gratifié peut être un successible, un parent quelque soit l’ordre auquel il appartient, le conjoint, un non successible (= un frère ou une sœur en présence d’enfants), une concubine …

Pour ce qui concerne le second gratifié (= l’appelé) lui aussi peut être librement choisi.

La libéralité graduelle a été prévue pour permettre d’assurer la situation d’un enfant handicapé. Pour les parents qui désigneront l’enfant handicapé comme premier bénéficiaire et les frères et sœurs de celui-ci seront désignés en second comme « appelés ».

Cette libéralité graduelle peut comporter qu’un seul degré c’est-à-dire que le second gratifié ne peut pas être lui aussi obliger de conserver, de transmettre …

Dans l’hypothèse où la libéralité graduelle était consentit à plusieurs degrés (= pas autorisée), elle ne sera pas nulle pour autant. Dans ce cas, la loi prévoit qu’elle ne sera valable que pour le premier degré.

3. Les conditions relatives aux biens

D’un point de vue qualitatif, la libéralité graduelle peut porter sur toute sorte de biens mais d’un point de vue quantitatif lorsque le grevé est un héritier réservataire qui peut donc être soit un enfant du testateur ou du donateur, soit le conjoint, la double charge ne peut en principe porter que sur la quotité disponible. Pour la raison simple que la réserve héréditaire doit revenir à son bénéficiaire libre de toute charge.

Par conséquent, si la charge excède la quotité disponible, le grevé pourra en demander le cantonnement sur les biens représentant le disponible à moins que le grevé renonce à ce cantonnement du vivant du donateur dans le cadre d’une renonciation anticipée à l’action en réduction pour atteinte à la réserve.

B. Les effets de la libéralité graduelle

La question des effets doit être distinguée selon qu’il s’agisse du grevé ou de l’appelé. S’agissant du grevé, la libéralité va opérer transfert de propriété des biens au profit du grevé qui devient propriétaire des biens mais il est soumis à une double obligation relative à ces biens :

  • il doit les conserver
  • il doit les transmettre

Pour assurer le respect de cette obligation, il est prévu que le disposant prescrive des garanties et des sûretés pour assurer la bonne exécution de la charge. L’une des garanties consistera en particulier dans la publication de cette charge à la conservation des hypothèques lorsque le bien transmis est un immeuble.

S’agissant du problème plus spécifique de la conservation des biens, l’article 1049 du Code civil prévoit que la libéralité consentie ne peut produire son effet que sur des biens ou des droits identifiables lors de la transmission et subsistant en nature au décès du grevé. Il faudrait, donc, déduire de ce texte que l’obligation du grevé est de conserver ces biens en nature. Cette conservation en nature est conforme à l’objectif de la substitution qui est normalement d’assurer la conservation des biens dans la famille et cette obligation est aussi protectrice des droits de l’appelé. Sur ce point, on peut néanmoins citer l’opinion de Malaurie qui estime que la convention qui institue la libéralité graduelle devrait pouvoir écarter l’obligation de conserver les biens en nature et prévoir la possibilité d’une transmission en valeur. Car même si la loi ne le prévoit pas cette solution permettrait la libre circulation des biens et il suffirait alors de prévoir parmi les garanties pouvant être prescrites par le disposant une obligation de remploi.

S’agissant du second gratifié, celui-ci verra ses droits s’ouvrir au décès du grevé. Les biens grevés sont transmis au second gratifié à la mort du grevé et en principe les droits de l’appelé sont protégés par l’obligation de conservation qui pesait sur le premier gratifié. Et on admet que si ce premier gratifié avait aliéné les biens, le second gratifié serait fondé à les revendiquer entre les mains des acquéreurs sous peine de priver la libéralité graduelle de tout intérêt et de la transformer en libéralité résiduelle. Mais, on admet que le grevé peut de son vivant et de manière anticipée transmettre la jouissance des biens à l’appelé. Car effectivement la transmission au second gratifié suppose que ce second gratifié soit toujours vivant au décès du grevé. Si tel n’était pas le cas, si le second gratifié décédait avant le grevé ses droits seraient caduques. Dans cette hypothèse, les droits de propriété du premier gratifié sont consolidés et passe alors à ses propres héritiers sauf si l’acte constatant la libéralité graduelle avait prévu que dans un tel cas les biens seraient donnés aux héritiers du second gratifié ou encore si un autre gratifié (= alternatif) avait été désigné par le donateur ainsi que cela résulte de l’article 1056 du Code civil.

II. La libéralité résiduelle

Il s’agit d’une double libéralité successive selon l’article 1057 du Code civil mais qui sera faite avec qu’une seule charge pesant sur le premier gratifié, charge de transmettre à sa mort les biens donnés à un second gratifié s’il n’en a pas disposé de son vivant. Le premier gratifié sera soumis uniquement à une obligation de transmettre mais ne sera pas soumis à une obligation de conserver comme le prévoit l’article 1057 du Code civil qui déclare qu’il peut être prévu dans une libéralité résiduelle qu’une personne sera appelée à recueillir ce qui subsistera du don ou du legs fait à un premier gratifié à la mort de celui-ci.

Au niveau des conditions applicables à la libéralité résiduelle, les bénéficiaires sont les mêmes prévus par les libéralités graduelles car l’article 1057 du Code civil renvoie aux conditions de la LG.

Dans le cas de la libéralité résiduelle, les pouvoirs du premier gratifié sont extrêmement important car il est tenu d’une obligation de transmettre et pas de conserver. Par conséquent, le premier gratifié pourra disposer librement des biens à titre onéreux. Il peut les aliéner et dans le cas qu’il dispose des biens dont il a été gratifié, les droits du second gratifié ne se reportent en aucun cas sur le produit de l’aliénation, ni même sur les biens qui seraient acquis en emploi ou remploi – Article 1058 alinéa 2.

De la même manière, il a le droit d’en disposer à titre gratuit, mais que par donation entre vifs mais en revanche, il ne pourra pas en disposer par voie testamentaire. Article 105 9 du Code civil qui déclare que le premier disposer par testament les biens donnés ou légués av titre résiduel.

La liberté résiduelle présente donc un intérêt limité car l’efficacité de cette libéralité va reposer entièrement sur le premier gratifié. S’il dispose complément des biens, il n’y aura plus rien à transmettre. La loi prévoit donc que le disposant pourrait en particulier imposer au gratifié une clause lui interdisant de disposer des biens entre vifs mais cette clause devra être prévue de manière expresse. Les droits du second gratifié sont acquis au décès du premier gratifié sauf stipulation contraire du disposant et s’il est décédé avant la libéralité sera caduque sauf s’il y a une stipulation contraire. Cela est pareil que la liberté graduelle.

SECTION 2 – LES DIFFÉRENTES LIBÉRALITÉS

Sous-section 1 – Les libéralités entre vifs

Ce qui caractérise les libéralités entre vifs, notamment les donations, c’est qu’elles produiront leurs effets du vivant du disposant. La donation est la pièce maitresse de l’anticipation successorale entre vifs. Elle permettra de gratifier son bénéficiaire du vivant du disposant et cette donation entre vifs lorsqu’elle empruntera la forme particulière de la donation partage, elle permettra là de réaliser véritablement une anticipation successorale puisqu’à la gratification proprement dite, on ajoutera le partage des biens donnés.

Paragraphe 1 – La donation

Art 894 du Code civil prévoit que la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose au profit du donataire qui l’accepte. La donation sera constituée dans un élément matériel et l’élément intentionnel. Il y a toutefois des règles spécifiques concernant la forme et le fond, conditions de la validité, dont dépendront les effets de la donation.

Sous-paragraphe 1 – Les conditions de la donation

A. Les conditions de forme

La donation est soumise à l’exigence de la forme authentique parce que la donation, étant un acte gratuit, peut se révéler dangereux à la fois pour le disposant mais aussi dangereux pour les tiers qu’il s’agisse des créanciers du disposant ou qu’il s’agisse des ayant-causes du disposant (ses héritiers). Le notaire sera donc investi d’un rôle de contrôle et de conseil qui sera essentiel sur l’utilisation des donations. La donation devra donc être nécessairement passée par acte notarié à peine de nullité – Art 931 du Code civil. La donation est donc un contrat solennel qui devra être reçu par le notaire lui-même. L’intervention du notaire permettra d’éclairer le disposant sur les conséquences de son acte. Il est fondamental que le donateur, dès lors que par une donation, se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée au profit du donataire, qu’il engage lui-même son avenir, et d’autre part, l’intervention du notaire est essentielle car elle permettra le respect des règles successorales notamment celles liées à la protection de la réserve. Le non-respect de cette condition de forme sera entachée d’une nullité absolue qui est en principe, insusceptible de confirmation – Article 133 9 du Code civil, sous réserve d’une confirmation possible de par des héritiers ou ayant-causes du donateur – Article 1340 du Code civil.

Puisque la donation est un contrat, elle devra obligatoirement être acceptée par le donataire et cette acceptation devra être expresse. Cette acceptation figurera soit dans l’acte de donation lui-même ou alors, intervenir dans un acte postérieur mais qui sera également un acte authentique, la seule condition posée dans ce cas étant que cette acceptation qui n’est pas concomitante à l’acte de donation doit intervenir du vivant du donateur sous-réserve de ce qui a été dit à propos des libéralités graduelles et résiduelles. L’acceptation de la donation pourra être rétractée mais c’est la règle du parallélisme de forme, et devra donc se faire par acte authentique.

Les exceptions à l’exigence de l’acte notarié :

L’existence de la forme authentique de la donation sera écartée dans 3 cas :

(i) Le don manuel

Il va consister de la remise d’une chose de main en main. Dans ce type de don, c’est cette tradition qui constitue la forme requise à la validité de la donation. Le don manuel comme un contrat réel. Il y a dépouillement actuel et irrévocable et la dépossession irrévocable sera garantie par la tradition de remise de main à la main. Article 2276 du Code civil. Comme c’est la tradition réelle qui rend la donation parfaite, il semble logique de dire que le don manuel ne pourra porter que sur un bien mobilier et un bien corporel. Ceci étant, la jurisprudence adopte une position relativement souple et admet de qualifier de don manuel un virement de somme d’argent ou un virement de titre dématérialisé. Le don manuel sera soumis en tant que donation au régime juridique des donations.

(ii) La donation déguisée

C’est la donation qui aura l’apparence d’un contrat d’une autre nature qu’une donation, généralement un contrat à titre onéreux qui dissimule un acte gratuit. Concrètement l’acte effectif (la donation) est déguisé en un acte apparent d’une autre nature. Les éléments de la donation seront réunis car la donation sera constituée dans son élément matériel (le transfert de la propriété) et dans son élément intentionnel (la volonté de gratifier le bénéficiaire). Ex. la vente sans paiement de prix où le vendeur donnera quittance de paiement du prix sans l’avoir reçu. Dans le cas la donation déguisée, sur le plan de la forme, l’acte devra respecter les exigences de forme applicables à l’acte dont il a pris l’apparence.

En revanche, sur le fond, cet acte sera soumis aux conditions de la donation puisque la donation correspond à la véritable nature de l’acte entre les parties, et par conséquent, l’acte sera nul dans le cas où il y aura violation d’une règle de fond de donation, qu’il s’agisse des règles des incapacités ou qu’il s’agisse de l’irrévocabilité.

(iii) La donation indirecte

Dans ce cas, c’est une technique autre que la donation qui sera employée mais ayant la même finalité que la donation. L’acte apparent correspondra à l’acte effectif et il n’y aura pas nécessairement la volonté de dissimuler la libéralité. Concrètement, la donation résultera de l’accomplissement d’un acte juridique déterminé qui n’est pas une donation ex. la remise de dette.

B. Les conditions de fond.

La donation est irrévocable – Art 931 du Code civil. Ce principe d’irrévocabilité interdit au donateur de reprendre le bien donné et l’objectif poursuivi par cette règle est d’éviter toute forme de chantage que le donateur pourrait exercer sur le donataire. Elle s’appliquera aux dons manuels, déguisés et indirects. La seule exception réside dans la donation de biens à venir entre époux, faite entre époux durant le mariage – Article 1096 alinéa 1 du Code civil.

Pour garantir l’irrévocabilité de la donation, le législateur interdit certaines clauses qui pourraient indirectement remettre en cause ce principe d’irrévocabilité. 3 clauses sont concernées par l’interdiction :

(i) Art 944 du Code civil – Prévoit que toute donation entre vifs faite sous des conditions dont l’exécution dépend de la seule volonté du donateur sera nulle. Une donation sera donc nulle toutes les fois que des conditions imposées à son exécution dépendront uniquement du testateur, ce qui correspond à l’interdiction dans les donations des conditions potestatives étant précisé que la jurisprudence va exclure non seulement toutes les conditions purement potestatives (dépendant de la seule volonté du donateur) mais aussi les conditions simplement potestative (dépendant de la volonté du donateur mais aussi d’un tiers ou d’un évènement extérieure).

(ii) La clause qui portera sur la charge pour le donataire de payer les dettes futures du donateur. Cette hypothèse est visée à l’article 945 du Code civil et l’exclusion de ce type de clause est justifiée par le fait qu’on pourrait supprimer la libéralité ou diminuer la valeur tout simplement en contractant des dettes.

(iii) Article 943 du Code civil – Concerne l’exclusion des donations des biens à venir sous réserve de celles autorisées entre époux. 2 catégories de biens sont visées, notamment ceux dont le donateur n’a aucun droit au moment de la donation, ou encore ceux qu’il laisserait à son décès. Ceci étant interdit parce que le donateur pourrait anéantir la donation en ne faisant pas l’acquisition des biens concernés ou encore, anéantir la donation des biens à son décès, en les dispersant avant son décès.

Exception : Clause admise, c’est la clause admettant le droit de retour conventionnel. C’est un droit expressément autorisé par la loi – Article 951 du Code civil. C’est un droit qui pourra être prévu soit dans le cas du prédécès du donataire soit dans le cas du prédécès du donataire et ses descendants. Ce droit de retour conventionnel ne peut profiter qu’au donateur seul. Pour garantir l’efficacité de ce droit de retour conventionnel, lorsqu’il y aura un droit de retour conventionnel, cet acte de donation sera très souvent assorti d’une clause d’interdiction d’aliéner et d’hypothéquer durant la vie du donateur.

Sous-paragraphe 2 – L’exécution des donations

Dès lors que la donation aura été valablement conclue, elle aura vocation à s’exécuter entre les parties et sera opposable aux tiers dès lors que les formalités qui seraient requises auront été accomplies. La donation est un contrat unilatéral et c’est sur le donateur que repose l’obligation principale au niveau de la donation. Toutefois, compte tenu des particularités des donations, notamment des donations avec charge, il pourra avoir également des obligations à la charge du donataire. De manière plus précise, les obligations du donateur se présentent de la manière suivante :

Puisque la donation consiste dans le transfert d’un bien ou d’un droit, l’obligation du donateur est de transférer le bien ou le droit, mais à l’inverse de ce qui se passe au niveau des contrats à titre onéreux, la seule garantie due ici par le donateur, sera la garantie d’éviction contre son fait personnel, mais il ne sera pas soumis à la garantie d’éviction de fait des tiers ou la garantie des vices cachées puisque la donation est à titre gratuit. Le risque sera celui d’un manque à gagner. Au niveau des obligations du donataire, ses obligations existeront lorsqu’il y aura des charges prévues dans la donation auquel cas il sera tenu de les exécuter et au delà de cette obligation, le donataire devra faire preuve d’une sorte de reconnaissance à l’égard du donateur.

Sous-paragraphe 3 : La révocation des donations

Art 953 du Code civil concernant les hypothèses d’inexécution des charges, ingratitude, refus d’aliments ou encore pour survenance d’enfants.

(i) La révocation pour inexécution des charges :

La révocation est judiciaire – art 956 du Code civil. Sauf si une clause de la donation avait prévu qu’elle aurait lieu de plein droit et cette solution qui n’est pas inscrite à l’article 956 a été dégagée par la jurisprudence qui dès lors qu’il s’agit d’une clause dérogatoire à la loi et au droit commun exige que la clause exprime clairement la volonté des parties de rendre inutile l’intervention du juge. Les effets de cette révocation pour inexécution des charges sont prévus à l’article 954 du Code civil. La révocation jouera de manière rétroactive et par conséquent les biens ou droits qui étaient compris dans la donation devront revenir au donateur libre de toutes charges et hypothèques conclus du chef du donataire. Les effets doivent être envisagés entre les parties et entre les tiers.

Dans le rapport entre les parties (donateur et donataire), dès lors qu’il y aura révocation, le donataire sera tenu de restituer les biens ou droits au donateur et dans l’hypothèse où les biens auraient péri, il y aura lieu à restitution en valeur.

A l’égard des tiers, dès lors que la révocation est rétroactive, elle se répercute nécessairement sur les actes de disposition faits par le donataire et les droits consentis au profit des tiers par ces dispositions seront anéantis. Le seul tiers qui sera protégé est le possesseur de bonne foi grâce à l’application de la règle de l’article 2276 « en fait de meubles, possession vaut titre ».

(ii) La révocation pour ingratitude

Elle est nécessairement judiciaire et n’a pas d’effet rétroactif – Art 958 du Code civil – et ne joue que dans des cas limitativement énumérés. Ce cas de révocation présente un intérêt particulier depuis la reforme du divorce où les conditions de révocabilité des donations ont été modifiées.

(iii) La révocation au cas où le donataire refuse des aliments au donateur

L’action doit être intentée dans un délai d’un an à compter du jour où le fait constitutif d’ingratitude a été commis ou a été connu du donateur.

(iv) La révocation pour survenance d’enfant

Elle ne peut jouer que dans l’hypothèse où le donateur n’avait pas d’enfants ou de descendants vivants au jour de la donation. En revanche, l’existence d’un enfant simplement conçu à l’époque de la donation n’est pas prise en compte selon l’article 961 du Code civil. Il faut encore que le donateur ait par la suite un enfant vivant et viable, ou qu’il adopte un enfant dans le cadre d’une adoption plénière. La particularité de cette cause de révocation pour survenance d’enfant est que depuis la loi de 2006, cette cause de révocation de joue pas de plein droit et elle doit avoir été nécessairement prévu dans l’acte de donation.

Paragraphe 2 – La donation partage

Prévu à l’article 1075 Code Civil, c’est une opération familiale qui vise à préparer la succession du donateur qui repartit de son vivant tout ou parti de son patrimoine entre tous ses héritiers présomptifs ou certains d’entre eux, de manière égale ou non. Sera qualifié d’héritier présomptif la personne qui aura vocation à venir à la succession du disposant dans l’hypothèse ou celui-ci décéderait le jour de l’acte.

Dès lors que la Donation Partage constitue un partage anticipé des biens du disposant, le partage doit être effectué au profit des héritiers présomptifs. L’intérêt de la donation partage est que c’est un instrument privilégié de l’anticipation successoral qui va permettre au disposant d’éviter les conflits entre ses héritiers lors de la répartition des biens successoraux. La donation partage était, jusqu’en 2006, réservée aux descendants du disposant. Depuis la loi de 2006, la donation partage peut se décliner de différentes manières afin de pouvoir favoriser l’insertion des jeunes générations dans la vie (la donation partage transgénérationelle) soit pour favoriser la transmission d’une entreprise familiale au profit d’une personne qualifiée, soit enfin pour permettre la Donation Partage dans les familles recomposées dans le cadre de donation partage conjonctives.

Conditions de la donation partage:

4 points méritent d’être soulignés :

Qui peut faire une Donation Partage ?

Qui peut bénéficier de la Donation Partage ?

Quels sont les biens ?

Effets de la Donation Partage.

(i) Qui peut faire une donation partage

Depuis la loi de 2006, toute personne peut faire une Donation Partage au profit de ses héritiers présomptifs et il ne s’agit plus uniquement de réserver les Donation Partage aux ascendants en faveur de leurs descendants. Le disposant n’est pas nécessairement un ascendant.

(ii) Qui peut y bénéficier

Avant 2006, c’étaient les enfants et petits-enfants, alors qu’aujourd’hui, la Donation Partage peut intervenir au profit de bénéficiaires autres que les descendants. Elle va pouvoir profiter inclure un tiers ou encore à des descendants de degrés différent (dans le cas d’une Donation Partage transgenerationelle)

Des bénéficiaires autres que les descendants :

Concrètement, depuis la reforme, puisque tous les héritiers présomptifs du donateur i.e. ceux qui seraient effectivement ses héritiers au jour de l’acte peuvent bénéficier d’une Donation Partage. Elle pourra donc être faite au profit de frères et sœurs, neveux et nièces, conjoint survivant, parents et grands-parents.

La Donation Partage peut inclure un tiers

Une Donation Partage pourra être faite au profit d’un tiers à certaines conditions, notamment lorsque faite également à des héritiers présomptifs i.e. le tiers va s’ajouter aux héritiers présomptifs et dès lors qu’elle portera sur une entreprise individuelle à caractère industrielle, commerciale, agricole, artisanale ou libérale voire même depuis 2007, que la Donation Partage porte sur des droits sociaux portant sur une telle entreprise. Il faut que le donateur ait une fonction de dirigeant dans l’entreprise. Dans le cas de la Donation Partage incluant un tiers, ce dernier ne pourra que les biens affectés à l’exploitation de cette entreprise qu’il s’agisse de biens corporels ou incorporels.

La Donation Partage à des degrés différents (la Donation Partage transgénérationelle)

Prévu à l’article 1075-1 du Code civil au terme duquel il est possible de sauter une génération en faisant une Donation Partage au profit des petits-enfants malgré la présence d’enfants, étant précisé que ces enfants peuvent soit passer la tour soit figurer parmi les donataires. Cette Donation Partage supposera l’accord des enfants dans l’acte de donation conformément aux arts 1078-4 et 1075-5 combinés.

(iii) Les biens objet de la Donation Partage

La Donation Partage ne peut porter que sur les biens présents au jour de l’acte, les biens à venir sont exclus. Concernant l’origine des biens donnés et de leur importance.

Concernant l’origine des biens donnés, c’est le renvoi à une Donation Partage particulière qu’est la Donation Partage conjonctive. Il y aura Donation Partage conjonctive lorsque 2 époux quelque soit leur régime matrimonial procèdent ensemble dans un même acte à la Donation Partage de tout ou partie de leur bien qu’il s’agisse de biens propres, personnels ou communs.

Avant la réforme, cette Donation Partage conjonctive existait mais ne pouvait intervenir qu’entre parents et successibles, ce qui avait pour conséquence que les enfants d’un premier lit de l’un des époux ne pouvaient pas participer à une Donation Partage conjonctive car c’était uniquement entre parents et enfants successibles.

Depuis la reforme de 2006, la loi admet la possibilité de faire une Donation Partage conjonctive en présence d’enfants de lits différents. Les biens seront alors nécessairement partagés selon leurs origines respectives et les enfants non-commun ne pourront être gratifiés que par leur auteur soit au moyen de biens propres soit au moyen de biens communs mais dans ce dernier cas, l’autre époux devra intervenir à l’acte pour consentir à la donation sans prendre la qualité de co-donateur car ce n’est pas son successible. L’époux donateur devra récompense à la communauté à hauteur de la fraction des biens communs donnés.

La Donation Partage ne porte pas nécessairement sur l’intégralité des biens du disposant, elle peut être que partielle. Le reste des biens sera partagé au décès selon les règles légales au moment de la liquidation de la succession.

(iv) Les effets

La Donation Partage, dès lors qu’elle réalise un partage anticipé aura un caractère définitif d’un partage et in sera interdit de remettre en cause une Donation Partage pour cause de lésion – Article 1075-2 du Code civil. La seule action possible par rapport à cette Donation Partage sera l’action en réduction – Article 1077-1 ex. un héritier ne participe pas à cette Donation Partage. Il pourra exercer une action en réduction.

Les donataires deviennent attributaires immédiatement et irrévocablement (sous réserve des causes de révocations vues pour la donation) des biens qui sont compris dans leur lot. A l’ouverture de la succession du disposant, les biens seront exclus de la succession. Il n’y aura pas besoin de les rapporter à la succession dans le cas où tous les héritiers réservataire auront concouru à la succession partage.

CHAPITRE 2 : Les testaments

C’est ce que prévoit l’article 895 du Code civil « acte par lequel le testateur dispose pour le temps où il n’existera plus de tout ou partie de ses biens et ses droits et qu’il peut révoquer ». C’est donc l’acte par lequel s’expriment les dernières volontés du testateur celles qui ont trait à ce qui se passera après son décès.

La définition qui vise des dispositions patrimoniales doit être élargie puisque le testament peut également comporter des dispositions extra patrimoniales telles que la désignation d’un tuteur pour ses enfants mineurs (= article 403 du Code civil) ou la reconnaissance des enfants.

C’est un acte juridique unilatéral. C’est un acte de volonté individuelle qui est soumis à un formalisme particulier.

Il existe 3 formes de testament :

· le testament olographe,

· le testament authentique ou public,

· le testament mystique.

Section 1 : Le testament olographe

C’est ce que prévoit l’article 970 du Code civil « le testament olographe ne sera point valable s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur ». Il n’est assujetti à aucune autre forme.

Le testament olographe est la forme la plus couramment utilisée en pratique. Il préserve le secret des volontés du testateur notamment à l’égard des bénéficiaires. Il permet à tout moment de modifier selon les volontés du testateur et il ne coûte rien puisqu’il ne nécessite pas le recours au notaire.

Mais, il existe certains inconvénients : son rédacteur risque d’être influencé par d’autres personnes et d’autre part le testateur risque de ne pas respecter correctement les conditions imposées par la loi. Enfin, ce testament n’est soumis à aucunes règles de conservation et par conséquent, il peut très bien ne pas être trouvé, voir disparaître à l’initiative de l’héritier qui en aurait connaissance et qui serait défavorisé.

Ce testament doit être manuscrit, daté et signé.

I. La forme manuscrite du testament olographe

C’est ce que prévoit l’article 970 du Code civil « le testament olographe doit être écrit entièrement de la main du testateur ».

Donc 2 conditions :

· le texte doit être écrit à la main

· il doit être de la main du testateur

A.Un texte manuscrit

La forme manuscrite est une formalité substantielle du testament olographe. C’est elle qui permet de s’assurer de la volonté du testateur et d’autre part de son identité. L’exigence de la forme manuscrite exclue donc le recours au texte dactylographié. Il est peut important que le testateur appose une mention manuscrite aux pieds des feuilles numérotés, datées et signées et peu importe également que le testateur a également visé d’une formule lu et approuvé.

L’écrit numérique est exclu. De la même manière, sera exclu le testament verbal ou un testament audiovisuel enregistré de manière numérique et manuscrite.

Le testament doit être manuscrit mais l’écriture manuscrite ne fait évidemment pas obstacle à l’utilisation d’un objet matériel quelconque (= stylo…) dès lors qu’il reproduit une écriture humaine. Tout les supports son admis : support papier, parchemin, tissus, lettre missive dès lors que le testateur avait l’intention de faire son testament.

S’il y a plusieurs feuilles, il faut un lien matériel et intellectuel suffisant pour considérer l’ensemble en un seul et même acte.

B. Un texte écrit de la main du testateur

Un seul mot écrit d’une main étrangère entraîne normalement la nullité du testament. Ce principe comporte, néanmoins, un tempérament tiré de la jurisprudence de la main assistée ou guidée.

La jurisprudence admet ainsi que le testateur puisse se faire aider lorsqu’il éprouve une difficulté à écrire dès lors qu’il aura conscience de ce qu’il écrit. Ce sera le cas notamment lorsqu’un tiers assiste le testateur affaiblit par l’âge ou par une infirmité.

Dans l’hypothèse de la main guidée, le testament est écrit de la main du testateur aidé physiquement par un tiers qui lui a tenu la main et ce testament est valable sous réserve que du fait de cette assistance le testament ne soit pas l’expression de la volonté propre du signataire. L’important est que cette assistance doit être purement matérielle et non pas intellectuelle.

Si les héritiers veulent contester l’écriture ou la signature du testateur, le testament olographe étant un acte sous seing privé, il suffira qu’ils déclarent qu’ils ne reconnaissent pas l’écriture du testateur ou sa signature en se prévalant de la présomption inscrite à l’article 1323 alinéa 2 du Code civil qui prévoit que les héritiers peuvent se contenter de déclarer qu’ils ne connaissent point l’écriture ou la signature de leur auteur. L’intérêt de cette présomption est que la charge de la preuve est renversée et ce sera alors à celui qui prétend que le testament est valide de démontrer que le document est bien de la main du défunt.

C. Les modifications

Il peut arriver que le texte initial du testament soit modifié par des ratures, des surcharges ou des renvois. Dans ce cas, se pose alors la question de la validité de ses modifications et de la validité du testament.

Les modifications pour être prises en compte doivent émaner de la main du testateur ce qui est d’ailleurs présumé. S’agissant ensuite de la question de leur validité, celle-ci dépend du moment où ses modifications ont été faites.

Les modifications contemporaines à la rédaction de l’acte sont valables : le moment de leur réalisation relève du pouvoir souverain des juges. Ces modifications n’ont pas besoin d’être datées et approuvées par une signature distincte.

Si ces modifications sont postérieures à la rédaction de l’acte :

· Si ces modifications ne font que rectifier une erreur de rédaction ou apporter une précision, elles sont valables dès lors qu’elles ne modifient pas le fond du testament et elles n’ont besoin ni d’être datées, ni d’être approuvées par le signataire.

· Si ces modifications touchent au fond du testament et traduisent une disposition nouvelle, elles ne remettent pas en cause la validité du testament mais elles seront réputées non écrites sauf si elles ont été datées et signées de manière manuscrite par le testateur parce qu’elles s’analysent alors comme un codicille i.e. un ajout au testament qui n’est valide que s’il répond aux conditions formelles du testament olographe.

II. La signature manuscrite

C’est un élément essentiel, c’est elle qui marque la volonté du testateur de s’approprier les termes du testament et c’est ce qui garantit l’identité du testateur. C’est une formalité substantielle à laquelle il ne peut être supplée.

La notion de signature est entendue de façon large puisque l’on admet que la signature par le simple prénom était valable. Solution logique et indispensable puisque l’on admet qu’un testament puisse être fait dans une lettre missive. Ce qui a de l’importance, c’est que l’on puisse identifier avec certitude sur l’auteur de l’acte. La signature doit se trouver au pied du testament à la suite des dispositions testamentaires, étant sensée clore l’acte.

III. La date manuscrite

Prévue par l’article 970 du Code civil, la date permet de vérifier la capacité du testateur et c’est elle qui permet également de trancher le conflit éventuel entre les différents testaments qui pourraient émaner du testateur.

Cette date doit être complète jour, mois, année. Elle peut être mentionnée en chiffre ou en lettre voire en un mélange des deux.

La jurisprudence a admis récemment qu’un testament où la date était incomplète dès lors que les éléments extrinsèques au testament corroborés par des éléments intrinsèques au testament établissaient que le testament avait été rédigé au cours d’une période déterminée pendant laquelle le testateur était lucide et qu’aucune révocation du testament n’était intervenue. Voire même l’absence de date selon une jurisprudence de 2007.

Concernant le problème de l’exactitude de la date, la date du testament fait foi par elle-même jusqu’à preuve du contraire. C’est donc à ceux qui contestent la date d’en rapporter la preuve, preuve qui peut se faire par des recours à des éléments extrinsèques lorsqu’ils corroborent des éléments intrinsèques du testament.

Section 2 : Le testament authentique

C’est ce que prévoit l’article 971 du Code civil. Le testament par acte public est reçu par deux notaires ou par un notaire et deux témoins. Cette forme de testament permet d’éviter tout risque d’erreur et de bénéficier de la forme de l’acte authentique. Il peut être consenti par toute personne, blessée, malade, aveugle ou incapable d’écrire.

Mais, il existe quelques inconvénients à ce type de testament :

· frais de rédaction de l’acte

· il comporte un risque de divulgation car lorsqu’il est fait par un notaire devant deux témoins, ces témoins eux ne sont pas soumis au secret professionnel. Le risque sera levé lorsque le testament sera reçu par deux notaires.

I. Les personnes intervenant à l’acte

C’est ce que prévoit l’article 971 du Code civil « les personnes qui interviennent lors d’un testament authentique sont le testateur lui-même, le ou les notaires et les deux témoins ».

S’agissant du testateur, il doit être présent car le testament authentique présente la particularité d’être dicté par le testateur au notaire, cette forme de testament n’est pas accessible aux personnes qui n’ont pas l’usage de la parole.

S’agissant du notaire : soit deux soit un seul mais avec deux témoins. Les notaires ne doivent pas avoir d’incapacité et les témoins doivent être majeurs, capables, jouir de leurs droits civils et un sourd ou un aveugle ne peut pas être témoin. Ne peuvent pas être témoin non plus les légataires, ni le notaire qui reçoit l’acte.

II. La procédure

C’est ce que prévoit l’article 972 du Code civil « Si le testament est reçu par deux notaires, il leur est dicté par le testateur ; l’un de ces notaires l’écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement. S’il n’y a qu’un notaire, il doit également être dicté par le testateur ; le notaire l’écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement. Dans l’un et l’autre cas, il doit en être donné lecture au testateur. Il est fait du tout mention expresse ».

Dans les deux cas, il doit y avoir fait lecture au testateur et il en sera fait mention. La dictée est une formalité essentielle, elle doit être verbale et spontanée de la part du testateur. Par conséquent, sera nul le testament où le testateur ne fait que répondre aux questions du notaire ou le testament qui aurait été rédigé intégralement par le notaire.

Le testateur a le droit d’avoir un brouillon. Il suffit que la rédaction reproduise le sens de ce que voulait le testateur. La loi veut que le testateur exprime lui-même sa volonté mais n’interdit pas au notaire d’employer une rédaction qui sans changer le sens de cette volonté la rende plus claire et compréhensible.

L’intérêt de l’intervention du notaire réside précisément dans la mise en forme correcte du testament et dans la traduction des termes juridiques appropriés des paroles du testateur.

Section 3 : Le testament mystique

C’est ce que prévoient les articles 976 et suivants du Code civil. Il représente une formule intermédiaire entre le testament olographe et le testament authentique.

Avec le testament mystique, celui qui sait au moins lire va pouvoir exprimer ces dernières volontés. Le testateur doit obligatoirement savoir lire, cette exigence est prévue expressément par l’article 978 du Code civil. Cela exclue donc les aveugles mais aussi les analphabètes.

C’est un testament sous seing privé qui est remis, cacheté par le testateur en présence de deux témoins à un notaire qui va dresser un acte de souscription qui sera soit conservé par le notaire soit remis au testateur.

Il existe des conditions de forme : le testament doit être écrit mais pas nécessairement manuscrit. Il n’est pas nécessaire qu’il soit écrit par le testateur lui-même, il a pu le dicter.

L’article 976 du Code civil prévoit que le testateur va présenter son testament au notaire et à deux témoins. Testament qui soit est déjà clos, cacheté et scellé ce qui en garantie la confidentialité. Soit non clos auquel cas il va le faire clore, cacheté et scellé par le notaire en présence des témoins. Le testateur va déclarer alors que le contenu est son testament, qu’il est signé par lui, qu’il a été écrit par quelqu’un d’autre.

Dans l’hypothèse où les formalités ne seraient pas remplies, il n’y aura pas forcément nullité mais possibilité de requalifier en testament olographe si les conditions sont respectées.

Section 4 – Le Testament international

Il est issu de la Convention de Washington de 1973 qu’a ratifiée la France en 1994. La loi du 23 juin 2006 modifiera les conditions.

Paragraphe 2 – Le régime juridique des testaments

Section 1 – Le contenu

Les dispositions testamentaires contenues dans le testament constituent les legs. La définition du legs est que c’est la disposition testamentaire qui contient la transmission de biens à son bénéficiaire.

L’objet du legs est d’exhéréder un héritier légal i.e. le priver de droit sous réserve que ce ne soit pas un héritier réservataire. Il peut aussi augmenter la part d’un autre héritier ou encore appeler à la succession une personne tierce qui n’aurait aucune vocation successorale.

Il faut toutefois respecter les dispositions d’ordre public.

La loi distingue 3 sortes de legs :

Article 1002 du Code civil – Le legs universel, le legs à titre universel et le legs à titre particulier.

Le legs est universel lorsque le testateur donne à une ou plusieurs personnes l’universalité des biens qu’il laissera à son décès. Le légataire universel qui acceptera le legs recueillera alors également le passif et répondra indéfiniment des dettes et charges qui dépendent de la succession.

Le legs à titre universel – Article 1010 alinéa 1 du Code civil – Celui par lequel le testateur va léguer une quote-part des biens dont la loi lui permet de disposer telle qu’une moitie ; sera aussi un legs universel le fait de disposer de tous ses immeubles (une catégorie de biens) voire une cote part de tous ses immeubles ou de tous ses biens meubles. Le légataire répondra du passif à proportion de la part reçue.

Le legs à titre particulier est défini par défaut – Article 1010 al dernier. Tout autre legs est à titre particulier. Ce legs correspondra dont à des biens déterminés et ainsi, le légataire à titre particulier ne sera pas tenu des dettes successorales – Article 1024 car il ne reçoit qu’un droit ou bien particulier.

Le régime juridique des legs et qu’ils ne peuvent être délivrés qu’à la mort du disposant. Les effets ne se produisent qu’à la mort du disposant, on va ainsi admettre à l’inverse des règles de donations entre vifs, que jusqu’au décès du testateur, le legs ne constitue qu’un projet et ainsi, jusqu’au décès, il pourra être révoqué ou modifié. L’article 895 prévoit qu’un testament peut être révoqué. La révocation peut intervenir soit à l’initiative du testateur ou judiciaire.

Lorsque la révocation intervient à l’initiative du testateur, elle pourra être soit expresse soit tacite. L’article 1035 du Code civil va venir préciser les modalités de cette révocation à l’initiative du testateur. Ce texte dispose que les testaments ne pourront être révoqués en tout ou partie que par un testament postérieur ou par un acte devant le notaire portant déclaration du changement de volonté. Cette révocation est donc soumise à un certain formalisme car elle va nécessiter soit un testament postérieur soit un acte passé devant le notaire. Dans le cas d’un testament postérieur, il n’est pas exigé de parallélisme de forme et ainsi, un testament authentique peut être modifié par un testament olographe. Il y aura révocation expresse lorsque le nouveau testament contiendra expressément la volonté de révoquer l’ancien testament. En revanche, il y aura révocation tacite lorsqu’en l’absence de volonté de révocation expressément manifestée, le nouveau testament sera incompatible avec le précédent. Cette règle est inscrite à l’article 1036 du Code civil – « les testaments postérieurs qui ne révoqueront pas d’une manière expresse les précédents, n’annuleront dans ceux-ci que celles des dispositions y contenues qui se trouveront incompatibles avec les nouvelles ou qui y seront contraires ». Egalement si les biens auront été vendus par le testateur ou s’il a détruit le testament.

La révocation judiciaire ne peut intervenir qu’à l’initiative des héritiers car de son vivant, le testateur peut révoquer son testament de manière discrétionnaire.

Selon l’article 1046 du Code civil, il y a un renvoi à l’article 1044 et également à l’article 955 qui autoriseront la demande en révocation testamentaire et ces motifs concernent les hypothèses de révocation de donations entre vifs. Les seules causes qui ne pourront être exercées sont le refus d’aliments et la survenance d’enfant.

Les legs peuvent être révoques mais peuvent aussi être caduques et la caducité résultera notamment lorsque le légataire sera décédé ou lorsque le l’objet ne peut plus être transmis au légataire parce qu’il aura été détruit.