Droits de l’homme, écologie et droit de l’environnement

DROIT DE L’HOMME ET DROIT DE L’ENVIRONNEMENT

  • – ce droit à l’environnement a été reconnu au plan international et dans de nombreux pays étrangers
  • – en France, on a d’abord eu la loi Barnier du 2 février 1995, qui reconnait chacun le droit à un environnement sain
  • – 10 ans après, on a la consécration constitutionnelle de ce droit à l’environnement avec la charte de 2004

section 1 Les sources juridiques du droit de l’homme et de l’environnement

  • 1 – Au plan international et européen

=> De nombreuses déclarations consacrent au plan international la reconnaissance d’un droit de l’homme à l’environnement

  • déclaration de Stockholm de 1972 : la plus importante : « homme a un droit fondamental à la liberté, à l’égalité, et à des conditions de vie satisfaisante dans un environnement dont la qualité lui permettent de vivre dans la dignité et le bien-être
  • la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte de Nairobi) du 28 juin 1981 : proclame dans son article 24 : tous les peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global propice à leur développement
  • le Protocole de San Salvador du 17 novembre 1988 : qui en fait un droit individuel : « toute personne a le droit de vivre dans un environnement salubre »

– enfin, selon l’art 1 de la Déclaration de Rio (1992), les êtres humains ont droit à une vie saine

* au niveau européen :

– la CEDH ne consacre pas en tant que tel un droit de l’homme à l’environnement

=> Pas de disposition spécifique à l’environnement

– mais plusieurs décisions de la Cour EDH ont reconnu une atteinte à un droit lié indirectement à la protection de l’environnement

– ex : en 1991, la Cour déclare que la protection de l’environnement est manifestement un dessein légitime conforme à l’intérêt général

– ensuite, dans l’arrêt Zander (1993), la Cour qualifie le droit de jouir d’une eau non polluée comme un droit de caractère civil auquel s’applique l’article 6-1 (qui protège le droit à la propriété ??!)

=> La Cour reconnaît ainsi à un propriétaire un droit subjectif à un environnement sain

– dans l’affaire Lopez-Ostra c/ Espagne (1994), la Cour EDH affirme qu’une nuisance grave constitue une ingérence dans la vie privée qui viole l’article 8 de la convention

– pour terminer, depuis l’arrêt Oneryildiz, une atteinte à l’environnement peut violer le droit à la vie de l’article 2 de la CEDH

– enfin, on constate également qu’il y a la reconnaissance d’un droit d’assistance ou d’ingérence écologique

(1) d’abord, lorsqu’il y a une catastrophe écologique, l’organisation des secours repose sur des accords de coopération en matière de sécurité civile ou de lutte contre la pollution des mers par les hydrocarbures

=> Une Convention de Londres de 1969 prévoit l’organisation de ces secours

(2) ensuite, à l’image de l’assistance humanitaire de l’ONU en cas de catastrophe humanitaire, on a pu prôner une assistance écologique avec des casques verts intervenants d’office, sans être requis par l’Etat national, spécialement dans des cas de risque écologique majeur

(3) l’initiative de certaines associations d’environnement de créer des tribunaux internationaux non-officiels, chargés de juger des crimes écologiques

– cette initiative de ces associations relève aussi d’une ingérence ayant des objectifs médiatiques et pédagogiques

=> Ex : le tribunal international de l’eau en Hollande ; la Cour internationale d’arbitrage et de conciliation sur l’environnement, créée à Mexico en 1994

  • 2 – Dans les pays étrangers

– dans pratiquement tous les pays du monde, on a éprouvé le besoin d’insérer le droit de l’homme à l’environnement dans les constitutions

– d’abord, dans les pays communistes, la consécration constitutionnelle du droit de l’homme à l’environnement a été effectuée dès les années 1970

– ensuite, les démocraties occidentales ont également admis ce nouveau principe

=> Constitution de la Grèce en 1975, Constitution portugaise, etc.

– s’agissant de l’UE, 10 Etats-membres / 15 donnent une valeur constitutionnelle au droit de l’homme à l’environnement

  • 3 – La France

– en France se pose la question fondamentale des droits reconnus aux animaux, aux plantes, à la diversité biologique, et aux éléments naturels dans leur ensemble

– la protection de ces éléments exige qu’ils deviennent des sujets de droit

– or notre système juridique ne réserve les droits subjectifs qu’aux personnes, et non pas aux animaux ou aux choses

=> Encore aujourd’hui, les animaux, les plantes, etc., ne peuvent bénéficier de droits subjectifs

– la reconnaissance d’un droit subjectif à l’environnement a été suggérée dès le 11 mai 1970 par le rapport Armand

– ce rapport a été suivi de plusieurs propositions de lois constitutionnelles en 1975 et 1976, et de nombreuses déclarations d’intention par des hommes politiques

– de cette problématique découle une autre question : quel va être le contenu de ce droit à l’environnement ?

=> Il est très difficile de formuler concrètement le droit fondamental à l’environnement : droit de l’homme à l’environnement : un tel droit reste anthropocentrique

– or la protection de l’environnement ne concerne pas que l’homme : concerne aussi tous les êtres vivants et la biosphère

– pour résoudre ce premier problème, il était nécessaire de se fonder sur une définition large de l’environnement

=> Le droit à l’environnement concerne l’homme et les éléments de nature qui l’entourent, dans la mesure où ils forment un tout écologiquement indissociables

– donc le droit de l’homme à l’environnement, c’est essentiellement un droit de l’espèce qui protège à la fois l’homme et le milieu dans lequel il vit

– ce droit de l’homme à l’environnement, c’est aussi la reconnaissance d’un niveau minimum de jouissance des ressources communes

– concrètement, c’est le droit à l’eau et à l’air pur, c’est le droit au silence, c’est le droit d’accès à la faune, à la flore, au littoral, etc.

– 2è facette : le droit à l’environnement est accompagné d’une obligation, pour tous, de préserver les ressources naturelles

– effectivement, dès la loi de 1976 relative à la protection de la nature, a été consacré le devoir de chacun de veiller à la sauvegarde du patrimoine naturel

=> Corolaire du droit de l’homme à l’environnement

– après cette loi de 1976, la loi Barnier de 1995 élargit cette obligation en proclamant : « il est du devoir de chacun de veiller à la sauvegarde et de contribuer à la protection de l’environnement »

– problème : aucune sanction n’est prévue en cas d’atteintes aux droits et devoirs proclamés par la Charte constitutionnelle de l’environnement (aucune disposition répressive, aucune référence à la responsabilité pénale)

– or la proclamation de droits et devoirs ne peut avoir une réelle portée juridique que si elle est assortie de sanctions

– l’absence de sanction est paradoxale : on hisse ces droits et devoirs au sommet de la hiérarchie des normes (=> Protection renforcée), mais on ne prend même pas la peine de prévoir des sanctions…

– le constituant français aurait pu se référer à la constitution espagnole (qui prévoit des sanctions), ou à la constitution grecque…

SECTION 2 – La reconnaissance du droit des générations futures

– on part de la Charte de l’environnement

=> Droit nouveau à un environnement équilibré et respectueux de la santé

=> Cela concerne les générations présentes

– comment en arrive-t-on à une reconnaissance du droit des générations futures ?

=> Caractère irréversible des atteintes au milieu naturel et aux espèces animales et végétales

– les décisions publiques ou privées doivent systématiquement prendre en compte leurs effets directs et indirects sur le long terme

– c’est cette consécration juridique de la prise en compte du long terme qui est la reconnaissance du droit des générations futures

– ce droit des générations futures, c’est le devoir pour les générations présentes de protéger l’environnement sur le long terme, en préservant les biens du patrimoine commun

– ce droit des générations futures avait dans un premier temps déjà été évoqué dans la déclaration de Stockholm (1972)

– ensuite, le principe 3 de la déclaration de Rio (1992) mentionne les besoins relatifs à l’environnement des générations futures

– lors de la conférence de Rio, on avait pris en compte le futur comme étant un objectif visant à assurer un développement durable

– au plan national ?

– en matières de déchets nucléaires, c’est dans la loi du 30 décembre 1991, relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs qu’on trouve pour la première fois en droit français l’obligation de prendre en considération les droits des générations futures

=> Actuellement, L542-1 Code environnement

– par la suite, reconnaissance plus globale du droit des générations futures :

=> Art L110-1 II, issu de la loi Barnier, qui vise aussi les générations futures à l’occasion de la définition qu’il donne du développement durable

– enfin, dernier texte en date qui reconnaît ce droit : la Charte constitutionnelle de l’environnement, qui consacre l’obligation de tenir compte des générations futures (7è considérant)

SECTION 3 – La préservation du patrimoine commun

– ce concept est de plus en plus utilisé : il cherche à introduire un élément moral et juridique dans la conservation de l’environnement

– concrètement, il s’agit d’identifier des éléments de l’environnement, dont on veut assurer la conservation et la gestion en bon père de famille

– quelles sont les sources de cette préservation de ce patrimoine commun ?

– la Charte constitutionnelle de l’environnement proclame dans son 3è considérant que l’environnement est le patrimoine commun des êtres humains

– le droit internat de l’environnement a aussi consacré le concept de patrimoine pour des milieux qu’il est nécessaire de gérer, de préserver en commun

– le concept de patrimoine commun est auj. complété par le concept de biens publics mondiaux

– ex : décret du 22 août 2003 portant publication d’un accord entre le Gouvernement de la RP française et le Gouvernement du Royaume de Suède relatif à la création d’un groupe de travail international sur les biens publics mondiaux

6/03/06

SECTION 4 – Le développement durable et le principe de l’intégration de l’environnement

– le concept de développement durable est issu d’un rapport Bruntland « votre avenir à tous » de 1987

– ce concept était déjà contenu de manière implicite dans la déclaration de Stockholm de 1972

– ce concept sera la ligne de force de la déclaration de Rio

– le développement durable exprime l’idée que les ressources vivantes ne doivent pas être ponctionnées telles qu’elles ne puissent à moyen ou à long terme se renouveler

=> Il faut garantir la pérennité des ressources

– par extension, toute la politique de développement actuelle doit garantir qu’elle ne portera pas préjudice aux générations futures, ni aux ressources communes (eau, air, sols, espèce diversité biologique)

– ce concept est plutôt un objectif qu’un principe

– ce concept a été introduit par la loi Barnier du 2 février 1995 en droit français

=> Art L110-1 II Code environnement : donne la définition du développement durable reprise de celle de la déclaration de Rio

=> « le développement durable vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs »

– on constate que le développement durable est désormais également le fondement de la nouvelle politique d’aménagement du territoire comme le schéma national et le schéma régional d’aménagement et de développement du territoire qui fixent les orientations futures en matière d’environnement et de développement durable

=> Lois du 4 février 1995

– la Charte de l’environnement intègre le développement durable à double titre

=> Dans ses considérants (qui précèdent la Charte), et dans l’art 6 de la Charte, en tant qu’objectif des politiques publiques obligeant à prendre en compte la protection et la mise en valeur de l’environnement et à opérer une conciliation avec le développement économique et social

– les conditions de mise en œuvre sont variables

* d’après la déclaration de Rio de 1992 :

(1) il faut éliminer la pauvreté (principe 5)

(2) tirer pour l’avenir les conséquences du fait que les Etats reconnaissent qu’ils ont des responsabilités communes mais différenciées dans la dégradation de l’environnement (principe 7)

(3) réduire et éliminer les modes de production et de consommation non viables (principe 8)

(4) intégrer l’environnement dans toutes les autres politiques de développement

= intégration de l’environnement dans toutes les décisions et stratégies publiques et privées est une exigence fondamentale pour garantir le développement durable

* au niveau communautaire, le traité instituant la Communauté européenne (qui a été modifié par le traité d’Amsterdam, qui s’inspire du 5è programme d’action « vers un développement durable ») fait figurer parmi les principes que les exigences de la protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques et action de la communauté, en particulier de promouvoir le développement durable

– les Etats-membres sont chargés de la mise en œuvre

* au niveau de la France : le droit français est également soumis à l’exigence du développement durable

  • les travaux et projets d’aménagement qui nécessitent une autorisation ou une décision d’approbation ainsi que les documents d’urbanisme doivent respecter les préoccupations d’environnement

=> L122-1 Code de l’environnement.

  • la politique des transports doit tenir compte de la protection de l’environnement (loi orientation transport intérieur)
  • la politique agricole contribue à l’aménagement et au développement du territoire dans le respect de la protection de l’environnement : loi de 1995 sur la modernisation de l’agriculture

+ Loi de 1999 d’orientation agricole : la politique agricole prend en compte la fonction environnementale de l’agriculture en vue du développement durable

= l’ensemble des personnes publiques et des activités privées est soumis à une exigence de conditionnalité environnementale

=> Le développement durable est sous-entendu par plusieurs principes d’action environnementale