Fiscalité et formalisme des mutations et transmissions

Formalisme, mutations, et transmissions

C’est sans doute un des domaines les plus anciens avec la consommation. Il s’agit de taxer des actes, des opérations qui sont liées à une transmission patrimoniale ou à une opération juridique, un montage nécessitant un certain formalisme (enregistrement, publicité). C’est l’Etat lui-même qui impose ce formalisme.

La taxation revêt plusieurs formes : ça peut être un droit de timbre, un droit fixe (en général 125 euros) un taux proportionnel (2% par exemple) ou un système progressif. Ce sont des recettes importantes et habituelles.

Au niveau de l’actualité, le régime des successions est concerné : on trouve 2 pistes :

  • l’une communautaire : le 23 février 2005, Commission européenne a lancé un véritable débat public sur les successions transnationales : elle a publié un livre vert sur les successions transfrontalières : l’idée de la commission est de faciliter le règlement des successions : le but est d’aider au partage.

Les problèmes ne sont pas essentiellement fiscaux : le premier problème est celui de la loi applicable (conflit de lois). Ensuite, la juridiction compétente, puis la question des règles de compétences des autorités publiques et de certaines professions juridiques. Le quatrième problème est celui de la reconnaissance mutuelle des documents et des actes extrajudiciaires nécessaires au règlement d’une succession. (problème des testaments, actes notariés, actes administratifs.)

C’est le domaine le plus ancien qui est réglementé par les conventions. Le principe est en général celui de l’état de dernière résidence du défunt, dernier lieu de séjour.

Quand il y a une convention fiscale bilatérale, c’est ce principe qu’on est tenté d’appliquer. Le problème se pose lorsqu’il n’y a aucune convention fiscale.

  • La France elle-même est en train de réformer en partie son droit des successions et des libéralités (débat engagé au niveau parlementaire début 2006 : l’objectif est une réécriture complète du dispositif du code civil. Il y a des problèmes qui se sont posés notamment au niveau du PACS. Cette réforme française ne porte cependant pas sur la fiscalité (barème) mais sur le droit civil. La loi du 13 août 2004 prévoit la transmission notamment à titre patrimonial de la voirie routière de l’Etat au département, patrimoine historique (Etat aux collectivités territoriales) ou autres infrastructures : on a prévu qu’il s’agirait d’une mutation à titre gratuit exonérée de droits. Il convient de souligner deux phénomènes fiscaux distincts : il y a d’une part une fiscalité qui frappe certaines formalités qui sont liées à une volonté d’opposabilité ; il y a d’autre part une fiscalité qui frappe la mutation au regard de la valeur des biens.

NB : la loi de finances de 2006 a changé un certain nombre de choses notamment en matière de donations. En outre, le régime fiscal des plus-values a été totalement réformé par un projet de rectification de la loi de 2005. L’idée générale de ces réformes est de faciliter la transmission et peut être incité les plus vieux à transmettre plutôt qu’à garder. Ainsi, le droit fiscal s’adapte à la démographie française.

Résultat de recherche d'images pour "fiscalité locale"

  • 1 : Un triple dispositif en matière de formalités

Le système français est rarement réformé en profondeur mais par petites touches.

On a une loi du 26 septembre 1969 modifiée en 1983 pour les collectivités territoriales. A partir du 1er octobre 1970, on va se retrouver dans trois situations :

  • formalité fusionnée : une seule taxation/ opération en la matière
  • formalité d’enregistrement (ex : bail)
  • formalité de publicité foncière

2. La formalité fusionnée

L’article 647 du Code Général des Impôts exige l’enregistrement et la publicité foncière (publication au fichier immobilier).

Sont visées essentiellement les transmissions à titre onéreux de droits réels immobiliers (vente, adjudication, échange, apport en société). Ce dispositif a été étendu par la loi de finances pour 1999 pour les actes dit « mixtes » et qui concernent les cessions de meubles (meublants).

Sont exclues les décisions judiciaires, mutations à titre gratuit, baux de courte durée.

La publicité doit intervenir dans les deux mois de la date de l’acte. On a une formalité unique au service de la conservation des hypothèques donc un impôt unique.

2. B) Les formalités d’enregistrement et de publicité foncière

  • L’enregistrement

En application des articles 634 et suivants du Code Général des Impôts, il se fait à la recette des impôts selon les textes. Depuis 2006, on parle de service des impôts.

Cela donne date certaine et évite des conflits survenant en matière d’élection.

On relève 17 types d’opérations :

Par exemple, pour les actes qui ne sont pas des actes notariés, il faut un enregistrement dans les 10 jours à compter de la date comme la PUV.

Certains doivent être enregistrés dans le mois : actes notariés, d’huissiers de justice, transmission de propriété ou d’usufruit, les actes de répudiations de succession, legs, communauté, les inventaires. On trouve également les dons manuels

Le point de départ est la date de la révélation à l’administration fiscal et non du don : c’est ce qu’a précisé un arrêt de la Cour de cassation du 10 octobre 2000, Cloiseau, RJF 2001 n° 112. Enfin, on trouve les testaments déposés chez les notaires qui doivent aussi faire l’objet d’un enregistrement. S’il y a eu dépôt d’un testament, il faut l’enregistrer pour lui donner une valeur et une opposabilité. Le délai est de trois mois à compter du décès.

  • La publicité foncière

L’article 663 du Code Général des Impôts précise que l’objectif de cette publicité est l’information des tiers. Certains actes sont essentiels à la vie courante. Parmi eux, l’inscription d’hypothèque judiciaire ou conventionnelle.

L’assiette de ces droits

C’est la valeur du bien qui est la référence : on parle de valeur vénale.

Pour l’usufruit, c’est le prix exprimé et pour les dons, c’est la valeur du bien au jour du fait générateur de l’impôt.

Ce problème ne se rencontre pas s’il s’agit de droit fixe.

  • 2 : Les tarifs applicables

Il n’y a aucune logique générale. On trouve un système de droit fixe, forfaitaire actuellement à 125 euros si rien n’est prévu. On trouve autrement un système de droits proportionnels qu’il ne faut pas confondre avec le coût des formalités.

Il existe également un système progressif qui peut aller dans les deux sens.

2. Les mutations à titre onéreux

Selon l’opération, il y a à chaque fois un régime spécifique : il n’y a aucun système cohérent. Concernant les biens professionnels, la tendance est un allègement de la fiscalité.

L’exemple le plus fameux est celui de l’article 719 du Code Général des Impôts : il a réformé le système sur les cessions de fond de commerce et clientèle soumis à un droit d’enregistrement mais dont le système tarifaire a changé.

  • Jusqu’à 23 000 euros, le tarif est de 0 %
  • Entre 23000 et 107 000 euros, on est à 4 %
  • Pour la fraction supérieure, le tarif est de 2,6 %.

La référence est «le prix de la vente de l’achalandage, cession du droit au bail, les objets mobiliers ». C’est ainsi un système avantageux.

Autre exemple : cession des droits sociaux : art. 726 du Code Général des Impôts : les droits d’enregistrement s’élèvent à 1, 1%, lui-même plafonné à 4000 euros par mutation.

Pour d’autres cessions, le tarif est de 5 % : participation des personnes morales à prépondérance immobilière

Sur les échanges de biens immeubles, l’article 684 du Code Général des Impôts précise qu’ils sont soumis à publicité ou droit d’enregistrement à 5% sans plafond.

Cela n’a rien à voir avec le coût de la formalité : ce n’est pas une prestation de service.

L’article 680 est un peu résiduel : c’est l’article par défaut : pour les actes non tarifés autrement ou non exonérés, on applique le taux fixe de 125 euros.

2. Les mutations à titre gratuit

  • La donation : article 750 ter et suivants du Code Général des Impôts

Sont visés les biens meubles ou immeubles (assiette large) et on prend en compte la valeur vénale au moment ou survient le fait générateur.

Pour les actions cotées, on prend une valeur moyenne du moment de la cotation en bourse. Pour les bijoux, c’est la valeur précisée dans le contrat d’assurance. Pour les successions, on va prendre en compte les donations faites précédemment (dans les 6 années).

Il convient de distinguer les donations des présents d’usage. Le présent d’usage est quelque chose de modeste qui n’est pas fiscalisé à la différence de la donation.

La frontière est floue.

TGI Paris, 6 juillet 2000, cts Dalloz-Furet (RJF 2001 n° 257) : Dans cette famille, à Noël, on offrait de l’argent et non des cadeaux. La somme du don s’élevait à 200 000 francs pour deux enfants. Quelle va être la fiscalité applicable ? La famille prétend que c’est un présent d’usage mais l’administration fiscale considère que c’est une donation. On va considérer qu’une fraction est un présent d’usage et au-delà c’est une donation.

Le TGI va écarter la vision globale d’un présent d’usage reprenant l’argumentation de l’administration fiscale.

On passe de 10 000 francs de présent d’usage à 30 000 francs. « La nature du présent d’usage doit être appréciée en fonction de l’usage et de l’importance du cadeau qui doit être en rapport avec la fortune du donateur. »

Le patrimoine s’élevait à 8,2 millions de francs.

  • les successions

Le législateur a souhaité opérer des traitements spécifiques par rapport au droit commun pour tenir compte de certaines situations particulières acquises qui se sont multipliées.

L’article 775-10 du Code Général des Impôts énonce 5 cas qui ont pour but de ne pas pénaliser les héritiers.

Sont exclues de la succession, les indemnités perçues pour les victimes de certains événements : victimes du SIDA par transfusion sanguine ; les personnes contaminées par le virus du SIDA dans l’exercice d’une activité professionnelle (personnel médical) ; les personnes contaminées par la maladie de CROUTLEZF- JACOB par hormone de croissance ; personnes contaminées par cette maladie ; personnes atteintes des maladies relatives à l’amiante.

L’article 779-II du Code Général des Impôts porte sur les héritiers atteints d’une infirmité rendant impossible l’exercice d’une activité professionnelle et qui ne peut donc subvenir à ses besoins : abattement.

A coté des abattement spéciaux, il existe des exonérations liées à la prise en compte des phénomènes de sociétés : art. 796 du Code Général des Impôts : décès d’une personne lors de l’exercice de sa profession.

Ex : militaires morts sous les drapeaux pendant la durée de la guerre (Laquelle ?)

Ex : militaires retournés dans leur foyer morts de leurs blessures ou d’une maladie contractées dans les trois années à compter de la fin des hostilités…

Certaines revendications sont apparues : le législateur est intervenu : Personnes décédées en captivité dans un camp d’internement après avoir fait de la résistance ; personnes mortes en Afrique du Nord du fait d’actes de terrorisme dans les trois années à compter de sa réalisation (depuis 1990).

En matière de succession, nous avons un double dispositif : un régime général d’abattement sur la succession elle-même et selon les situations un système d’abattement calculé en fonction de la part nette revenant à chaque héritier. Finalement, le système français se révèle intéressant pour les petites et moyennes successions.

Pour le conjoint survivant, 76 000 euros d’abattement, 50 000 euros pour les ascendants.

La loi de finances pour 2006 prévoit des dispositions pour les lignes collatérales : 5000 euros entre frères et sœurs ou neveux et nièces.

Ces dispositions doivent s’appliquer pour les donations.

Pour les handicapés (infirmité physique), abattement de 57 000 euros.

Cass, 17 juillet 2001, DGI c/ GOUYOU (RJF 2001 n°1456) : un héritier est incapable de travailler en raison d’un accident du travail à la suite duquel il a perdu des facultés : «délabrement physique »). Ces frères et soeurs l’aident. Il devait bénéficier de l’avantage fiscal à la succession des parents : la Cour de cassation le refuse : le certificat constatant l’infirmité date de 1952 (la personne ne peut plus travailler la terre).

En première instance, le TGI admet l’argument. La CA confirme le jugement mais son arrêt est cassé : «sans rechercher si l’infirmité survenue au cours de la vie active de M. GOUYOU avait empêcher celui-ci de se livrer dans des conditions normales de rentabilité à une activité professionnelle et par conséquent si elle avait eu une incidence sur le montant de la retraite qu’il percevait au jour de la succession, le tribunal n’a pas donné de base légale à sa décision »

L’article 777 du Code Général des Impôts impose un système de tarif progressif par tranche qui varie selon les liens avec la personne décédée.

Ces droits de mutations sont assez élevés, après déduction des abattements.

En ligne directe, on a un système de tranche :

  • jusqu’à 7600 euros = 5%
  • au delà d’1,7 millions d’euros : 40 %

Le système est le même pour la succession entre époux.

Entre frères et soeurs (collatéral), un tarif spécifique :

  • Jusqu’à 23 000, 35 %
  • Au-delà, 45 %

Jusqu’au 4ème degré inclus, tarification à 55%.

Au-delà du 4ème degré ou s’il n’y a aucun lien de parenté, 60 %.

Pour les personnes pacsées, le système est différent :

  • Jusqu’à 15 000 euros, 40 %
  • Au-delà, 50 %

Comment se fait le paiement ?

Normalement, avec la déclaration de succession qui doit être déposée à la recette des impôts dans les 6 mois ou 1 an à compter du jour du décès (selon la territorialité)

Se pose alors le problème du système de la dation (paiement en nature).

Le débat fiscal porte essentiellement sur la valeur et sur sa contestation par l’administration fiscale. Elle peut toujours contester l’évaluation.

Si elle la conteste, il lui appartient de rapporter la preuve de la valeur qu’elle prétend substituer (article L. 17 du livre des procédures fiscales).

L’administration a un guide national de l’évaluation des biens.

Un bien similaire pour les immeubles se définit comme une « construction de standing analogue à celui de l’immeuble à évaluer »

Cass, 16 janvier 2001, Lenoir (RJF 2001 n°717) : problème de valeur d’immeuble : la Cour de cassation rejette l’argument du contribuable : il n’apporte pas d’éléments de preuve suffisants par rapport aux preuves de l’administration fiscale « même si des immeubles bâtis au moyen de matériaux de qualité médiocre donnent en définitive des habitations très modestes ».

Que fait-on de l’hypothèque ?

Pour la Cour de cassation, une hypothèque est sans incidence sur la valeur vénale de l’immeuble qu’elle grève.