Histoire et définition du droit d’auteur

DROIT D’AUTEUR : histoire, définition

Le Droit d’auteur fait partie du Droit de la propriété intellectuelle (DPI). Au sein du DPI, l’on distingue le Droit d’auteur (DA) du Droit de la propriété industrielle (le Droit des marques, le Droit des brevets & le Droit des dessins et des modèles).

Le Droit d’auteur s’applique à de nombreuses créations non réduites au monde des arts (par exemple, les logiciels sont protégés par le Droit d’auteur).
L’on définit le Droit d’auteur comme étant le droit exclusif reconnu au créateur pour l’exploitation de son oeuvre ; ce Droit exclusif reconnu à l’auteur comporte un aspect patrimonial et un aspect moral.

Aujourd’hui, le Droit d’auteur est très fréquent en pratique : c’est un véhicule employé par les sociétés pour faire des bénéfices. En effet, car grâce au Droit d’auteur, l’auteur acquiert un monopole d’exploitation sur son oeuvre ; dès lors, l’auteur peut interdire aux concurrents d’utiliser sa création. L’on confère à l’auteur un monopole d’exploitation pour financer la création, la recherche et l’investissement de son oeuvre.

Par ailleurs, le Droit d’auteur génère un contentieux important et est caractérisé par un engouement fort du fait de son importance économique ; cet essor du Droit d’auteur doit être mis en perspective.

I) Aperçu historique de l’évolution du Droit d’auteur

Son apparition est récente. En Droit romain, le Droit d’auteur n’existait pas : Rome n’a pas théorisé le Droit d’auteur.

Pour la reconnaissance d’un Droit d’auteur sur une œuvre, ce qui compte c’est le support de l’œuvre, non l’œuvre elle-même car l’œuvre se confond avec son support (dès lors, si je confie un papier à interprète et que ce dernier écrit un poème dessus, ce sera moi la propriétaire de l’œuvre).

Mais, par la suite, les droits de l’auteur se sont améliorés. Sous l’Ancien régime, il n’y a eu que quelques reconnaissances ponctuelles exclusives conférées à certains auteurs. En, effet, le Roi a tenté de développer les arts et les lettres en conférant des privilèges royaux permettant aux auteurs de bénéficier de certains droits sur leurs créations. Ces droits n’étaient que précaires car ils ne sont pas subordonnés à une reconnaissance légale.

C’est le siècle des Lumières qui va favoriser la reconnaissance d’un droit aux auteurs. Le XVIIIème siècle va permettre de considérer que le produit de la pensée d’une œuvre de l’esprit est une richesse et a une valeur, laquelle doit revenir à l’auteur lui-même. Ce siècle des Lumières a débouché sur le sacre de l’auteur : c’est l’auteur, par son travail propre, qui est l’auteur, le fruit de son travail lui revient donc. Désormais, l’on pense à partir de l’auteu recueillant le bénéficie de son travail. Ce contexte est propice à la reconnaissance du Droit d’auteur qui va intervenir progressivement par le biais du Droit intermédiaire (lequel se situant entre la Révolution française et l’avènement du Code civil).

Sous la pression d’auteurs influents, l’Assemblée constituante va voter différentes lois qui vont conférer un statut à certains créateurs. La loi des 13 et 19 janvier 1791 reconnaît aux auteurs dramatiques un monopole d’exploitation sur la représentation de leurs œuvres : ils ont donc eu un Droit d’auteur. La loi des 19 et 24 juillet 1793 fait de même au profit des écrivains, musiciens et peintres. Pour autant, ce progrès est limité car la durée de la protection de leurs droits est limitée à la vie de l’autre ; d’autre part, le Droit d’auteur n’est reconnu qu’au profit des personnes expressément désignées par le législateur. En dehors des personnes visées par la loi, il n’y pas de Droit d’auteur.

En 1804, le Code civil va avoir une influence nulle sur le Droit d’auteur : le Conseil constitutionnel n’a pas recueilli en son sein le Droit des auteurs et de leurs esprits. Le Droit d’auteur restera à l’abri de l’influence des codifications napoléoniennes. Ce sont les lois de 1791 et de 1793 qui vont continuer de s’appliquer avec des évolutions jurisprudentielles.

=>reconnaissance éclatée du Droit d’Auteur

C’est seulement au 20ème siècle qu’est apparue une modification majeure avec l’apparition d’un Code de la propriété intellectuelle (CPI). En effet, l’économie s’est transformée, en raison des nouveaux modes de diffusion et de créations, ce qui amène, derechef, à une évolution juridique. Dès lors, les lois de 1791 et 1793 sont jugées anciennes : le législateur va donc instaurer la loi de 1957 portant sur la propriété littéraire et artistique, laquelle va reconnaître un droit exclusif aux produits des auteurs d’œuvre de l’esprit et se présenter comme un véritable droit de propriété. Celui qui crée une œuvre de l’esprit en devient propriétaire.

La loi de 1957 va reconnaître que ce droit exclusif a un aspect patrimonial (représentation, diffusion de l’œuvre) et un aspect moral (l’auteur pourra être titulaire d’un droit moral même s’il a cédé son droit patrimonial).

Cette loi de 57 a été complétée par la loi du 3 juillet 1985 avec la reconnaissance des droits voisins (droits conférés aux artistes-interprètes ainsi qu’aux producteurs de phonogrammes, vidéogrammes et aux entreprises de communication).

Ces deux lois ont été codifiées dans le Code de la Propriété Intellectuelle (juillet 1992) et ont été combinées dans ce même Code.

La reconnaissance du Droit d’auteur est relativement récente ce qui explique qu’il y ait certaines incertitudes frappant le Droit d’auteur. Du coup, dans l’opinion publique, le Droit d’auteur est assez mal perçu du fait de l’évolution technologique complexifiant le Droit d’auteur.

Par exemple, l’auteur (et non l’interprète) d’une chanson est le SEUL à pouvoir l’exploiter car il a un Droit d’auteur sur cette chanson. Ce monopole confié à l’auteur ne sclérose-t-il pas la libre diffusion, le partage des œuvres de l’esprit ? Est-il justifié ?

II) Originalité du Droit d’auteur

Le Droit d’auteur a une nature difficile à caractériser ; logiquement il s’agit d’un droit de propriété en pratique controversée.
A. Nature du Droit d’auteur

Le Droit d’auteur est un droit de propriété incorporel car il porte sur une chose incorporelle. Selon l’article L111-3 du CPI, la propriété incorporelle, définit à l’article L111-1 du CPI, est indépendante de la propriété de l’objet matériel ; l’acquéreur de l’objet n’est investi, du fait de cette acquisition, d’aucun droit prévu par le présent code.

En quoi consiste ce droit sur cette chose incorporelle ? L’usucapion s’applique-t-elle donc à cette chose incorporelle qui ne peut être détenue ?

Aujourd’hui, en Droit des biens, la majorité des auteurs admettent que les biens incorporels peuvent faire l’objet d’une vraie propriété, d’une possession s’il s’agit de biens meubles.

La spécificité du bien incorporel implique une certaine adaptation des règles prévues par le Code civil pour les biens. Le Droit d’auteur relève en réalité du Droit spécial des biens car il est incorporel et parce qu’il fait l’objet de dispositions particulières dans un Code spécial. Cette qualification de Droit de propriété longtemps niée est pleinement consacrée si l’on observe le sort que lui réserve la CEDH et la Constitution de la Vème République. Dans 1er protocole additionnel article 1er de la CEDH , l’on parle de “Droit au respect de ses biens”. Or, l’œuvre de l’esprit est-il un bien au sens de cet article ? Oui, pour la Cour EDH, il s’agit d’un bien au sens de ce texte. C’est ce qui résulte de l’arrêt Balan c/ Moldavie, Cour EDH 29/01/2008 : le concept de “biens”, mentionné dans cet article, est applicable à la propriété intellectuelle et notamment à l’œuvre de l’esprit que constituait la photographie en l’espèce.

Le Conseil constitutionnel a lui aussi reconnu que le Droit d’auteur relevait de la protection constitutionnelle de la propriété. Si une loi porte atteinte au Droit d’auteur, y’a-t-il une atteinte au droit de propriété ? DC, 27/07/2006 : les finalités et les conditions d’exercice du droit de propriété ont subi, depuis 1789, une évolution caractérisée par une extension de son champ d’application à des domaines nouveaux. Parmi ces domaines nouveaux, figurent les droits de propriété intellectuelle, notamment le Droit d’auteur et les droits voisins. Ce Droit d’auteur est donc protégé contre les ingérences de la loi qui ne peut lui porter atteinte, ni même en nier la substance.

=> Le Droit d’auteur est un bien incorporel particulier faisant l’objet de règles particulières qui lui sont propres.

B) Structure du Droit d’auteur

Le Droit d’auteur se compose de deux droits selon l’article L111-1 du Code de la Propriété Intellectuelle :

  • – un droit moral (droit à l’intégration, au respect, à la paternité de l’œuvre)
  • – un droit patrimonial (cession, exploitation, reproduction) permettant à l’auteur d’avoir le monopole d’exploitation de son œuvre

Le Droit d’auteur est donc un droit dual : le droit moral recouvre la dimension personne de l’auteur et de son œuvre, ce qui renforce la spécificité du Droit d’auteur, tandis que le droit patrimonial recouvre la dimension économique de l’œuvre de l’auteur.

Cette distinction débouche sur une différence quant au régime juridique applicable. L’on peut librement céder le droit patrimonial ; par exemple, si l’auteur d’une chanson cède ses droits sur la chanson, il préservera un droit moral.

Les droits patrimoniaux sont limités dans le temps, ils durent toute la vie de l’auteur et 70 ans à compter du décès de l’auteur tandis que les droits moraux sont perpétuels.

Les droits patrimoniaux sont dans le commerce a contrario du droit moral qui est d’ordre public.

Le lien entre le bien et son auteur est personnel. Cela permet d’opérer une distinction entre le système français et le système anglo-saxon. Le Droit français protège d’abord le créateur, ce qui n’est pas le cas du Copyright protégeant avant tout l’investisseur. Cela implique des différences de régime, notamment en matière d’œuvres créées par les salariés.


III. Sources du Droit d’auteur

Elles correspondent à la Constitution, à la loi, aux règlements, aux décrets, aux circulaires mais également aux sources internationales.

En ce qui concerne la Constitution, le Droit d’auteur est protégé sur le fondement du Droit de propriété. La jurisprudence de la Cour de cassation a, par ailleurs, joué un rôle important dans la reconnaissance du Droit d’auteur.

En ce qui concerne les sources internationales, l’on retrouve la Convention de Berne de 1886 permettant d’assurer une protection internationale du Droit d’auteur en établissant un socle commun des règles protectrices. L’on retrouve aussi les accords du GATT de Marrakech de 1994 ayant abouti à la conclusion d’un accord ADPIC (accord relatif aux aspects des droits de PI touchant au commerce). Par le canal de cet accord, l’OMC impose aux Etats membres des règles communes. Cet accord s’impose à l’UE de telle sorte que les Etats doivent respecter les accord de l’ADPIC ; lorsque le juge interne transpose une directive, il doit interpréter le droit national transposant la directive conformément à l’ADPIC.

Le Droit de l’UE aujourd’hui une place importante en Droit d’auteur puisque de nombreuses directives ont été adoptées par l’UE en matière de Droit d’auteur et de Droit de la propriété littéraire et artistique ; la plupart du temps elles interviennent de manière sectorielles et aboutissent à des lois de transpositions de telle sorte qu’elles influent sur les dispositions du CPI. La directive 2001-19 sur l’harmonisation de certains aspects du Droit d’auteur et des droits voisins a eu une influence sur la définition du Droit d’auteur. Voici le plan du cours sur le droit d’auteur :