L’euthanasie : qu’en dit le droit pénal ?

L’euthanasie

Selon le Dictionnaire du vocabulaire juridique, Litec, la définition de l’euthanasie est le » fait de donner sciemment la mort à une personne atteinte d’une maladie incurable et souffrant de manière insupportable, en général poursuivi pénalement en France sous la qualification d’assassinat, mais qui peut donner lieu à la prise en compte par la juridiction de jugement de la raison qui a poussé le délinquant à agir afin de diminuer la peine prononcée « . Dictionnaire du vocabulaire juridique, Litec.

On distingue :

  • L’euthanasie active : Elle suppose le geste d’un tiers qui donne la mort
  • L’euthanasie passive : C’est l’arrêt des traitements qui abrège la vie lorsque le cas est désespéré.

Que dit le code pénal ? Il ne sanctionne pas l’euthanasie en tant que tel. Il sanctionne le fait de donner délibérément la mort.

» L’homicide commis volontairement est qualifié de meurtre « , le fait de donner la mort à autrui constitue un meurtre. Il est puni de trente ans de réclusion criminelle « . Article 221-1 du code pénal.

Toutefois, la loi Leonetti est venue :

– L’euthanasie active y est proscrite

– L’euthanasie passive y est tolérée : afin d’évier un « acharnement thérapeutique », et « l’obstination déraisonnable » du corps médical et « la prolongation artificielle de la vie » , la loi autorise le médecin à réduire ou arrêter le traitement d’un patient en fin de vie, même si cela doit entraîner sa mort à plus ou moins court terme. Des soins palliatifs, visant essentiellement à soulager les douleurs et à améliorer le confort du patient, peuvent être mis en place jusqu’au décès. C’est strictement encadré et résulte d’une décision collégiale

  • a) L’euthanasie et notions voisines :

Elle doit être distinguée de quelques situations qui aboutissent au même résultat.

Elle doit être distinguée de l’orthothanasie qui est le fait pour un médecin de laisser mourir le malade par omission. Il n’y a pas de meurtre. Toutefois, on peut engager sous la qualification de non assistance de personne en danger.

Elle doit être distinguée de la dysthanasie qui est le fait d’interrompre une réanimation artificielle qui maintenait une personne dans un état de vie végétative. On peut engager des poursuites du chef d’homicide volontaire, il y a un acte positif sur une personne vivante, voire assassinat. Il peut y avoir l’état de nécessité, machine en nombre limité, une personne arrive en urgence alors que l’autre personne est dans le coma depuis longtemps. L’état de nécessité enlève sa qualification pénale au fait. C’est le problème de la proportionnalité entre la valeur sacrifiée et la valeur protégée.

L’euthanasie doit être distinguée du suicide médicalement assisté où le malade reçoit un soutien médical pour mourir, mais c’est lui et lui seul qui déclenche le processus menant à sa mort. Les pays autorisant l’euthanasie (exemple : Belgique) et le suicide assisté (exemple : Suisse) ont encadré leur pratique par des lois pour limiter les risques de dérives.

  • b) La loi leonetti :

On le retrouve dans le code de la santé publique.

Suite à l’affaire Humbert, la loi Leonetti sur l’accompagnement de la fin de vie a été votée le 22 avril 2005. Elle a été qualifiée de «loi timide« , puisqu’elle maintient l’interdiction de l’euthanasie c’est-à-dire qu’elle maintient l’interdiction de donner volontairement la mort à une personne en fin de vie. Toutefois, cette loi a marqué un recul de certaines infractions, principalement d’abstention (on s’en rend coupable parce qu’on a rien fait alors que la loi nous obligeait de faire, exemple, la non assistance à personne en danger, article 223-6 du code pénal et le délaissement d’une personne hors d’état de se protéger, article 223-3 du code pénal). Sur ces infractions d’abstention, la loi Leonetti a créé des faits justificatifs nouveaux fondés sur l’ordre de la loi ou autorisation de la loi.

Concernant l’autorisation de la loi :

La loi Leonetti n’impose rien, par contre, elle autorise le médecin, à certaines conditions à arrêter ou limiter des traitements jugés disproportionnés et qui sont définies dans le texte comme des traitements inutiles et qui n’ont d’autres effets que le maintient artificiel de la vie, article 1110-5 du code de la santé public, exemple chimiothérapie, actes médicaux extrêmement lourds.

Il y a un problème de détermination de ces notions. Qu’est ce que sont de traitements jugés disproportionnés? Les traitements inutiles? Par rapport à la guérison ou par rapport au confort de la personne? Le terme déraisonnable?

L’appréciation de ces traitements, de l’utilité ou d’inutilité, ne va pas relever du juriste mais de l’étique médicale.

Le problème se pose lorsque le patient est hors d’état d’exprimer son consentement.

Dans ce cas, la loi impose une procédure strictement définie :

La décision sur l’arrêt du traitement médicale doit être motivée, reposer sur une décision collégiale et elle doit être prise après consultation de la personne de confiance, de la famille ou à défaut d’un proche. La décision doit être transcrite dans le dossier médicale, il faut une parfaite transparence.

Cette autorisation de la loi n’est qu’une autorisation, le médecin est libre, il n’est pas obligé d’arrêter le traitement médical même si la personne de confiance, la famille ou un proche demande l’arrêt du traitement médical.

Le traitement à double effet :

C’est un traitement anti douleur qui a un double effet, d’abord antalgique (il diminue la douleur) mais ce traitement hâte la mort. Le code de la santé public admet l’utilisation de ce traitement lorsqu’il n’y a pas d’autres moyens pour diminuer la douleur. Le code de la santé public admet ces traitements, article L1110-5 alinéa 5.

On ne peut pas recourir à ces traitements sans procédure :

Il faut en informer le malade s’il en est conscient et la personne de confiance ou l’entourage. Il faut prouver que c’est le seul moyen de diminuer la douleur. Il faut une inscription de la décision dans le dossier médical.

Lorsque ces conditions sont remplies, il y a présomption d’utilisation de ce traitement dans un but antalgique et par conséquent, sur le plan juridique, pour engager les poursuites pour homicide volontaire, le parquet doit prouver l’intention du médecin de tuer.

Lorsqu’une des conditions n’est pas respectée, on peut engager des poursuites d’homicide volontaire contre le médecin.

L’ordre de la loi :

La loi impose au praticien, en cas de conscience du malade, de respecter son autonomie mais elle distingue selon que le patient est ou non en fin de vie.

En cas de fin de vie d’une personne consciente, la volonté de celle-ci s’impose au médecin qui doit s’incliner et ne peut alors pas imposer un traitement forcé, article 1111-10 du code de la santé public. Cette règle s’oppose à une règle de déontologie du médecin selon laquelle le médecin doit apporter assistance aux malades et qu’il doit s’assurer qu’il reçoit les soins nécessaires. Dès lors, la loi impose une information du malade sur les conséquences de son choix et la décision du patient est inscrite dans le dossier médical.

En cas de refus de soins d’une personne qui n’est pas en fin de vie et qui refuse les soins, article 1111-4 du code de la santé public. Cet article reconnait le droit de la personne «d’interrompre ou de refuser tout traitement« . Désormais, le patient a un droit de veto contre tout traitement même au risque de sa propre vie. C’est la fin d’une Jurisprudence, Sénanayake, elle avait autorisé le médecin, en cas de pronostique vital, à procéder à un acte médical contre la volonté du patient (témoins de Jehova). Désormais, le médecin doit respecter la volonté du patient, il doit seulement l’informer des suites d’un refus de soins et lui donner un délai de réflexion. Il n’y a que pendant ce délai de réflexion que le médecin peut recourir au traitement sans quoi il tombé sous la qualification de non assistance à personne en danger.