L’individualisation des personnes (nom, domicile, état civil)

L’INDIVIDUALISATION DE LA PERSONNE

Trois institutions permettent d’individualiser la personne physique et de l’identifier dans la vie sociale : son nom (§1), son domicile (§2) et son état civil (§3).

§ 1 : Le nom

La loi règle la détermination du nom (I.) et organise sa protection (II.)

I. La détermination du nom

Les règles de détermination du nom patronymique (A) sont différentes de celles du prénom (B)

A- Le nom patronymique

Le nom patronymique se transmet par voie d’hérédité. La femme mariée ne perd pas son nom patronymique par l’effet du mariage. Elle acquiert seulement la faculté d’user du nom patronymique de son mari, qu’elle peut substituer ou juxtaposer à son propre nom. De même, le mari peut joindre à son nom le nom de son épouse (article 300 du Code civil). A la suite d’un divorce, chacun reprend, en principe, l’usage de son nom (article 264 du Code civil).

L’enfant légitime prend le nom de son père. ATTENTION CETTE NOTION « D’ENFANT LÉGITIME » N’EST PLUS A L’ORDRE DU JOUR DONC CETTE PARTIE EST OBSOLÈTE

L’enfant naturel prend le nom de celui de ses père et mère à l’égard de qui sa filiation est établie en premier lieu. Il prend le nom de son père si la filiation est établie simultanément à l’égard de l’un et de l’autre (article 334-1 du Code civil). Néanmoins, il est possible, pendant la minorité de l’enfant, de substituer au nom de la mère, le nom du père qui l’aurait reconnu en second par simple déclaration conjointe des parents devant le greffier en chef du tribunal de grande instance. Si l’enfant a plus de 13 ans, son consentement personnel est nécessaire (article 334-2 du Code civil). Dans les autres cas, le changement de nom doit être demandé au juge des affaires matrimoniales (article 334-3 du Code civil).

Le Garde des Sceaux, Mme Lebranchu, a présenté le 4 avril 2001 les orientations du gouvernement concernant la réforme du droit de la famille. Parmi les propositions présentées, on peut relever celle qui concerne le nom patronymique qui a déjà fait l’objet d’une proposition de loi adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 8 fév. 2001. Afin de respecter le principe d’égalité entre les enfants et les parents, les règles d’attribution du nom devraient être modifiées. Le gouvernement expose les motifs suivants : « Les femmes ont acquis leur indépendance et elles sont de plus en plus nombreuses à conserver leur nom patronymique et à ne pas utiliser à titre d’usage le nom de leur mari. L’égalité des parents au sein de la famille, l’égalité dans l’exercice de l’autorité et des responsabilités parentales, posées aujourd’hui en principe général du droit de la famille, doivent trouver leur application concrète dans les principes gouvernant la dévolution du nom ». Les enfants pourront porter soit le nom de leur mère, soit celui de leur père, soit leurs deux noms accolés dans l’ordre qu’ils choisiront. Le parent dont le nom est composé de deux noms accolés ne pourra transmettre qu’un seul de ces noms à ses enfants. Le choix effectué par les parents, qu’ils soient mariés ou non, lors de la naissance du premier enfant, devra s’appliquer à tous les enfants communs.

La proposition de loi déposée par Gérard Gouzes, adoptée le 8 février 2001 est rédigée de la façon suivante :

« Lorsque le filiation d’un enfant est établie simultanément à l’égard de ses deux parents, ces derniers choisissent le nom qui lui est dévolu. L’enfant peut acquérir soit le nom de son père, soit le nom de sa mère. Il peut aussi acquérir leurs deux noms accolés dans l’ordre alphabétique, dans la limité d’un patronyme pour chacun d’eux. Lorsque la filiation d’un enfant est établie successivement à l’égard de ses deux parents, il acquiert le nom du parent à l’égard de qui sa filiation est établie en premier lieu. Lorsque la filiation d’un enfant est établie à l’égard du seul parent, il acquiert le nom de celui-ci. Les enfants issus des mêmes père et mère portent un nom identique (…) ». Il est également précisé que « lorsque le mère ou le mère porte un double-nom, ce parent choisira la partie de son nom qu’il souhaite transmettre à ses enfants. A défaut, la dévolution du nom se ferait par ordre alphabétique. En tout état de cause, la transmission des noms à chaque génération est limitée à deux. »

Il faut relever que le dispositif gomme toute différence entre les enfants, quelle que soit la nature de leur filiation. Il préserve l’unité dans la fratrie, puisque tous les enfants de cette fratrie porteront le même nom, le choix s’effectuant par les parents lors de la naissance du premier enfant.

L’enfant ayant fait l’objet d’une adoption plénière prend le nom de l’adoptant, le nom du mari s’il y a adoption conjointe des deux époux (article 357 du Code civil). L’enfant ayant fait l’objet d’une adoption simple ajoute, en principe, à son nom patronymique celui de l’adoptant. Cependant, le tribunal peut décider d’une substitution avec l’accord de l’enfant s’il a plus de 13 ans (article 363 du Code civil).

Le nom ne peut, en principe, faire l’objet d’aucun changement. Par exception, le changement de nom peut intervenir à la suite d’un changement de filiation (article 61-3 du Code civil) ou dans le cas particulier de l’enfant naturel (voir plus haut). Si l’enfant a plus de 13 ans, son consentement personnel est requis. Le changement peut aussi être autorisé par décret si le demandeur justifie d’un intérêt légitime (article 61 et s. du Code civil, notamment en cas de nom ridicule, déshonoré ou menacé d’extinction). Dans ce cas, la personne doit déposer une requête auprès du Garde des Sceaux qui la transmet au Conseil d’Etat pour avis. Le décret est pris par le gouvernement et publié au Journal Officiel et transcription du changement en marge des actes de l’état civil de l’intéressé. Une demande de francisation du nom et/ou des prénoms à consonance étrangère est enfin possible en cas de naturalisation ou de demande de réintégration dans la nationalité française (loi du 25 oct. 1972). La procédure est identique à celle décrite plus haut et peut être déposée en même temps que la demande de naturalisation ou dans le délai d’un an suivant la demande.

B – Le prénom

Le ou les prénoms sont choisis librement par les père et mère de l’enfant. L’officier d’état civil inscrira les prénoms choisis par les parents sans pouvoir s’y opposer. Cependant, si le choix des parents lui paraît contraire à l’intérêt de l’enfant ou risque de porter atteinte aux droits des tiers, l’officier d’état civil en avise le procureur de la République qui peut saisir le juge aux affaires matrimoniales. Celui-ci ordonnera, le cas échéant, la suppression des prénoms litigieux et invitera les parents à faire un nouveau choix. Si ceux-ci s’y refusent, le juge attribuera lui-même un prénom à l’enfant (article 57 du Code civil).

Le ou les prénoms ne peuvent, en principe, faire l’objet d’aucun changement. Rien ne s’oppose à ce que soit utilisé, en tant que prénom usuel, l’un quelconque des prénoms figurant sur les registres de l’état civil. Par exception, un changement de prénom, l’adjonction ou la suppression de prénom peuvent être demandés au juge des affaires familiales. Si l’enfant a plus de 13 ans, son consentement personnel est requis (article 60 du Code civil).

II. – La protection du nom

Le nom est une institution de police mais aussi un attribut de la personnalité. Il est obligatoire, immuable, ce qui signifie que chacun doit porter son nom sans possibilité d’en changer. Il est aussi incessible et imprescriptible, ce qui signifie que nul ne peut céder son nom, ni perdre son nom par un non-usage même prolongé. En tant qu’élément de la personnalité, il fait l’objet d’une protection.

Le nom est protégé contre l’usurpation. Tout membre de la famille dont le nom est usurpé, peut agir en justice pour en faire cesser l’usage illégitime sans qu’il soit nécessaire d’apporter la preuve d’un préjudice. L’usage prolongé d’un nom pendant des générations peut faire acquérir ce nom dans des conditions dépendant de l’appréciation des juges.

Le nom est protégé contre le risque de confusion découlant de son utilisation pour désigner un personnage de fiction ou un produit quelconque. Le demandeur doit prouver le risque de confusion et le préjudice en résultant.

§ 2 : Le domicile

Le domicile est le lieu où la loi localise la personne, notamment pour l’application des règles de procédure ou pour la détermination de la loi applicable en droit international privé. Le domicile se distingue de la résidence qui est le lieu où la personne vit effectivement et habituellement.

I. La détermination du domicile

En principe, toute personne détermine librement le lieu de son domicile. Cependant parfois la loi désigne le domicile de certaines personnes.

Le domicile volontaire est fixé au lieu du principal établissement de la personne (article 102 du Code civil). Le domicile est librement choisi par la personne, il est l’endroit que l’individu considère comme le principal lieu de ses centres d’intérêts. Sa détermination est une question de fait qui relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.

Le domicile légal est celui que la loi désigne pour certaines personnes. Cette désignation obligatoire découle soit de l’état de subordination de certains individus vis-à-vis d’autres personnes (le mineur est domicilié chez ses père et mère : article 108-2 al. 2 du Code civil ; le majeur sous tutelle est domicilié chez son tuteur : article 108-3 du Code civil ; les «gens de maison » chez leurs employeurs : article 109 du Code civil), soit de l’exercice de certaines professions (les fonctionnaires publics inamovibles sont domiciliés au lieu où ils exercent leur fonction : article 107 du Code civil ; les bateliers qui ne justifient pas d’un domicile de droit commun doivent choisir un domicile dans une commune figurant sur une liste dressée par l’Administration : article 102 du Code civil).

II. Les caractères du domicile

Toute personne a nécessairement un domicile. S’il est difficile à déterminer, on retiendra le domicile d’origine, c’est à dire celui qu’elle avait à sa naissance à moins qu’il soit établi qu’elle en a changé au profit d’un autre.

Toute personne ne peut avoir qu’un seul domicile. C’est le principe de l’unicité du domicile. Néanmoins, il est possible, par contrat, d’élire domicile chez une personne habitant en un lieu situé dans le ressort de la juridiction que l’on veut rendre compétente.

Toute personne peut librement changer de domicile. Le changement de domicile se fera par le fait d’une habitation dans un autre lieu, joint à l’intention d’y fixer son principal établissement. (article 103 du Code civil)

Le domicile est inviolable. L’article 226-4 du nouveau Code pénal réprime «l’introduction ou le maintien dans le domicile d’autrui à l’aide de menaces, voies de fait ou de contrainte ».

§ 3 : L’état civil

L’état civil d’une personne décrit sa situation familiale, au regard de sa filiation et de son mariage. L’état civil dépend donc des événements qui modifient cette situation familiale : naissance, décès, mariage, etc.… Ces événements seront enregistrés et constatés officiellement dans les registres de l’état civil.

I. L’établissement des actes de l’état civil

L’état civil est constaté sur des registres officiels tenus à la mairie. Le maire, officier de l’état civil de sa commune (art. L. 122-25 du Code des communes), est chargé de la rédaction des registres de l’état civil, tenus en double. A l’étranger, les actes de l’état civil concernant les Français sont dressés sur les registres tenus par les agents diplomatiques ou les consuls.

Par exception, le tribunal de grande instance peut ordonner par jugement, la modification de l’état civil. Tel sera l’hypothèse en cas de rectification des actes existants lorsqu’ils sont erronés ou en cas d’inexistence de l’acte (perte, omission d’accomplissement d’un acte). Tel est aussi dorénavant le cas de l’acte de naissance, régulièrement dressé, d’un transsexuel dont la demande de modification a été favorablement accueillie par l’autorité judiciaire (Ass. Plén. 11 déc. 1992, Bull. civ. n°13).

II. Les fonctions des actes de l’état civil

Les actes de l’état civil sont des actes authentiques. Leur force probante est très grande puisque les faits que l’officier de l’état civil a constatés lui-même font foi jusqu’à inscription de faux. Cependant, les énonciations que l’officier de l’état civil n’a pas constatées lui-même font seulement foi jusqu’à preuve contraire. En principe, il n’est pas permis de prouver autrement l’état civil que par la production d’un acte de l’état civil.

Les actes de l’état civil permettent aussi d’informer les tiers. Les actes sont publics, accessibles à tous. Toute personne peut obtenir un extrait de l’acte de naissance ou de mariage et une copie intégrale de l’acte de décès de tout individu.