La banque, une activité commerciale et un service public?

La banque, une activité commerciale et un service public?

Chapitre 1 : une activité commerciale.

Cet aspect commercial se retrouve dans l’objet de l’activité bancaire, dans les acteurs, dans les opérateurs bancaires, et enfin sans les relations avec la clientèle.

Section 1 : l’objet de l’activité bancaire.

L’objet de l’activité bancaire est précisé par le code monétaire et financier aux articles L311-1 et suivants : les banques ont deux types d’activités, les opérations de banques et les services de paiement.

L’article L311-1 dispose que les opérations de banque comprennent la réception de fonds publics, les opérations de crédits, ainsi que les services bancaires de paiement. Cela signifie que les banques ont vocation à recevoir l’épargne des citoyens à travers leurs dépôts, et peuvent, grâce aux dépôts des épargnants, redistribuer dans l’économie sous forme de prêt. Concernant les services bancaires de paiements, ceux-ci sont les services qui consistent dans la délivrance de moyens de paiement. Les moyens de paiement sont eux tous les instruments qui permettent de transférer de l’argent d’un compte à un autre (chèque, carte, virement).

L311-3 prévoit que la gestion des moyens de paiements comprend « les services bancaires de paiement et les services de paiements ». Cette différence a été posée par une ordonnance du 15 juillet 2009.

Les opérations de banques sont réservées aux établissements de crédit, et les services de paiement sont réservés aux établissements de crédits et aux établissements de paiement.

Le but est de permettre à des établissements qui ne sont pas des établissements de crédit de pratiquer des services de paiement, afin d’ouvrir le marché à la concurrence. Finalement, les services bancaires de paiement et les services de paiement sont à peu près la même chose, les services de paiement étant moins large que les services bancaires de paiement (les chèques et les monéo de relèvent pas du service de paiement.

La liste des services de paiement est établie à l’article L314-1 du code monétaire et financier.

Il faut ajouter à cela les opérations connexes aux opérations de banques (paiements financiers, gestion de portefeuille).

Mais les banques ont avant tout comme activité de servir d’intermédiaire dans les transferts de fonds, de distribuer de l’argent dans les opérations de crédit, et d’avoir des activités complémentaires qui viennent se greffer aux précédentes (opérations de coffre-fort, assurance, téléphonie mobile, multimédia).

Section 2 : les opérateurs bancaires.

L’activité bancaire étant commerciale, ceux qui la pratiquent de manière habituelle sont des commerçants. Il y a d’une part les établissements de crédit, ayant le monopole des opérations de banque, et d’autre part les établissements de paiement, ayant le monopole « partagé » des services de paiement avec les établissements de crédit.

I) Les établissements de crédit.

La définition des établissements de crédit est posée à L511-1 du code monétaire et financier. Ainsi, les établissements de crédit sont des personnes morales, qui effectuent de manière répétée des opérations de banque.

Par exemple, une entreprise qui prête de l’argent à son dirigeant ne tombe pas sous le coup du monopole bancaire. En revanche, si une entreprise prête de l’argent cette fois de manière habituelle, elle tombe sous le monopole des opérations de banque.

Il faut enfin être en présence d’une opération de banque.

Ces établissements de crédit bénéficient du monopole bancaire. Ainsi, seuls les établissements de crédit peuvent effectuer certaines opérations. Le champ de ce monopole est précisé à l’article L511-5 du code monétaire et financier, de manière négative. Entrent dans ce monopole :

Les opérations de banque à titre habituel.

La réception de fonds publics à vue ou à deux ans de terme.

Deux remarques s’imposent :

Les critères de la qualification d’établissement de crédit et les critères du monopole bancaire ne sont pas les même (il y a en plus la réception des fonds).

« A vue » signifie que le client peut retirer ses fonds quand il le veut. Un compte à terme signifie que les fonds sont bloqués pendant un certain temps. Ces comptes entre dans le monopole bancaire car les clients doivent pouvoir venir chercher leur argent, l’établissement de crédit doit donc avoir des fonds importants.

La loi ne dit pas que cette activité de réception de fonds doit être habituelle donc, même occasionnellement, un établissement qui n’est pas un établissement de crédit ne peut pas effectuer cette activité.

La sanction du non respect du monopole bancaire peut être de deux types, pénale et civile. Un prêt qui serait conclu en méconnaissance du monopole bancaire est-il valable ? La jurisprudence a opéré un revirement. Au départ, la Cass prévoyait qu’un tel prêt était nul. Mais elle opère un revirement par un arrêt d’assemblée plénière du 4 mars 2005 : elle refuse alors de prononcer la nullité d’un prêt pourtant illégal. Il est illégal par rapport au monopole bancaire, mais valable d’un point de vue civil.

Le monopole est réservé aux établissements de crédit car ils possèdent des gages de sécurité. Ceux-ci sont agréés pour pouvoir pratiquer les opérations de banque. Cet agreement est délivré par l’autorité de contrôle prudentiel.

Il existe deux grandes sortes d’établissements de crédit :

Les banques à proprement parler, qui ont une compétence générale pour pratiquer toutes sortes d’opérations de banque. Leur activité n’est pas orientée ni limitée à certaines opérations ou secteurs économiques.

Les sociétés financières ou établissements spécialisés, qui ont des compétences spéciales limitées à certaines activités (sociétés d’investissements, sociétés de portefeuille d’actions) qui ne peuvent agir que dans leur secteur.

II) Les établissements de paiement.

Cette catégorie a été introduite en droit français sous l’influence d’une directive datant de 2007. C’est l’ordonnance du 15 juillet 2009 qui, en créant les services de paiement, a créé les établissements de paiement. Cette ordonnance a aussi créé un nouveau monopole parallèlement au monopole bancaire. Ce monopole des services de paiement appartient aux établissements de paiement et aux établissements de crédits.

Il existe dans la loi certaines dérogations aux monopoles (les chèques cadeaux émis par les grands magasins, les cartes de fidélité) notamment dans les chaines de distributions.

Section 3 : les relations avec la clientèle.

Ces relations avec la clientèle sont des relations de droit privé : on a affaire à un commerçant (la banque) qui contracte soit avec un non commerçant (un particulier, une société civile) ou avec un autre commerçant (une entreprise commerciale). Deux signes montrent qu’on se trouve dans le cadre d’une relation de droit privé :

Un contrat qui obéi aux règles générales du droit des contrats, et en particulier à la liberté contractuelle, fortement tinté ici d’intuitus personae. La banque contracte avec un client à certaines conditions, la relation est personnalisée. Cette relation passe par des mécanismes de droit privé classique, comme la cession de créances, la subrogation, la compensation, etc. Autre instrument essentiel de cette relation, le compte bancaire : c’est un contrat spécial avec un régime spécial. Il s’agit presque d’un contrat cadre.

Les parties aux contrats sont responsables en cas de manquement à leurs obligations. Les banques insèrent ainsi dans le contrat plusieurs clauses limitatives de responsabilité, qui sont a priori valable sous deux réserves :

o Sauf si elle est abusive face à un consommateur.

o Sauf si le débiteur de l’obligation s’est rendu coupable d’une faute dolosive ou d’une faute lourde.

Chapitre 2 : une activité de service public.

Les banques sont des entreprises privées, qui sont soumises aux lois de la concurrence, aux lois du marché. Si une banque ne peut plus faire face à ses dettes grâce à ses fonds disponibles, elle encourt la faillite, comme n’importe quelle entreprise. C’est assez rare dans l’histoire, mais la crise de 1929 et celle de 2008 ont montrées que c’était possible.

Toutefois, il semble désormais exclu, dans le contexte économique actuel, que les états laissent leurs banques faires faillites. Le remède possible est de deux sortes :

Soit un prêt qu’accorde l’état à la banque en difficulté. C’est le scénario de 2008 en France.

Soit l’état rachète une partie du capital social de la banque, et devient alors actionnaire de celui-ci. S’il rachète plus de la moitié du capital social, il deviendra alors actionnaire majoritaire, il s’agira d’une nationalisation. C’est le scénario de 2008, cette fois au Royaume-Uni. Les nationalisations n’ont alors été que temporaires, l’état revendant ensuite les actions en empochant la plu value.

Les banques ont encore une fonction sociale, que l’on peut expliquer par deux phénomènes :

La banque est en charge de la délivrance de la monnaie, ce qui nécessite que les pouvoirs publics contrôlent cette distribution.

On distingue la monnaie fiduciaire (monnaie matérielle, qui circule de la main à la main) à la monnaie scripturale (monnaie immatérielle, qui n’existe qu’à l’état électronique, sur les comptes bancaires).

Les banques ne doivent pas contribuer à l’exclusion sociale : les banques ne doivent pas contracter qu’avec les riches, et exclure du système bancaire les personnes qui n’ont pas les moyens. Concrètement, le législateur a instauré au profit des citoyens un droit aux comptes, qui permet à toute personne de se faire ouvrir un compte dans un établissement de crédit.

Dans un premier temps, l’établissement bancaire est libre de contracter ou de ne pas contracter. Dans un second temps, si le client potentiel se fait refouler de plusieurs établissements, il peut saisir la banque de France afin que celle-ci désigne autoritairement un établissement qui va ouvrir un compte au profit de ce demandeur. La procédure figure dans le code monétaire et financier à l’article L312-1. Les conditions d’ouverture du compte peuvent alors être limités aux services bancaires de base (délivrance de relevés périodiques de comptes, délivrance de moyens de paiement non risqués).

Section 1 : les grandes fonctions économiques du secteur bancaire.

I) Le service de caisse, service de paiement.

Le banquier est le caissier de son client : c’est lui qui tient la caisse. Le banquier décaisse (paie au moyen des fonds disponibles sur le compte) et encaisse (reçoit les fonds sur le compte). Autrement dit, le banquier sert d’intermédiaire dans les opérations de paiement. Il facilite le paiement entre les cocontractants.

Le paiement est un mode d’extinction de l’obligation, se traduisant par la satisfaction du créancier et la libération le débiteur.

II) La distribution de crédits.

Le mot crédit vient du latin credere qui signifie « faire confiance ». L’essence du crédit, c’est la confiance qu’une personne accorde à une autre. A cette confiance s’ajoute l’élément temporel: une personne fourni immédiatement à une autre un service, à charge pour cette dernière de le rendre plus tard. Il y a donc un décalage temporel entre l’exécution des deux obligations.

En matière bancaire, ce crédit est forcément à titre onéreux, le cout du crédit étant supporté par le client. La banque supporte elle le cout de non remboursement du crédit. Le crédit joue donc un rôle essentiel dans l’économie de marché, aussi bien pour les entreprises qui ont besoin d’investir, ou de combler des décalages de trésorerie (il y a parfois un décalage dans le temps où l’entreprise doit payer ses dettes et où elle se fait payer ses créances, il s’agit alors du décalage de trésorerie).

Ce crédit se traduit concrètement par une autorisation de découvert : il s’agit d’un crédit. Celui-ci est essentiel pour les entreprises, comme pour les particuliers. Autrefois, il s’agissait d’économiser pour consommer. Aujourd’hui, la société de consommation fonctionne sur la base du crédit à la consommation : on dépense l’argent qu’on a pas. Cette dérive de la société de la consommation correspond à des besoins des ménages réels ou fictifs.

Section 2 : l’ordre public bancaire.

Cet ordre public se traduit de deux manières :

Par un interventionnisme étatique dans l’activité.

Par des autorités de régulation.

I ) L’interventionnisme étatique.

L’activité bancaire est née au Moyen-Age, sur les marchés entre les commerçants. Mais c’est véritablement après la révolution et à la fin du XIXe siècle que le secteur bancaire s’est développé : c’est la période de la Révolution industrielle. A ce moment là naissent les grandes banques d’affaires. C’est alors l’âge d’or du capitalisme et du libéralisme. Mais déjà, à la fin du XIXe siècle, apparaissent les premières lois sociales.

Cette période libérale va aller jusqu’aux années trente. La crise de 1929 l’interrompt, et fait basculer le secteur bancaire dans une période interventionniste. Sous l’influence des théories économiques de Keynes, les états contrôlent et nationalisent les banques. Cette période va durer jusqu’aux années quatre-vingts. On assiste alors à une nouvelle vague de libéralisation. Cette libéralisation se traduit de plusieurs manières :

Les banques centrales deviennent indépendantes des pouvoirs politiques. C’est le cas de la banque de France, qui n’est plus sous la tutelle politique de l’état.

La désintermédiation bancaire, qui signifie que plusieurs types d’opérations bancaires ne passent plus par les banques, mais par un autre canal qui est le marché, la bourse (à court terme) et sur les marchés financiers (moyen et long terme).

Le décloisonnement des marchés, qui retire les limites physiques et rend le marché international.

C’est l’avènement du néolibéralisme. Mais c’est un libéralisme qui ne se développe pas dans les rapports traditionnels du marché, mais parallèlement, dans une économie virtuelle. L’état se désengage alors du secteur bancaire à travers une vague de privatisation.

Actuellement, on se trouve dans une phase de réinvestissement de l’état, de retour de la puissance publique. Ce retour est dû à une crise financière, qui est d’abord une crise bancaire (2008), qui entraine donc des mesures des états pour renforcer le contrôle sur les banques. Cette crise se traduit en 2011 par une crise des dettes souveraines, qui touche également le secteur bancaire.

II ) Les autorités de régulation.

Ce sont toutes les autorités chargées de surveiller le système bancaire.

A) Au plan national.

Il existe notamment dans les autorités bancaires la Banque de France. C’est une institution crée en 1800, nationalisée en 1945, et qui appartient désormais au système européen des banques centrales, placé sous l’autorité de la Banque Centrale Européenne. C’est elle qui émet les euros, gère les comptes du trésor public, et a aussi une fonction d’information sur le système bancaire. C’est par exemple elle qui répertorie les incidents de paiement. Elle est également chargée de la tenue des chambres de compensation (ce sont des organes chargés de réaliser les opérations interbancaires, entre les banques).

A coté de la Banque de France, on trouve des organismes consultatifs, ou organismes de tutelle collective, qui ont une action sur l’ensemble des acteurs du système. Ces comités servent en réalité à conseiller le gouvernement dans l’édiction de certaines normes. Le Comité consultatif du secteur financier et le comité consultatif de la législation et de la réglementation financière en font par exemple partie.

  1. A coté de ces comités consultatifs, on a ce qu’on appelle les organismes décisionnels. Eux sont chargés d’appliquer la politique bancaire et de la surveiller. Ils peuvent prendre des décisions individuelles à l’encontre d’un établissement. Il s’agit notamment de la Commission bancaire et du comité des établissements de crédit. Mais l’état a décidé de les fusionner dans un seul organisme, l’autorité de contrôle prudentiel. Cette autorité indépendante date d’une ordonnance du 21 janvier 2010. Elle est chargée de surveiller à la fois le secteur bancaire et celui de l’assurance. Cette autorité dispose de pouvoirs d’investigation et de pouvoirs de recommandation, ainsi que de pouvoirs de police (sanctions).

B – Au plan international.

Le Comité de Bâle réuni les gouverneurs des principales banques centrales afin d’édicter des normes prudentielles au niveau international. Ce sont des mesures qui visent à sécuriser le secteur bancaire.

Au niveau européen, l’Autorité Bancaire est issue d’un règlement du 24 novembre 2010. Cette autorité a un pouvoir règlementaire et un pouvoir de police, ainsi qu’un pouvoir de sanctions envers les établissements qui ne respecteraient pas ces normes.