La classification selon la nature de l’infraction


La classification selon la nature de l’infraction

Il existe d’autres types de classifications en retrait et notamment la classification selon la nature de l’infraction. Celle-ci nous ramène à la classification tripartite. Elle prend une certaine importante dans l’organisation des régimes des infractions. Cette classification renvoie à la notion d’infractions spécifiques d’un côté et d’infractions de droit commun de l’autre.

  • Les infractions de droit commun; ce sont les infractions suivants vont pleinement coller au régime de la classification tripartite.
  • Les infractions spécifiques; on vérifie que certaines infractions alors qu’elles sont qualifiées délits ne vont pas tout à fait suivre le régime des délits, ou elles sont qualifiées crime et ne vont pas suivre le régime des crimes.

Avant les années 1980, on avait comme différence la distinction entre infraction de droit commun, face aux infractions politiques et militaires. Ces infractions spécifiques se développent au regard des circonstances particulières de leurs développement, elles renvoient également à des contentieux techniques (économique et financière, terrorisme).

Car ce sont ces infractions politiques et militaires qui étaient visées par le code pénal.

Ce développement des infractions spécifiques est dû aux particularités criminologiques ou encore parce qu’elles renvoient à la technicité du contentieux.

Section 1 : Les infractions de terrorisme et de criminalité et délinquance organisées

Des formes de criminalité ont bouleversé notre ordonnancement pénal ces dernières années : leurs particularités criminologiques ont conduit le législateur à intervenir spécifiquement pour proposer un cadre particulier. Ces formes de criminalité et de délinquance sont marquées notamment par leur mode de développement en réseau, avec souvent une dimension internationale. Ces modes opératoires engendrent des difficultés pour les services d’enquête et de justice quant à l’identification des intervenants, à leur localisation et donc à leur arrestation. C’est pourquoi au nom de l’efficacité d’abord policière, de nouveaux régimes ont été définis pour contrer ces formes de criminalité ou de délinquance. C’est en premier lieu le terrorisme qui a fait l’objet d’un dispositif particulier après les attentats perpétrés sur le sol français en 1985 avec les lois de septembre 1986, puis d’autres types de contentieux ont été concernés comme les infractions en matière de stupéfiants puis, apparaît l’expression plus générale de criminalité et délinquance organisées avec la loi du 9 mars 2004 qui va étendre très significativement un régime spécial dérogeant au droit commun, à un grand nombre d’infractions.

&1. Les difficultés à définir ces infractions

A) L’infraction de terrorisme

Elle a été introduite dans le droit pénal dans le code de procédure pénal avec la loi du 09 septembre 1986, l’objectif 1er est de donner un traitement procédural particulier. Au moment de la réforme du code pénal des questions se sont posées concernant le terrorisme. Avec la réforme de 1992, le législateur décide d’intervenir sur la définition même des actes et non plus seulement sur le traitement procédural. Le législateur insert donc des dispositions sous le titre II du livre IV (Des crimes et délits contre la Nation, l’Etat et la paix publique). Le terrorisme apparaît comme un crime de « lèse Nation » (Alain Peyrefitte).

Cette approche en droit interne va être associée à des conventions internationales :

Convention de Strasbourg du 27 janvier 1977 : la France ne va la ratifier qu’en 1987. Définition dans la convention: l’acte de terrorisme est constitué dès lors où il porte attente gravement à la vie, à l’intégrité corporelle, à la liberté des personnes (enlèvement, prise d’otages, séquestration), avec utilisation de bombes, grenades, fusées, armes à feu automatique.

Le code pénal français va se définir notamment par l’objectif poursuivi par les auteurs, on va d’abord s’intéresser au côté déstabilisant de l’acte. Il y a donc une prise en considération du but poursuivi : article 421-1 Code Pénal.

Il y a deux approches de l’acte de terrorisme :

L’acte terrorisme est compris comme une circonstance aggravante d’une infraction de droit commun. On va voir se mettre en place une nouvelle échelle des peines. Réf. À l’article 421-3 du Code Pénal.

Une infraction punie de 30 ans de réclusion criminelle (droit commun) sera punie de réclusion criminelle à perpétuité.

L’acte de terrorisme est une infraction autonome et une sanction autonome. On va avoir une définition spécifique de l’acte terrorisme qui sera sanctionnée de manière autonome sans avoir besoin de se rattacher à une sanction de droit commun. Exemple : L’article 421-2 du Code Pénal dispose que le terrorisme écologique puni de 20 ans de réclusion criminelle et 350 000 euro d’amende. Le fait de financer une entreprise terroriste est puni de 10 ans d’emprisonnement et de 225 000 euro d’amende (art 421-2-2 et 421-5 Code Pénal).

Ces deux types d’approche s’appuient notamment sur le mobile poursuivi par les auteurs, on a une dimension subjective puisqu’on va s’intéresser à l’état d’esprit de l’individu. L’infraction de terrorisme va donc se définir avec des particularités. Depuis la loi du 09 mars 2004 on voit que cette infraction terrorisme incluse un autre type de contentieux : délinquance organisée

B) L’infraction de délinquance ou criminalité organisée

C’est la nature du délit ou du crime qui va conduire à la nature du délire. Ce qui est pris en considération c’est la nature même de l’acte organisée avant d’être un délit ou un crime. On voit émerger cette classification selon la nature.

Il n’y a pas définition légale de délinquance ou criminalité organisée. C’est le mode opératoire qui va permettre de renvoyer à cette notion de délinquance ou criminalité organisée. C’est par le traitement procédural que l’on va aborder le régime du contentieux, c’est l’article 706-73 du code de procédure pénale qui va régir le traitement procédural de la délinquance ou criminalité organisée.

Ces infractions vont être envisagées sous la forme d’un contentieux spécifiques avec un régime spécifique.

Cet article souligne 2 catégories d’infractions :

Une série d’infractions relevant de l’organisation par nature c’est à dire que ce sont des infractions qui ne sont pas associées à l’expression de bande organisée (le blanchiment, le trafic de stupéfiants etc.) Ces infractions renvoient nécessairement à une organisation spécifique.

Une série d’infractions commises en bande organisée : infractions « ordinaires » commisses avec la circonstance aggravante de bande organisée. Article 132-71 Code Pénal « … »

Réf : convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (= Convention de Palerme de décembre 2000)

  • &2 : Le régime de ces infractions

Il faut souligner la gravité de ces actes. Le régime spécifique permet de stigmatiser ce genre d’acte. Des régimes particuliers et dérogatoires ont été mise en place. On va faire la distinction entre droit pénal de fond et droit pénal de forme.

  • a) En droit pénal de fond

Le régime dérogatoire va d’abord avoir une incidence particulière sur la pénalité, la plus grande sévérité de la peine à l’encontre des auteurs de ces actes.

Il y a d’abord une aggravation de la peine principale encourue : il y a une échelle des peines particulières en matière de terrorisme pour punir plus sévèrement.

Il y a également l’aggravation des peines complémentaires : le juge a un pouvoir d’individualisation de la peine, il va choisir ou non une peine complémentaire pour compléter la privation de liberté. En matière de terrorisme ou de délinquance organisée, les peines complémentaires vont être aussi aggravées. En matière de terrorisme il existe la peine complémentaire de privation des droits civiques qui va être dans ce cas allongée.

Il existe aussi l’allongement des délais de prescription de la peine.

Il y a eu la mise en place du mécanisme de « repenti », ce système a été largement développé en Italie contre la mafia. Un des criminels est coupable mais il collabore en donnant des informations, il y aura donc diminution ou exemption de peine (article 132-78 Code Pénal). C’est un mécanisme qui reste exceptionnel.

  • b) En droit pénal de forme

La compétence juridictionnelle se distingue de l’organisation de droit commun (tribunal de police etc.).

Il y a des juridictions spécialisées :

Les JIRS (Juridictions InterRégionales Spécialisées), Il y a une volonté d’aller au-delà du territoire de l’infraction puisque les infractions ont des réseaux qui se développent.

La compétence exclusive des juridictions parisiennes en matière de terrorisme.

Les juridictions françaises ont la possibilité d’être compétente pour juger des infractions terroristes commises hors du territoire français, contre des victimes non française. C’est la compétence universelle

Les règles d’investigations vont faire que pour ces contentieux vont être particulières : la surveillance (art 706-80 Code Pénal), sonorisations (art 706-73 CODE DE PROCÉDURE PÉNALE), infiltration (art 706-81 et s.CODE DE PROCÉDURE PÉNALE)

Les règles de procédure sont aussi différentes : dans le cas de la garde à vue, en droit commun elle peut aller jusqu’à 24h mais en matière de criminalité et délinquance organisée elle peut aller jusqu’à 4 jours.

En matière de prescription de l’action publique ; en matière de terrorisme (30 ans pour un crime au lieu de 10 ans en droit commun).

Section 2 : Les infractions à caractère sexuel

L’infraction la plus grave qui apparaisse est l’infraction à caractère sexuel sur mineur.

&1. Les particularités du droit pénal de fond

Ces infractions sont définies par la loi pénale (le viol, les agressions sexuelles, la pornographie…), elles sont aggravées lorsqu’elles sont commises sur des mineurs qui font l’objet d’une protection particulière en ce domaine. Les spécificités de leur régime s’appliquent d’abord en matière de sanction :

S’agissant des peines, outre l’aggravation due à la qualité de mineur de la victime, des peines complémentaires particulières sont envisagées comme l’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. La peine complémentaire dite du «suivi socio-judiciaire» va imposer au coupable une injonction de soin. Il va également y avoir une multiplication d’interdiction

Les mesures de sûreté ; ce sont des mesures qui visent à éviter la récidive, elles se développent en particulier pour le contentieux à caractère sexuel. On va voir se multiplier la possibilité de ficher les individus avec l’idée de conserver les informations pour éviter la récidive. Se développent également les mesures post-sentencielles, c’est le cas lorsque le coupable a exécuté sa peine mais que l’on considère que l’individu est encore dangereux et qu’il faut donc mettre des mécanismes de surveillance (rétention de sûreté, surveillance judiciaire, etc.). Ont été également mises en place avec notamment le fichage de ces délinquants au fichier national automatisé des empreintes génétiques FNAEG ou encore le FIJAIS, fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles. Ils ont été étendus au-delà des seules infractions à caractère sexuel aujourd’hui.

Les aménagements de peines des condamnés pour ces infractions sont soumis à des conditions plus draconiennes que pour les autres formes de délinquance ou criminalité en multipliant les expertises psychiatriques, en allongeant les délais de période de sûreté pour retarder voire supprimer ces aménagements de peines.

L’application de la loi pénale française même pour des faits commis à l’étranger s’est étendue de manière dérogatoire au droit commun pour permettre de poursuivre des faits dits de tourisme sexuel, l’acte n’a pas à être incriminé dans le pays de commission et la plainte de la victime n’est pas nécessaire. Les juridictions françaises peuvent se déclarer compétentes notamment pour poursuivre et condamner des ressortissants français qui se livreraient à l’étranger, à ces infractions qualifiées par la loi française.

&2 : Les particularités en droit pénal de forme

Le point important la question centrale concerne le délai de prescription de l’action publique. L’allongement est très significatif. L’allongement se fait de deux façons :

Le point de départ est repoussé si la victime est mineure au moment des faits. C’est le jour où elle devient majeure.

Allongement même du délai de droit commun qui est passé à 20 ans pour les crimes (au lieu de 10 ans en droit commun) et aussi pour les délits aggravés notamment commis sur mineurs (3 ans en droit commun).

Des règles de procédure spécifiques, en effet il y a un titre du code de procédure pénale qui est consacré à cette procédure. Il y a des expertises médico-psychologiques. C’est à partir de ce contentieux qu’a été mis en place l’enregistrement des auditions.

Ces régimes dérogatoires répondent à des spécificités mais avec un élargissement des régimes dérogatoires qui parfois peut laisser dubitatif concernant la pertinence. Il s’agit de porter atteinte aux libertés, quand des individus sont mis en compte sans être coupable, cela peut poser problème.