La faute intentionnelle et non intentionnelle

Une participation fautive intentionnelle ou non

Qui peut voir sa responsabilité pénale engagée? C’est seulement la personne qui a personnellement participé à la réalisation de l’infraction qui peut voir cette responsabilité engagée. Cette personne peut être, une personne physique, mais aussi une personne morale. Pour qu’une personne voit sa responsabilité pénale engagée, il faut la participation criminelle, c’est la participation de la personne au crime, à l’infraction. Elle doit obéir à deux caractères :

  • le caractère personnel et individuel de la responsabilité pénale
  • Une participation fautive : la personne concernée doit avoir eu la volonté d’enfreindre la loi pénale pour que l’infraction soit constituée. C’est ce que nous étudierons ici.

Il ne suffit pas qu’un acte interdit par la loi ait été accompli. Il faut encore que la personne concernée ait eu la volonté d’enfreindre la loi pénale pour que l’infraction soit constituée. Cette volonté est l’élément intellectuel ou moral de l’infraction.

Cette appellation se justifie doublement. L’élément moral permet de porter un jugement de valeur, donc un jugement moral sur le comportement du délinquant et donc il conduit à s’intéresser à sa psychologie.

Par ailleurs cet élément est constitué par une faute pénale qui aujourd’hui peut prendre différente forme. Cet élément moral renvoie à l’article 121 – 3 du code, déjà modifié à deux reprises, et ce texte prévoit quatre grands types de fautes.

Section 1 : La distctinction entre faute pénale intentionnelle et non-intentionnelle

Les 4 grandes types de fautes sont :

– La première est la faute pénale intentionnelle. Il n’y a point de crime ou de délit sans l’intention de le commettre.

– La deuxième est la faute de mise en danger délibérée de la personne d’autrui visé par l’alinéa deux, qui dit que toutefois lorsque la loi le prévoit il y a délit en cas de mise en danger délibéré de la personne d’autrui.

– Dans les alinéas trois et quatre il y a diverses fautes pénales d’imprudences, non intentionnelle et dans l’alinéa cinq la faute contraventionnelle ou matérielle, et il n’y a point de contravention en cas de force majeure.

L’élément moral permet une classification bipartite des infractions entre infraction intentionnelle et non intentionnelle.

Il y a d’un coté l’intention criminelle et de l’autre toute l’autre faute pénale.

Nature et régime de l’infraction.

Les infractions intentionnelles sont celles dont l’élément moral consiste en une faute intentionnelle. Le délinquant a voulu le résultat illicite.

Dans l’infraction non intentionnelle le délinquant n’a pas directement recherché le résultat illicite. Dans l’homicide involontaire il n’a pas voulu tuer la victime mais elle est morte quand même.

Ces infractions non intentionnelles forment une catégorie résiduelle. Ce sont toutes les infractions dont l’élément moral n’est pas l’infraction. Par exemple la faute de mise en danger délibéré, l’une des fautes d’imprudence, qui peut être faute d’imprudence simple ou une faute caractérisée, ou une faute contraventionnelle ou matérielle. Si on applique cela à la classification tripartite des infractions, il en résulte alors que les crimes sont par principe toujours intentionnels. Le nouveau Code pénal a supprimé la catégorie des crimes non intentionnels, soit ils ont été abrogés, soit ils ont été correctionnalisés.

Pour les délits, à titre de principe, sont intentionnels. Mais lorsque la loi le prévoit ils peuvent être des délits non intentionnels. Depuis le nouveau code pénal on trouve les deux.

Le nouveau code pénal a entendu supprimer une catégorie qui existait auparavant, la catégorie des délits matériels, dont l’élément moral reposé sur une simple faute, contraventionnelle ou matérielle.

Les contraventions ont un élément moral constitué en principe d’une simple faute contraventionnelle ou matérielle ce qui veut dire que le simple constat de la violation matérielle de la réglementation suffit à constituer l’infraction. Mais il existe des contraventions qui reposent sur une faute intentionnelle mais aussi non intentionnelle. Par exemple les contraventions de 5e classe sur les violences volontaires, et par des violences on a causé a quelqu’un une incapacité de travail inférieur a huit jour, c’est une contravention involontaire. Il existe aussi des contraventions qui reposent sur des fautes de négligences, comme le fait d’avoir causé à quelqu’un une incapacité de travail inférieure à trois mois.

Les intérêts de fond :

Le principal intérêt de fond réside dans la différence de répression. Les infractions intentionnelles sont plus sévèrement réprimées que les non intentionnelles.

Pour l’infraction tentée, les infractions non intentionnelles sont incompatibles avec la tentative, car elle suppose l’intention de consommer l’infraction.

Pour la responsabilité pénale, on peut se poser la question de savoir s’il y peut y avoir complicité d’homicide involontaire. Il faut prendre en compte les différents degrés de faute non intentionnelle et la chambre criminelle a admis la complicité de mise en danger délibéré.

Pour ce qui est de la légitime défense, on peut se demander si la légitime défense peut justifier la commission d’une infraction non intentionnelle.

Enfin on peut commettre une infraction en commettant une erreur de fait ou une erreur de droit. L’erreur de fait, fait disparaître la faute intentionnelle mais elle peut laisser subsister une infraction non intentionnelle. Il y a aussi des intérêts de procédure à cette distinction. Par exemple l’intervention de l’assureur au procès pénal. L’erreur de droit est difficilement admise par la jurisprudence.

Section 2 : La faute dans les infractions intentionnelles.

De très nombreuses infractions, les crimes, plus un grand nombre de délits, sont des infractions intentionnelles, dont l’élément moral consiste en ce qu’on appelle l’intention criminelle. Cette intention est exigée par l’article 121 – 3 al 1 mais n’est pas définit par le texte. On peut dire que cette intention criminelle se ramène à la conscience du caractère illicite de l’acte et à la volonté de l’accomplir quand même. Ainsi définit cette intention criminelle est ce qu’on appelle le dol général.

Ce dol général n’a rien à voir avec le dol dans la formation du contrat.

Parfois pour certaines infractions s’ajoute une autre forme de dol en plus de ce dol.

1§ Le dol Général.

Puisqu’en principe les crimes et les délits sont intentionnels le législateur n’a pas besoin de dire pour une infraction précise que cette infraction est une infraction intentionnelle et bien souvent il utilise des adverbes qui sont révélateurs. Il dit que l’infraction doit avoir été commise volontairement, sciemment… c’est la marque de l’exigence de l’intention criminelle. Cette intention criminelle peut être définie plus précisément en partant de l’étymologie du terme. Intention vient de intendere, ce qui signifie diriger vers, tendre vers, mais ça veut dire aussi donner de la tension. L’intention criminelle c’est la volonté du délinquant tendu vers un résultat illicite interdit par la loi pénale. Cette intention criminelle peut concerner des infractions de commissions mais aussi des infractions d’omissions. Elles se décomposent alors en deux éléments, la conscience et la volonté.

En ce qui concerne la conscience le délinquant devait avoir conscience de l’illicéité de son comportement. Les choses sont ici grandement facilitées par ce que l’on appelle la présomption de connaissance de la loi, nul n’est censé ignorer la loi.

L’intention implique ensuite que le délinquant tout en ayant eu cette conscience, ait eu la volonté d’accomplir quand même l’infraction, cette volonté doit englober à la fois le comportement du délinquant, comme les violences et le résultat de ce comportement. Cette définition de l’intention est le plus petit dénominateur commun à toutes les infractions intentionnelles. C’est-à-dire que ce dol général se retrouve au minimum à la base de toutes les infractions intentionnelles. D’où le dol général. Mais parfois on peut trouver autre chose en plus de ce dol général.

2§ Les autres formes de dol.

On peut trouver des variations de dol.

Dans certains cas la loi, exige une intention plus précise, particulière. Donc la loi exige au delà du dol général, un dol spécial. Dans d’autres cas, on se rend compte parfois qu’il y a discordances entre l’intention initiale et le résultat qui a été effectivement accompli. Le délinquant ne voulait pas tuer la victime, mais cela est arrivé quand même…

A) L’intention plus précise que le dol général, le dol spécial.

On est en présence d’un dol spécial lorsque le texte d’incrimination indique quelque chose de plus au delà du dol général, c’est le dol spécial. Ce dol quelque qu’il soit il ne faut pas le confondre avec le mobile.

  • 1) Dol général et spécial.

Pour une infraction le législateur exige ou la conscience, outre la volonté de l’accomplir quand même, une volonté particulière d’obtenir un résultat précis. Si cette volonté particulière n’est pas remplie, l’infraction n’est pas constituée. C’est le cas dans le vol, puisqu’il exige l’intention de se comporter, même de façon momentanée comme le propriétaire de la chose. Mais il est parfois difficile de savoir si une infraction intentionnelle comporte ou non un dol spécial. La question s’est posée ces dernières années notamment à propos de l’empoisonnement, article 221 – 5 du code pénal. La difficulté est de savoir si l’empoisonnement comporte ou non comme dol spécial l’intention de tuer, l’animus necandi, ou suffit il que l’agent ait eu l’intention de donner la mort.

Un arrêt de la chambre criminelle de 94, a suscité le doute parce que cet arrêt n’exigeait pas l’intention d’homicide. Mais par la suite dans deux arrêts ultérieur, la chambre criminelle a confirmée l’exigence de ce dol spécial, et elle l’a fait d’abord dans un arrêt du 2 juillet 1998, où elle affirme que la seule connaissance du pouvoir mortel de la substance administrée ne suffit pas a caractérisée l’intention homicide.

L’arrêt de 2003 indique que l’intention homicide est l’élément commun à l’empoisonnement et à l’atteinte volontaire à la vie d’une personne.

  • 2) Le dol et mobile.

Les mobiles ce sont les raisons, les motifs, pour lesquels une infraction a été commise. En droit français, le principe est celui de l’indifférence des mobiles, mais ces principes connaissent des exceptions.

En raison de leur extrême diversité, car ce sont les raisons personnelles de l’individu qui l’ont conduit à commettre l’infraction. Il peut y avoir autant de mobiles que d’individus. Dés lors ces mobiles extrêmement variables n’ont pas à être pris en considération au stade de la constitution de l’infraction. Il suffit que le dol général et le dol spécial soit constaté.

En pratique le juge et notamment les jurés d’assise peuvent être plus ou moins sensibles à ces mobiles en ce qui concerne le choix et le quantum de la peine. On sait très bien que devant la cours d’assises que des crimes passionnels peuvent aboutir à un acquittement.

Ce principe reçoit parfois exception lorsque le législateur décide dans un texte d’incrimination de prendre en compte un mobil particulier. On dit alors que ce mobil est érigé en dol aggravé.

Ce mobil exceptionnellement pris en compte peut l’être soit a titre d’élément constitutif de l’infraction soit à titre de circonstances aggravantes. Par exemple, l’article 314 – 7 du code pénal punit le délit d’organisation frauduleuse d’insolvabilité. Le texte dit que le débiteur organise son insolvabilité en vue de se soustraire à l’exécution d’une condamnation. Donc c’est un but particulier, un mobil particulier, érigé en élément constitutif de l’infraction.

Généralement c’est à titre de circonstance aggravante qu’il est pris en considération.

Ces circonstances peuvent être variables selon les infractions concernées mais il y en a une qui peut s’appliquer à beaucoup de cas c’est la préméditation.

Par exemple, ces mobiles ont été multipliés par le nouveau code pénal, pour le mobile terroriste et le mobile raciste.

Le mobile terroriste c’est le fait de commettre un certain nombre d’infraction pour semer l’intimidation dans un but particulier.

Le mobile raciste c’est le fait de commettre des infractions qui sont liées à l’appartenance de la victime à une ethnie, une nation, une religion… Depuis la loi Perben 2 la circonstance aggravante du mobile raciste est définit par l’article 132 – 76 al 2.

La préméditation est définie à l’article 132 – 72 comme le dessein formé avant l’action de commettre un crime ou un délit déterminé. C’est le fait d’organiser, d’anticiper l’infraction. Si elle est établie par l’accusation, elle entraîne dans les cas prévus par la loi, l’aggravation des peines encourues. L’exemple le plus évident est l’homicide volontaire. Le meurtre est puni de 30 de réclusion criminelle tandis que le meurtre avec préméditation, l’assassinat est puni de la réclusion criminelle à perpétuité. On est en présence d’une intention qui est plus précise, plus déterminé.

B) L’intention moins précise que le dol général.

On regroupe ici des hypothèses où l’on est en présence d’une discordance entre le résultat qu’a produit l’infraction, ce qui s’est réellement réalisé, et le résultat tel que le délinquant l’avait prévu. C’est le résultat sur lequel l’intention criminelle du délinquant s’était exercée. Cette discordance recouvre trop variété de dol, qu’on appelle le dol indéterminé, le dol dépassé ou praeter intentionnel et puis le dol éventuel, mais nous verrons que le dol éventuel se rattache aux infractions non intentionnelles.

a) Le dol indéterminé.

Le résultat d’une action délictueuse ou criminelle n’est pas toujours bien connu à l’avance. Il peut y avoir une part d’indétermination. Cette indétermination peut porter soit sur le dommage, on ne sait pas quel dommage il va causer, ou cette indétermination peut porter sur la victime elle même. Est-ce que cette indétermination est prise en compte par le droit pénal ?

Si on prend le cas des violences volontaires, un délinquant donne un coup de barre de fer sur sa victime, il peut lui causer un dommage léger ou la tuer, il a l’intention de causer des blessures à sa victime mais il ne connaît pas le préjudice exact qu’il va lui causer, et donc le délinquant est réprimé en fonction de la gravité du dommage causé. Donc s’il a causé à sa victime une mutilation ou une infirmité permanente, c’est 10 ans d’emprisonnement et 150 milles euro d’amende. S’il ne lui a causé qu’une ITT, inférieure à 8 jours c’est une simple contravention de 5e classe.

L’indétermination de la victime, c’est par exemple le cas d’un terroriste qui va faire exploser une bombe dans un métro ou un avion, et dans ce cas le droit pénal ne prend pas en considération l’indétermination de la victime, et donc l’infraction intentionnelle est parfaitement constituée et réprimée. Dés lors on dit que le dol indéterminé est équipollent, équivalent, au dol déterminé, il est puni de la même façon. Cette équivalence, ne connaît qu’une seule limite. Dans l’incrimination de ce qu’on appelle les coups mortels, qui sont punis en droit français depuis 1832, que l’on trouve dans l’article 222-7 du code pénal. C’est le fait d’avoir porté à la victime des coups qui ont entraînés sa mort mais sans intention de la tuer. Si on appliquait le principe, on devrait considérer qu’il y a meurtre mais ce n’est pas le cas puisqu’ils sont punis de 15 ans de réclusions, ce qui est une limite.

b) Le dol praeter intentionnel ou le dol dépassé.

Dans cette hypothèse le résultat qui a été effectivement réalisé par le délinquant est allé au-delà, a dépassé le résultat qu’il avait l’intention de causer. Donc le délinquant a voulu frapper la victime pour la blesser mais en fin de compte il l’a tué. Face à cette hypothèse deux réponses sont possibles. Soit on s’en tient à l’intention, c’est-à-dire de porter des violences volontaires, soit on s’en tient au résultat, c’est-à-dire qu’il a causé la mort de la victime involontairement. On peut se demander s’il n’y a pas de solution intermédiaire, de compromis. En principe, il n’est pas possible de considérer l’infraction praeter intentionnel, comme une pure infraction intentionnelle, y compris dans son résultat. C’est donc l’exemple de l’article 222 – 7, avec les coups volontaire ayant entraînés la mort sans intention de la donner, la répression est moindre que le meurtre mais elle est supérieure à la violence volontaire sans causer la mort, qui puni de 10 ans.

Ce principe sert dans certaines circonstances pour des raisons de politique criminelles. Dans certains cas le législateur estime qu’il doit faire preuve d’une plus grande répression, et donc il va punir le délinquant comme s’il avait voulu causé le dommage. Deux exemples.

C’est ce qui se passe en matière de détournement d’avion ayant entraîné la mort d’une ou plusieurs victimes, 224 – 7, et aussi dans le cas d’enlèvement et de séquestration de personnes se terminant par la mort, article 224 – 2 al 2.

c) Le dol éventuel.

Traditionnellement jusqu’au nouveau code pénal, on rattaché aux deux hypothèses précédentes celle du dol éventuel et l’on considéré que le dol éventuel était une sorte de faute intermédiaire entre la faute intentionnelle et la faute non intentionnelle.

Le délinquant a volontairement pris un risque en espérant que ce risque n’aboutirait pas à un dommage grave. C’est l’exemple classique en matière routière de l’automobiliste qui double sans visibilité. C’est une forme d’imprudence consciente, puisque le risque a été pris consciemment mais le dommage n’a pas été entièrement voulu.

L’ancien code pénal ne tirait aucune conséquence particulière de cette hypothèse. Si un dommage était survenu, la répression s’exerçait en fonction de se dommage. Donc concrètement le délinquant, si la victime était morte, encourait la répression d’homicide involontaire. Il n’y avait que dans le cadre du code de la route qu’était prévu un doublement des peines de l’homicide et des blessures involontaires causées en état d’ivresse. En revanche si aucun dommage n’était survenu, soit il n’y avait pas d’infraction, soit une contravention pour infraction au code de la route.

Le nouveau code pénal a été influencé par plusieurs paramètres sur cette question. Il a été influencé par le droit comparé, mais surtout par le nombre de victime de la route. Il a réagit en créant une faute pénale adapté qui est la faute de mise en danger délibérée de la personne d’autrui. Seulement cette faute fait partie des fautes non intentionnelles. Donc le dol éventuel que l’on considéré comme une faute intermédiaire, est aujourd’hui intégré dans les fautes non intentionnelles.