La police administrative : les titulaires et les mesures de police

Les titulaires de la police administrative et les mesures de police administrative

Définition de la Police selon l’arrêt CE 1919, Labonne : la police se rapporte à la mission d’exécution des lois : si le «bon ordre» dans la société n’est pas assuré, une correcte application des lois est impossible : le pouvoir de politique suppose pour l’Administration d’encadrer l’activité des citoyens par la réglementation qu’elle établit ou par d’autres mesures (déclaration, autorisation, interdiction) qui auront nécessairement un effet restrictif sur les droits et libertés fondamentales.

Paragraphe 1 => les titulaires des pouvoirs de police

I – Les titulaires du pouvoir de police générale

A/ Le Premier Ministre : Titulaire du pouvoir de police générale à l’échelle nationale

CE 1919, Labonne(certificat de capacité) : le Président, chef d’exécution de la loi sous la IIIe République, est l’autorité constitutionnellement en charge de l’application des lois disposant par nature d’un pouvoir corrélatif d’assurer le maintien de l’ordre public nécessaire à une bonne exécution de la loi.

– le pouvoir de politique générale issue de la jurisprudence Labonneest une source autonomede compétences au profit du Premier Ministre (chef d’exécution sous la V République) et non un pouvoir englobé dans le pouvoir réglementaire général issu de l’article 37 Constitution

=> CE, 2 mai 1973 , Association culturelle des israélites nord-africains de Paris

=> DC, 20 février 1987, Code rural

– la distinction opérée par 34 et 37 Constitution interdit au Gouvernement de prendre des mesures réglementaires dans le domaine de la loi ; mais article 34 de la Constitutionconfie au législateur la compétence pour fixer les règles en matière de libertés publiques : si Labonne était englobée dans l’article 37 de la Constitution cela interdirait pratiquement la prise de mesures de police par le Premier Ministre parce que la caractéristique même du pouvoir de police est de restreindre l’exercice d’une liberté

CE 1978, Union des chambres syndicat d’affichage juge légal une décision de police pris par le Premier Ministre sur le fondement de Labonne qui dans l’intérêt de la sécurité publique vient restreindre la publicité et les enseignes visibles des voies publiques

B/ Le Maire : titulaire du pouvoir de police municipale

– au nom de la commune, le maire a la charge de la protection de l’ordre public général sur le territoire

– à ce titre, par arrêté municipal, il édicte des mesures à même de prévenir les atteintes à l’ordre public local.

– tutelle du préfet qui est également habilité, en cas de carence de l’autorité municipale est après mise en demeure restée infructueuse, à édicter les mesures qui s’imposent

C/ La dualité des titulaires des pouvoirs de police générale à l’échelle départementale

– avant les lois 1982, seul le préfet à cet échelon disposait de telles prérogative Depuis, il les partage avec le président du Conseil général même s’il demeure l’autorité majeure en matière de police départemental.

  1. Les pouvoirs du préfet

– le préfet intervient à deux titres : d’une part lorsqu’une mesure de police locale excèdele champ géogr. d’une seule commune ; d’autre part dans les communes à policed’État, pour assurer le maintien de la tranquillité publique lors de grands rassemblements occasionnels

  1. Les pouvoirs du président du Conseil Général

concernent essentiellement le domaine public du département, les biens qui appartiennent à la colléctivité départementales (routes départementales)

II – Les titulaires des pouvoirs de police spéciale

– les pouvoir de police spéciale sont divers et peuvent être attribués à différentes autorités plus variées que les titulaires de police générale :

=> Tantôt ce sont des autorités qui détiennent déjà des pouvoir de police générale qui vont se voir attribuer en plus des prérogatives de police spéciale (le préfet peut se voir attribuer la police des installations classées ou le maire celle des édifices menaçant ruine) ;

=> Tantôt des textes attribuent des pouvoir de police spéciale à des autorités qui ne détiennent pas des pouvoir de police générale (police des films au ministre de la culture)

Paragraphe 2 => les diverses mesures de police

I – Les actes juridiques

A/ La nature des mesures édictables

– arsenal de mesures larges, juridiques, impersonnelles ou individualisée.

  1. La réglementation de police

– mesures généraux et impersonnelles qui visent à assurer l’ordre et qui vont être pénalement sanctionnées

R. 610-5 Code de procédure pénale : sanctionne toute méconnaissance des arrêtés de polices par des contraventions, après un procès-verbal de constatation d’une infraction (5 classes)

  1. Les mesures individuelles de police

– différentes manifestation de ce pouvoir de police, non plus par l’édiction de règles générales mais par l’entremise de décision, vont frapper nominalement (nommément) certains administrés

  1. a) Les autorisations

– l’autorisation préalable avant de pouvoir envisager une activité est une mesure individuelle de police.

– ces systèmes d’autorisation portent atteinte aux libertés publiques et découlent nécessairement d’une loi

– généralement admis lorsqu’ils cherchent à concilier des intérêts divergents (nécessité de l’ordre public par opposition à la liberté de ne pas être surveillé : autorisation préalable pour installer des caméras)

  1. b) Les interdictions

– si une action prévue (manifestation) est susceptible de porter atteinte à l’Ordre public, il est possible pour l’autorité de police d’envisager une interdiction de celle ci

  1. c) Les autres mesures

– d’autres mesures variées peuvent être prises au titre de la police : mise en fourrière, saisi d’un journal…

B/ La possibilité d’édiction des mesures de police

– une mesure de police est susceptible par hypothèse de porter atteinte aux libertés publiques : il n’est pas toujours envisageable de l’édicter, et elle doit toujours se justifier eu égard à sa nécessité pour maintenir l’ordre public : un encadrement juridique permet d’éviter les excès

  1. La déclaration préalable (ou d’autorisation préalable)

– un tel système (avant de pouvoir engager une action) n’est, en principe, prévu que par la loi

CE 1982, Assoc. de Ski de fond du Crévoux annule la décision communale de subordonner l’utilisation des pistes de ski de fond à une autorisation préalable

– exception : l’exploitation du domaine public : l’occupation temporaire peut être prévue par l’autorité

  1. Les décisions d’interdiction

– étroitement surveillées par le Juge Administratif qui a développé une jurisprudence particulièrement exigeante en la matière afin de les limiter aux hypothèses où elles sont absolument nécessaires

– exclue en principe les interdictions trop générales et absolue : il y a alors présomption d’illégalité et l’Administration devra justifier de manière détaillée l’interdiction (arrêtés anti-mendicité géographiquement étendus ou permanent)

– philosophie du contrôle : contrôle de proportionnalité entre la gravité de l’atteinte aux libertés et la menace à l’ordre public qu’il s’agit de conjurer, consacré par CE 1933, Benjamin (se révèle comme un vrai protecteur des libertés) : annule l’interdiction au motif que le maintien de l’ordre aurait pu être assuré par une mesure moins liberticide (quelques forces de police supplémentaire)

CE 1993, Mme Maes annule le refus opposée à une handicapée de se voir octroyer une dérogation lui permettant d’utiliser sa voiture sur une île interdite de circulation pour disproportion entre le motif poursuivi (tranquillité publique) et la gravité de la mesure.

– la question de l’appréciation laissée au juge soulève le problème de la subjectivité pouvant entraîner une divergence de solution entre juridiction : mais c’est avant tout une jurisprudence spécifique (interdiction saisonnière de certaines activités dans certains lieux touristiques)

C/ L’obligation d’édicter des mesures

– deux hypothèses à distinguer

  1. Lorsqu’une réglementation (régulière et légale) de police existe

– l’Administration doit assurer l’effectivité en prenant les mesures d’application s’imposant : CE 1972, Marabout oblige l’autorité édictant une interdiction (de stationnement) de matérialiser son respect (agent verbalisateur)

  1. Lorsqu’il n’existe pas de réglementation

– l’autorité de police est-elle obligée d’intervenir pour prévenir une menace à l’ordre public ? Le problème soulevé est qu’il convient de ne pas consacrer une obligation d’agir trop large afin de lui laisser un pouvoir d’appréciation assez important pour décider de l’utilité de leur action

– en principe, elle n’est pas dans l’obligation, sauf dans une hypothèse particulière où plusieurs conditions sont réunies, posées par CE 1959, Doublet : la mesure de police en cause s’avère «indispensable« , pour faire cesser un péril grave, résultant d’une situation particulièrement dangereuse pour l’ordre public : condition rarement réunies, mais le juge consacre parfois une obligation d’agir en assouplissant ces exigences

CE 1982, Rossi admet (raisons d’espèce) l’obligation invoquée par un administré de prendre des mesures visant à séparer piétons et cyclistes afin d’assurer la sécurité dans un jardin public (pas de péril grave)

-le principe posé par la jurisprudence Doublet ne sera jamais modifié (jusqu’à présent)

II – Les actes matériels de police

– ce sont les opérations sur le terrain (ronde de police, surveillance d’un barrage…).

– voir Paragraphe 1 => la finalité des mesures de police administrative : l’opération matérielle ne sera considérée comme une opération de police administrative que si elle est indépendante d’une infraction déterminée