La saisine devant le Conseil constitutionnel

LA PROCÉDURE DEVANT LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL : LA SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Si on estime que les juridictions constitutionnelles ne se limitent pas au Conseil Constitutionnel les procédures sont multiples. Mais on ne va pas traiter les procédures contentieuses portée devant les autres juridictions.

On ne va pas s’intéresser au contentieux électoral même si on sera amené à en parler parce que certaines procédures pourraient être étendues au contrôle de constitutionnalité, notamment le caractère public des audiences.

  • Article 61 et 64 de la constitution: contrôle des lois et des engagements internationaux.
  • Article 41: autre procédure, écarter des amendements qui ne sont pas du domaine de la loi qui n’a pas été utilisé depuis 1979 et procédure lacunaire
  • Article 37 al 2: question du Gouvernement au Conseil Constitutionnel sur le caractère règlementaire ou législatif de dispositions contenues dans une loi, pas vraiment un contentieux, pas vraiment de partie au procès.

Etudier la procédure permet de savoir si nous sommes en présence ou non d’une juridiction. Il faut que la procédure suivie soit une vraie procédure, c’est-à-dire une procédure contradictoire, écrite ou orale, secrète ou publique, les décisions de l’organe doivent être motivées en droit. La procédure devant le conseil répond t’elle à ces exigences ?

La procédure est souvent critiquée. Les améliorations proposées par le conseil ont parfois été refusées par les parlementaires.

Reproches majeures : absence d’audience publique et respect du principe du contradictoire assez faible. Pour la motivation des décisions des progrès ont été fait. Pour autant des critiques concernent le caractère objectif du contentieux constitutionnel. Contentieux objectif car procès fait à un acte, la notion de partie est délicate à déterminée bien plus que dans le contentieux administratif.

Critique aussi le fait que le contrôle est a priori : il est difficile de modifier les règles de procédure qui sont liées au caractère objectif et a priori, si on veut changer la procédure il faut changer le système de contrôle à la française. Les critiques tiennent au système lui-même.

Surtout le contentieux de la loi ordinaire qui permet de discuter de la procédure car dans les autres procédures il est impossible de déterminer les parties et le contentieux. Dans le cas des saisines obligatoires la notion de partie est difficile à déterminer vu qu’il s’agit d’une obligation même si il n’y a pas de litige sous jacent. Dans le cas du contrôle des engagements internationaux même problème, les autres signataires des engagements ne peuvent apparaître comme des parties.

Liste des cours relatifs au contentieux constitutionnel

Les textes sont peu nombreux, à la fois une chance et un handicap.

La convention européenne des droits de l’homme et les textes internationaux sont ils applicables ? Notamment Article 6 §1 droit à un procès équitable. La CEDH a considéré que l’article 6 n’était pas applicable en matière électorale (CEDH 21 oct 1997 Pierre-Bloch).

Décision relative au tribunal constitutionnel des droits de l’homme : la CEDH dit que l’article 6 doit s’appliquer mais en Espagne il s’agit d’un contrôle concret et a posteriori, en l’espèce relative à une loi sur l’expropriation (CEDH 25 juin 1993 Ruiz Mateos c/ Espagne).

Dans la constitution il n’y a quasiment rien vu que l’article 63 renvoie à une LO pour déterminer la procédure et notamment les délais de saisine. On aurait pu penser qu’on aurait trouvé dans la LO l’équivalent d’un code du contentieux constitutionnel.

Ordonnance du 7 novembre 1958 est décevante sur ce point. Elle ne comprend pas une subdivision qui s’appelle procédure devant le Conseil Constitutionnel. Dans le titre « fonctionnement » on trouve qlq dispositions comme par ex la désignation d’un rapporteur. Article 56 : prévoit un règlement intérieur pour fixer les règles de procédures édictées par le titre 2.

En réalité, un règlement de procédure a été édicté mais seulement pour le contentieux électoral (31 mai 1959). Un autre règlement a été adopté en 1988 dans la perspective du référendum relatif à la Nouvelle Calédonie : règlement de procédure sur les opérations de référendums.

L’absence de règles formelles laisse une place importante à la liberté du Conseil Constitutionnel. L’essentiel des règles de procédure vient de la pratique, d’une forme de coutume. Mais il n’y a jamais eu de véritable décision de principe sur la procédure.

Les saisines du conseil sont pour l’essentielles des saisines à caractère politique faites par des autorités politiques. La saisine représente un habillage juridique d’une pensée politique.

Dans la mesure où nous sommes dans un contentieux abstraits, les éléments de faits comptent assez peu. A relativiser : de plus en plus le juge constitutionnel est amené à s’intéresser au contexte de la loi telle qu’elle va s’appliquer.

  • &1 – les auteurs de la saisine

Le Conseil Constitutionnel parle de requérants pour parler des saisissants (comme on disait avt).

Ils sont limitativement énumérés dans la CONSTITUTION en ce qui concerne le contrôle sur saisine facultative. La liste des requérants a été ouverte en 1974 aux parlementaires.

2° ouverture. Article 54. Pour les engagements internationaux. Révision de 1992.

S’agissant du contrôle obligatoire, la CONSTITUTION est muette sur ce point. L’al 1 ne dit rien sur les auteurs de la saisine. On se reporte donc à l’ordonnance organique.

Il y a des autorités susceptibles de saisir le Conseil Constitutionnel (saisines facultatives) et des autorités qui doivent saisir le Conseil Constitutionnel.

A – les autorités susceptibles de saisir le Conseil constitutionnel

4 (autorités initiales) plus 2 (groupes de parlementaires).

En droit français : pas de possibilité de saisine par d’autres personnes qui pourraient être les citoyens.

  • le Président De la République

Président De la République = gardien de la CONSTITUTION . pour ça, 2 moyens :

  • Article 10 al 2 (relatif à la promulgation des lois) prévoit que le Président de la République peut demander une 2e délibération de la loi dans son ensemble ou de certains de ses articles. Cette demande est adressée au Parlement qui ne peut pas refuser cette 2e délibération.
  • Il peut saisir le Conseil Constitutionnel entre le vote et la promulgation

Les 2 peuvent être utilisées l’une après l’autre. Possibilité de conjuguer ces 2 procédures.

Ex : en 1985 à l’occasion d’une loi sur la Nouvelle-Calédonie. Conseil Constitutionnel, 8 août 1985. Après cette décision, le Président de la République a demandé une nouvelle délibération de la loi.

Puis une autre décision sur la Nouvelle-Calédonie le 23 août 1985.

– nouvelle délibération => possibilité qui n’appartient qu’au Président de la République.

– saisine => moyen partagé.

La saisine du Président de la République = un pouvoir propre donc dispensé du contreseing.

Pourquoi l’avoir exclu du contreseing alors qu’on pourrait voir ce pouvoir comme un pouvoir politique et non juridique ? Parce que ce pouvoir de saisine était conçu en 1958 comme un moyen de résoudre d’éventuelles crises (pour les périodes de majorité discordante).

Saisine facultative

Tout ça est un peu virtuel puisque le Président de la République n’a jamais saisi le Conseil Constitutionnel d’une loi ordinaire (Article 61).

Pourquoi ?

  • Par crainte de l’image un peu désastreuse qu’un rejet de saisine ferait sur le Président de la République.

Il faudrait que le Président de la République soit sûr d’écraser ses adversaires.

La question est restée posée en 1999 à propos de la loi sur le PACS. Il ne l’a pas fait.

  • Il est plus facile d’envoyer les autres.
  • Il est difficile pour le Président de la République de mêler le droit et la politique. On imagine mal le Président de la République rédiger une saisine.

Pour les engagements internationaux (Article 54), le Président de la République a saisi.

Ça correspond à la vision qu’on a du Président de la République. Ses attributions classiques en matières internationales.

Cas de saisine quasi obligatoire.

Politiquement, il est pratiquement quasi obligé de saisir le Conseil Constitutionnel pour des traités dont on sait qu’ils portent atteinte à la CONSTITUTION .

  • Conseil Constitutionnel, 9 avril 1992, Maastricht 1. Là, le Président de la République avait pris l’engagement de saisir le Conseil Constitutionnel lors de la signature du traité.
  • Conseil Constitutionnel, 19 novembre 2004, Traité établissant une CONSTITUTION pour l’Europe. Pareil. Il s’était politiquement engagé à saisir le Conseil Constitutionnel.

Valery Giscard d’Estaing, Mitterrand et Chirac n’ont pas hésité à utiliser cette possibilité. Aussi, pour résoudre parfois des problèmes internes, parfois même au sein de leur majorité.

1976 = 1ère utilisation de l’article 54 par le Président de la République. Au sujet de l’élection du Parlement européen au Suffrage Universel Direct.

Saisine parce que c’était susceptible de mettre en cause la souveraineté nationale.

CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 29 et 30 décembre 1976

Là, c’est pour rassurer la majorité. Dire : ok, ce n’est pas contraire à la souveraineté nationale.

Autre hypothèse :

  1. saisir le Conseil Constitutionnel pour satisfaire sa majorité contre la majorité parlementaire. Cohabitation.

Charte nationale des langues régionales ou minoritaire.

CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 15 juin 1999.

La cohabitation a permis une saisine conjointe du Conseil Constitutionnel au titre de l’article 54 du Conseil Constitutionnel entre le Président de la République et le 1er M (1 saisine signée par 2 autorités – ce qui n’apporte rien).

Ça manifeste la convergence de buts au sommet de l’Etat en matière de politique internationale.

A propos de 2 traités :

  • Conseil Constitutionnel, 31 décembre 1997, relative au traité d’Amsterdam.
  • Conseil Constitutionnel, 22 janvier 1999, relative au traité portant statut de la Cour pénale internationale.

L’exécutif tient à faire lever les obstacles juridiques à la ratification. Il s’agit d’un mécanisme préventif. C’est peut-être plus simple que le mécanisme qui permet au Parlementaires de saisir le Conseil Constitutionnel sur la loi de ratification.

  • Le 1er ministre
  • Saisine facultative

Saisine qui a été utilisée mais qui est restée rare.

Pourquoi ? Elle trouve son origine dans le fait majoritaire qui interdit politiquement et logiquement au Premier Ministre de saisir le Conseil Constitutionnel d’une loi qu’il a contribué à faire adopter.

Jusqu’aujourd’hui : 16 saisines du 1er M concernant les lois ordinaires. 5 pour les engagements internationaux.

Ça arriverait dans l’hypothèse de conflit entre le 1er M et sa majorité. Ça peut aussi permettre de faire lever des obstacles et des critiques à l’encontre d’une loi à laquelle il est attaché.

Ex : loi débattue pour lesquelles des questions constitutionnelles se pose. Là, le 1er M peut s’engager politiquement à saisir le Conseil Constitutionnel pour que celui-ci examine la constitutionnalité de la loi. C’est une certitude juridique dans un débat politique.

Une réponse positive conforte le 1er M. Ce n’est pas sans risque.

Il y a eu 2 cas de 1er M désavoués par le Conseil Constitutionnel (lois censurées) :

  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 28 juillet 1989, Loi Joxe. Rocard en 1989. concerne la compétence adm ou judiciaire concernant la reconduite à la frontière. Le Gouvernement avait opté pour la compétence du JUGE JUDICIAIRE. Le Conseil Constitutionnel a dit JA.
  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 25 fév 1992, Zone de transit. Edith Cresson. Concerne aussi le Droit des étrangers.
  • Les présidents des assemblées parlementaires

Faculté de saisine qui leur est donnée depuis 1958 dans un souci d’équilibre entre l’exécutif et le législatif. En réalité, cet équilibre ne se produit pas de cette manière-là. En gal, en termes d’équilibre politique, ce n’est pas 2-2.

L’utilisation de l’article 61 al 2 n’a pas été tout à fait identique pour les 2 présidents des ass.

  1. le président de l’AN

Le Président de l’Assemblée Nationale est issu de la majorité parlementaire n’a pas plus de raisons que le Premier Ministre de saisir le Conseil Constitutionnel puisqu’il est lui aussi issu de la majorité.

Mais il y a eu 3 cas de saisines de lois ordinaires par le Président du Sénat (aucune dans le cadre de l’article 54) :

  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 28 décembre 1976, relatif à la loi de finances
  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 24 décembre 1979, relatif à la loi de finances. Conseil Constitutionnel a censuré la LF puisque les dépenses avant les recettes.
  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 27 juillet 1994, lois relatives à la bioéthique. Le Président de l’Assemblée Nationale a voulu saisir le Conseil Constitutionnel des lois bioéthiques pour des raisons de fond. Pour lever un doute sur l’éventuelle inconstitutionnalité de la loi. Il veut être certain que ces lois sont constitutionnelles. (un peu comme saisine par le 1erM)
  1. le président du Sénat

Selon l’équilibre des pouvoir de la V° République, il n’appartient pas forcément à la majorité de l’Assemblée Nationale et donc du Gouvernement.

Il a donc plus de raisons et d’intérêts de saisir le Conseil Constitutionnel.

Avt 1974 (ouverture de la saisine), son rôle était même essentiel.

La révision de 1974 a diminué l’intérêt de la saisine par le Président du Sénat.

2 Président du Sénat qui se sont trouvés dans l’opposition par rapport à la majo de l’Assemblée Nationale :

  • Gaston Monnerville qui s’est opposé au GDG un certain nombre de x, notamment en 1962 à propos de la loi référendaire.
  • Alain Poher en opposition avec Pompidou.
  • Le Président du Sénat, jusqu’à aujourd’hui, n’a saisi que 6 fois le Conseil Constitutionnel.
  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 16 juillet 1971, Liberté d’asociation.
  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 6 novembre 1962, loi relative à l’élection du Président de la République au SUD.

Cas de saisines du Président du Sénat conjointe à celle de sénateurs. = une autre saisine.

Ex : Conseil Constitutionnel, 9 mai 1991, Loi relative au statut de la Corse.

  • Jamais de saisine pour engagement international.
  • Les groupes de parlementaires

Le plus fréquent.

Elargissement de la saisine en 2 temps : 1974 et 1992.

Groupe de 60 députés ou 60 sénateurs peuvent saisir le Conseil Constitutionnel.

Cette possibilité offerte à des parlementaires favorise le bicaméralisme égalitaire.

Mais c’est une fausse égalité numérique puisqu’il y a plus de 300 sénateurs et environ 600 députés. Il aurait peut-être été mieux de prévoir un seuil proportionnel équivalent pour les 2 chambres.

Cette compétence n’interdit pas les saisines parallèles des députés et sénateurs. Il peut y avoir une concertation entre les 2 du pt de vue de l’argumentation.

Depuis la dernière législature (2002), on voit souvent des saisines identiques. Seul l’auteur de la saisine est différent.

Il n’y a jamais eu de saisine conjointe signée par 60 députés plus 60 sénateurs comme on l’a vu pour le Président de la République et pour le 1er M. Rien ne l’empêche.

Les députés saisissent plus que les sénateurs.

Pendant longtemps, les sénateurs ont été les seuls à avoir utilisé l’article 54 (contrôle d’engagement internationaux). Conseil Constitutionnel, 2 septembre 1992, Maastricht 2. 1ère occasion de le faire.

Le chiffre de 60 = seuil élevé. Notamment parce qu’il est supérieur au nombre de parlementaires nécessaire pour former un groupe parlementaire dans une assemblée : 20 députés pour constituer un groupe parlementaire à l’AN. 15 au Sénat. On pourrait envisager d’abaisser le seuil à ces chiffres.

Ça évite les saisines dilatoires, les saisines trop politiques.

60 = beaucoup, surtout quand l’opposition n’atteint même pas le nombre de 60.

Ça s’est produit une fois sous la V° en 1993. Le PS n’avait même pas 60 députés.

Rien n’empêche que les auteurs de la saisine viennent de la majorité, notamment quand une partie de la majorité est opposée au texte.

En gal, ce sont des cas où la loi contestée a été adoptée par une partie de l’opposition.

Rien n’interdit juridiquement qu’un député qui a voté une loi puisse saisir le Conseil Constitutionnel.

  • Exceptions à saisines de la majorité :

– Conseil Constitutionnel, 15 janvier 1975, IVG. Rendue sur saisine de députés de la majorité.

C’est aussi la 1ère utilisation de la saisine parlementaire depuis la révision de 1974

– Conseil Constitutionnel, 27 juillet 1994, lois relatives à la bioéthique

Conseil Constitutionnel, 30 décembre 1996, LF rectificative pour 1996

– Conseil Constitutionnel, 7 novembre 1997, loi portant réforme du service national. Loi voulu par Chirac (avant la dissolution) mais votée par une majorité de gauche (gouvernement Jospin). Une partie de l’ancienne majorité a saisi le CC

– Conseil Constitutionnel, 28 sept 2006, Accord de Londres.

  • Irrecevabilité d’une saisine portant moins de 60 noms. Evident mais quelques bizarreries…

Ø Saisine régulière (à 60) suivie d’une 2e saisine de moins de 60 sénateurs à la 2e est irrecevable si elle porte sur des dispositions de la loi qui ne sont pas attaquées par la 1ère saisine. Arrivé en 1977, 1981. Le Conseil Constitutionnel, dans les 2 cas a considéré la saisine irrecevable parce que ces nouvelles saisines portaient sur des conclusions nouvelles.

CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 9 novembre 1999, Loi relative au PACS. Pareil.

Ø Si la seconde saisine signée par moins de 60 porte sur des dispositions de la loi déjà critiquées dans la 1ère saisine, elle est recevable.

Il ne s’agit pas de conclusions nouvelles mais de moyens nouveaux.

à Peu d’exemples. Conseil Constitutionnel, 29 décembre 1989, relative à la Loi Fiscale pour 1990.

  • L’impossibilité de saisir le Conseil Constitutionnel par un citoyen ou un administré

Cette possibilité n’existe pas à l’article 61 al 2 parce qu’elle n’est pas dans la tradition française de la loi. En outre, les conditions du contrôle a priori empêchent aux administrés de contester une loi.

Il pourrait y avoir un contrôle par voie d’exception (comme aux USA). Il pourrait exister une possibilité de question préjudicielle (Dans le projet de révision constitutionnelle de 1990, projet Badinter).

Le Conseil Constitutionnel a déjà été saisi par des citoyens dans les 80’s :

Ex à Conseil Constitutionnel, 18 novembre 1982, Quota par sexe. Saisine d’un particulier qui s’était greffée sur la saisine des parlementaires.

Dans les 2 cas, le Conseil Constitutionnel dit que la liste des autorités susceptibles de saisir le Conseil Constitutionnel interdit la saisine par d’autres personnes. « La demande de M. X est irrecevable ».

Dans le cas de l’article 54, ça ne s’est pas présenté mais la solution serait la même.

  • Technique des « portes étroites »

Sur des lois particulièrement discutées, particulièrement conflictuelles, qui intéressent des groupes de pression…, des citoyens, des groupements (syndicats, groupes d’intérêts, lobbies…) s’adressent au Conseil Constitutionnel par des mémoires dans lesquelles ils défendent la constitutionnalité ou non d’un texte.

Ces pratiques ne sont pas rendues publiques. Cet envoie de mémoire n’est pas mentionné par le Conseil Constitutionnel. Il n’en fait pas état dans sa décision.

Pratique fréquente diversement appréciée par les membres eux-mêmes de Conseil Constitutionnel. Certains y sont totalement hostiles car c’est un moyen de détourner l’article 61. D’autres y sont favorables car ils peuvent trouver des arguments utiles dans ces mémoires.

Ex :

  • Loi de nationalisation a donné lieu à de nombreuses portes étroites.
  • CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 28 sept 2006, Accord de Londres.

Moyen détourné de saisir le Conseil Constitutionnel par des administrés.

B – les autorités qui sont dans l’obligation de saisir le Conseil Constitutionnel

Il s’agit bien d’un contrôle obligatoire et non pas d’une auto saisine par le Conseil Constitutionnel.

En 1974, lors de l’ouverture de la saisine, Valery Giscard d’Estaing voulait aussi introduire une auto saisine du Conseil Constitutionnel en cas de violation des droits & libertés. Ça a été rejeté par le Conseil Constitutionnel lui-même et par le Parlement.

Article 17 de l’ordonnance organique désigne les autorités compétentes pour saisir le Conseil Constitutionnel ;

  • Les présidents des assemblées et les règlements des assemblées parlementaires

Al 2 de l’article 17 prévoit que le Règlement et les modifications de celui-ci sont transmises au Conseil Constitutionnel par le président de l’assemblée en question. = obligation.

2 remarques :

  • le Président des assemblées en question a le choix du moment de saisir le Conseil Constitutionnel. Il pourrait se permettre d’attendre un temps infini. La seule conséquence serait l’absence de mise en application du règlement (61 al 1).

On pourrait imaginer un conflit grave entre le Président de l’assemblée et la majorité de l’assemblée qui a adopté le règlement en question. Le président pourrait faire traîner les choses pour ne pas que le règlement s’applique. Très peu probable puisque le Président de l’assemblée fait en principe partie de la majorité.

  • Si le contrôle est bien obligatoire dans le texte, aucune sanction n’est prévue en cas de défaut de saisine. La seule sanction est que le texte n’entre pas en vigueur.

Depuis 1959 jusqu’à 2007, le Conseil Constitutionnel a eu à se prononcer plus de 60x sur les règlements et leurs modifications pour chacune des assemblées.

Cas du règlement du Congrès. Les textes n’envisagent pas spécialement la saisine du Conseil Constitutionnel pour le règlement du Congrès. Le Président du Congrès a saisi le Conseil Constitutionnel en 1963 pour le règlement du Congrès. Il a été révisé en 1999. Il y a eu une saisine du Conseil Constitutionnel à cette occasion.

L’intérêt de ces décisions relatives aux Congrès = les délais de saisine.

Le Congrès ne siège qu’une seule journée. S’il veut modifier son règlement, il doit le faire en début de séance. Il faut l’adresser au Conseil Constitutionnel qui doit siéger le jour même. La décision doit revenir au Congrès.

  • Le 1er M et les lois organiques

Article 17 al 1 de l’ordonnance organique plus CONSTITUTION.

« Les LO adoptées par le Parlement sont transmises au Conseil Constitutionnel par le 1er M ».

Par accident, il peut arriver qu’une autre pers saisisse le 1er M. C’est arrivé 2 fois en 1967. Cas d’empêchement du 1er M. saisine par voie de délégation.

Une centaine de décisions rendues pour des LO.

Le texte de l’ordonnance de 1958 a préféré que ce soit le 1er M qui saisisse le Conseil Constitutionnel plutôt que le Président de la dernière assemblée qui statue. Pourquoi ? Parce que c’est le 1er M qui assure le lien entre le parlement et l’exécutif dans la procédure législative.

L’absence de sanction qui pèserait dans le cas d’une non saisine = pareil que pour le Règlement des assemblées.

Mais il y a un délai : délai de 15 j de la promulgation. Donc, le Premier Ministre est vraiment dans l’obligation de saisir le Premier Ministre.

C – le cas particulier de la saisine des lois du pays et de la saisine des textes relatifs aux compétences de la Polynésie française

v Lois du pays. Nouvelle-Calédonie

LO du 19 mars 1999 organise un contrôle spécifique sur les lois du Pays de la Nouvelle-Calédonie adoptées par le Congrès du territoire dans des domaines énumérés.

Ces lois peuvent faire l’objet d’une saisine facultative du Conseil Constitutionnel (pas du JA). L’idée est de considérer ces textes comme de véritables lois.

Les autorités de saisines sont énumérées par la LO de 1999.

Saisine qui se fait dans un délai de 10 j entre l’adoption de la « loi » et la promulgation.

Procédure qui a donné lieu à 2 décisions depuis 1999. L’une en 2000. L’autre, Conseil Constitutionnel, 5 avril 2006. La saisine a été rejetée car il n’y avait pas le nombre suffisant de signataires.

v La Polynésie française

LO du 27 février 2004 portant surtout de la Polynésie française.

Prévoit à propos de textes adoptés au niveau national (lois, ordonnances, décrets), intervenus après l’entrée en vigueur de la LO en question intervenus dans des matières qui sont désormais de la compétence de la Polynésie française.

Le Conseil Constitutionnel peut être saisi pour le déclassement de ces textes.

Le texte donne les autorités de saisine.

  • &2 – La saisine

A – la forme de la saisine

Très peu de formalisme dans le contentieux constitutionnel.

Le Conseil Constitutionnel peut être saisi par une simple lettre.

La signature de la saisine interdit tout désistement.

  • La saisine et écrite et signée

L’article 18 de l’ordonnance de 1958 prévoit que la saisine peut se faire par une ou plusieurs lettres de saisine (il peut y avoir 60 lettres identiques, ou une signée par 60).

Ces lettres doivent être signées. Le secrétariat général des signatures est contrôlé par le secrétariat du Conseil Constitutionnel. Si la télécopie est possible, il faut ensuite une régularisation manuscrite.

Pas de saisine électronique possible aujourd’hui.

  • La signature de la saisine interdit tout désistement

La saisine du Conseil Constitutionnel a un caractère irrémédiable et indivisible.

Il a fallu attendre les années 1990 pour que cette question apparaisse. Empêche tout retour en arrière ou désistement. Un requérant ne peut pas invoquer une sorte de remord tardif.

Le Conseil Constitutionnel estime que la saisine met en route le contrôle de constitutionnalité et il n’est plus possible d’y faire obstacle.

La solution est la même que le nombre de parlementaire qui veuille se désister fasse passer en dessous des 60 signatures.

CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 30 décembre 1996, relative à une LF rectificative pour 1996 (amendement Malraux sur les anciens combattants). Saisine par 61 députés. Puis, plusieurs Parlementaires ont dit qu’ils souhaitaient qu’on les retire de la liste (= désistement). C’était des parlementaires de la majorité qui contestaient cette disposition spécifique pour des raisons idéologies.

Ces parlementaires avaient souhaité contester cette disposition litigieuse. Ils n’ont pas compris que la saisine du Conseil Constitutionnel entraîne l’examen possible de toute la loi par le Conseil Constitutionnel, y compris de dispositions avec lesquelles ils étaient en accord.

Le Conseil Constitutionnel n’a pas fait droit à leur demande et a considéré que cette saisine ne s’apparentait pas à un recours opéré par une personne devant le Juge Administratif qui présente un intérêt et qui lorsque cet intérêt à agir est satisfait, cette personne se désiste de ce recours. Au contraire, le Conseil Constitutionnel a mis l’accent sur le caractère totalement objectif du contentieux constitutionnel à la française.

La saisine a pour effet de déclencher un contrôle de toutes les dispositions de la loi qui lui sont déférées, y compris de celles qui n’ont pas été critiquées dans la saisine. = responsabilise les auteurs de la saisine.

Les arguments de texte invoqués par le Conseil Constitutionnel pour justifier sa position sont discutables. Parce que ces textes sont peu nombreux, qu’on peut les interpréter de plusieurs manières différentes.

L’un des arguments majeur = l’article 61 alinéa 1 et 2 qui dit que le Conseil Constitutionnel se livre à un examen de la conformité de la loi à la CONSTITUTION. Le Conseil Constitutionnel a toujours interprété ça comme une possibilité de contrôler la conformité de toute la loi à la CONSTITUTION.

L’autre argument de texte : l’article 18 de l’ordonnance organique. Mais ça ne traite que de la forme de la saisine et ne comporte aucune indication sur le contenu de la saisine et donc sur le comportement du Conseil Constitutionnel.

Ainsi, la décision Quota par sexe de 1986 se trouve de manière pleinement et expressément justifiée.

Les auteurs de saisines peuvent être tentés de se désister. Ils n’ont plus la possibilité de se désister car ça reviendrait à faire obstacle à l’exercice du contrôle. 386 DC. Considérant n° 4.

Alors que le contrôle des lois ordinaire est facultatif, malgré tt, le contrôle de constitutionalité s’éloigne du REP puisque tant que l’instruction n’est pas close, le désistement est toujours possible en matière de REP.

Dans la décision 386 DONC, le Conseil Constitutionnel ne prévoit que 2 cas de dérogations possibles dans lesquelles il admettrait le désistement :

  • l’erreur matérielle
  • la fraude ou le vice du consentement

Dans l’hypothèse de 1996, ça faisait descendre le nombre en dessous du seuil de 60, mais de toute façon, ça ne change rien. Le retrait est toujours impossible.

Autre décisions 99-421 DONC (CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 16 novembre 1999, Loi de codification). Un député avait souhaité enlever sa signature en invoquant la « confusion » qui a accompagné la signature de la saisine. Le Conseil Constitutionnel (3 ans après la décision de 1996) a considéré que la saisine avait un caractère global, même si ça ne faisait pas passer en dessous des 60.

Pourquoi le Conseil Constitutionnel adopte cette conception rigide du contrôle de constitutionnalité ?

D’une certaine façon, il enferme les auteurs dans une saisine qui n’est plus la leur.

B – la motivation de la saisine

Pas de motivation obligatoire de la saisine

Toujours comparable avec le contentieux administratif.

Ça accentue le caractère non juridictionnel. La lettre de saisine se contente de viser le texte contesté. Elle peut ne rien comporter d’autre que le texte. Elle peut ne pas être motivée.

Ça donne de la liberté au Conseil Constitutionnel.

Ex : Conseil Constitutionnel, 16 juillet 1971, rendue sur saisine du Président du Sénat qui n’avait pas motivé sa saisine.

Développement de la motivation

La motivation des saisines accompagne et suit le développement quantitatif des saisines parlementaires.

C’est à partir de 1974 que les parlementaires se sont mis à motiver les saisines.

Quand le Parti Communiste était assez nombreux à l’Assemblée Nationale, il pouvait saisir seul le Conseil Constitutionnel de 1974 à 1981, ces saisines n’étaient jamais motivées parce que, le Parti Communiste, qui a toujours été hostile au contrôle de constitutionnalité de la loi pour des raisons de principe (conception rousseauiste de la loi), n’a pas voulu argumenter ses saisines.

Aujourd’hui, les saisines sont très développées.

Saisines parlementaires = très argumentées et motivées. Elles s’accompagnent de mémoires

Les autres auteurs de saisines.

Elles ne sont pas motivées pour le 1er M, Président des assemblées ou Président de la République.

Les raisons pour lesquelles ces autorités politiques ne motivent pas :

  • ils ne veulent pas s’exposer à un désaveu sur l’argumentation juridique du Conseil Constitutionnel.
  • ils ne veulent pas entrer dans une logique contentieuse

C – la publicité de la saisine

La saisine n’a pas été publiée pendant très longtemps.

Le Président du Conseil Constitutionnel, Mayer, en 1983, a décidé que les saisines des décisions du Conseil Constitutionnel seraient publiées au JO.

1994, sous la présidence de Badinter, il a décidé la publication au JO des observations du Gouvernement.

Où sont publiées ces saisines et observations dans le JO ? A partir de 1995, depuis une décision 369 DONC, on a décidé que la saisine, la décision, les observations sont publiées en même temps et avec la loi.

= la décision et ce qui l’accompagne sont avec la loi, comme si elles faisaient partie de la loi. Comme si la loi ne devait être comprise qu’avec la saisine.

Ça impliquerait que la décision est un élément, une sorte de dernière étape de la promulgation de la loi.

Publication de saisine : ça ne vaut que pour les décisions pour lesquelles il y a une saisine argumentée et motivée.

  • Pour toutes les saisines obligatoires : pas de publication de la saisine
  • Pour les saisines facultatives mais sans argumentation (celles du Président de la République, Premier Ministre, Président des assemblées) : pas de publication de la saisine

D – Délai de saisine

Il faut distinguer les différents types d’actes qui peuvent faire l’objet de saisine et aussi les différents contrôles.

Saisine obligatoire / saisine facultative.

2 cas de contrôles obligatoires (Article 61) :

– LO (contrôle avant la promulgation)/

– règlements des assemblées (contrôle avant l’entrée en v)

Dans un cas comme dans l’autre, le texte qui fait l’objet de la saisine doit avoir été définitivement adopté.

Le Conseil Constitutionnel a été amené à préciser ce pt : Conseil Constitutionnel, 8 novembre 1976, prévention des accidents du travail 1. Saisine irrecevable. Le Conseil Constitutionnel rappelle que le texte dont il est saisi doit avoir le caractère de loi. Il doit avoir été définitivement adopté. Il ne peut être saisi qu’au terme de la procédure législative.

Donc, après le vote mais avant la promulgation : possibilité de saisine.

Mais une difficulté apparaît : le délai de saisine n’est pas fixe car il dépend de la promulgation par le Président de la République.

Le délai de promulgation est fixé à 15j. Mais ce délai de 15j est un maximum pour promulguer. Donc, le délai max de promulgation = 15j. Mais le délai n’est pas fixé dans son minimum.

Le Président de la République pourrait promulguer la loi immédiatement après l’adoption de la loi. Donc, le délai de saisine du Conseil Constitutionnel est alors réduit à presque rien.

Le Président de la République pourrait promulguer immédiatement la loi

  • pour des raisons d’urgence
  • Volonté du Président de la République d’empêcher la saisine du CC

Le Président de la République ne commettrait pas alors d’illégalité.

Ça s’est déjà produit. Conseil Constitutionnel, 7 novembre 1997, Loi portant réforme du service national. La loi a été votée par le Parlement. Le Président de la République a attendu 1 semaine pour promulguer. Mais, le lendemain, des sénateurs (de la majorité) saisissent le Conseil Constitutionnel d’une loi qui n’avait pas encore été publiée (phase intermédiaire entre la promulgation et la publication). Le Conseil Constitutionnel s’est déclaré incompétent au motif qu’une loi promulguée même non publiée ne peut être déférée au Conseil Constitutionnel.

Il y a une véritable lacune des textes qui auraient pu prévoir une limite minimale pour la saisine. Jusqu’à aujourd’hui, les choses se sont bien passées pour des raisons de bonne courtoisie entre les autorités publiques. Mais en cas de crise majeure, la situation pourrait être délicate.

La promulgation est donc dans la procédure législative, l’acte qui clos la procédure législative.

CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 23 août 1985, Evolution de la Nouvelle-Calédonie 2. Considérants 20 et 22 qui expliquent ce qu’est la promulgation.

La saisine suspend le délai de promulgation (61 al 4). (Et non pas interrompu. Interrompu = un nouveau délai repart).

Loi sur l’IVG en 2001 a soulevé une autre difficulté en matière de délai. Conseil Constitutionnel, 4 juillet 2001, IVG. Le Conseil Constitutionnel rappelle que le délai de promulgation ne peut être suspendu que par une saisine du Conseil Constitutionnel et qu’il ne peut pas être suspendu une 2° fois par une autre saisine dirigée contre le même texte. Dans l’affaire de 2001, le Conseil Constitutionnel avait déjà statué sur cette loi au fond le 27 juin 2001. Le Conseil Constitutionnel avait été saisi une 2° fois de cette même loi le 29 juin (ils avaient trouvé de nouveaux arguments). Le Conseil Constitutionnel a dit que, ayant statué déjà une fois sur cette loi, le délai ne pouvait pas être suspendu une 2° fois.