La répression pénale des infractions commise dans l’entreprise

L’infraction commise au sein d’une entreprise.

Deux catégories d’infraction sont susceptibles d’être commises :

  • Certaines n’ont rien à voir avec la marche de l’entreprise, seuls des facteurs de temps et de lieux les y rattachent. Exemple : bagarre sur le lieu de travail —> action purement individuelle qui ne concerne pas les entreprises, ses dirigeants et les employés.
  • Les infractions liées à la marche de l’entreprise, c’est-à-dire celles qui sont commises à travers le travail pour l’entreprise. Exemple : Infraction de contre-façon, de pollution, de publicité trompeuse et celle liées à la sécurité du travail (les accidents résultant du non respect de la réglementation sur l’hygiène et la sécurité entraînent au moins une contravention). S’il y a violence ou homicide indépendamment de ce non respect, si celui-ci est très grave, il peut également avoir délit de mise en péril, en quel cas il y a un lien avec l’entreprise. Pendant longtemps, les tribunaux ont uniquement recherché des responsabilités individuelles. Ceci a posé un double soucis : éviter de sanctionner quelqu’un qui n’y est pour rien comme un contre maître.
  • La recherche des responsabilités individuelles est délicate. En droit pénal, le soucis de savoir qui est responsable s’oppose à la logique du droit civil où le chef d’entreprise sera systématiquement responsable pour le fait de ses préposés. Le code pénal a admis le principe de responsabilité des personnes morales sous la forme d’amendes (ce qui fut une des plus grandes innovations de la réforme de 1992). Le code pénal admet le cumul de responsabilités individuelles et de la société elle-même.

Les réformes de 1996 et surtout du 11 juillet 2001 ont largement diminué ce domaine de responsabilité des personnes physiques pour faute non-intentionnelle ou d’imprudence et il n’est pas impossible que la responsabilité des personnes morales prenne le pas. La loi du 11 juillet 2001 diminue le domaine de la responsabilité pénale des personnes physiques pour faute d’imprudence.

1.La responsabilité des personnes morales.

Article 1992 Code Pénal. Le texte actuel a été mal construit. Ainsi, chaque mot doit être interprété.

Article 121-2 Code Pénal: Principe d’une irresponsabilité exclusivement personnelle. Ce n’est pas parce qu’on reconnaît le responsabilité d’une personne morale que ce sera un groupe car il existe la responsabilité pénale personnelle de la personne morale. Ce n’est pas une exception au principe ci-dessus. C’est en son nome que l’infraction a été commise, donc c’est la personne morale qui est directement responsable. Les personnes morales, à l’exception de l’état, sont responsables pénalement selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 Code Pénal dans les cas prévus par la loi ou le règlement des infractions commises pour leur compte par leurs organes et représentants.— Domaine.

Il existe deux restrictions :

  • -La responsabilité pénale de la Personne Morale n’existe qu’à propos des infractions pour lesquelles le législateur l’a indiqué expressément. L’homicide est une des infractions prévues. A l’occasion d’une loi récente (qui a prévu l’infraction de manipulations psychologiques ou la lutte contre les sectes) le législateur a augmenté largement les infractions susceptibles d’être imputés à la Personne Morale: presque tous les actes volontaires.
  • La responsabilité peut concerner a priori aussi bien des Personnes Morales de droit privé et de droit public, mais seulement dans le cadre d’activité économiques ou sociales. Ce qui est exclu, c’est la responsabilité de Personne Morale pour les activités relevant de la puissance publique : l’état ne peut jamais être poursuivi pénalement. Les crimes jugés par la justice pénale international sont des crimes commis dans le cadre d’une politique d’état ou gouvernementale. Les Collectivités Territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions (à caractère économique et social qui ne sont pas liés à l’exercice de puissance publique) commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de convention, de délégations de service public (pas liées à puissance publique). Exemple : 11.12.2001 —> accident dû à l’utilisation d’une machine dans un lycée technique de l’enseignement public. La Collectivité Territoriale dont dépendait ce lycée était poursuivie pour blessures par imprudence. Pas abouti parce que les tribunaux ont décidé que l’obligation de sécuriser les machines du lycée participait à l’enseignement public et donc pas susceptibles de délégations : Collectivités Territoriales = mise hors de cause.

— Conditions auxquelles la responsabilité de la personne morale peut être poursuivie.

Deux conditions découlent du texte :

  • -L’acte doit être accompli par les organes dirigeants ou représentants de la Personne Morale: infraction doit provenir de ceux qui agissent au nom de la Personne Morale, qui décident en son nom. Ceci exclu la responsabilité des Personnes Morales pour les actes des ses salariés normalement, mais inclut des organes normaux de représentation de la Personne Morale. Il est possible que le représentant, dans certains secteurs, notamment dans le domaine de sécurité, délègue ses pouvoirs. Le délégataire est également susceptible d’engager la responsabilité pénale de la PM. Exemple : Crim. 9.11.1999 sur les avalanches mortelles (homicide involontaire) à cause de la faute d’appréciation des directeurs des pistes et chefs de secteurs. La Personne Morale est poursuivie aussi. Ceux qui ont agi ne sont pas ses représentants mais avaient reçu délégation de pouvoir des représentants de la Personne Morale : donc c’est eux qui ont agi au nom de la Personne Morale : société a également été condamnée.
  • -L’acte doit correspondre à la Personne Morale elle-même. L’acte doit être accompli pour le compte de la Personne Morale :
  • Si la faute est lucrative : normalement si ça a rapporté à la Personne Morale —> pas de difficulté.
  • Mais sont incluses également des fautes sans profit ou profit plus indirect (discrimination à l’embauche révélant une véritable politique de l’entreprise).

— Mécanisme.

Système spécifique de sanction. Principe = amende mais à chaque fois le taux encouru, le maximum encouru est quintuplé par rapport à celui pour les personnes physiques. Autres sanctions = économiques. Interdictions et privations de droits (comme l’interdiction d’APE ou de participer à des marchés publics). Exceptionnellement dissolution de la Personne Morale pour les infractions les plus graves et pas pour les syndicats

– Responsabilité Personne Morale pas exclusive de la responsabilité des personnes physiques pour les mêmes faits.

2.La responsabilité des personnes physiques.

Article 127-1 Code Pénal : on est responsable pénalement que de son propre fait. Jamais responsable au pénal du fait d’autrui. Distinction d’avec le code civil.

Loi 1976 (infraction à réglementation hygiène et sécurité du travail): imputable au chef d’entreprise qu’en cas de faute personnelle de sa part. Mais dans une entreprise, il incombe au chef d’entreprise de se préoccuper personnellement de la sécurité dans son entreprise et donc de la façon dont la réglementation est respectée: peut on admettre qu’en cas d’accident il s’agira toujours d’une faute personnelle de sa part ? Traditionnellement, on admet dans ces cas la responsabilité pénale du chef d’entreprise. Mais cela ne veut pas dire qu’il doit lui-même veiller personnellement à la sécurité : il a seulement l’obligation d’organiser par avance celle-ci. Il peut pour cela faire une délégation de pouvoir en la matière (le domaine de la sécurité n’est ici qu’un exemple). La responsabilité pénale incombera alors en principe au délégataire, à 3 conditions :

  • – La délégation doit être indispensable, i.e. en rapport avec la taille de l’entreprise
  • – le délégataire doit avoir un lien de subordination avec le chef d’entreprise (en principe un de ses salariés ou l’un des salariés d’une des entreprise si groupe d’entreprise)
  • – doit être effective (pas homme de paille): celui qui est délégué doit posséder la compétence, l’autorité et les moyens financier pour faire appliquer ses ordres.

Si conditions sont remplies, en principe le chef d’entreprise est exonéré sauf si évidemment il a malgré tout participé à l’acte illicite.

Ex. Ch Crim, 06/02/2001 : pub trompeuse-délégation en matière de pub-mais chef d’entreprise avait participé a l’élaboration de la campagne litigieuse.

Le délégataire peut lui-même sub-déléguer une partie de la tache. Même conditions que pour simple délégation.

La preuve de la délégation est libre (ecrit, oral…). La a admis une exonération du chef d’entreprise jurisprudence indépendamment de toute délégation quand il peut prouver l’absence de faute

Ex. Crim, 20.09.1980, Revue de Science Crim, 1981, P.870: accident alors que le chef d’entreprise devait partir en vacances; avait fait programme de travail, mais salariés initiatives non prévues dans le programme: accident: exonération du chef d’entreprise dans ce cas-là.

Mais cas ou délégataire part en vacances, chef d’entreprise s’est vu reproché de ne pas l’avoir remplacé. Le droit pénal doit être préventif, dissuasif.

Loi du 13.05.1996 qui a un peu restreint la responsabilité pénale pour faute d’imprudence ne devait pas avoir beaucoup d’influence sur la responsabilité des chefs d’entreprise

Ce qui a le plus changé: loi 10.07.2000, sanction des fautes pénales non intentionnelles: influence sur responsabilité perso du chef d’entreprise.

Loi 2000 fondé sur mécanisme de distinction selon que le lien de causalité est direct ou indirect:

– lien de causalité imprudence-accident indirect (lorsque l’imprudence a seulement concouru au dommage et n’en est pas la cause 1ère): seule l’imprudence qualifiée (faute délibérée ou caractérisée) est punissable pénalement en ce qui concerne les personnes physique (loi rien modifié à la responsabilité des Personnes Morales).

Le plus souvent, la faute du chef d’entreprise n’est pas la cause immédiate de l’accident: enchaînement de circonstances qui a pu conduire à l’accident parce que mauvaise organisation; donc il est possible que la loi profite aux chefs d’entreprise. Il est possible que les poursuites contre les Personnes Morales prennent le pas sur poursuites contre personnes physiques en cas d’imprudences simples.

Ex. Crim, 24.10.2000 : Cour d’Appel : ouvrier tombé d’une échelle. La Cour d’Appel impute la responsabilité au contre maître sur place pour blessure par imprudence. Quant au directeur de l’usine, relaxé en vertu de la loi (seulement imprudence simple) et de toute manière, délégation. Cassé par Cass. : la Cour d’Appel aurait dû rechercher s’il n’y avait pas responsabilité pénale de la société pour imprudence simple commise en son nom par le délégué pour son compte en dépit de la relaxe du directeur de l’usine.