La responsabilité civile ou pénale des fonctionnaires

La responsabilité civile et pénale des agents de la fonction publique

L’article 15 de la DDHC dispose que la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration.

La responsabilité du fonctionnaire a donc un fondement constitutionnel incontestable mais la portée de cette disposition est relativement limitée dans la mesure où la mise en oeuvre de la responsabilité d’un fonctionnaire n’est pas aisée.

Tout de même, l’agent public n’est pas irresponsable. Il existe d’ailleurs trois types de responsabilités :

  •  la responsabilité disciplinaire (étudié dans un autre chapitre)
  • la responsabilité civile
  • la responsabilité pénale

CHAPITRE 1 : La responsabilité civile des fonctionnaires

La responsabilité civile se distingue de la responsabilité disciplinaire en ce sens qu’il ne s’agit pas d’une responsabilité interne à l’administration.

  • &1 : Le fait générateur de la responsabilité du fonctionnaire : la faute personnelle

Seule la faute personnelle du fonctionnaire permet de mettre en jeu la responsabilité du fonctionnaire, devant le juge judiciaire. La faute personnelle se définit par opposition à la faute de service qui correspond à une responsabilité de l’administration.

Le problème qui se pose résulte de la possibilité que se confondent une faute de service et une faute personnelle.

La jurisprudence a posé certains critères pour identifier la faute personnelle :

– la faute commise dans l’exercice des fonctions ou en dehors

Dans l’exercice des fonctions

Une faute est considérée comme personnelle si elle présente un caractère intentionnelle ou si elle est particulièrement grave.

En dehors des fonctions

La faute personnelle est admise plus largement dans ce cas. Mais, la faute de service n’est pas exclue. Pour que soit reconnue une faute personnelle, en dehors de l’exercice des fonctions, il faut que celle-ci soit dépourvue de tout lien avec le service. À contrario, les fautes dont il pourra être démontré qu’elles ne sont pas dénuées de tout lien avec le service, pourront être imputées à l’administration.

Ex : l’arme conservée à domicile par un gardien de la paix. L’accident qui survient à cause de cette arme peut être considérée comme une faute de service parce que sa détention n’était pas sans rapport avec le service.

  • &2 : Les limites à la mise en œuvre de la responsabilité du fonctionnaire

La responsabilité pour faute personnelle du fonctionnaire est rarement mise en œuvre pour les faits commis dans l’exercice des fonctions. Mais, la rareté de cette mise en œuvre ne se fait pas forcément au détriment des victimes. Elle se fait parfois à leur avantage.

3 limites :

– L’article 11 du titre 1er du STATUT GÉNÉRAL DE LA FONCTION PUBLIQUE précise que lorsque le fonctionnaire est poursuivit devant le juge civil, à la condition qu’aucune faute personnelle ne lui soit imputable, l’administration doit le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui.

– Dans deux cas, s’opère une substitution de responsabilité (la responsabilité de l’administration remplace la responsabilité du fonctionnaire) :

  •  Dans le cas des dommages causés aux élèves ou par les élèves des écoles publiques (loi de 1937).

Les instituteurs ne seront donc pas reconnus responsables même en cas de défaut de surveillance. En revanche, l’État peur former une action récursoire contre les instituteurs dans ce cas.

  •  Dans le cas d’un dommage causé par un véhicule (loi de 1957).

La loi reconnaît la responsabilité de l’administration pour tout dommage causé par un véhicule de l’administration, quant bien même la conduite de l’agent serait fautive.

– Le cumul de la responsabilité de l’administration et de la responsabilité du fonctionnaire (cumul d’une faute de service et d’une faute personnelle).

Dans ce cas, la victime peut demander la réparation de l’intégralité du dommage à l’administration (protection contre l’insolvabilité de l’agent fautif).

CHAPITRE 2 : La responsabilité pénale des fonctionnaires

L’objet de la responsabilité pénale

L’objet de la responsabilité pénale est de préserver l’intérêt de la société, l’ordre public. Le Procureur de la République représente à ce titre, les intérêts de la société.

Dans le cadre de la responsabilité disciplinaire, il s’agit d’assurer l’intérêt du service.

L’autonomie de la responsabilité pénale et de la responsabilité disciplinaire

Les procédures ont chacune un caractère autonome :

  •  les décisions de l’administration ne s’imposent pas au juge pénal et inversement
  •  les constatations de fait établies devant l’administration ne s’imposent pas au juge pénal mais, les faits établis devant le juge pénal s’imposent à l’administration.

SECTION 1 : Le caractère faiblement spécifique de la responsabilité pénale des fonctionnaires

Dans le Code pénal, peu de dispositions sont spécifiquement destinées aux fonctionnaires.

En revanche, il existe des dispositions mentionnant des infractions spécifiques aux personnes qui exercent des fonctions publiques et des circonstances aggravantes :

– Les infractions spécifiques aux personnes qui exercent des fonctions publiques

C’est le titre III du chapitre 2 du Code pénal qui mentionne ces infractions spécifiques aux personnes exerçant une fonction publique (ex : la prise illégale d’intérêt).

– La circonstance aggravante constituée par la qualité d’agent de la fonction publique

ex : les atteintes à la liberté individuelle, les atteintes au secret des correspondances.

SECTION 2 : Le cas des infractions non intentionnelles

L’article 121-3 du Code pénal prévoit une exception au principe du caractère intentionnel des crimes et délits. En effet, dans certains cas, il est possible que des infractions aient un caractère non intentionnel.

Quels sont ces délits ?
– la mise en danger délibérée d’autrui
– la faute d’imprudence
– la faute de négligence

De ce point de vue, l’existence de ces infractions non intentionnelles a posé problème dans les années 1990. un certain nombre de fonctionnaires ont été poursuivis pour ces infractions à l’occasion d’événements tragiques

Ex : L’affaire de la chute du panneau de basket qui a tué un lycéen. Le directeur du lycée avait été poursuivi pour faute de négligence puis relaxé.

Tout cela a alimenté la crainte des fonctionnaires et notamment des élus locaux de se voir poursuivis.

La définition des infractions non intentionnelles a été reprise par deux lois, l’une de 1996, l’autre de 2000.

Aujourd’hui, il existe deux types de conditions (pour que l’infraction non intentionnelle soit caractérisée) :

  •  La démonstration que l’auteur n’a pas accompli les diligences normales compte tenu de ses fonctions, compétences et moyens. L’article 11 bis A du STATUT GÉNÉRAL DE LA FONCTION PUBLIQUE ajoute que les difficultés propres aux missions confiées au fonctionnaire doivent être prises en compte.
  •  Dans le cas d’un lien indirect entre la faute et le dommage, l’auteur doit avoir :

– commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d’une particulière gravité qu’il (l’auteur) ne pouvait ignorer

– ou violé de façon manifestement délibérée, une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.