La responsabilité des dirigeants de société

La responsabilité des dirigeants

Il faut distinguer selon que la victime du dommage est la société, un associé ou un tiers. Il faut savoir qui et la victime.

§1 – La responsabilité du dirigeant envers la Société

Cette hypothèse est assez facile à identifier, un dirigeant commet des fautes de gestion, souscrit des marchés ruineux, néglige des actions, fait des investissements inconsidérés, la société s’appauvrit.

Ce type de préjudice donne lieu à une action en responsabilité qui porte le nom d’action sociale, l’action en responsabilité de la société à l’égard d’un dirigeant. C’est une action qui va se traduire par l’obtention de dommages et intérêts au profit de la Société.

Le problème c’est que par définition, elle doit être exercée par le dirigeant lui même. Il s’agit pour le dirigeant d’agit contre lui même. S’il est en place, il ne le fera pas. Il suffirait de le révoquer et s’il est majoritaire, on ne pourra pas le révoquer (sinon révocation judiciaire).

On ne peut exclure l’hypothèse que s’il se réitère, il soit remplacé par un dirigeant complice ou complaisant qui n’engage pas l’action.

D’où une règle particulière dans le Code civil, figurant à l’article 1843-5, cette action sociale a de particulier de pouvoir être exercée par un simple associé agissant pour le compte de la société. On appelle cette action, action ut singuli (≠ ut universi). C’est un cas particulier, prévu par la loi qui habilite l’associé à agir pour le compte de la Société.

L’associé exerce un droit propre, un droit lié à la qualité d’associé. La société devra ensuite être mise en cause.

L’article 1843-5énonce ensuite deux règles pour assurer l’efficacité de l’action :

La loi condamne toute clause statuaire qui réduirait la faculté d’agir at singuli.

Est visée également la pratique du quitus, lorsque les associés se réunissent pour clôturer les comptes, ils attendent le dirigeant et ils commencent par approuver les comptes, tenir le dirigeant quitte de sa gestion. Il renoncerait alors à lui reprocher quoi que ce soit. C’est la solution qu’imposerait le droit civil du mandant. En matière de société cette règle est mauvaise car le quitus risque d’être donné trop facilement car ils n’ont pas toutes les informations sur la réalité de la gestion. C’est pourquoi en droit des sociétés, le quitus est sans effet sur le plan de la responsabilité du dirigeant envers la Société.

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§2 – La responsabilité du dirigeant envers un associé

La loi évoque qu’il y a une possibilité de réparation du dommage subi individuellement. Cette action est appelée action individuelle qui s’oppose à l’action sociale, action qui appartient à la Société.

L’action individuelle appartient à l’associé, l’action individuelle pose un problème juridique car il va être délicat d’identifier le préjudice personnel ouvrant droit à l’action individuelle. Tout préjudice car usé à la Société entraine un préjudice pour les associés.

Si le dirigeant gère mal, la Société s’appauvrit les associés subissent une moins-value. On pourrait être tenté de tire que tout appauvrissement de la société ouvre droit à réparation. On pourrait être tenté de l’accepter au titre du préjudice par ricochet. La réponse est négative car la situation est différente : le préjudice par ricocher est un préjudice autonome, spécifique à la victime par ricochet. On est en présence de deux préjudices distincts. Ici ce n’est pas le cas, le préjudice de l’associé n’a pas d’autonomie par rapport au préjudice de la Société.

Celui qui peut demander réparation est la victime directe, la Société. L’action individuelle de l’associé est irrecevable. C’est pourquoi la question est un peu délicate.

L’action individuelle ne sera recevable que dans la mesure où le préjudice est propre à l’associé et distinct de tout préjudice social.

Par exemple, un dirigeant social fait une présentation trop flatteuse de la Société à un investisseur, des perspectives extraordinaires, l’investisseur investit dans des conditions lésionnaires pour lui. On admet alors qu’il y a un préjudice personnel, propre à cet associé.

Deuxième exemple, un dirigeant refuse de verser le dividende du à un associé pour de mauvaises raisons. Un jour, on découvre la réalité, il admet qu’il s’est trompé, la Société doit verser son dividende et il est trop tard, la Société a fait faillite. Si le dirigent n’avait pas retenu indument le dividende, il aurait pu être payé au moment où la société pouvait le payer. Ici, l’associé peut se plaindre d’un préjudice individuel.

§3 – La responsabilité du dirigeant à l’égard des tiers

L’hypothèse est celle d’un dirigeant qui, par son comportement fautif cause un préjudice à un tiers en relation avec la Société: un fournisseur, un client, le banquier, le bailleur.

On rencontre une fois de plus une difficulté, le dirigeant, organe de la personne morale, engage la responsabilité civile de la Société quand il commet une faute, le dirigeant n’est pas un simple mandataire. Par exemple, un dirigeant dénigre un concurrent, le concurrent peut demander réparation à la Société.

Parfois, la tierce victime va vouloir agir non pas contre la Société mais contre le dirigeant car la Société est insolvable ou pour nuire au dirigeant.

La jurisprudence répond à cette question de manière négative en principe. En principe, la victime ne pourra pas agir contre le dirigeant, à moins qu’elle démontre que le dirigeant a commis une faute détachable de ses fonctions.

C’est à rapprocher du droit administratif ou encore la responsabilité civile du commettant pour les fautes de son préposé. Celui qui agit pour autrui est responsable lorsqu’il sort de ses fonctions. Une critique peut être émise car le dirigeant de société est plus que le commettant.

La Cour de Cassation a donné une définition tardive de la faute détachable des fonctions dans un arrêt de la chambre Commerciale 20 mai 2003. L’arrêt dit que l’on est en présence d’une faute détachable des fonctions lorsque le dirigeant commet intentionnellement une faute d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales.

La faute doit être intentionnelle et d’une particulière gravité. Par exemple, a été jugée comme faute détachable des fonctions le fait de mobiliser deux fois la même créance. Une créance est assez liquide, on peut notamment la mobiliser pour obtenir de l’argent en vendant les créances au banquier. C’est ce que l’on appelle des opérations d’escompte.

En 2010, la chambre commerciale de la cour de cassation a rendu un nouvel arrêt qui affine le critère : l’arrêt dit qu’est une faute détachable le fait pour une société effectuant des travaux le fait de ne pas souscrire une assurance décennale. Dans la mesure où il y a une infraction pénale, intentionnelle, ce comportement est nécessairement une faute détachable des conditions. Toute infraction pénale intentionnelle est une faute détachable des fonctions. Il y a toute de même des cas particuliers :

L’hypothèse où la faute commise par le dirigeant est une faute pénale, sa réparation peut être demandée devant les juridictions pénales ou les juridictions civiles. Or, les juridictions pénales ne font pas la différence entre fautes intentionnelles ou fautes non intentionnelles.

Il y a une situation dans laquelle la responsabilité des dirigeants est parfois recherchée à titre personnel et il existe pour cette situation un cas de figure particulier. Lorsque la société est en liquidation, le liquidateur en tant que représentant collectif des créanciers va parfois engager la responsabilité civile, personnelle des dirigeants, il y a là une action règlementaire à l’article L.651-2, c’est l’action en comblement de passif.
En réalité, l’action en comblement de passif est une action en responsabilité civile, dotée d’un régime spécifique. On est en présence d’une action en responsabilité contre les dirigeants initiée par les tiers, il n’est pas question de faute détachable des fonctions.

– Il y a un troisième cas particulier, les dirigeants sociaux sont responsable à l’encontre d’un tiers particulier, l’administration fiscale. C’est une action spécifique.