La saisissabilité des biens du débiteur

Le principe: la saisissabilité des biens du débiteur

Les créanciers ont pour droit de gage général les biens présents et à venir du débiteur (Code Civil Article 2284).

En principe, les biens du débiteur sont saisissables, le créancier peut donc mettre en œuvre une mesure d’exécution sur ces biens dès lorsqu’ils appartiennent au débiteur (1) et qu’ils se situent sur le territoire français (2).


1) L’appartenance des biens au débiteur

  1. A) Principes généraux

Le créancier peut saisir tous les biens du débiteur même s’ils sont détenus par un tiers. Cette situation ne doit pas être confondue avec la saisie d’un bien appartenant à un tiers car alors le débiteur n’a pas la propriété du bien.

La saisie d’un bien appartenant à un tiers est nulle (car le bien n’appartient pas au débiteur), le tiers peut donc exercer une action en revendication ou en distraction pour récupérer son bien.

La saisie immobilière d’un bien acquis en tontine est impossible du vivant des acquéreurs puisque par définition on ne connait pas le propriétaire du bien.

Les biens déjà saisis sont en principe indisponibles (L91 Article 29 reprenant l’adage « saisie sur saisie ne vaut »). Cette règle, signifie seulement qu’il est interdit de procéder à une seconde saisie indépendante, d’ailleurs les textes prévoient l’existence d’un concours de saisies sur un même bien i.e. l’hypothèse où plusieurs créanciers pratiquent une saisie sur un même bien et se répartiront donc le prix du bien entre eux.

  1. B) Cas particuliers

L’établissement et la preuve de la propriété du débiteur pose des problèmes pour les biens indivis mais aussi pour les comptes joints et les comptes professionnels.

1) Les biens indivis

Principe d’insaisissabilité (Code Civil Article 815-17 al.2): tant que le partage n’a pas eu lieu, il est impossible de savoir si le bien indivis sera attribué au débiteur or s’il est attribué à un autre copartageant, celui-ci sera réputé propriétaire depuis le jour de la naissance de l’indivision conformément à l’effet déclaratif du partage, dans ce cas de figure il y aurait alors saisie des biens appartenant à un tiers or une telle saisie est nulle. Le principe est donc celui de l’insaisissabilité des biens indivis.

3 exceptions:

  • l’insaisissabilité des biens indivis concerne uniquement les créanciers personnels de l’indivisaire et non les créanciers de l’indivision (i.e. les créanciers successoraux qui ont donc pour droit de gage l’ensemble des biens de l’indivision).

  • la divisibilité automatique des dettes et créances (Code Civil Article 1220): les créanciers personnels de chaque indivisaire peuvent saisir la part de créance de leur débiteur car il n’y a pas, en vertu de ce principe, d’indivision sur les créances.

  • les créanciers peuvent toujours provoquer le partage au nom du débiteur et même intervenir dans l’acte de partage (pour en surveiller le déroulement). Dans ce cas, le partage réalisé, ils pourront saisir les biens appartenant à leur débiteur.

2) Les comptes joints et comptes professionnels

Le débiteur n’a pas la propriété intégrale des sommes inscrites en compte joint ou professionnel.

Pour les comptes joints: la saisie ne peut porter que sur la portion du solde créditeur correspondant à la part du débiteur. Dès lors, le créancier doit prouver l’existence et le montant des sommes revenant au débiteur (difficile).

Pour les comptes professionnels: il faut distinguer selon que l’exercice du compte est obligatoire ou facultative:

  • ouverture obligatoire: le professionnel n’a pas la libre disposition des fonds en compte. Dès lors, ce compte n’est pas saisissable par un créancier personnel du professionnel.

  • ouverture facultative: le compte est saisissable par des créanciers personnels.

2) La localisation des biens sur le territoire français

Les tribunaux français sont compétents pour connaître des saisies pratiquées sur tous les biens du débiteur situés en France même si celui-ci est étranger ou domicilié à l’étranger. L’important est la localisation peu important la résidence et la nationalité. Le JEX territorialement compétent est celui du lieu d’exécution de la mesure si le débiteur demeure à l’étranger (D92 Article 9). La situation des biens en France est une condition nécessaire et suffisante pour pratiquer une saisie.