Transmission de la lettre de change par endossement translatif

LA TRANSMISSION DE LA LETTRE DE CHANGE PAR L’ENDOSSEMENT TRANSLATIF

Normalement par un endossement. Celui qui pratique l’endossement est l’endosseur. Celui qui bénéficie de l’endossement est l’endossataire.

On n’envisagera que 3 types :

  • l’endossement translatif : Celui qui transmet à l’endossataire tous les droits qui sont attachés au titre.
  • L’endossement de procuration. Le porteur de la lettre de change confie à un tiers le soin de recouvrer le montant de cette lettre de change en ces lieux et place.
  • L’endossement pignoratif.L’endosseur donne son titre en gage à son créancier.

On étudie ici l’endossement translatif.

C’est un mode de transmission des droits attaché au titre sans qu’il soit nécessaire de respecter les formalités de la cession de créance

§ 1 :Les conditions.

A) Les conditions de fond.

  1. Relatives à l’endosseur.

Il va signer la lettre de change et va donc s’engager cambiairement. On va donc retrouver dans ces conditions de fond toutes les conditions de fond du tireur (fond, consentement, capacité).

Il faut que la cause de l’endossement soit licite. Si cette cause est illicite et quelle n’est pas mentionnée sur le titre, elle est inopposable au porteur de bonne foi (qui l’ignorait au moment où il l’a acquis), mais elle est opposable par l’endosseur envers l’endossataire, car c’est une exception issu de leurs rapports personnels.

Si le caractère illicite apparait sur le titre, on ne protège pas le porteur. Il sera opposable à tous porteurs.

Attention : la traite n’est pas nulle.

L’endossement partiel est nul.

L’endossement conditionnel n’est pas nul mais interdit. Donc s’il y a une condition, la condition est réputée non écrite

L’époque de l’endossement

L’endossement translatif peut intervenir entre le jour de la création du titre et le jour non pas d’échéance mais le jour ou soit il est fait dresser protêt faute de paiement, ou soit le délai pour faire dresser protêt faute de paiement est expiré.

Problème : savoir quand l’endossement translatif est intervenu.

Supposons un endossement non daté. La solution consiste à regarder s’il y a eu ou non établissement d’un protêt faute de paiement.

Si oui : il suffira de lire les mentions du protêt. En effet, le protêt reprend toutes les mentions faites sur le titre.

A contrario : si l’endossement ne figure pas après le protêt, il n’est pas valable.

S’il n’y a pas eu de protêt, l’art 511-14 c.com présume que l’endossement sans date est intervenu avant l’expiration du délai pour faire dresser le protêt. Mais c’est une présomption simple, donc renversable.

  1. Relatif à l’endossataire.

C’est celui à qui on transmet l’endossement. Encore faut-il qu’il l’accepte. En droit cambiaire on se suffit d’une adoption tacite : le fait qu’il la recueille suffit.

Il peut être personne physique ou morale (pas de problème).

Concernant la personne physique :

Elle n’a pas besoin d’avoir la qualité commerciale. Il ne signe pas le titre, il va avoir des droits. Quand il recueil le titre, il ne souscrit pas. Mais si par la suite il veut la transmettre, il n’a pas besoin d’avoir la qualité commerciale.

— donc on peut être un endossataire mineur.

Il peut y avoir plusieurs endossataires alternatifs ou cumulatifs.

Le bénéficiaire d’un endossement peut-il être un précédent signataire ? Oui. Il peut l’endosser à qui il veut. (Porteur précédent, bénéficiaire, tireur, voir même le tiré (art 511-8).

Mais le porteur n’a alors de recours cambiaire que contre ceux qui sont à gauche (sinon ça va revenir à lui).

Si c’est le tiré qui endosse : selon une 1ère école, la lettre de change disparait par confusion du porteur et du tiré. La créance du porteur n’existe plus. On ne peut plus l’endosser.

Pour d’autres, la confusion n’interdit pas l’endossement ultérieur de la lettre de change. Elle ne disparait pas. Mais si au jour de l’échéance le porteur et le tiré sont la même personne, il y a confusion (prof est pour cette solution).

L’endosseur peut interdire l’endossement à l’endossataire. C’est la clause non à ordre.

  • B) Les conditions de forme.

L’art 511-8 exige que l’endossement soit inscrit sur le titre et signé par l’endosseur. Cette signature peut être manuscrite ou à la griffe.

La mention utilisée le plus souvent : « transmit à l’ordre de X » mais l’endosseur peut choisir entre un endossement nominatif ou en blanc ou au porteur.

Nominatif : est mentionné le nom de l’endossataire.

L’endossement en blanc : il y a un blanc à la place du nom de l’endossataire ou encore celui qui se fait par le biais d’une simple signature sans aucune mention (juste une signature de l’endosseur).

Quand l’endossement en blanc se fait par le biais d’une formule, il peut être n’importe où (recto ou verso). Mais s’il prend la forme d’une simple signature, elle doit être au verso de la lettre de change.

En effet la signature apposée au recto de la lettre de change est soit une signature d’acceptation quand elle émane du tiré, soit c’est une signature d’aval lorsqu’elle émane d’un autre intervenant.

Les réactions possibles de celui qui reçoit une lettre de change endossée en blanc

4 réactions :

  • remplir le blanc de notre nom :

on transforme l’endossement en blanc en endossement nominatif.

  • Remplir le blanc du nom d’un autre personne que nous et ensuite on lui remet.

Comme on n’apparait pas en nom, on n’apparait pas, on ne la signe pas pour la faire circuler, donc on n’est pas engagé cambiairement.

  • Remettre la lettre de change de la main à la main à un tiers sans remplir le blanc.

On n’est toujours pas engagé cambiairement.

La différence est pour l’endossataire : là il va pouvoir à son tour la transmettre sans l’endosser.

  • L’endosser soit en blanc soit nominativement, soit même au porteur.

Inconvénient : on a signé, on est engagé cambiairement.

Avantage : ça donne un nouveau débiteur à l’endossataire.

L’endossement au porteur : (511-8 al 6)

L’article l’assimile à un endossement en blanc. Ça a les mêmes effets.

Le tireur n’a pas le droit de crée une lettre de change en blanc. Il doit désigner le bénéficiaire. Il peut se désigner bénéficiaire et après l’endosser au porteur.

§ 2 : Les effets de l’endossement translatif.

  • la transmission des droits.
  • L’obligation de garantie.
  • L’inopposabilité des exceptions.
  • A) La transmission des droits.

Art 511-9 : l’endossement transmet tous les droits résultant de la lettre de change. L’endossement translatif n’a pas les mêmes effets qu’une cession de créance classique. Dans la cession de créance classique, le cessionnaire recueille les droits du cédant. Il ne peut pas avoir plus de droit que le cédant. Le cédé peut opposer au cessionnaire toutes les exceptions qu’il pouvait opposer au cédant.

Dans l’endossement translatif, l’endossataire n’est pas l’ayant droit du cédant. Il ne recueille pas les droits de l’endosseur. Il recueille les droits qui sont attachés au titre. Donc il est possible que l’endossataire ait plus de droit que l’endosseur. En effet, l’endossement entraine la purge des exceptions. Le cédé ne pourra pas opposer au cessionnaire les exceptions qu’il opposait au cédant. L’endossataire ne recueille pas les droits de l’endosseur (sinon il pourrait opposer les exceptions !).

Le plus souvent, l’endossataire à plus de droit que l’endosseur.

Par ailleurs, non seulement l’endossataire acquière toute les actions cambiaires mais en plus un droit sur la créance de provision qui existera au jour de l’échéance. C’est l’action en provision (c’est une action extra cambiaire).

Enfin, l’endossataire acquière les accessoires, les garanties de paiement qui sont attachées à la provision mais à la condition que ces garanties soient mentionnées sur le titre.

  • B) Garantie des endosseurs.

On va comparer avec la cession de créance.

Dans la cession de créance, le cédant garantie l’existence de la créance cédée, mais ne garantit pas le paiement. Donc ya pas d’action en cas de non-paiement.

Ici, l’existence et le paiement de la créance sont garantis. Si l’endossataire ne parvient pas à se faire payer par le tiré, l’endossataire peut exercer une action contre l’endosseur (+ signataire antérieur)

Peut-on s’exonérer de ces garanties ?

Le tireur peut s’exonérer de la garantie d’acceptation du tiré mais il ne peut pas s’exonérer de la garantie du paiement de cette créance (art 511-6)

L’endosseur peut s’exonérer des 2 (art 511-10).

  • C) L’inopposabilité des exceptions.

L’endossement translatif emporte purge des exceptions. Le débiteur cédé ne peut opposer à l’endossataire les exceptions qu’il pouvait opposer à l’endosseur.

Principe : ne peut être opposé au créancier cambiaire que les exceptions issues des rapports personnels du créancier cambiaire avec le débiteur actionné.

  1. Condition d’application.

a) Le porteur doit être un porteur légitime.

C’est celui qui peut se prévaloir d’une chaine ininterrompue d’endossement translatif régulier.

Ce n’est pas forcément celui qui détient matériellement le titre

Ex : si à son tour le porteur légitime a fait un mandat, il n’a plus le titre mais reste le porteur légitime.

b) Le porteur doit être de bonne foi.

Elle est présumée en droit cambiaire.

La bonne foi s’apprécie au jour de l’endossement consentie à l’endossataire.

Donc au moment ou il reçoit le titre il faut voir s’il est de mauvaise foi. Peut-importe après.

Critère d’appréciation de la bonne ou de la mauvaise foi ?

  • Pour une 1ère école, l’endossataire est de mauvaise foi à partir du moment où il connait l’exception au jour de l’endossement qui lui est consenti.

Ex : le tireur a livré 10 tonnes de petit pois au tiré et a créé un lettre de change circule et arrive dans les mains de P1. le jour ou P1 endosse pour P2, et P2 sait que les petits pois étaient avariés, pour l’école, le tiré pourra l’opposer au tireur mais aussi à P2 car il est de mauvaise foi.

  • Pour une 2ème école, l’endossataire est de mauvaise foi quand il existe entre lui et l’endosseur une collusion frauduleuse (si l’endossement n’a été effectué que pour léser le débiteur cambiaire).
  • 3ème école : critère = connaissance de l’exception + action sciemment au détriment du débiteur

Pour qu’un porteur soit de mauvaise foi il faut non seulement qu’il ait connaissance de l’exception au jour de l’endossement qui lui est consenti, mais il faut de plus qu’il ait agit sciemment au détriment du débiteur.

On a proposé cette solution médiane, car on s’est dit qu’il se peut parfaitement que l’endosseur connaisse l’existence de l’exception au jour où elle ait consentie, mais qu’il estime que cette exception aura disparu au jour de l’échéance.

Ex : livraison de marchandises avariées au jour de l’endossement P1 sait qu’une partie de ces marchandises est avariée, et il sait donc qu’il existe une exception qui par le biais de l’inopposabilité des exceptions ne pourra pas lui être opposé. Mais il peut tout en connaissant cette exception légitimement penser que cette exception aura disparu au jour de l’endossement et donc que cette exception ne lèse pas le tiré. Il faut donc savoir que cette exception va perdurer et qu’elle va être préjudiciable au tiré. Le fait de savoir qu’il y a un problème pendant l’endossement de la LETTRE-CHÈQUE ne suffit pas.

C’est non seulement la connaissance de l’exception au jour de l’endossement mais aussi le fait de savoir que cette exception va perdurer jusqu’au jour de l’échéance, c’est à dire la conscience de causer un préjudice au tiré qui ne pourra pas s’en prévaloir.

Cette solution a été énoncée dans l’arrêt Worms du 26 juin 1956

« Le porteur est de mauvaise foi lorsqu’il a eu conscience en consentant à l’endossement du titre à son profit de causer un dommage au débiteur cambiaire par l’impossibilité où il le mettait de se prévaloir vis à vis du tireur ou d’un précédent endosseur d’un moyen de défense issu de ses rapports avec ce dernier. »

Pour qu’on porteur soit de mauvaise foi il faut qu’il connaisse l’exception au jour où l’endossement lui a été consenti, et qu’il sache que l’exception se maintiendra jusqu’au jour de l’échéance.

A partir du moment où le porteur ignore l’exception au jour où l’endossement lui est consenti, peu importe qu’il el sache par la suite, il ne peut pas être de mauvaise foi. Si la connaissance existe, cette condition est nécessaire mais non suffisante.

–> Le mode de preuve

La preuve de la conscience et de la connaissance se prouve par tous moyens.

Ex : indices, témoignages…

–> La jurisprudence actuelle

La jurisprudence actuelle semble faire une différence entre les porteurs banquiers et les porteurs non banquiers. Elle est + sévère avec les porteurs banquiers, elle considère qu’ils ont des informations que les porteurs habituels n’ont pas et qu’ils savent mieux quand ces exceptions vont se maintenir ou non. C’est donc plus facile de prouver la mauvaise foi d’un banquier que d’un porteur ordinaire, mais cela reste tout de même assez difficile.

  1. Le domaine

a) les exceptions échappant au principe.

–> les vices apparents.

Le principe de l’inopposabilité des exceptions a été créé pour protéger le porteur contre ce qu’il ignore, a contrario il n’est pas nécessaire de protéger le porteur contre ce qu’il doit savoir. Le principe de l’inopposabilité des exceptions ne concerne donc pas les vices apparents sur le titre.

Ex : l’omission d’une mention obligatoire.

Malgré le principe de l’inopposabilité des exceptions …pourra toujours opposer au porteur

Ex :

–> L’exception d’incapacité

L’exception d’incapacité est opposable car on a privilégié la défense de l’incapable sur la défense du porteur. On a décidé que l’incapable mérite plus d’être protégé qu’un porteur capable.

–> L’absence de consentement

Attention, il ne s’agit que de l’absence de consentement et non le vice du consentement.

Ex : le vice de consentement

On signe une LETTRE-CHÈQUE car on est contraint par la violence, mais on ne pourra pas se prévaloir de ce vice de consentement à un porteur de bonne foi. Par contre cette exception de vice du consentement pourra être opposée à l’auteur du vice.

Le défaut de consentement

Par contre, si on a imité la signature, ce n’est pas un vice de consentement, il y a défaut de consentement, on pourra donc toujours opposer au porteur de bonne foi cette absence de consentement.

Explications :

Si la signature a été imitée, on n’est pas signataire du titre, on n’est donc pas débiteur cambiaire et la réglementation cambiaire ne nous concerne pas et donc le principe de l’inopposabilité des exceptions ne nous concerne pas à On ne peut pas imposer une règle à une personne qui n’est pas entrée dans le champ cambiaire.

b) les limites du principe de l’inopposabilité des exceptions

Le principe de l’inopposabilité des exceptions ne concerne pas les rapports personnels du débiteur et du créancier cambiaire. Le débiteur cambiaire pourra toujours opposer au créancier cambiaire des exceptions issues de leurs rapports personnels.

En effet, ce sont des exceptions que le créancier cambiaire connaît puisqu’elles proviennent de ces propres rapports avec son débiteur, et bien svt il est la source de ces exceptions.

Ex : le tiré accepteur peut toujours opposer au tireur qui l’assignerait en paiement des exceptions issues de l’absence partielle de provision. Par contre cette exception ne pourrait pas être opposée à P1.