La Vème République, présidentialisme et Parlement assujetti?

La constitution de 1958 en application : un président puissant, un parlement assujetti?

  • A l’origine, la constitution de 1958 est conçu comme un régime parlementaire dans lequel les pouvoirs de l’exécutif sont renforcés
  • Puis en 1962 a été instaurée l’élection du président de la République au suffrage universel direct. La Veme république est donc devenue un régime de type semi-présidentialiste

La Ve République échappe aux typologies classiques des différents régimes démocratiques. Elle apparaît en effet comme un régime hybride présentant simultanément des caractéristiques propres au régime présidentiel et au régime parlementaire.

La pratique constitutionnelle révèle 2 phénomènes :

Section 1. La présidentialisation.

§ 1. Origines de la présidentialisation.

A. Origines institutionnelles.

1. La notion de pouvoir d’état.

a) les fondements historiques : le discours de Bayeux.

En juin 1946 lors du discours de Bayeux, de Gaulle exprime la volonté de restaurer l’Etat, d’assurer la continuité et la permanence de l’Etat, d’assurer le développement de la démocratie (pluralisme, mais en dénonçant la rivalité entre les partis politique ; pour les dépasser il développe sa conception de la fonction présidentielle).

· Le président a la charge de l’état et doit être un arbitre national, placé au-dessus du législatif et de l’exécutif et des partis.

b) les fondements juridiques.

Art.5 de la constitution de 1958. C’est la première fois qu’on définit le rôle du Président de la République en se référant au 3 éléments constitutifs de l’état (Territoire, Population et organisation politique souveraine).

2. La fonction présidentielle : les missions du chef de l’état.

a) Le gardien de la constitution.

Art.5 précise « le Président veille au respect de la constitution ».

· Par la saisine, rare, du Conseil Constitutionnel.

· Par l’interprétation de ses propres pouvoirs, plus fréquent.

b) L’arbitre national.

Sur le mot arbitrage il existe 2 conceptions, l’arbitrage actif et passif. Dans les républiques précédentes, le chef de l’état exerçait l’arbitrage passif, donc la neutralité et la recherche d’un compromis (arbitrage au sens sportif du terme). En revanche désormais, c’est l’arbitrage actif qui va primer au nom de la défense de l’intérêt général de la nation. Ainsi, le Président tranche souverainement, il a un réel pouvoir de décision et d’orientation de la politique nationale (de Gaulle : le guide de la nation).

Les domaines couverts par cet arbitrage était initialement ceux de l’article 5 (appliqué aux fonctionnements réguliers des pouvoirs public et à la continuité de l’état). Dans la pratique les domaines ont été élargis par l’interprétation que les président ont fait de la constitution ; cela touche désormais les domaines, économiques, sociaux et culturels.

Les formes peuvent être directes ou indirectes.

Directe :

S’exerce par le choix du 1er ministre, lorsque le Président préside le Conseil des ministres.

Indirecte :

Concerne à faire appel au peuple souverain, quand un conflit apparait ou perdure, via référendum (art.11) ou la dissolution de l’assemblée nationale par le Président.

c. Le garant ou la forme extérieure de l’arbitrage présidentiel.

Le rôle de garant est une manifestation externe. Le Président (art.5 alinéa 2) est garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité territoriale et du respect des traités ratifiés par la France. C’est une dimension de politique étrangère et de défense nationale.

L’art.64 alinéa 1, le Président est aussi garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire et c’est ici une forme interne.

Le Président dispose de moyens :

· L’art.16 qui lui permet de bénéficier de pouvoirs exceptionnels en cas de crise (l’indépendance nationale, de l’intégrité territoriale et du respect des traités ratifiés).

· L’art.15, sur l’armée.

· L’art.14, nomination des ambassadeurs.

· L’art.52, le président ratifie les traités internationaux, il conserve la maitrise de l’appareil diplomatique.

Ainsi, le Président détermine la politique de la nation et tous ont affirmé ceci. (Pompidou : « je suis le principal responsable national », Mitterrand : « la fonction est à la fois une fonction d’arbitrage et d’autorité » ; Chirac : « je décide et il exécute » en parlant de Sarkozy).

L’art.5 sert aussi de base au Conseil Constitutionnel pour ériger un principe de droit en principe fondamental et de valeur constitutionnelle.

B. Les origines politiques de la présidentialisation.

1. Les soutient des électeurs.

C’est la majorité présidentielle. Ce soutient peut être direct (sa manifestation est l’élection présidentielle, légitimité électorale, renforcée par l’élection au suffrage universel direct et le quinquennat –le président est désormais en 1ère ligne), ou indirect lorsque le président utilise la procédure référendaire (on répond davantage à l’auteur du texte qu’au texte lui-même.

2. Le soutient parlementaire.

C’est la majorité parlementaire (majorités présidentielles et parlementaires ne coïncident pas toujours. Ce soutien est obtenu à échéance normale non provoquée par les élections législatives. Il peut être aussi provoqué quand le Président utilise le droit de dissolution et il recherche alors une majorité que le soutienne.

Il faut qu’il coïncide avec la majorité populaire, il faut que la majorité parlementaire soutienne le Président, c’est le fait majoritaire, qui est apparu en 1962.

§ 2. Manifestation du phénomène de présidentialisation.

Double domination qui s’exerce sur le gouvernement et sur le parlement.

A. La domination présidentielle sur le gouvernement.

Le gouvernement et son chef résultent et procèdent du Président et en période de fait majoritaire, le Président absorbe les pouvoirs du gouvernement, on assiste ainsi à un faux partage des pouvoirs. Le Président a des pouvoirs avec contreseing et sans contreseing, mais en période de fait majoritaire ce contreseing est fictif..

B. La domination présidentielle sur le parlement.

En période de présidentialisation elle se manifeste d’abord sur le plan politique, le véritable chef est alors le Président et non le 1er ministre ; sur le plan technique, le Président exerce une fonction indirecte de législateur (de manière positive, on demande un projet, ou négative, on bloque un projet de loi).

§ 3. Les limites de la présidentialisation.

C’est la cohabitation. On parle de cohabitation ou de coexistence (selon Mitterrand), lorsque les majorités présidentielles et parlementaires ne coïncident plus. Elle peut résulter d’une élection présidentielle, le nouveau président élu n’ayant pas de majorité au parlement, aujourd’hui cela est devenu improbable, car le président est élu d’abord (inversion du calendrier depuis 2001) et de plus depuis le quinquennat les 2 élections ont lieu la même année et le président dispose en plus d’un droit de dissolution. Elle peut résulter d’élection législative, mais depuis le quinquennat, 1 mois plus tard les électeurs n’élisent plus une majorité différente (mais cela reste possible bien qu’on ne l’observe pas dans les faits). En revanche la coïncidence peut disparaitre, il suffit que le président meurt ou démissionne et ainsi les 2 élections n’auront plus lieu en même temps.

A. la réhabilitation du gouvernement.

En cohabitation le Président n’absorbe plus les pouvoirs du gouvernement et l’obligation du contreseing reprend toute sa force. Le 1er ministre a aussi une légitimité populaire, car c’est son parti qui a remporté les législatives.

B. Le président conserve un rôle certain.

C’est une interprétation extensive de l’article 5 de la Constitution. Le Président dispose d’un pouvoir d’interprétation de la Constitution, ainsi il peut interpréter ses propres pouvoirs dans un sens extensif, c’est ce qu’ont fait Mitterrand et Chirac. Mitterrand a étendu le domaine de l’arbitrage au domaine social, au domaine économique (refus de certaines privatisations par voie d’ordonnance). Il dispose aussi d’une faculté d’empêcher, et peut bloquer certaines nominations proposées par le 1er ministre. Son rôle reste prépondérant en politique étrangère et de défense nationale.

Section 2. L’assujettissement du parlement.

Il est à la fois juridique et politique.

§ 1. L’assujettissement juridique : la rationalisation.

On utilise des techniques de parlementarisme rationalisé, la constitution propose des techniques qui permettent de restreindre les fonctions principales du parlement afin de renforcer le gouvernement.

A. L’extension de la notion de rationalisation.

Une double manifestation juridique :

· Il est plus difficile de renforcer le gouvernement sous la Vème.

· La fonction législative est encadrée.

B. Le renforcement de l’efficacité de la rationalisation.

Ceci tient dans « le contrôle de constitutionalité ».

Art.41, en cas de litige c’est au Conseil Constitutionnel de se prononcer. Ce contrôle a donc jouer un rôle de renforcement de la rationalisation et de son efficacité.

§ 2. L’assujettissement politique du parlement : le fait majoritaire.

A. Le phénomène majoritaire.

Apparu avec l’élection du président au suffrage universel direct, de plus désormais les députés sont élus au scrutin uninominal à 2 tours, ce qui permet de dégager une majorité parlementaire.

De 1959 à 1981, la majorité fut de droite et l’opposition de gauche (de 1972 à 1980 lentes constructions avec l’union de la gauche).

A partir de 1981 il y eu l’alternance politique qui a été ininterrompue de 1978 à 2012 excepté 1 fois (à chaque élection législative la majorité changeait). En 2007 ce sera la seule fois où une majorité sortante sera reconduite.

(Les 3 cas de cohabitation c’est en cours de mandat et avant le quinquennat).

B. L’évolution du phénomène majoritaire.

Ce phénomène a connu des atténuations et même des éclipses.

1. Atténuation.

Lorsqu’il y a rupture de la majorité parlementaire, ce fut le cas sous Giscard en 1976 (démission Chirac qui crée le RPR et s’oppose de 1976 à 1981 au gouvernement Barre qui utilisera le plus l’art.49-3). C’est donc la guerre au sein d’une formation divisée.

Egalement en 1988, suite à la réélection de Mitterrand qui dissout l’assemblée mais il a besoin des communistes pour être majoritaire, les communistes ne soutiennent pas toujours.

2. Les éclipses.

Elles sont dues au phénomène de cohabitation.

Il y eu 3 périodes de cohabitations, les petites et la grandes cohabitations.

G. Vedel a appelé les premières, la cohabitation 5+2 (petites cohabitations de 2 ans après 5 ans de phénomène majoritaire), où à l’époque le mandant présidentiel était de 7 ans (donc cohabitations de 2 ans chacune).

· La première de 1986 à 1988

· La deuxième de 1993 à1995, même explication Mitterrand est élu en 1988, en 1993 la droite gagne les législatives. En 1993, Mitterrand nomme un 1er ministre de droite, Balladur (Chirac ne veut plus l’être car il pense que c’est cela qui lui a valu d perdre les présidentielles).

La Grande cohabitation durera 5 ans après 2 ans de phénomène majoritaire, de 1997 à 2002. Chirac est élu en 1995, en 1997, il dissout l’assemblée nationale, mais cette dissolution est ratée et Chirac nommera Jospin 1er ministre.

Les cohabitations n’ont jamais profitées au premier ministre, qui n’ont jamais été élus aux présidentielles qui suivaient immédiatement ces périodes.

Partie 2. Les pouvoirs publics constitutionnels politiques : les pouvoirs exécutifs et législatifs.

L’exécutif sort renforcé sous la Vème et par effet de balancier le pouvoir législatif est rationalisé (forme d’affaiblissement par rapport aux républiques précédentes).