Le caractère trompeur des pratiques commerciales

Qu’est ce que le caractère trompeur des pratiques commerciales ?

On pouvait déjà estimer que l’ancien article était long, ce n’est rien en rapport avec le nouvel article L121-1 du Code de la consommation. Cet article prévoit les cas dans lesquels une pratique commerciale esttrompeuse. Ces cas feront donc l’objet d’une présentation générale, puis on verra l’appréciation

1) Présentation générale : les cas dans lesquels la pratique commerciale est trompeuse.

De l’ancien article à l’actuel article L121-1 du Code de la consommation, il y a une constante qui est dans l’usage que le législateur fait de la liste. Ce procédé est repris dans l’article L121-1 du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008 retouchée par la LME mais la rédactionactuelle est beaucoup plus complexe et surtout, sur un plan purement quantitatif, il apparaît comme étant nettement plus long que l’ancien article. Les premiers termes de cet article sont les suivants: « une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes »: suit une série de circonstances dans lesquelles une pratique sera trompeuse. Mais à cela s’ajoute un autre paragraphe : une pratique commerciale est également trompeuse. Autrement dit, l’article établi dans ses deux premiers paragraphes une summa divisio qui repose sur ce premier et deuxième paragraphe. Chacun de ces paragraphes décrit une catégorie de pratiques commerciales trompeuses: dans le premier paragraphe, les pratiques ont pour point commun de supposer un acte positif, quand au second paragraphe, elles reposent sur une abstention, précisément sur une rétention d’information. Sur les pratiques décrites dans le premier paragraphe : elles supposent un acte positif, elles peuvent être commises dans trois séries de circonstances. Deux d’entre elles paraissent nouvelles par rapport à l’incrimination de publicité trompeuse ce qui confirme l’extension de la nouvelle incrimination :

– il s’agit tout d’abord de la pratique commerciale qui crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d’un concurrent. A priori, on a donc le sentiment qu’on va au delà de la publicité trompeuse mais une interprétation large de la publicité avait donné à la Cour de cassation la possibilité de réprimer les actes ici décrits sous publicité trompeuse, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 février 1989 : interprétation qui permettait deconsidérer que constituait une publicité trompeuse l’usage d’un nom créant une confusion dans l’esprit du public.

– de même, une autre série de circonstance est sensée représenter une innovation (3° du §1) : une pratique est trompeuse si la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n’est pas clairement identifiable, il peut sembler que c’est une innovation mais l’innovation semble avoir une portée limitée donc la doctrine considère que l’apport est limité.

– la troisième catégorie évoque elle la publicité trompeuse. En effet, parmi les pratiques commerciales trompeuses du §1, on retrouve des pratiques commerciales qui évoquent, ne serait ce que par les termes employés, l’ancienne publicité trompeuse: une pratique commerciale est trompeuse si elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments qui suivent: on retrouve au titre de ces éléments des éléments qui évoquent largement ceux visés au titre de la publicité trompeuse: nature du bien, service, prix, mode de calcul de celui-ci, portée de l’engagement de l’annonceur, ce sont autant de points sur lesquels portera l’allégation fausse. On retrouve donc ici une continuité manifeste par rapport à la publicité trompeuse. C’est pour cela que les enseignements de la jurisprudence sur la publicité restent d’actualité pour cette nouvelle incrimination.

Le §2 de l’article L121-1 du Code de la consommation décrit d’autres séries de pratiques qui sont également trompeuses et ce sont des pratiques commerciales qui seront trompeuses car elles reposent sur une rétention d’information. En effet, la pratique commerciale sera trompeuse si le silence a été conservé sur un certains nombres d’éléments qui sont des éléments importants pour le consentement et à cet égard, l’article L121-1 du Code de la consommation vise une information substantielle. L’alinéa suivant recourt de nouveau au procédé de la liste pour énumérer comme substantielles un certain nombre d’information. Ces informations portant sur les caractéristiques principales du bien ou du service, ou encore sur l’adresse et l’identité du professionnel, ou encore sur les modalités de paiement ou de livraison.

Etant précisé que son dernier alinéa qui fait l’objet du §3 est celui qui précise que certaines de ces pratiques peuvent viser les professionnels: ce sont celles du §1 qui se caractérisent par un acte positif. Donc, la seconde série ne concerne que les consommateurs qui peuvent seuls en être victime.

Cet article procède donc à une nette distinction. Le procédé peut sembler artificiel puisque dans les faits, la différence est parfois ténue entre ce qui relève d’une abstention ou ce qui relève d’une indication fausse ou de nature à induire en erreur. La différence est parfois difficile à établir car garder le silence, cela revient parfois à énoncer quelque chose de faux donc on peut être réservée sur cette distinction d’un point de vue méthodologique: l’intérêt est surtout de faire la part des choses en ce qui concerne ou non les professionnels. Précisément, si on observe les appréciations faites par la jurisprudence pour la publicité trompeuse, on constate que cela peut résulter d’un acte positif consistant à affirmer des choses inexactes ou un acte négatif par le fait de ne pas révéler une information substantielle. La publicité trompeuse peut par exemple prendre la forme d’une représentation tendancieuse de la réalité, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 mars 1984 constitue une publicité trompeuse le fait sur un paquet de cigarette de mettre e valeur des textes anglais qui donnait ainsi à l’ensemble une connotation anglo-saxonne qui suggérait que ce n’était pas un produit français alors que c’en était un. La publicité peut également consister en un mensonge qui supposera que l’agent ait affirmé des faits inexacts en ayant conscience de leur fausseté: mise sur un site de vente aux enchères des sacs sous des marques prestigieuses alors que ce n’en est pas. La publicité peut être commise par un simple silence: exemple, banque qui avait fait passer une pub pour un compte épargne destiné au mineur: tu peux retirer de l’argent sans demander à personne alors que le mineur avait besoin de l’autorisation parentale pour ouvrir le compte. Il a été jugé que l’usage de caractère réduit, certaines publicité comportant des mentions en petits caractères que c’était assimilable à une forme de réticence=> arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 27 novembre 1990. Certaines mentions trop petites pour que les automobilistes puissent les lire. On voit par cette jurisprudence que cela transcende la distinction entre acte positif et négatif.

Ces pratiques commerciales telles que définie dans l’article L121-1 du Code de la consommation seront incriminés dans les circonstances mais si on est dans ce cadre, cela ne veut pas dire qu’il y aura un caractère trompeur.

2) L’appréciation du caractère trompeur de la pratique commerciale.

Quand on se reporte à l’article L121-1 du Code de la consommation qui prévoit ces deux grandes catégories de pratiques commerciales trompeuse, il faudra que le juge apprécie s’il y a eu tromperie. La pratique sera trompeuse si par exemple elle crée une confusion ou si elle repose sur des allégations fausses ou de nature à induire en erreur. Ces éléments sont révélateurs de la tromperie et le juge devra les apprécier. Il y a lieu de se reporter à la jurisprudence de la publicité trompeuse qui peut être repris dans le cadre de la nouvelle incrimination. Il était de jurisprudence que le juge doit se livrer à une appréciation in abstracto de la publicité trompeuse: il faut qu’il prenne un consommateur moyen de référence dans l’idée que certaine pratique peuvent induire une personne en erreur si elle n’est pas assez perspicace pour distinguer un discours qui peut être excessif et la réalité: on a beau être consommateur et être protégé, il n’en demeure pas moins qu’on doit être avisé. La loi pénale n’a pas vocation à protéger les sots, naïfs qui sont excessivement victime d’une tromperie parce qu’ils n’auraient pas l’esprit de faire la part des choses entre la réalité et des exagérations qui peuvent paraître supportables. C’est pourquoi le juge pénal, pour apprécier le caractère trompeur, va se demander si la publicité ou la pratique était de nature à tromper un consommateur moyen qui ne sera pas suffisamment abruti pour prendre au premier degré le discours commerciale. Ce consommateur moyen doit donc être normalement attentif et intelligent. Par exemple, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 2007 évoqué dans la chronique un an de droit pénal de laconsommation de la revue de droit pénal de mai 2008. Les juges du fonds font souvent référence à ce consommateur moyen, jugement du TGI de Paris du 11 décembre 1996 ou arrêt de la Cour d’appel de Paris du 16 novembre 2007 faisant référence à un consommateur moyen, normalement informé etraisonnablement attentif et avisé. La Cour de Justice des Communautés Européennes s’est également positionner sur cette ligne de consommateur moyen, normalement avisé, arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes du 16 juillet 1998 en ce sens. Exemple qui montre que le consommateur ne doitpas être trop crédule. Cette référence à un consommateur moyen qui a un minimum de bon sens permet de faire la part des choses entre des pratiques commerciales qui sont illicites car trompeuses et celles qui peuvent induire en erreur le consommateur mais ceux-ci ne pourront s’en prendre qu’à eux-mêmes. On a un arrêt de la Cour de cassation qui montre que certaines publicités peuvent induire en erreur ceux qui la prennent au premier degré. Arrêt au sujet d’une publicité trompeuse, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 21 mai 1984 : il s’agissait d’un spot TV de publicité qui avait pour objet de promouvoirune certaine marque de bagage sensé être résistant: le spot reposait sur une scène de football qui se jouait entre bulldozer et ce qui fait office de ballon était la valise. A l’issue de cette partie, la valise apparaissait intacte. Il était évident, si on avait un minimum de bon sens, qu’un tel traitement infligé à une valise ne pourrait que l’affecter dans sa substance et pour le tournage, plusieurs valises avaient été utilisé es. La Cour de cassation avait considéré que ce n’était pas une publicité mensongère, la loi de 1973 n’interdisait pas la publicité hyperbolique qui se traduit par la parodie ou l’emphase dès lors qu’il est établi par référence à l’optique du consommateur moyen et en tenant compte du degré de discernement et du sens critique de la moyenne des consommateurs, que l’outrance ou l’exagération de l’ouvrage publicitaire ne peut finalement tromper personne: c’est donc une invitation à prendre un certain recul vis-à – vis des messages publicitaires qui ont vocation à embellir la réalité. Cette appréciation est donc celle du juge en référence au consommateur moyen mais innovation de 2008, il y a des pratiques commerciales qui sont réputé es trompeuses. Le législateur a inséré l’article L121-1-du Code de la consommation issue de la loi du 4 août 2008. C’est un article très long, qui est d’une lourdeur incomparable et qui a pour objet d’énumérer despratiques qui sont réputé es trompeuses : l’article énonce en effet que « sont réputés trompeuses au sens de l’article L121-1 du Code de la consommation les pratiques commerciales qui ont pour objet: « . S’en suit une liste immensément longue puisqu’elle consiste en 22 rubriques, on a atteint des proportions déraisonnables, qui ont vocation à caractériser ces pratiques qui sont réputées trompeuses :

– parmi elles, sera une pratique commerciale réputée trompeuse le fait de proposer l’achat de produit et ensuite de refuser de présenter au consommateur le bien qui a fait l’objet de la pratique,

– de même le fait de déclarer qu’une personne est sur le point de céder son activité (pour vendre à des prix bas).

– de même, entre dans cette catégorie le fait d’affirmer d’un produit ou d’un service qu’il augmente les chances de gagner aux jeux de hasard ou encore la pratique commerciale qui a pour objet de déclarer ou de donner l’impression que la vente d’un produit ou la fourniture d’un service est licite alors qu’elle ne l’est pas.

Telle qu’elle est, elle est limitative mais il n’est pas exclu que le législateur vienne l’étoffer pour prendre en compte la pratique. Le juge n’a pas ici à apprécier le caractère trompeur en ce sens qu’il faudra considérer que plus d’une présomption, c’est une règle de fonds qui aura donc pour conséquence de dessaisir le juge de l’appréciation du caractère trompeur. Il faut enfin préciser au sujet de l’article L121-1-1 du Code de la consommation qu’il est applicable aux pratiques qui visent le professionnel=ce sont despratiques qui peuvent être considérées comme particulièrement trompeuse donc il faut protéger les professionnels.

Il reste qu’on attend la jurisprudence sur les éléments nouveaux de cette infraction.