Le cautionnement

LE CAUTIONNEMENT

Se porter caution signifie s’engager à régler les dettes du locataire en cas de défaillance. Le cautionnement est donc une sûreté personnelle par laquelle une personne nommée « la caution » s’engage à l’égard d’une troisième dite « le bénéficiaire du cautionnement » à payer la dette du débiteur principal dite « la personne cautionnée », pour le cas où cette dernière faillirait à ses engagements.

I : DÉFINITION DU CAUTIONNEMENT

C’est le contrat par lequel une personne dite caution s’engage à régler à un créancier la dette d’un débiteur si celui-ci ne s’exécute pas lui-même
Cette définition présente un défaut car on a l’impression que le cautionnement est un contrat subsidiaire c’est à dire que la caution ne pourra être actionnée que si au préalable le créancier s’est tourné vers le débiteur qui en l’a pas encore payé. C’est dans ce sens que le Code civil a réglementé ce contrat mais aujourd’hui une grande majorité de contrat de cautionnement est doublée de solidarité et de ce fait le créancier pourra librement s’adresser soit au débiteur principal, soit à la caution pour le paiement de la dette
Ce contrat est réglementé par le Code civil aux articles 2011 à 2043 mais cette réglementation est trompeuse car désormais il existe de nombreuses dispositions sur le cautionnement dans d’autres codes dont le Code de la consommation.
Si on examine les dispositions du Code civil on s’aperçoit qu’à part quelques modifications le contrat n’a pas vraiment fait l’objet d’une réforme d’ensemble. Pourtant il a totalement changé depuis 1804 En effet en 1804 il était considéré comme un contrat d’ami ou un contrat qui jouait dans les relations familiales Aujourd’hui ces hypothèses subsistent mais le cautionnement a changé de visage du fait de la « bancarisation du cautionnement »
Les banques agissent souvent comme caution pour des opérations relativement importantes Pour elle le système est intéressant car en réalité on se trouve en présence d’une technique de crédit par signature et les banques prêtent leurs signature sans avoir de décaissement à faire.


Pour le créancier l’avantage est très important car les banques sont a priori des garants solvables et ils sont quasiment surs d’être payés à l’échéance.
C’est aussi avantageux pour le débiteur car la fourniture d’une telle caution est souvent un élément important dans la négociation contractuelle, sans avoir à mobiliser son actif même s’il devra payer ce prêt de signature et que cette rémunération peut aller jusqu’à 3% par an du paiement garanti.
Les banquiers de leur côté se sont mis aussi de plus fréquemment à exiger des cautionnements, phénomène qui n’a pas touché que le droit des sociétés.

Le cautionnement est aussi marqué par le droit de la consommation car ces cautionnements étaient souvent demandés pour les crédits à la consommation mais le phénomène s’est aussi produit dans le domaine du crédit immobilier
Dans ce domaine s’est développé le cautionnement mutuel : des sociétés sont crées dans le but de cautionner et le banquier prêteur va exiger de l’acquéreur de l’immeuble qu’il souscrive un contrat de cautionnement

A partir du moment où le nombre de cautionnement a augmenté il est apparu de nombreux litiges qui ont influés sur sa réglementation. Pendant un temps c’est pratiquement uniquement la jurisprudence qui a façonné le contrat de cautionnement et elle l’a fait le plus souvent dans un sens favorables aux cautions surtout Personne Physique
Mais depuis quelques années le législateur intervient plus fréquemment et on assiste a un phénomène nouveau : les règles du Code civil apparaissent comme un « droit commun » du cautionnement à côté duquel viennent se greffer des réglementations particulières ex : cautionnements donnés en garantie d’un crédit à la consommation ou d’un crédit immobilier


Désormais c’est plus souvent la caution Personne Physique qui, sur un certains nombre de points va bénéficier de règles particulières. Le législateur veut qu’elles soient convenablement informées et que l’engagement des cautions demeure raisonnable (introduction du formalisme et d’une certaine forme de proportionnalité)

Le mot de cautionnement peut revêtir plusieurs sens :
– dans le langage commun il évoque souvent l’idée d’un dépôt de somme d’argent or ce dépôt est une sûreté réelle.
– si on se place sur l’idée de sûreté personnelle on voit que ce mot peut, là aussi revêtir deux sens différents
– l’opération de cautionnement : cette opération est en réalité une opération qui met aux prises 3 personnes : créancier, débiteur et caution qui s’engage à la demande du débiteur mais qui est liée par un contrat de garantie avec le débiteur
– contrat de cautionnement qui vise seulement le contrat unissant la caution et le créancier

La terminologie est ambiguë car le Code civil avec ce mot vise tantôt l’opération et tantôt le contrat


II : L’OPÉRATION DE CAUTIONNEMENT

L’article 2011 du Code civil définit le contrat de cautionnement : « celui qui se rend caution d’une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation si le débiteur n’y satisfait pas lui même »
Cette définition se limite aux relations issues du contrat créancier / caution mais elle fait apparaître le rôle joué par le débiteur principal

  • A) LE ROLE DU DEBITEUR PRINCIPAL

Son rôle est a priori simple : fournir au créancier une sûreté : le contrat de cautionnement.
Malgré tout son rôle est ambiguë car il est à l’origine du rapport contractuel entre le créancier et la caution tout en demeurant extérieur à ce rapport
En réalité le contrat préalable entre le débiteur principal et la caution est un contrat d’ordre. Le rôle du débiteur principal est d’autant plus important que la caution n’est qu’une garante et qu’elle ne doit pas supporter le poids définitif de la dette c’est à dire qu’elle pourra recourir contre le débiteur principal
Si on se place lors de la formation du cautionnement il aura obligatoirement un caractère accessoire qui postule l’existence d’une obligation entre le créancier et le débiteur principal.
Cette nécessité pour le débiteur de trouver une caution peut avoir pour origine soit le contrat, soit la loi, soit le juge. En pratique la convention est de loin la source la plus importante de cautionnement mais les expressions de cautionnement légal et judiciaire sont équivoques Elles signifient que dans certaine hypothèses c’est la loi où le juge qui vont imposer au débiteur de fournir une caution au créancier, mais les relations entre le débiteur et le créancier seront des relations contractuelles

Le domaine du cautionnement légal est assez mouvant et dépend de la volonté du législateur Par exemple les articles 601 et 626 obligent l’usufruitier ou le bénéficiaire d’un droit d’usage et d’habitation de fournir une caution; en cas de perte d’une lac celui qui l’a perdu peut en obtenir le paiement moyennant fourniture d’une caution.
Cependant doit on qualifier de cautionnement les « garanties professionnelles » ? L’assemblée plénière a répondu par la négative.
Sur le terrain du cautionnement judiciaire l’octroi de sûreté est subordonné à l’appréciation et à la décision du juge ex en matière de divorce où la prestation compensatoire prend encore la forme d’une rente
Ces cautionnements présentent des particularités archaïques : ils imposent que la caution soit domiciliés dans les ressort de la Cour Administrative où le cautionnement doit être donné, la caution doit avoir un bien suffisant pour répondre de la dette et cette solvabilité s’apprécie uniquement par rapports aux immeubles dont la caution est propriétaire sauf dette modique ou matière commerciale. La jurisprudence a atténué cette dernière obligation car c’est au créancier d’apprécier la solvabilité de la caution c’est à dire qu’il peut accepter une caution ne répondant pas aux prescriptions du Code civil

  • B) LE RÔLE DU CRÉANCIER

Pendant longtemps on a affirmé que le rôle du créancier était tout à fait limité. Il est à l’origine le plus souvent de l’opération de cautionnement mais le contrat de cautionnement s’analyse comme un contrat unilatéral : seule la caution prend un engagement d’où la conclusion que le créancier a seulement à accepter le contrat
Cette affirmation semble de moins en moisson exact Dans l’hypothèse d’un cautionnement d’un montant illimité pour des dettes futures (ouverture de crédit) la décision du créancier d’octroyer un nouveau crédit va obligatoirement influer sur le contrat de garantie
Il y a une hypothèse classique où le contrat de cautionnement devient synallagmatique quand le créancier rémunère la caution mais dans ce cas le contrat est disqualifié en une assurance-crédit
Si on reste sur le contrat unilatéral, on voit que des obligations sont à la charge du créancier :
– une obligation traditionnelle dans l’article 2037 du Code civil ( dès 1804)
« La caution est déchargée lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait du créancier, s’opérer en faveur de la caution » Il peut arriver qu’une caution s’engage car le créancier a d’autres sûretés sur le débiteur. Or, si la caution paie, elle va bénéficier d’un recours subrogatoire et de ce fait elle va être titulaire de sûreté. On sanctionne par la déchéance du cautionnement le fait pour un créancier de laisser dépérir ses sûretés. Il a l’obligation de maintenir ses autres garanties
– les autres obligations sont plus récentes et de plus en plus importantes. Il s’agit de toutes les obligations d’informations Dans la conception classique il appartient à la caution de rechercher l’information Aujourd’hui la situation n’a pas changé sur le plan des principes mais on a telle ment multiplié les hypothèses où le créancier est tenu d’informer la caution que le principe est devenu quasi vide Il n’existe pas un principe général d’obligation d’information de la caution par le créancier mais des obligations d’information particulières qui se sont multipliées Ces obligations légales d’information se retrouvent lors de la formation du contrat ou lors de l’exécution

  • C) LE RÔLE DE LA CAUTION

La caution apparaît comme le personnage central de l’opération de cautionnement Elle est le pivot de l’opération en ce qu’elle entretien des relations contractuelles avec le créancier et envers le débiteur
Originairement dans les relations entre le débiteur et la caution les rédacteurs du Code civil les avaient conçues comme gratuites mais ce n’est plus obligatoirement le cas aujourd’hui Il est fréquent que la caution se fasse rémunérer. Ici, cette question a amené à s’interroger sur le point de savoir si la caution souscrit un engagement à titre gratuit ou non envers le créancier ?
Le créancier reçoit-il un avantage à titre gratuit ? La réponse ne peut être que négative et ce pour 2 raisons :
– la caution n’a pas d’intention libérale envers le créancier
– en réalité le créancier ne va subir aucun enrichissement du fait du cautionnement Le paiement effectué par la caution au créancier éteint la dette du débiteur envers le créancier et en réalité la caution verse seulement au créancier ce qui lui est du On est incontestablement en présence d’un acte à titre onéreux
Pendant longtemps la personne de la caution était indifférente et on appliquait les même règles à toute les cautions mais le système s’est modifié et de plus en plus souvent on effectue deux distinctions : l’opposition entre personnes morales et personnes physique et l’opposition entre les cautions averties et les cautions profanes.
Les cautions personnes physiques et les cautions profanes bénéficient d’un traitement de faveur


III : LES VARIÉTÉS DE CAUTIONNEMENT

La diversité des hypothèses et circonstances où le cautionnement s’applique amènent à distinguer selon les personnes cautions ou les modalités de cette sûreté et pour cette raison on devrait fait quatre distinctions : caution simple et caution solidaire, caution civile et caution commerciale, certificat de caution et sous cautionnement

  • A) LE CAUTIONNEMENT SIMPLE ET LE CAUTIONNEMENT SOLIDAIRE

Autrefois cette distinction apparaissait comme la plus importante mais depuis quelques années le cautionnement simple a quasiment disparu et pratiquement tous les cautionnements sont solidaires
Pourtant on assiste à une volonté législative de limiter dans certains cas les cautionnements solidaires
l’article 47 2° de la loi du 11 février 1994 sur l’initiative et l’entreprise individuelle et l’article L.341-5 du Code de la consommation prohibent ce cautionnement solidaire dans l’hypothèse des cautionnements généraux. Selon le second de ces textes « les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion figurant dans un contrat de cautionnement consenti par une personne physique au bénéfice d’un créancier professionnel sont réputées non écrites si l’engagement de la caution n’est pas limité à un montant global expressément et contractuellement déterminé incluant le principal, les intérêts, les frais accessoires » Le non respect de cette règle est donc sanctionné par une transformation en cautionnement simple
Le cautionnement solidaire atténue la différence entre le cautionnement et la solidarité. Comme l’avait dit la Cour de cassation la solidarité ne change pas la nature du cautionnement mais modifie seulement certains de ses effets
Il existe en effet une différence classique entre solidarité et cautionnement. En principe le codébiteur solidaire est un débiteur principal personnellement intéressé à la dette et à l’inverse la caution est un débiteur accessoire qui n’est pas personnellement intéressée à la dette puisqu’elle se contente de la garantir. Toutefois, la caution solidaire va être tenue plus sévèrement que la caution simple
En effet la caution simple bénéficie de 2 prérogatives écartées pour le cautionnement solidaire :
-le bénéfice de discussion : le créancier avant d’actionner la caution doit poursuivre le débiteur principal et ce n’est que s’il ne le désintéresse pas qu’il actionnera la caution
– le bénéfice de division : il apparaît dans l’hypothèse où une même dette envers un même créancier est garantie par une pluralité de caution. Dans le cautionnement simple, le créancier doit fractionner ses poursuites envers les cautions alors que dans le cautionnement solidaire le créancier pourra s’adresser à n’importe quelle caution pour le paiement de toute la créance garantie
On ajoute aussi que les effets secondaires de la solidarité s’appliquent en cas de cautionnement solidaire c’est à dire la représentation mutuelle des coobligés

  • B) LE CAUTIONNEMENT CIVIL ET LE CAUTIONNEMENT COMMERCIAL

Pendant longtemps, le cautionnement avait quasiment toujours un caractère civil : c’est un service d’amis, dans le cadre familial. Ce caractère civil subsiste dans l’hypothèse où la dette garantie était une dette commerciale
Le principe demeure qu’a priori le cautionnement est un contrat civil mais il va devenir commercial dans 4 hypothèses :

  • – la caution se fait rémunérer
  • – l’application de la commercialité par la forme pour les actes fait à propos d’un acte de commerce par la forme ex aval des lettres de change.
  • – l’application des actes de commerce par nature : sera commerciale le cautionnement donné par un commerçant pour les besoins de son commerce
  • – le cautionnement est un cautionnement intéressé de nature patrimoniale ce qui vise les cautionnements donnés par les chefs d’entreprise ou les associés majoritaires de la société. La Cour de cassation considère toutefois que la qualité de dirigeant ne donne pas automatiquement lieu à un cautionnement commercial

La première conséquence de cette distinction est que le cautionnement civil relève des tribunaux civil et le cautionnement commercial des tribunaux de commerce ce qui est important du fait des divergences entre la chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation

La seconde est que l’on retrouve la différence de prescription : 30 ans en matière civil et 10 ans en matière commerciale
La troisième est que pendant longtemps la différence entre les actes civils et commerciaux tenait au fait que le contrat civil obéissait à la preuve par écrit et le contrat commercial à celle par tous moyens. Cependant depuis 1980 la liberté de la preuve se limite aux seuls actes de commerce fait par les commerçants. On applique aussi la théorie des actes mixtes
En réalité la raison le plus importante de distinction entre ces deux catégories tenait au fait qu’en matière commerciale il existe une présomption de solidarité ainsi tout cautionnement commercial sera solidaire sauf à en disposer autrement

  • C) LE CERTIFICAT DE CAUTION ET LE SOUS-CAUTIONNEMENT

L’article 2014 du Code civil alinéa 2 dispose « On peut aussi se rendre caution non seulement du débiteur principal mais aussi de celui qui le cautionne »
Le certificat de cautionnement s’analyse comme le cautionnement de la caution. L’intérêt est que si la caution est insolvable le créancier agira contre le certificateur
Le sous cautionnement arrive souvent dans le domaine international quand un créancier ne veut pas être garantie par le banquier de la nationalité du débiteur mais par un banquier de sa nationalité. Ce banquier n’acceptera de s’engager que s’il est lui même garanti par le banquier du débiteur. En réalité on a deux contrat de cautionnement qui sont émis : l’un entre le créancier et la caution banque nationale; l’autre entre la caution banque nationale et la caution banque du débiteur principal

  • D) LE CAUTIONNEMENT RÉEL

Cette sûreté ne posait pas de difficulté autrefois. Il apparaît comme une sûreté mixte à la fois réelle et personnelle. Une caution sera tenue envers un créancier de la valeur du bien affecté en garantie c’est à dire que le garant sera tenu seulement à hauteur du bien donné en garantie
L’avantage pour un créancier d’accepter cette sûreté est que lorsqu’on affecte un bien en garantie on affecte une valeur relativement stable et que le créancier aura sur ce bien un droit de préférence
Cette garantie a suscité un abondant contentieux sur sa nature juridique : sûreté personnelle ou sûretés réelles ? De là dépend la réglementation applicable
Pendant un premier temps la 1er ch.civ avait affirmé que le cautionnement réel était une sûreté réelle : le créancier avait souscrit simplement une obligation « propter rem » (
Expression qui signifie littéralement: « à cause de la chose ».) avec comme conséquence que l’on excluait toutes les règles du cautionnement
Dans le même temps la chambre commerciale avait adopté une conception mixte : le créancier bénéficiaire « dispose à l’égard de la caution d’un droit de créance en cas de défaillance du débiteur principal; ce droit étant limité aux biens affecté à la garantie de l’engagement »
La 1er ch.civ . est ensuite revenue sur sa conception le 15 mai 2000 la caution « reste seulement tenue en cette qualité du paiement de la dette sur ses biens propres et revenus dans la double limite du montant de la somme garantie et de la valeur des biens engagés »
La conception mixte du cautionnement réel est sans doute la meilleure : dès lors qu’un tiers a garanti autrui on est nécessairement en présence d’une variété de cautionnement d’ou plusieurs conséquences :
– au niveau du droit des régimes matrimoniaux, l’article 1415 applique à cette sûreté
– de même et une façon générale les règles du cautionnement ont vocation à s’appliquer chaque fois qu’elles ne seront pas contrariées par une disposition spécifique du droit des suretés.