Le délit d’initié

L’exploitation en bourse d’informations privilégiées

Aussi dit délit d’initié

A longtemps laissé le législateur indifférent. Création de la COB en 1967, mais pas encore d’incrimination du délit d’initié. Il a fallu attendre la loi du 23 décembre 1970, article L.465-1 du CMF.

Choses sont devenues compliquées du fait des gouvernements socialistes, dès 1981, nationalisation d’une grande partie de l’activité. Toutes les banques et nombre d’industries et du coup le marché financier s’est considérablement réduit. Raréfaction et donc montée des actions,…petits épargnants se sont rués dessus. Pour assurer la confiance, actif sur l’incrimination du délit d’initié. L’on suppose qu’Al Quaida a vendu à découvert des actions avant le 11 Septembre. Allongement de la liste des délits de terrorisme, loi du 15 novembre 2001, avec le délit d’initié.

Section 1. Les fondements de la répression pénale ou administrative de l’exploitation d’informations privilégiées

Dévastateur pour l’économie et l’emploi. Le seul intérêt d’une action étant la variabilité de sa valeur en monnaie : l’on se croit donc malin en investissant, mais certains sont si malins qu’ils sont malhonnête.

Copie sur la SEC américaine qui donne trois fondements : dol, vol, triche.

  • 1. Le dol

Mensonge induisant le cocontractant en erreur. Pourrait convenir pour punir l’initié, mais obstacle technique car il faut utiliser les services d’un prestataire de services d’investissement qui est un écran entre l’acheteur et le vendeur.

  • 2. Le vol

Non pas d’actions mais d’un secret. La loi du 23 décembre 1970 ne reposait d’ailleurs que sur le vol.

Le dépositaire indiscret ne vole pas, on lui apporte le secret : ce sont des tuyautés (TIPPEE). Initiés non professionnels en droit français.

  • 3. La triche

Par méconnaissance de la règle d’égalité. Seulement ici l’égalité n’est pas une valeur fondamentale en matière de bourse.

Déloyauté proscrite en matière commerciale.

Difficile limite en l’habileté permise et la déloyauté.

Deux ensembles de règles : la loi impose une information très complète du public, exemple de L.233-7 du Code de commerce sur la publication des franchissements de seuil ; la jurisprudence ne puni pas ceux qui sont plus malins que d’autres, casse une condamnation prononcée contre un investisseur connaissant bien les grandes surfaces, poursuivi pour délit d’initié car un des seuls à connaître aussi bien le marché (en gros car très intelligent), 26 juin 1995 la Ruche méridionale, droit pénal 1995 n°225 « le caractère privilégié des informations ne saurait résulter de l’analyse que peut en faire celui qui les reçoit, mais doivent être analysée de manière objective… » Origine aussi compte.

Si l’information est acquise par vol, alors délit, TIPEE de par l’exploitation de l’information car triche. Autre tricheur l’utilisateur de son propre secret. C’est donc l’inégalité et l’illégalité dans les modes d’acquisition qui constitue la frontière. Délit ou manquement.

Section 1 – Le délit d’exploitation ou de communication irrégulière d’informations privilégiées

Le délit d’initié est le fait pour un dirigeant de société dont les actions sont cotées sur un marché réglementé et pour les personnes disposant à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, d’informations dites « privilégiées » de réaliser ou de permettre à une personne ou à des tiers de réaliser des opérations sur les titres de la société grâce à l’information privilégiée et ce, avant que celle-ci ne soit rendue publique. L.465-1 du CMF. Loi du 15 novembre 2001 étend du vol vers la triche.

Sous-section 1. Les conditions préalables du délit

  • &1. Le corps du délit (la valeur)

Dans l’article L.465-1

  • Une valeur négociable

Titres d’un émetteur, les instruments financiers.

Titres d’un émetteur (action, bon de souscription,…).

Instruments financiers : contrats à terme négociable, …promesses d’achat, de vente…instruments à terme sur les marchandises, parts de SICAV..

  • Négociable sur un marché règlementé

Donc délit que si actions sont cotées. Pas besoin d’être négociées, il suffit qu’elles soient négociables, donc hypothèse de la

Français ou pas ? 113-2 du Code pénal, est réputée commise en France l’infraction dont un des éléments constitutifs est réalisé en France. Arrêt de la chambre criminelle du 3 novembre 1992, droit pénal 1993 n°87, lire aussi l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 juillet 1989, droit bancaire 1990 p.84.

  • &2. L’auteur du délit d’initié

A) Les dirigeants de l’émetteur

S’il y a un émetteur évidemment, les « insiders » en ricain. Visés par l’alinéa 1er, ont l’information et font l’information. Désignés par renvoi à L.225-109 qui doivent mettre au nominal leurs actions : administrateurs, DG, Psdt, CS, représentants permanents des personnes morales administrateurs.

Gérants de fait ne sont pas énumérés à cet article.

B) Les personnes disposant d’informations à raison de leur profession ou fonction

Nature, circonstances.

  1. La nature des fonctions ou de la profession

Les personnes agissant sur ordre de l’émetteur

Les salariés, comme le directeur financier par exemple. Personnes qui sont au service de la société (avocat, notaire, commissaire aux comptes, sociétés prestataires de services d’investissements). Donc les SPSI ne peuvent faire profiter leurs investisseurs des projets de leurs autres clients.

  • Les personnes informées des activités des émetteurs

A prendre argement : les personnes qui savent. Par exemple les hauts fonctionnaires de Péchiney. Connaissance du champ d’intervention

Il faut aussi y placer les fonctionnaires qui ont un pouvoir d’autorisation, ….Exemple du fonctionnaire qui prépare l’agrément d’exportation d’armes de guerre, sait dès lors que les actions relatives vont monter, Thomson 13 Mai 1986. Autorisation de mise sur le marché d’un produit, pareil va faire monter les actions. Agents de la COB elle-même qui avaient fait des investigations et en avait profité pour faire une opération d’initié. Diplomate qui connaît une guerre prochaine. Où s’arrêter ? Problème sur les analystes financiers, sont-ils initiés ? En principe non, sont juste intelligents et au courant (appréciation objective), sauf si trichent. La limite étant le cas où ils obtiennent leur information autrement que par des lectures « publiques ». Décision de sanction de la COB du 24 juin 1993, bulletin joly Bourse 1993 p.757. Société française des analystes financiers, l’orateur délivre une information non encore publique, un des membre de l’auditoire communique cette information.

  1. Les circonstances de l’acquisition de l’information

Ce sont des professionnels, mais alors dans l’exercice normal, à l’occasion ? Exemple du coiffeur du PDG qui apprend la chose à l’occasion mais pas dans l’exercice normal, seulement à l’occasion.

Deux décisions « subtiles ». Alinéa 1er et 2 de l’article L.465-1 du CMF : a l’occasion de l’exercice (1970) et l’autre dans l’exercice (1989). Tribunal correctionnel de Paris 15 octobre 1976, note au JCP par Tunc, premières décisions : un architecte avait RDV avec un dirigeant de société et attendait dans l’antichambre d’être reçu. Voit sortir un autre monsieur qu’il connaissait avec un air heureux, et donc imagine une « affaire ». Condamné pour délit d’initié : exploitation pour son compte des informations reçues.

13 février 2002, bulletin Joly Bourse §43, syndicaliste qui a l’occasion de l’exercice de son mandat avait obtenue une information privilégiée qu’il avait indûment communiquée. Relaxé car l’exercice normal de ses fonctions de syndicaliste ne permet pas ce genre d’informations.

C) Les initiés non professionnels

Alinéa 3 de L.465-3, toute personne autre que celles vises aux deux alinéa précédent possédant en connaissance de cause des informations privilégiées. Donc doivent savoir que l’information n’est pas publique. Date de la loi du 15 novembre 2001, loi de sécurité dont l’objet est la sécurité contre le terrorisme.

Donc les tuyautés sont devenus punissables à cause du terrorisme.

Tant qu’une information n’est pas publique, alors tout le monde peut être un initié !

Est-ce que celui qui projette un crime et qui sait qu’il fera baisser les actions et qui en profite pour les vendre à découvert, sait-il qu’il est initié ? Oui.

  • &3. La nature de l’information privilégiée

Définie comme celle qui est susceptible d’avoir un effet sur les cours.

A) L’objet

Doit avoir une influence sur le cours : augmentation de capital, contrat, fusion, OPA, raid, faillite d’un concurrent…

B) La densité de l’information

Ce ne doit pas être une rumeur. Directive du 22 décembre 2003, 621-1 de l’AMF : information doit être précise et particulière.

  1. Précise

Porte sur un événement que l’on peut décrire : une OPA par exemple. Descriptible et qui se situe dans le temps.

  1. Particulière

Dans la loi, expression suivante : situation, perspective d’un émetteur dont les titres sont cotés. Donc un ou quelques titres, pas tous les titres.

Loi du 15 novembre 2001 semble démentir cette idée, car les terroristes ont fait des opérations sur l’ensemble des valeurs américaines. L’on peut déduire de l’esprit de cette loi que la connaissance d’un événement ayant un effet général peut être un délit d’initié.

C) Le caractère secret de l’information

Non publique. Peut être le secret d’un cercle étendu, mais qui n’est pas le public.

Une information commence à être publique lorsqu’un investisseur raisonnable est susceptible de la connaître.

Sous-section 2. Les comportements incriminés

Connaître l’information n’est pas un délit, il faut un certain comportement. Pour les américains : « discolse or refrain ».

Deux façons : ou bien l’initié agit pour lui-même, pour autrui.

  • &1. L’initié agit pour lui-même

« Réaliser une ou plusieurs opérations avant que le public ait connaissance de ces informations ».

A) L’élément matériel du délit : quid de réaliser

Passer un ordre de vente ou d’achat portant sur les titres que l’on détient.

Ce qui est puni c’est l’ordre et non pas le profit.

L’opération doit exploiter l’information. L’on se contente de présomptions, sont plus ou moins fortes suivant qu’il s’agit d’un dirigeant ou d’un TIPEE. Importance pratique, Cour d’appel de Paris 30 mars 1977, JCP 1978 n°18789 Tunc : une personne avait passé un ordre, reçu une information privilégiée, ordre réalisé après. La Cour d’appel de paris a estimé qu’il n’était pas initié car l’opération n’a pas été inspirée par l’information connue postérieurement.

B) L’élément moral de l’infraction

La conscience dont il s’agit est celle qui porte sur le caractère privilégié de l’information (il faut le savoir). Donc intéressant pour le TIPEE.

Le mobile est indifférent. Cour d’appel 26 mai 1977, JCP 1978 n°18789, PDG avait conduit sa société a faire de mauvaises affaires, a peur de sa responsabilité et vend ses actions encore « bonnes » pour payer ses futurs dommages et intérêts. Mobile honorable mais condamné, car avait conscience du caractère privilégié de son information.

  • &2. L’initié agit dans l’intérêt d’un tiers

Deux façons d’agir dans l’intérêt d’un tiers, prévu dans deux endroits différents.

Permettre de réaliser, fin de l’alinéa 1er. Repris dans l’alinéa 3 pour le TIPEE. Dans l’alinéa 2, il y a communiquer à autrui. Donc deux délits à distinguer car pas la même peine.

  • a) Permettre de réaliser
  1. L’élément matériel

Exécution d’une opération comme mandataire, pour le compte d’autrui. Cas de l’agent de change qui agi pour ses clients qui n’ont rien demandé.

Suggérer d’opérer à un investisseur.

  1. L’élément moral

Différent dans les deux cas : le mandataire aura bien conscience d’agir. Celui qui suggère d’opérer doit avoir conscience que celui qu’il informe utilisera mal.

  • b) Communiquer

Alinéa 2, communiquer à un tiers en dehors de l’exercice normal de ses fonctions. C’est le « dîner en ville ».

« Data room », donc cadre normal des fonctions, ces communications sont licites. Mais si celui qu’on informe licitement s’en sert pour commettre alinéa 1 ou 2, alors ce dernier sera un initié, mais le communiquant ne sera pas responsable.

Sous-section 3. La poursuite et la répression

  • &1. Les règles de procédure
  • a) La compétence territoriale

Un seul compétent, le tribunal de Paris, article 704-1 du Code de procédure pénale.

L’AMF, joue un rôle dans la recherche et la constatation des infractions.

Le rôle de l’AMF

  1. La recherche et la constatation

Fonctionnaires de l’AMF, personnages dirigés par le collège de l’AMF. Beaucoup de pouvoirs, L.621-9 à 12 du CMF : convoquer les gens, interroger, communication de pièces, perquisition et saisie (mais alors il faut une autorisation délivrée par le président du TGI de Paris).

  1. Le rôle dans l’exercice de l’action publique

Si le procureur de la République décide de saisir les juridictions pénales, il doit demander son avis à l’AMF, L.466-1 du CMF.

  1. La constitution de partie civile

L’AMF le peut, pour se plaindre des opérations illicites sur le marché. L.621-16-1, mais alors se prive d’un pouvoir : ne peut dès lors juger la même chose comme manquement. Sinon serait juge et partie.

  • b) L’action civile
  1. L’action civile des actionnaires de l’émetteur

Préjudice pour les actionnaires, mais aussi les futurs actionnaires…un seul arrêt admet la recevabilité de l’action civile, mais seulement s’il s’agit des actionnaires de l’émetteur. Cet arrêt ne dit pas en quoi consiste le préjudice. Sur pourvoi contre une juridiction d’instruction, 11 décembre 2002, droit pénal 2003 n°35.

  1. L’action civile des associations défendant leur objet social

Associations de défense des investisseurs, des épargnants. Deux association admises pour défendre leur objet social : l’association des actionnaires de l’émetteur, L.452-1 alinéa 3 du CMF, renvoyant à l’article L.225-120 du Code de commerce.

Les associations de défense agréées par l’administration, celles-ci sont multicarte. Agrément, de peur que les émetteurs se fassent des associations fausses pour en réalité attaquer les « ennemis ». Prévu aussi par L.452-1 alinéa 2.

  1. Les associations agissant comme mandataire des victimes

L.452-2 du CMF. Certaine publicité possible mais sur autorisation du président du tribunal de grande instance, contrairement à s’il s’agissait d’une association de consommateur qui ne peuvent faire de publicité.

  • 2. La répression
  • Les personnes physiques

L.465-1 qui a trois alinéas.

Exploitation

Communication

Circonstance aggravante

Professionnels

2 ans et 1,5 millions ou dix fois le profit réalisés ou qu’il a fait réalisé

1 an et 150 000 euros

Aucune

Tuyautés

1 an et 150 000 euros ou dix fois le profit

1 an et 150 000 euros

Si criminel ordinaire 1,5 millions ou dix fois le profit et 7 ans de prison

si terroriste alors articles 421 et 423 du Code pénal : 10 ans d’emprisonnement

  • Les personnes physiques

L.465-3 de CMF, quintuple de la peine d’amende et toutes les peines classiques.

Section 3. Le manquement d’initié

Exploitation d’informations privilégiées telle que décrite par le règlement de l’AMF et réprimée comme telle.

Un peu plus étendu dans sa définition. Peut se cumuler a udélit, mais alors limite du décuple du profit pour les amendes.

Livre VI du règlement de l’AMF, 621 et suivants.

Section 4. Les infractions voisines du délit d’initié

Au nombre de deux.

1. Le défaut de mise au nominatif des actions des dirigeants (de l’émetteur) et de leur famille

Article L.247-4, délit qui consiste à n’avoir pas mis au nominatif leurs actions, 9 000 euros d’amende.

2. La manipulation des cours

L.465-2 alinéa 1er, consiste à fausser le marché. Donc répandre de fausses nouvelles. D2crit dans l’article 631-1 du règlement de l’AMF (arrêté du 12 novembre 2004 homologuant le règlement).