Le droit de retour des collatéraux privilégiés (frères, sœurs du défunt)

Le droit de retour des collatéraux privilégiés

Lorsque le défunt laisse uniquement un conjoint survivant (il n’a ni descendant, ni père ni mère) et des collatéraux privilégiés, en principe le conjoint recueille toute la succession. Cependant, si le défunt a reçu à titre gratuit des biens de ses ascendants, ces biens sont dévolus par moitié à ses frères et sœurs, ce qui peut donner lieu à une indivision entre le conjoint survivant et les bénéficiaires du droit de retour.

Les frères et sœurs du défunt (= qui sont évincés de la succession par le conjoint survivant) se voient reconnaître effectivement à titre de compensation un droit de retour légal inscrit à l’article 757-3 du Code civil : « Par dérogation à l’article 757-2, en cas de pré décès des père et mère, les biens que le défunt avait reçus de ses ascendants par succession ou donation et qui se retrouvent en nature dans la succession sont, en l’absence de descendants, dévolus pour moitié aux frères et sœurs du défunt ou à leurs descendants, eux-mêmes descendants du ou des parents pré décédés à l’origine de la transmission ».

Il s’agit d’un droit de retour qui est fondé sur l’origine des biens (= les biens que le défunt a reçu par donation ou par succession), ce qui explique qu’on le rattache à la catégorie des successions anomales.

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I. Les conditions du droit de retour des collatéraux privilégiés

A. Les conditions relatives aux personnes

Pour que le droit de retour puisse s’exercer, il faut que les parents soient pré décédés et que le défunt ne laisse pas de descendants. Ce droit de retour est réservé aux frères et sœurs du défunt ou leurs descendants; eux-mêmes descendants du ou des parents pré décédés à l’origine de la transmission.

Cette précision du texte vise l’hypothèse des familles recomposées (= frères germains, consanguins et utérins).

Par conséquent, l’application de ce texte va conduire à :

  • s’il s’agit de frères et sœurs germains, le droit de retour s’exerce indifféremment sur les biens provenant à la fois des ascendants paternel et maternel car ils appartiennent aux 2 lignes.
  • s’il s’agit de frères et sœurs consanguins, le droit de retour s’exerce que sur les biens provenant des ascendants paternels.
  • s’il s’agit de frères et sœurs utérins, le droit de retour s’exerce que sur les biens provenant de la ligne maternelle.

B. Les conditions relatives aux biens

Le droit de retour va s’exercer sur les biens que le défunt a reçu de ses ascendants par donation ou succession (= bien reçu à titre gratuit).

Le terme d’ascendant a été substitué au terme « d’eux » qui visait uniquement les parents. Cette modification apportée en 2006 s’explique une fois de plus par le vieillissement de la population, la multiplication des libéralités faites aux petits enfants et s’explique aussi par l’instauration dans la loi de 2006 des donations transgénérationelles qui permettent effectivement de faire des donations en sautant une génération et ces nouvelles libéralités justifient donc l’instauration du droit de retour lorsque les biens proviennent des ascendants.

Ces biens doivent se retrouver en nature dans la succession du défunt. La conséquence de cette exigence est double : d’une part les biens ne doivent pas avoir été aliénés par le défunt et d’autre part ces biens ne doivent pas avoir été légués par le défunt. Ce n’est pas un droit d’ordre public. Il ne faut pas que ces biens aient été détruits.

Dans tout ces cas, l’exigence de la conservation des biens en nature exclut la subrogation qui permettrait au droit de retour de s’exercer sur le prix perçu ou sur les indemnités perçues. On ne retrouve pas la possibilité d’exercer le droit de retour en valeur.

Problème qui se posera de savoir ce qu’il advient des donations portant sur des sommes d’argent. L’argent c’est consomptibles d’où le problème.

Autre difficulté soulevée par le droit de retour des frères et sœurs, c’est dans l’hypothèse où ce droit de retour a vocation à s’exercer sur un bien qui constituait le logement des époux car on s’est demandé si dans une telle hypothèse le droit de retour était compatible avec le droit viager sur le logement reconnu au conjoint survivant par l’article 764 du Code civil.

Cette question a fait l’objet d’une réponse : aucune incompatibilité entre les 2 droits. La Garde des Sceaux a estimé que ce droit de retour ne faisait en aucun cas obstacle au droit viager d’habitation dès lors que le conjoint en remplissait les conditions pour pouvoir en bénéficier. Par conséquent, dans ce cas particulier les collatéraux privilégiés auront vocation à la moitié du logement en propriété mais ce droit ne pourra pas mettre en échec l’exercice du droit viager du conjoint survivant et concrètement les droits des collatéraux privilégiés seront suspendus jusqu’au décès du conjoint survivant.

II. L’exercice du droit de retour

Lorsque leur droit de retour peut s’exercer, les collatéraux privilégiés recueilleront la moitié des biens transmis au défunt par ses ascendants à condition de remplir les conditions requises pour succéder car il s’agit d’une vocation successorale.

Dans ce cas particulier, il y aura bien 2 dévolutions distinctes :

  • l’une portera sur la succession ordinaire du défunt (= biens autres que les biens de famille)
  • l’autre portant sur les biens de famille dévolus conformément à l’article 757-3.