Le rapport de dettes

LE RAPPORT DE DETTES

Le rapport de dettes est l’opération par laquelle l’héritier , débiteur du défunt ou d’un cohéritier , impute ses dettes sur le lot qu’il est appel à recevoir.

L’article 829 disposait que chaque cohéritier fait rapport à la masse des sommes dont il était débiteur. La loi de 2006 a consacré cette pratique : article 864 à 867 du Code civil. Il va s’agir de tenir compte lors du partage des dettes existantes entre l’un des cohéritiers et le de cujus ou l’indivisaire.

Le rapport des libéralités est une opération préparatoire au partage. Le rapport de dette se situe plus loin car c’est déjà une opération de partage : il concerne la composition des lots. Néanmoins, l’origine des deux rapports est proche : le rapport de dettes au 16ème siècle, il existait déjà mais ne valait que pour un seul type de dette : il ne valait que pour le prêt. Cette institution existe toujours.

Soit un de cujus qui donne 10 000€ à son enfant, la donation est rapportable. Le rapport va être de 10 000€. Soit un de cujus, qui prête 10 000€ à l’un de ses enfants. A son décès, si le prêt n’est pas encore remboursé, on va prendre en compte cette dette qu’il devait au de cujus. On pourrait imaginer qu’après le partage l’emprunteur rembourse à l’ensemble des copartagés la somme en question. Le risque est l’insolvabilité des cohéritiers. La masse partageable va donc être augmenté d’autant. L’intérêt, c’est que les cohéritiers évitent l’insolvabilité du cohéritier débiteur : ils ont une sorte de droit préférentiel. Si l’héritier avait des créanciers personnels, ils vont éviter le concours avec eux.

Section 1 : Le champ d’application du rapport de dettes

La loi entend largement les personnes qui sont impliquées par ce rapport de dettes car il joue à l’encontre des copartageants c’est-à-dire non seulement les cohéritiers ab intestat mais aussi tous les successeurs qui viennent au partage successoral.

Les dettes rapportables, ce sont d’abord les prêts consentis par le de cujus a un cohéritier. Ce sont aussi toutes les autres dettes dont le successeur était tenu envers le de cujus quelle que soit leur nature. Par ailleurs, les dettes rapportables sont aussi celles nées pendant l’indivision et qu’un coindivisaire doit aux autres coindivisaires : hypothèse où un coindivisaire a fait une dépense indispensable sur un bien indivis… La notion de dette rapportable s’applique aux dettes exigibles mais aussi aux dettes non exigibles : le rapport de dettes emporte déchéance du terme par souci de simplification, et pour un souci de sécurité. On va ainsi éviter le risque d’insolvabilité. En attendant la réalisation du rapport, la créance n’est pas exigible.

Section 2 : La mise en œuvre du rapport de dette

On retrouve la technique du moins-prenant : le débiteur va prendre moins dans le partage que son bien normal. On va établir au nom de chaque successeur, un compte au nom de ce que celui peut devoir au de cujus ou à l’indivision et tout ce dont il peut être créancier. On appelle ça le compte d’indivision et les articles de ce compte d’indivision sont, en règle générale, évalués selon le nominalisme monétaire.

Problème: question de la dette de somme d’argent. Quand on a une dette consentie par un prêt qui a servi à acquérir un bien. Faut-il rembourser le nominalisme ou bien la valeur du bien au jour du partage ? Il y a eu un débat certains mettant en avant le mécanisme de la subrogation réelle : Cassation, 1989. La Cour de cassation a été critiquée que d’autres faisaient valoir que le rapport de dette n’était pas le rapport de la libéralité et qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer l’article 860. Revirement de jurisprudence dans une décision de 1994: pour le rapport de dettes, il faut s’en tenir au nominalisme monétaire : il faut se contenter du montant du prêt. Cette question n’a pas été transcrite dans un texte pour la loi de 2006 mais les textes qui existent depuis 2006 ne remettent pas en cause ce principe. L’article 866 du Code civil prévoit que les sommes rapportables produisent intérêt au taux légal sauf stipulation contraire : système de nominalisme.

Si le solde du compte d’indivision est négatif, le cohéritier doit de l’argent à l’indivision. Il est débiteur. Le montant du paiement s’élève au chiffre du solde mais il faut ajouter les intérêts du solde à compter de l’ouverture de la succession. L’idée est que même si le rapport des dettes est née avant le décès, il n’est pas exigible avant le partage : il ne peut pas être réclamé dès le décès. Si la dette était une dette productrice d’intérêt (prêt par exemple), si c’était prévu avant le décès, le point de départ est antérieur au décès.

On utilise la technique de l’imputation. On va grossir la masse partageable du montant du solde négatif et les intérêts. L’ensemble va être partagé entre tous les successeurs mais la dette va être imputée sur la part du débiteur qui prendra seulement sa part diminué de la dette.

L’avantage est de demander au copartageant un droit préférentiel par rapport aux autres créanciers de l’héritier débiteur. Si le débiteur ne paye pas spontanément, chaque copartageant peut le solliciter afin qu’il verse la fraction du reliquat.