Le rattachement en droit international

Le rattachement en droit international

C’est l’élément de la situation juridique qui va permettre de désigner la loi applicable. En principe, il suffit de localiser, parmi les faits de l’espèce, l’élément qui correspond à la définition de l’élément de rattachement, lequel va varier d’une RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS à une autre.

Ceci étant, l’application de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS peut être parfois compliquée par deux ordres de considération. Le premier facteur de complication, c’est lorsqu’une difficulté apparait dans la mise en œuvre de l’élément de rattachement qui est retenu dans la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS. La deuxième source de difficulté c’est lorsque l’élément de rattachement subit une modification dans le temps, modification juridique ou factuelle. L’élément de rattachement va changer, par exemple parce que la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS va changer. La modification factuelle c’est par exemple une RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS qui dit que le critère est la nationalité et la personne change de nationalité.

  • 1. Les complications dans la mise en œuvre de l’élément de rattachement

D’abord, il peut y avoir une difficulté qui apparait au niveau du droit. Il y aussi des difficultés qui apparaissent au niveau des faits, c’est-à-dire que dans la situation, plusieurs éléments semblent correspondre à la définition de l’élément de rattachement (ou à l’inverse, il n’y a aucun élément).

  1. Les difficultés de définition de l’élément de rattachement

On peut parfois hésiter sur le sens exact de l’élément de rattachement retenu par la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS.

C’est en fait un problème d’interprétation de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS. C’est donc une difficulté qu’on résout selon les conceptions de l’auteur de cette règle. En principe, on va interpréter selon les conceptions du for.

Si la règle est de source purement interne, le point de départ du raisonnement est de se dire que généralement l’élément de rattachement retenu par la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS a la même signification que celle qu’il a en droit interne, sauf quand cela paraitrait inadapté. On peut distinguer trois catégories de rattachement :

Il y a des rattachements qui posent des problèmes trop spécifiques en DIP pour que le droit interne renseigne utilement sur leur sens. Par exemple, en matière contractuelle, l’élément de rattachement est la loi choisie par els parties. Il n’y a aucun équivalent en droit interne. Un autre exemple est le lieu du délit, en droit interne l’article 46 du Code de procédure civile laisse un choix à la victime. On considère que pour le conflit de lois, il existe parfois des délits complexes. Si on a un fait générateur en France et un dommage en UK, on considère qu’on ne peut pas laisser à la victime le choix. La jurisprudence a développé, en cas de délits complexes, des solutions propres au droit international privé.

Il y a des critères de rattachement qui ne posent aucunes difficultés par nature. Par exemple, le lieu de situation d’un bien corporel ne pose pas de difficultés.

Il y a des critères qui peuvent poser des difficultés mais le droit interne est alors utile. Cela concerne la nationalité et le domicile.

Parfois, la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS va être issu d’un texte international (traité ou convention européenne). Le but d’un traité est d’unifier les solutions entre les pays signataires. Dans ce cas, certains traités donnent une définition d’élément de rattachement. Par exemple, la Convention de La Haye du 15 juin 1955 pour régler les conflits entre la loi nationale et la loi du domicile. Dans cette convention, on nous dit que le domicile est le lieu de la résidence habituelle. Les textes européens ont tendance à faire la même chose. Quand les textes européens ne le font pas, la CJUE a tendance à donner des définitions européennes des critères de rattachement retenus.

  1. Les difficultés tenant à la pluralité ou au défaut de rattachement

Parfois, parmi les faits de l’espèce, on a l’impression que plusieurs éléments correspondent au critère de rattachement. C’est le cas par exemple avec la nationalité, on parle alors de conflit de nationalités. La jurisprudence française a trouvé une solution qui est discutée en doctrine et est remise en cause dans le cadre communautaire. Selon elle, il faut distinguer :

L’individu a, parmi ses nationalités, la nationalité française ; elle prévôt alors toujours

Lorsque les nationalités sont toutes étrangères, il faut retenir la nationalité la plus effective, c’est-à-dire celle qui est la plus réelle. Elle va être déterminée en fonction d’un certain nombre d’indices.

Certains auteurs critiquent cette position et militent pour une approche fonctionnelle de la nationalité. Cela signifie qu’il faut regarder les buts poursuivis par chacune des RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS qui retiennent la nationalité comme critère de rattachement. Paul Lagarde considère qu’il faut retenir une solution ou une autre selon la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS.

Dans un arrêt Garcia Avello, la Cour de justice a dit que les autorités d’un Etat membre ne pouvaient pas priver un binational des droits qu’il pouvait tirer de sa deuxième nationalité. Bien entendu, cela n’est valable que dans le cadre européen.

Parfois, on ne trouve pas le rattachement retenu par la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS. Ceci peut être dû à trois causes :

Le rattachement n’existe pas en l’espèce.

Le rattachement existe mais il est inconnu. Par exemple, une RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS en matière mobilière retient le lieu de situation du bien, or ce bien a été perdu et on ne sait pas où il est.

Le rattachement existe, est connu mais en l’espèce, il ne permet pas désigner un ordre juridique. Par exemple, un bien qui se situerait dans un espace non soumis à l’autorité d’un Etat (ex : la haute mer) ou dans un espace disputé entre deux Etats.

Il y a alors deux solutions possibles qui sont combinées. La première est de trouver un rattachement subsidiaire au cas où le rattachement primaire ne fonctionne pas. La deuxième solution est d’appliquer la loi du for du fait de sa vocation subsidiaire. La loi du for est toujours là pour « combler les trous ». La jurisprudence française utilise ces deux solutions en les combinant, si les rattachements subsidiaires ne fonctionnent pas, on en vient à la loi du for.

  • 2. Les complications nées d’une modification temporelle dans l’élément de rattachement

En droit interne, des règles de droit peuvent se succéder dans le temps, cela crée le problème de conflit de lois dans le temps. La question est de savoir si la loi nouvelle est rétroactive ou non. Ce facteur temps peut aussi intervenir en DIP. Le temps peut être une perturbation de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS quand à l’élément de rattachement de différentes manières. Le temps peut conduire à une modification juridique ou factuelle mais le résultat sera le même, il y a aura une modification du critère.

La modification juridique veut dire qu’une loi va être modifiée entre le moment où la situation litigieuse est née et le moment où le juge est saisi. Cette règle de droit modifiée peut être la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS du for ou c’est la loi interne du pays désigné par la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS qui a changé.

La modification de l’élément de rattachement peut être factuelle, c’est-à-dire que l’élément de rattachement se modifie lui-même entre le moment où la situation est née et le moment où elle est appréciée par le juge. On dit généralement que la localisation actuelle de l’élément de rattachement n’est plus la même que sa localisation initiale, on parle alors de conflit mobile.

  1. Le changement de la règle de conflit de lois du for

On appelle ça un conflit transitoire de DIP.

En fait, il y a des appellations très proches car les problèmes sont très proches. Dans un cas comme dans l’autre, deux règles se succèdent.

Ex : le 1er août 1972 est entré en vigueur l’article 311-14du Code civil qui a posé une nouvelle règle de conflit de lois en matière de filiation, qui soumet l’établissement de la filiation à la loi nationale de la mère au jour de la naissance de l’enfant. Avant, la règle de conflit de lois ancienne élaborée par la jurisprudence distinguait filiation légitime (loi des effets du mariage) et filiation naturelle (loi nationale de l’enfant). Pour un enfant né avant 1972 mais dont on chercherait à établir la filiation après 1972, quelle règle de conflit applique-t-on ?

Auparavant, ces problèmes de droit transitoire étaient assez rares parce que le droit international privé était essentiellement d’origine jurisprudentielle. Or, la jurisprudence est censée est purement déclarative du droit, elle est donc immédiatement applicable car elle est censée être préexistante. Aujourd’hui, les conventions internationales se sont multipliées en droit international privé mais en général, elles prévoient des dispositions de droit transitoire. Mais surtout, il y a des interventions législatives de plus en plus fréquentes en droit international privé.

  1. Les hésitations doctrinales

Au moment où les difficultés sont apparues, la doctrine s’est divisée en deux camps. Le camp minoritaire a milité pour des solutions spécifiques au droit international privé. Le camp majoritaire a dit qu’il suffisait de transposer les solutions de droit transitoire interne.

Le premier courant a insisté sur la spécificité du DIP. Pour eux, la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS n’est pas une règle comme les autres, il faut donc élaborer des solutions propres. Le premier argument est de dire que la règle de droit interne crée des droits subjectifs, ce qui n’est pas le cas pour la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS. Le deuxième argument c’est que la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS ne s’adresse pas aux individus mais aux juges, elle est faite pour permettre au juge de trouver la loi applicable. Du coup, ce courant disait qu’il fallait appliquer la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS nouvelle immédiatement, quelque soit la date de naissance de la situation.

La tendance majoritaire a été plutôt favorable à la transposition du droit transitoire interne. Le principal argument est qu’un changement de RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS met els parties dans une situation analogue à un changement de législation interne. Dans les deux cas, il y a un changement de la réglementation applicable aux individus. Le deuxième argument est de dire que les impératifs sont les mêmes dans les conflits de droit interne et ceux de DIP. Ces impératifs sont d’assurer l’unité de la législation nationale tout en assurant la sécurité juridique des individus. Les solutions de droit transitoire sont d’assurer un passage de la législation ancienne à la législation nouvelle. En DIP, les mêmes objectifs sont visés. Les solutions devraient donc être tout aussi bonnes pour le droit transitoire en DIP. Au sein de ce courant, il y a toutefois des divisions. La division principale existe entre ceux qui disent qu’il faut simplement appliquer les principes généraux du droit transitoire alors que d’autres disent qu’il faut appliquer les solutions particulières du droit transitoire qui sont posées par lé législateur ponctuellement.

  1. Les solutions du droit positif

Il n’y a pas vraiment de problème lorsque l’auteur de la nouvelle règle donne la solution, c’est ce que font souvent les traités internationaux. Parfois, c’est le législateur français qui prend la peine de préciser quand sa RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS va s’appliquer.

Mais parfois, le législateur ne dit rien, c’est alors la jurisprudence qui va donner les solutions. Son principe de base est d’appliquer les principes généraux de droit transitoire par matière. La jurisprudence va donner la même solution de droit transitoire à une RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS nouvelle dans une matière, la même que celle qu’elle aurait donné à une nouvelle règle de fond dans la même matière.

La jurisprudence applique trois principes généraux :

Application immédiate de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS nouvelle ;

Les situations définitivement acquises ne sont pas remises en cause ;

On distingue donc la création des droits et le contenu des droits. Ce principe subit une exception en matière contractuelle, on maintient la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS ancienne pour les effets prochains.

En revanche, il y a un principe de droit transitoire interne qui n’est pas transposé par la jurisprudence. En droit interne, on considère que la loi nouvelle, lorsqu’elle est d’ordre public, peut s’appliquer à des situations qui auraient du rester soumises à la loi ancienne. En matière interne, quand on fait une nouvelle loi, c’est pour améliorer les choses. Mais avec une nouvelle RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS, on ne sait pas quel droit est plus protecteur.

La deuxième question est de savoir si on applique les dispositions transitoires spéciales qu’on trouve dans certaines lois.

S’agissant de la loi sur le divorce de 1975, la Cour de cassation a écarté la disposition transitoire de cette loi en DIP au motif que « cette disposition pose seulement des règles transitoires spéciales de la loi interne et ne régit pas la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS, laquelle demeure déterminée par les principes généraux du droit transitoire qui commandent l’application immédiate de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS » (Cour de Cassation Civ 1ère, 13 janvier 1982, Ortiz-Estacio).

On a un doute à propos d’un arrêt concernant la loi de 1972 (Cour de Cassation Civ 1ère, 9 juin 1996, Imhoos). La Cour de cassation a répondu au visa de la règle spéciale de la loi de 1972. En l’espèce, la solution revenait au même que si elle avait appliqué les principes généraux, un doute demeurait donc.

Certains auteurs disent qu’il faudrait distinguer selon la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS. Pour la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS neutre, on applique les principes généraux. Mais pour les RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS qui poursuivent un but particulier, il faudrait alors appliquer les dispositions spéciales. L’exemple typique est l’article 311-17 du Code civil sur la reconnaissance d’enfant, le but est de favoriser les validations, il faudrait donc appliquer les dispositions de droits transitoires spéciales.

De façon générale, la mise à l’écart des dispositions de droit transitoire spéciales est une bonne solution. En effet, en droit interne, ces dispositions sont élaborées en fonction de la teneur des règles de fond. Par exemple, la loi de 1972 se déclare immédiatement applicable à toutes les reconnaissances d’enfants naturels faites avant son entrée en vigueur, le législateur s’est montré plus libéral. Ce raisonnement n’est pas transposable en matière de DIP. Rien ne dit que la loi nouvellement désignée sera plus favorable que la loi anciennement désignée.

  1. Le changement de la loi étrangère désignée par la règle de conflit de loi

On parle souvent de conflit transitoire de droit étranger.

La RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS ne change pas et désigne un ordre juridique. Mais dans cet ordre, deux règles de fond se sont succédées.

Pour le juge ce qui change, c’est que ce qui est en cause c’est le droit étranger.

Pour résoudre ce problème, la majorité de la doctrine était favorable à une solution de principe, celle d’appliquer les règles de droit transitoire étrangères. La justification donnée à cette solution c’est qu’il faut appliquer le droit étranger désigné par RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS sans le modifier. Or, les règles de droit transitoire étrangères sont là pour dire à quelles situations est applicable la loi ancienne et à quelles situations est applicable la loi nouvelle. Il faut donc suivre ce que disent ces solutions car l’application correcte du droit étranger suppose qu’on le respecte dans toutes ces dimensions. Sur le plan des idées, un courant minoritaire de la doctrine a contesté cette solution, il reproche à cette solution de ne pas tenir compte de la spécificité du problème, c’est un conflit de droit transitoire mais on est dans une dimension internationale. Ce courant dit que c’est un problème posé au juge français. Par ailleurs, la mission du juge français n’est pas d’assurer l’unité législative de l’ordre juridique étranger. Ces auteurs disent qu’en fait il faudrait adopter une autre solution et se fonder plutôt sur les finalités des règles françaises de DIP. On poserait donc la solution de droit transitoire en fonction de l’objectif d’une RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS. Par exemple, en matière de célébration du mariage, l’objectif des RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS est d’assurer une certaine faveur à l’égard de la validité du mariage, il faudra donc appliquer, dans le droit étranger, la loi ancienne ou la loi nouvelle selon celle qui correspond le mieux à l’objectif.

Cette solution n’a pas été suivie par la jurisprudence. La Cour de cassation a clairement posé qu’il appartient à la loi étrangère de résoudre les conflits de lois dans le temps de droit étranger. La Cour de cassation l’a clairement exprimé (Cour de Cassation, Civ 1ère, 3 mars 1987, arrêt Leppert). En l’espèce, il s’agissait d’une action en recherche de paternité. C’était la loi allemande qui était désignée, mais cette loi avait été modifiée entre la date de naissance de l’enfant et la date où le juge avait été saisi. La Cour de cassation dit qu’il appartient au droit allemand de dire quelle loi doit être appliquée. Si la rétroactivité posée par la loi nouvelle apparait choquante au regard de l’ordre public, on applique alors la loi étrangère ancienne. C’est en principe la seule limite.

Ceci étant, il existe parfois une autre limite qui est plus controversée. C’est lorsque la loi étrangère commande l’application de la règle substantielle nouvelle mais, au moment de l’adoption de cette loi étrangère nouvelle, la situation litigieuse avait perdu tout lien avec le pays dont cette loi est issue. Dans ce cas, on va alors appliquer la loi ancienne et non la loi nouvelle. C’est une théorie dite de la pétrification du rapport de droit au jour de sa naissance qui a été créée en Allemagne. On estime que cette situation n’avait plus aucun lien avec l’ordre juridique étranger. En fait, en France, la question s’est posée à propos de la modification légale en matière de régime matrimonial dans les anciens pays communistes. Ces lois se déclaraient applicables immédiatement, même à des époux mariés avant. Beaucoup de personnes étaient parties en France avec aucune volonté de revenir dans leur pays. Si on suit le raisonnement normal, la loi applicable est la loi du premier domicile conjugal. On a du coup un certain nombre de décisions françaises où els juges ont refusé de suivre les solutions étrangères de droit transitoire au motif qu’il y aurait un manque de réalisme à appliquer la loi nouvelle à des personnes qu’elle ne concerne plus. La Cour de cassation na parait retenir cette solution que dans le cas des réfugiés. Elle rendait alors ses décisions au visa de la convention de Genève. L’article 12 de cette convention dispose que « les droits précédemment acquis par les réfugiés et découlant du statut personnel, et notamment ceux qui résultent du mariage seront respectés par tous les Etats contractants ». La Convention ordonne aux Etats contractants de ne pas remettre en cause des droits acquis anciennement.

  1. Le conflit mobile

Les droits français et étrangers ne changent pas mais l’élément de rattachement désigné par la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS se modifie dans les faits. Dans ce cas là, la question sui se pose est de savoir quelle loi on applique, par exemple celle de son ancienne nationalité ou celle de la nouvelle.

Ce problème ne nait pas avec tous les rattachements, il faut que le rattachement en cause soit susceptible de mobilité. Par exemple, le lieu de situation d’un immeuble n’est pas modifiable, il en va de même pour le lieu de délit qui n’est pas mobile non plus.

Parfois, on pourrait avoir un critère mobile mais le critère va être immobilisé par une précision temporelle qui figure dans la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS elle-même. Par exemple, en matière de succession immobilière, le critère de rattachement est le dernier domicile du défunt.

Les critères qui peuvent poser problème sont essentiellement la nationalité, le domicile et le lieu de situation des meubles.

La doctrine traditionnelle était favorable à la transposition des solutions de droit transitoire internes françaises. Il y a une analogie si l’on se place du point de vue de l’individu, vis-à-vis de son droit subjectif, deux lois vont se trouver successivement applicables. Pour l’individu, c’est la même chose. Il faut donc savoir si on va appliquer la législation anciennement applicable ou la législation nouvellement applicable. En principe, on va appliquer la loi nouvellement désignée mais sans rétroactivité. Plus précisément, une situation juridique déjà constituée restera soumise à la loi anciennement désignée pour ses conditions de validité et pour ses effets déjà accomplis. Par contre, pour ses effets futurs, elle sera soumise à la loi nouvellement désignée. Sauf pour les effets futurs des contrats qui restent soumis à la loi anciennement désignée.

Une doctrine plus moderne a contesté ce point de vue. Elle a contesté les fondements de la solution traditionnelle. Pour la doctrine moderne, il y a une erreur de point de vue. Les règles de droit transitoire servent à assurer un passage entre les deux lois mais on cherche plus à appliquer la loi nouvelle car elle est censée améliorer l’état du droit. Pour le conflit mobile, ce n’est pas transposable car il n’y a pas de modification de lois. Cette doctrine souligne qu’en plus, la loi nouvellement désignée n’est pas forcément meilleure que l’ancienne loi désignée. Elle ajoute qu’ici le conflit mobile, contrairement au conflit de lois dans le temps, n’est pas une initiative du législateur mais nait d’une initiative personnelle. Cette action de l’individu va perturber la mise en œuvre de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS, on en revient donc à une difficulté d’application de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS elle-même. Il faut donc s’interroger sur les motivations de la RÈGLE DE CONFLITS DE LOIS et poser la solution en fonction de ces objectifs.

Souvent, on peut justifier les décisions jurisprudentielles par chacune de ces théories. Les solutions peuvent paraitre variables car la jurisprudence pose des solutions au cas par cas.

Trois exemples :

En matière de capacité. Si un incapable change de nationalité, on lui applique immédiatement la loi de sa nouvelle nationalité. Parfois, la jurisprudence va faire quelques entorses au raisonnement traditionnel. Cour de Cassation, Civ 1ère, 15 mai 1963, Patino: question de la prescription de l’action en nullité fondée sur l’incapacité d’une mineure. En théorie, on a deux solutions différentes, à savoir la solution en matière de capacité et la solution en matière de prescription. En droit transitoire interne, la loi nouvelle en matière de prescription est immédiatement applicable aux prescriptions non encore acquises, on devrait donc appliquer la loi de sa nouvelle nationalité qui pose une prescription de 10 ans. Selon la loi de son ancienne nationalité, le délai était de 30 ans et n’était donc pas encore prescrite. La Cour de cassation a décidé d’appliquer la loi de l’ancienne nationalité au motif « que la mise en œuvre de la nullité encourue, et notamment la prescription de l’action destinée à la faire valoir, forme avec l’incapacité originaire et sa sanction un ensemble indissociable, soumis à une loi unique ». Si on avait raisonné normalement, on aurait du dire que c’était la loi espagnole qui régissait sur le fond mais la prescription est appréciée au jour où le juge est saisi donc il aurait fallu appliquer la loi bolivienne.

Sur les effets du mariage. Ils sont susceptibles d’entrainer de nombreux conflits mobiles car le mariage est susceptible de durer, de plus les époux peuvent changer de nationalité ou changer de domicile. La tendance majoritaire en jurisprudence est d’appliquer la loi nouvellement désignée aux effets du mariage car on estime que les époux s’intègrent à une nouvelle communauté en changeant de nationalité ou de domicile. Parfois, la jurisprudence va écarter l’application de la loi nouvelle, essentiellement dans deux cas, à savoir lorsque cela constituerait une fraude de l’un des époux et lorsque l’application de la loi nouvelle obligerait à trop l’adapter aux dispositions très différentes de la loi ancienne. Par exemple, dans un arrêt (Cour de cassation, civ 1ère, 19 février 1963, Chemouni), un tunisien avait épousé deux femmes en Tunisie. Il s’installe ensuite en France et est condamné à verser à sa seconde épouse une pension alimentaire en application de la loi tunisienne qui régit les effets du mariage. Il prétend qu’il ne doit pas cette pension car il a été naturalisé français en 1956. La loi des effets du mariage est donc la loi française puisqu’ils habitent tous les deux en France. Pourtant, la Cour de cassation va confirmer la condamnation au motif que « tant au regard de la loi commune des époux avant 1956 que de la loi française régissant, depuis cette date, les effets du mariage d’époux de nationalité différente domiciliés tous deux en France, la pension alimentaire est due ». La loi nouvellement désignée ne peut pas condamner à une pension alimentaire puisqu’elle ne prévoit pas le cas d’un époux polygame. Sans vraiment le dire, la Cour de cassation applique donc la loi tunisienne.

Dans le domaine du statut réel (statut des meubles), la solution générale est de dire que si un meuble situé dans un pays étranger et transporté en France, la loi française est d’application immédiate (Cour de cassation Civ 1ère, 8 juillet 1969, Diac). La loi française va déterminer le contenu des droits réels mais la loi ancienne va rester valable relativement au mode d’acquisition du bien. La vision traditionnelle est de dire qu’on fait ça pour la sécurité des tiers. Dans une vision internationale, on peut dire que le critère de rattachement est le bénéfice des apparences. Pour la sécurité des transactions, on se fonde sur les apparences.