Le rôle du juge nationale dans le contentieux européen

La participation juridictionnelle des États membres

Bien que l’une des singularités des plus saillante de l’ordre juridique européen consiste en ce qu’il dispose d’un système juridictionnel propre et structuré et bien, celui-ci, demeure essentiellement tourné en direction des sujet primaire de l’union qui sont les Etats. Or, l’union se caractérise également par le fait, que le droit qu’elle produit vise également en principe à travers les Etats les sujets secondaires que sont les individus, du coup, démultipliant ainsi le contentieux qu’elle est susceptible d’occasionner. C’est l’une des raisons pour lesquelles l’union a choisi de s’appuyer sur les structures juridictionnelles des Etats membres, faisant ainsi du juge national le juge du droit commun de l’union (1) tout en assurant sa subordination (2).

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1) Le juge national : juge de droit commun du l’union

Quand bien même ce choix peut être considéré comme risqué, l’union a fait du juge national le garant principal de l’effectivité de son droit.

v Les avantages :

D’une part, c’est une solution moins complexe que de créer un réseau de juge européen dans chaque territoire national. Et permet de moins heurter de front la souveraineté des Etats.

D’autre part, le juge national est associé à l’application du droit de l’union, et donc favorise bien l’intégration de l’ordre juridique européenne aux Etats membres.

v Inconvénient :

L’effectivité du droit européenne dépend en partie de la collaboration des Etats national. D’autant que, le risque n’est pas surmonté comme aux Etats unis par la règle du précédent, et donc par rapport à l’uniformité de l’interprétation du droit de l’union.

Ce choix de décentralisation se traduit par deux principes :

  • Le principe d’administration indirecte : généralement ce principe consiste à affirmer qu’il revient aux Etats membres de mettre en œuvre les dispositions du droit de l’union, TPIE 10 JUILLET 1990 ARRET TETRA PACK. Ce principe vaut pour toutes les institutions des Etats membres, juridictionnelles ou non dans leur domaine de compétence. Vu qu’il s’agit d’une obligation si une institution ne respecte pas alors l’Etat membre pourra faire l’objet d’une sanction, avec un recours en manquement.

  • Le principe d’autonomie institutionnelle et procédurale : il est une modalité d’application du principe précédent, d’administration indirect. D’un point de vue général, ce principe laisse les Etats membres choisirai ceux de leurs organes qui seront chargés de mettre en œuvre le droit de l’union.

o Dans son versant institutionnel, le principe laisse le soin aux Etats membres de déterminer la nature, législative ou jurisprudentielle des règles fixant les modalités procédurales de protection du droit de l’union. De même, les Etats sont libres en ce qui concerne la répartition interne des compétences juridictionnelles, relative au litige en application du droit de l’union. CJUE 27 JUIN 2013 ARRET AGORKCONSULTIGN-04.

o Dans son versant procédural le principe, consacre la capacité des Etats membres « de régler les modalité procédurales des recours en justice » relatif au droit de l’union. Il comprend aussi le principe « pour la qualification des actions engagées par les personnes lésées devant les juridictions nationales » CJCE 12 DECEMBRE 2006. Cette autonomie, s’étend enfin à certain règle procédurale de fond comme appréciation de lien de causalité, ou encore évaluation du préjudice dans le contentieux de la responsabilité étatique pour violation du droit de l’union. CJCE 19 NOVEMBRE 1991, ARRET FRANCOVICH.

Bien que ce principe ait été depuis longtemps consacré par la CJCE, ARRET CJCE 1976 CENTRAL FINANCEZ, ARRET COMMET, la CJUE confirma solennellement l’existence de ce principe, CJUE 29 JANVIER 2009 ARRET PETROSIAN.

Ce choix en faveur d’une décentralisation n’étant pas tempéré, comme dans d’autre système juridique par la règle du précédent. L’ordre juridique de l’union a développé un certain nombre de garde de fou permettant de garantir l’application uniforme de son droit.

2) La subordination du juge national

Il apparait que chaque des principes précédant dispose d’un principe symétrique mais s’inscrivant en contre point par rapport à d’autre. Destiné à en nuancer, en métriser la portée. Ainsi, les principes de primauté et de coopération loyale semblent faire écho au principe d’administration indirecte tandis que les principes d’équivalence et d’effectivité tempèrent le principe d’autonomie constitutionnelle et procédurale.

v Le principe de primauté :

Le droit de l’union dispose d’une valeur supérieure au droit national, lesquelles doit en conséquence en respecter les exigences, dès lors qu’il s’agit d’acte européen de valeur obligatoire. ARRET CJCE 16 JUILLET 1964 COSTA CONTRE ENEL. Il s’agit d’un principe disposant d’un principe absolu s’étendant tant au droit européenne originaire et dérivé. Il vaut de même à l’égard de l’ensemble des normes composant le droit interne y compris les normes constitutionnelles. CJCE 17 DECEMBRE 1970 ARRET INTERNATIONALE HANDELSGESELLSCHAFT. La CJUE veille au principe de primauté et peut le cas échéant sanctionner les Etats membres qui ne respecteraient pas grâce au recours en manquement. (Voir ARRET ARCELOR).

v Principe de coopération loyale :

Ce principe est consacré à l’article 4 paragraphe 3 du TUE, il visait initialement les relations institutionnelles entre les organes de l’union et les Etats membres. Et s’étend à la matière contentieuse avec deux conséquences principales :

  • « il incombe aux juridictions des Etats membres d’assurer la protection juridique découlant pour les justiciables de l’effet direct des dispositions du droit communautaire». ARRET 1980 HEINTZ JUST. Les juridictions nationales amené à l’interpréter et tenus de le faire dans toute la mesure que possible dans la finalité du texte et dans les modalités des directives pour atteindre le résultat visé par celle-ci. CJCE 11 JUILLET 2002 ARRET MARC ET SPENCER. Ce principe comporte une dimension passive et une dimension active qui permettent in fine de garantir le caractère obligatoire et exclusive de la compétence de la CJUE quand bien même elle n’a qu’une compétence d’attribution. AFFAIRE DITE DE L’USINE MOX en est une illustration CJCE 30 MAI 2006 COMMISSION CONTRE IRLANDE. Il s’agissait d’une affaire dans laquelle l’Irlande avait en application de la convention de montégo bay à laquelle l’ensemble des Etats membres de l’union et l’union elle-même était partie. L’Irlande saisit d’un litige qui l’opposait au royaume unis le tribunal de la mer au détriment de la CJCE. Alors que la convention était un acte mixte la CJCE la volontairement assimilé au traité auquel l’union est seule partie. Ce faisant elle intègre la convention au droit européen et interdit toute différentiation dans le traitement juridique entre un litige opposant deux Etats membres (c’est-à-dire ressortissant général et soumis au droit de la convention) et un litige dans lequel l’union est directement partie.

o Sur le plan passif le principe de coopération loyale implique que les Etats membres doivent s’abstenir de mettre en péril les buts du traité. Or, parmi ces buts, se trouve celui de l’uniformité du droit de l’union et son corolaire la compétence obligatoire et exclusive de la CJUE. La cour estime ainsi que l’Irlande a violé cette obligation d’abstention en prenant le risque de permettre à une autre juridiction que la cour de se prononcer sur l’étendue des obligations respectives des Etats membres et donc indirectement de se prononcer sur le droit de l’union.

o Sur le plan actif : les Etats membres sont tenus de coopérer étroitement avec les institutions européennes que l’Irlande avait également violées, en n’informant pas préalablement les institutions européennes des difficultés potentielles engendrées par la mise en œuvre de tels accords mixtes comme la convention de motégo bay.

Ce versant de coopération loyale interdit aux Etats membres de déclarer elle-même non conforme un acte de droit dérivé européen au droit originaire voir ARRET FOTO FROST et ARRET ARCELOR.

v Principe d’équivalence et d’effectivité :

Ce sont des exigences cumulatives :

  • Principe d’équivalence : il implique que les voies de recours national permettant de mettre en œuvre le droit de l’union « ne peuvent être moins favorable que celle concernant les recours similaire de nature interne». en matière juridictionnel le principe d’équivalence repose sur un principe de non-discrimination. D’ailleurs, cette idée de non-discrimination est consacrée dans un ARRET EXPRESS DERIS FROUS, ainsi par exemple, ce principe serait méconnu dans l’hypothèse où le droit processuel national prévoirait des frais supplémentaires ou encore, des délais plus courts d’action en justice relative à l’application du droit de l’union. Si la cour estime désormais que ce principe requiert que « lensemble des règles applicable au recours s’applique indifféremment au recours fondé sur la violation du droit de l’union et a ceux similaire fondé sur la méconnaissance du droit interne » CJUE 26 JANVIER 2010 TRANSPORTES SUR BANIOS Y SERVICIO GENERALES, elle n’exige pas pour autant qu’un Etat applique le régime le plus favorable dont son ordre juridique dispose au contentieux relative au droit de l’union, CJCE 15 SEPTEMBRE 1998 EDIS. Ou autre illustration CJUE 22 JUIN 2010 ARRET AZIZE MELKI ET SELIME ABDELI, la CJUE accepte que le caractère prioritaire de la QPC ne s’étende pas à la question préjudicielle européenne. il suffit juste qu’elle soit traité de la même manière elle n’a pas besoin de bénéficier du régime le plus favorable.

  • Le principe d’effectivité : il suppose quant à lui que les modalités procédurales encadrant la mise en œuvre du droit de l’union ne doivent pas « rendre en pratique impossible l’exercice de droit que les juridictions nationales ont l’obligation de sauvegarder». Autrement dit il ne suffit plus que les procédures internes traitent aussi bien les recours intentés sur le fondement du droit de l’union que les autres, il faut qu’elles soient aussi objectivement efficace. Ce principe peut être rattaché au droit au recours objectif de l’article 13 de la CEDH, CJCE 2007 ARRET UNIBET. Ce principe d’effectivité a pu conduire à imposer au juge national de suspendre à titre provisoire l’application d’une loi dès lors que sa contrariété avec le droit de l’union est invoquée alors qu’une telle procédure était inconnue et manifestement contraire à la tradition juridique en cause, cette décision revenait à enfreindre la souveraineté du parlement du RU, CJCE 19 JUIN 1990 ARRET FACTORTAME. Il impose également que puisse être engagé la responsabilité de l’Etat en qu’a de violation du droit de l’union quelques soit l’organe a l’origine de la violation. C’est l’une des causes profondes de la jurisprudence GARDEDIEU, traditionnellement en France, la responsabilité de l’Etat du fait des lois ne pouvait être engagé que dans l’hypothèse d’une part ou la loi en cause n’avait pas entendu exclure toute indemnisation et d’autre part dans l’hypothèse où le préjudice revêtait un caractère grave et spécial. Dans l’ARRET GARDEDIEU, le JA admet que l’Etat doit réparer tous les préjudices résultant de l’intervention d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France sans restriction. ARRET CE ASSEMBLEE 8 FEVRIER 2007 GARDEDIEU.

Pour ARRET MELKI CJUE, l’idée était qu’une question préjudicielle posée par la cour de cassation à la CJUE relative à la comptabilité de la QPC avec le droit de l’union. Deux difficultés principales étaient posées :

o Le caractère prioritaire de la QPC semblait contraire au principe d’effectivité lequel interdit aux Etats membres de tolérer tout obstacle même temporaire à l’application du droit de l’union, ARRET CJCE 9 MARS 1978 SIMMENTHAL. Le caractère prioritaire de la QPC semblait contraire au principe d’équivalence, puisse elle disposait d’un caractère chronologique de par sa priorité.

o La QPC représentait un obstacle potentiel à la mise en œuvre de la question préjudicielle européenne, puisque en raison du délai ou son intervention est prévue le CConsti ne peut saisir lui-même la CJUE. Et parce qu’après une intervention du CConsti le juge de droit commun pourrai renoncer à poser la question à la CJUE.

Alors qu’en principe la seule présence de dispositions nationales potentiellement incompatibles avec le droit de l’union était sanctionnée par la CJUE, la CJUE innove en admettant leur maintien mais en leur adjoignant des réserves d’interprétation. Du coup, la CJUE sur ce fondement estime que la QPC est compatible à 3 conditions :

o Il faut que les juridictions nationales disposent toujours de la faculté de saisir la CJUE d’une question préjudicielle malgré la mise en œuvre d’une QPC et ce au stade qu’il convient pour garantir l’effectivité du droit de l’union.

o Il faut que les juridictions nationales est la possibilité de laisser une loi inappliquée même si conforme à la constitution en attendant la réponse de la CJUE.

o Il revient en tout état de cause aux juridictions nationales de protéger les droits des individus qui tirent du droit de l’union en leur accordant des mesures provisoires même si ces mesures n’existent pas dans le droit national.

CONCLUSION : Cette solution révèle que les principes d’équivalence d’effectivité de et primauté conduisent dans une certaine mesure à la consécration tacite d’une autonomie du juge national par rapport à son ordre juridique d’origine lorsqu’il met en œuvre le droit de l’union. En d’autre terme, quand il est juge de droit commun du droit de l’union il est invité à se détacher des obligations qui lui incombent en vertu de son droit national dès lors qu’elles auraient pour effet de contredire l’effectivité du droit européen. C’est ainsi que la CJUE a estimé que le juge national est lié par son interprétation au point qu’il soit contraint de méconnaitre l’appréciation de sa juridiction supérieure si la considère contraire à celle de la CJUE sans que le caractère constitutionnel de la juridiction supérieure puisse nuancer cette position. (Dans une certaine mesure on peut aller jusqu’à accepter une remise en cause de l’autorité de la chose jugée). CJUE GRANDE CHAMBRE 9 MARS 2010 ARRET ERG. Mais encore ARRET GRANDE CHAMBRE 5 OCTOBRE 2010 ELCHINOV. Une telle autonomie reconnue à la juridiction nationale en tant que juge européen renforce les questionnements d’une partie de la doctrine qui s’interrogent sur « une communautarisation des fonctions des juridictions nationales ».