Les actes d’instruction : interrogatoire, audition, expertise…

Les actes d’instruction

Ce sont ceux qui tendent à la recherche de la vérité, par opposition aux décisions juridictionnelles. On retrouve la double casquette des juridictions d’instruction. C’est ici l’article 81 du Code de Procédure Pénale qu’il faut citer, quiautorise le juge d’instruction à accomplir tous lesactes qu’il juge utile à la manifestation de la vérité, conformément à la loi . Les quatre derniers mots disparaissent dans l’avant projet.

En réalité, cette formule de l’article 81, avec cette réserve, fait allusion à une règle fondamentale : une juridiction d’instruction peut effectuer tous les actes qu’elle juge utile, avec une précision.Si cet acte est de nature à porter atteinte à une liberté individuelle, il doit être autorisé par la loi , d’où la réserve de l’article 81 qui disparaît d’ailleurs dans le projet de réforme. Il y a donc une réglementation des actes tendant à la découverte de la vérité, actes qui menacent les libertés individuelles et qui doivent faire l’objet d’une régulation légale.

Chapitre 1. Les interrogatoires, auditions et confrontations

Il s’agit d’opérations durant lesquelles on recueille les avis des parties, lors d’un interrogatoire, d’une audition ou d’une confrontation , selon l’article 114 du Code de Procédure Pénale. Cela soulève deux questions : la notion de ces opérations ainsi que la question de leur régularité.

Section 1 : Les notions d’interrogatoire, d’audition et de confrontation

La différence entre ces opérations tient à la qualité de l’auditeur du juge. La personne soumise à examen est soumise à interrogatoire. C’est la partie civile que l’on entend durant une audition. Quant à la confrontation, elle suppose l’audition commune de plusieurs personnes pour confronter leur point de vue.

La question qui s’est posée a été celle de savoir si la confrontation relève d’un régime particulier au motif que ce n’est pas un interrogatoire, ou si elle ne doit pas suivre le même régime que cet interrogatoire. En effet, si l’on confronte la personne mise en examen avec la partie civile ou un témoin, cette confrontation peut amener le juge à poser à la personne mise en examen des questions qu’elle aurait posé durant un interrogatoire, permettant de décider la culpabilité ou l’innocence de la personne .

On devrait donc donner un même régime juridique. Malheureusement, la jurisprudence et le Code de Procédure Pénale ne sont pas en faveur de cette uniformisation du régime juridique. Spécialement, la jurisprudence considère que la confrontation n’a pas à respecter toutes les règles applicables à l’interrogatoire . Le Code de Procédure Pénale n’est pas loin de ratifier cette solution.

Section 2 : La régularité des interrogatoires, auditions et confrontations

Au cours de ces opérations dangereuses pour la personne mise en examen, il faut instaurer des garanties ainsi données par le Code de Procédure Pénale. En premier lieu, conséquence de l’affaire d’Outreau, la personne mise en examen peut demander à être confrontée séparément avec chacun de ses accusateurs si la personne est hostile à la confrontation collective.

La deuxième garantie, qui vaut pour toutes les parties, est celle selon laquelle ces personnes ne peuvent être entendues qu’à la condition que leurs éventuels conseils soient en mesure d’être présents lors de ces procès. En effet, le Code de Procédure Pénale prévoit la possibilité pour les intéressés, de renoncer à cette présence. Pour que l’avocat soit présent en une autre qualité que celle d’alibi, la loi ajoute que l’avocat doit avoir accès au dossier 5 jours ouvrables au minimum avant la date de la confrontation ou de l’interrogatoire, de telle sorte qu’il assiste à cette opération fort de la connaissance du dossier pour répondre au nom de son client.

En troisième lieu, l’avocat doit être convoqué à cette opération dont il a accès au dossier, pour qu’il soit en mesure d’être présent.

En quatrième lieu, au cours du premier entretien que le juge d’instruction aura avec la partie privée, la personne mise en examen ou la partie civile, le juge d’instruction devra les informer de certains de leurs droits au cours de la procédure . C’est le cas pour la personne mise en examen au cours de l’interrogatoire de première comparution. C’est la même chose pour la partie civile à l’occasion de sa première audition. Il s’agit d’informer qu’ils auront la possibilité de demander l’annulation d’une pièce qu’ils jugeraient irrégulière, ou de la possibilité de se servir du juge d’instruction comme d’un détective public etc.

Ces opérations se déroulent en présence du procureur de la république qui doit être averti de l’opération à venir . Au cours de l’interrogatoire, de la confrontation, les avocats peuvent poser des questions sauf opposition du juge qui déciderait que cette question est inopportune. Le cas échéant, si un avocat désirait poser cette question, et qu’elle a été refusée par le procureur, l’avocat peut demander à ce que cette question déclinée figure au procès verbal.

À cela s’ajoute que, dans certaines hypothèses, les interrogatoires de la personne mise en examen donnent lieu à un enregistrement audiovisuel. C’est le cas spécialement en matière de crime. L’idée est en effet que c’est le moyen d’éviter des contestations sur la réalité d’aveux donnés au cours d’un interrogatoire.

Chapitre 2. Les autres actes d’informations

n évoque notamment le transport sur les lieux,la possibilité pour le juge d’instruction d’aller sur les lieux pour effectuer par exemple une reconstitution. Sont aussi réglementées les perquisitions et saisies. Il y a également la réglementation de l’opération d’infiltration, avec même une opération dite de sonorisation et de fixation d’image de certains lieux ou véhicules. Il s’agit donc, au cours de l’instruction, s’agissant de la criminalité organisée, d’autoriser la pose de micros ou de caméras dans le domicile de la personne que l’on soupçonne. Cela concerne aussi l’audition des témoins, les interrogatoires etc.

S’agissant des perquisitions, leur réglementation est équivalente à celle vue à propos de l’enquête de flagrance et notamment la possibilité de recourir à la contrainte, la règle étant celle selon laquelle le juge d’instruction, en tant que juge, peut recourir à la contrainte sans avoir besoin du consentement des intéressés.

S’agissant de l’expertise,cela suppose qu’apparaisse une question d’ordre technique dont la résolution dépend de l’avis d’un expert. Ce recours à l’expertise peut être décidé d’office par le juge d’instruction mais peut aussi intervenir à la demande du parquet ou des parties privées. En cas de refus du juge d’accorder une expertise, un appel est possible devant la chambre de l’instruction.

Le principe est celui de l’expert unique. On ne désigne qu’un expert par opération. La raison est budgétaire, une modification ayant été introduite pour que les parties puissent adjoindre le choix d’un expert choisi par le demandeur ou la partie civile, qui va se joindre à l’expert désigné. Si le juge d’instruction refuse de désigner ainsi un expert, on a un recours possible.

Ces conclusions de l’expert ne lient pas le juge, conformément au principe de liberté de la preuve. Ces conclusions peuvent être soumises à débat contradictoire, ce qui ouvre aux parties en question la possibilité de les contester en demandant une contre expertise, ou la possibilité de demander que le travail de l’expert soit complété en demandant un complément d’expertise. Le juge d’instruction n’est pas tenu par ces demandes, mais un appel est possible devant la chambre de l’instruction.

Les écoutes téléphoniques :

Elles peuvent être ordonnées par le juge d’instruction qu’en matière criminelle ou en matière correctionnelle si la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans de prison. La décision d’interception est prise pour une durée maximum de 4 mois renouvelables. Il doit être dressé un PV de chacune des opérations d’interception et d’enregistrement. Ils sont placés sous scellé et il est dressé un PV de la correspondance c’est à dire de la partie de la conversation téléphonique utile à la manifestation de la vérité.

Aucune écoute ne peut avoir lieu sur une ligne dépendante du cabinet d’un avocat ou de son domicile sans que le bâtonnier en soit informé par le juge d’instruction et cela sous peine de nullité.

Aucune interception ne peut avoir lieu sur la ligne d’un parlementaire sans que le président de son association n’en soit avisé par le juge d’instruction. A l’expiration du délai de prescription de l’action publique, les enregistrements doivent être détruits.

L’enquête de personnalité : Deux types d’actes peuvent être réalisés :

  • Une enquête sur la personnalité et sur la situation matérielle, familiale ou sociale de la personne mise en examen. Le juge d’instruction peut faire vérifier cette situation en demandant que l’on informe sur les mesures propres à favoriser l’insertion sociale de la personne. Cette mesure est obligatoire lorsque le juge d’instruction envisage le placement en détention provisoire d’un majeur de moins de 21 ans si l’appel encouru ne dépasse pas 5 ans. Pour cette enquête le juge d’instruction peut commettre un OPJ, une personne habilitée, le service pénitentiaire d’insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou encore toute association habilitée.
  • Un examen médical et médico-psychologique ainsi que toute autre mesure utile. Les parties peuvent demander qu’il soit procédé à l’un des examens ou mesure précités par une demande écrite et motivée faisant l’objet d’une déclaration au greffe du juge d’instruction. Si le juge n’entend pas faire droit à la demande, il rend une ordonnance motivée au plus tard dans le mois de la réception de la demande, à défaut la partie peut saisir le Président de la chambre d’instruction qui décide dans les 8 jours par ordonnance et sans recours s’il y a lieu ou non de saisir la chambre de l’instruction.