La fixation de la peine

LES DISPOSITIONS LÉGALES FAVORABLES ET DÉFAVORABLES AU CONDAMNÉ DANS LA FIXATION DE LA PEINE

On distingue le cas des décisions favorables au condamné et les décisions défavorables.

I ) Les dispositions légales favorables au condamné

Mais le législateur a également prévu des dispositions en matière de fixation de la peine, donc là ça n’est plus simplement l’intervention du juge mais des dispositions légales qui vont être mises en place en matière de fixation de la peine, c’est le deuxième aspect, les dispositions légales en matière de fixation. Elles vont aller soit dans le sens d’un adoucissement, soit dans le sens d’une aggravation du sort du condamné.

S’agissant tout d’abord des dispositions favorables, on peut citer l’exemption de peine c’est-à-dire que l’on va exempter le condamné de toute sa peine ou seulement en abaisser le quantum. C’est ce premier aspect que nous allons étudier.

— Donc les exemptions de peine légale, c’est l’absolution légale qui est prévue à l’article 132-78, c’est ce que l’on appelait sous l’ancien Code, l’excuse absolutoire conduisant à retenir la culpabilité du délinquant tout en l’exemptant de peine et ce dans un souci d’utilité sociale. Ce système existe toujours mais le Nouveau Code pénal parle désormais d’exemption de peine et il concerne essentiellement la question des repentis.

En effet, la Loi du 9 mars 2004, Loi PERBEN II est venue organiser de façon plus large qu’auparavant cette situation particulière des repentis qui n’était à l’origine prévue qu’en matière de stupéfiant, de terrorisme ou en encore de faux monnayage. Le législateur n’en a toutefois pas fait une règle de portée générale systématiquement applicable. La Loi désormais établit une liste d’infractions concernées par une possible exemption de peine comme par exemple en matière d’assassinat ou de torture, de proxénétisme, de traite des êtres humains ou encore de détournement de moyens de transport. Donc une liste établie par le législateur. Et ici, il pourra y avoir exemption de peine si l’intéressé par ses confessions, va empêcher l’infraction ou encore le cas échéant, va permettre d’identifier les autres auteurs ou complice. Donc on incite évidemment à la repentance, à la confession afin d’éviter l’infraction ou pour permettre l’identification des auteurs.

Ça c’est la première situation ce que l’on appelle l’absolution légale.

— Mais on pourrait également citer au titre des exemptions, la minorité pénale dont on a déjà parlé, je ne ferai que dire un mot, elle se présente comme une cause d’exemption de peine obligatoire à l’égard du délinquant de moins de 13 ans qui a commis une infraction, puisque seules des mesures éducatives ou des sanctions éducatives à partir de 10 ans peuvent être prononcées à son encontre. Mais attention, cette exemption n’est que facultative cette fois, à l’égard du mineur de 13 à 18 ans puisque le juge peut décider l’application d’une peine – vous vous en souvenez – en général adoucie, réduite de moitié le plus souvent par rapport à celles qui sont prononcées à l’encontre des majeurs lorsque les circonstances et la personnalité du délinquant l’exigent.

Voyons maintenant non plus les exemptions de peine mais l’abaissement légal de peine.

— En effet des réductions de peine sont seulement prévues cette fois et non des exemptions au bénéfice des participants repentis – une fois encore – à certaines infractions – je vous renvoie à la liste que l’on a dressée il y a quelques instants – et qui, par leurs informations vont permettre de faire cesser l’infraction ou encore d’éviter un dommage ou d’identifier les auteurs ou complices. A noter qu’aucune condamnation – il convient de le souligner – ne peut être prononcée sur le seul fondement des déclarations émanant des bénéficiaires de ces dispositions.

Par ailleurs, le Code de Procédure pénale prévoit, ce sont des situations un peu particulières, des mesures destinées à assurer la sécurité du repenti et des membres de sa famille.

Donc exemption lorsque l’on empêche l’infraction ou que l’on permet l’identification des auteurs, mais il n’y aura qu’un abaissement lorsqu’il n’y aura pas de possibilité d’éviter l’infraction mais simplement de la faire cesser ou d’éviter un dommage.

— Autre disposition favorable au condamné prévue par la Loi : c’est ce que l’on appelle le concours d’infraction. Lorsqu’une infraction est commise par un délinquant, avant que celui-ci ait été définitivement condamné pour une autre infraction commise précédemment bien entendu, on parle de concours réel d’infraction.

Se pose alors la question de savoir si les peines afférentes à ces différents actes délictueux vont purement et simplement se cumuler c’est à dire s’additionner ; ou si ces infractions vont être considérées comme une infraction unique et ainsi se confondre.

D’une façon générale, le droit français refuse la règle de l’addition des peines prononcées – système pratiqué notamment aux Etats-Unis – et, à l’évidence peu favorable au condamné sinon parfois totalement surréaliste puisqu’on assiste à des peines pouvant aller jusqu’à 150 ans ou 200 ans de prison par exemple.

Le Code pénal qui traite de ce concours d’infraction aux articles 132-2 à 132-7 est venu modifier sensiblement le système de l’ancien Code pénal.

Il va falloir maintenant distinguer entre la confusion des peines qui est, bien entendu, à l’avantage du condamné et ce que l’on appelle le cumul des peines qui est à son désavantage puisque là on va additionner les peines ensemble.

  • Avec la confusion des peines, le délinquant ne va exécuter que la peine la plus élevée dans chaque catégorie de peine prononcée contre lui. Donc, la plus élevée des peines de prison, la plus élevée des peines d’amende, la plus élevée des peines alternatives ou encore la plus élevée des peines complémentaires. Donc, voilà pour la confusion des peines.
  • Le cumul des peines, lui, est tout à fait défavorable au condamné puisque là, à l’inverse les peines vont ici s’additionner. Ce système du cumul s’applique aux contraventions principalement et à quelques situations spécifiques comme en matière de délits fiscaux ou de délits douaniers où, là il y aura un cumul en raison du caractère à la fois sanctionnateur et réparateur à l’égard du Trésor.

Donc voilà pour les dispositions favorables prévues par le législateur au bénéfice des condamnés. Mais, il existe aussi des dispositions défavorables au condamné prévues par la Loi.

II ) Les dispositions légales défavorables au condamné

En effet, la responsabilité pénale d’un individu peut se trouver aggravée en raison de circonstances particulières entourant l’infraction et que le législateur a prévues précisément. Le juge ne peut en effet, de lui-même créer des circonstances aggravantes on s’en doute bien. Ces circonstances aggravantes, qui vont venir renforcer la sanction, et ces circonstances aggravantes – on va le voir – sont de plusieurs sortes.

La première catégorie, c’est ce que l’on appelle la circonstance aggravante générale, une circonstance aggravante qui tient à la personnalité du délinquant, dès lors que ce dernier se trouve en état de récidive, c’est la récidive, c’est une notion que vous connaissez.

Deuxième situation, toujours défavorable, les circonstances aggravantes, non plus générales mais spéciales qui, ici, vont tenir à l’infraction et qui font que celle-ci est considérée comme représentant un danger plus grand pour une société et doit donc, en cela être plus sévèrement punie. Donc ça, c’est la deuxième catégorie, nous allons revenir évidemment sur le détail.

Enfin, dernière disposition défavorable au condamné, il faut ajouter la période de sûreté et la perpétuité réelle.

Commençons par la récidive, circonstance aggravante générale, nous l’avons vu.

Le délinquant récidiviste est celui qui commet une ou plusieurs infractions alors qu’une ou plusieurs condamnations définitives ont été prononcées contre lui antérieurement. Le délinquant, bien que déjà averti, manifeste ainsi en répétant des actes antisociaux et bien sa volonté de rester dans l’illégalité. Alors la justice se veut alors plus sévère à son égard.

La récidive étant, elle aussi, une question particulièrement technique, nous n’aborderons ainsi que les principes sans entrer dans le détail bien entendu.

Cette question de la récidive est traitée dans le Nouveau Code pénal aux articles 132-8 à 132-11 et son régime se trouve un peu simplifié par rapport à l’ancien Code pénal.

Elle ne concerne pas que les personnes physiques, les personnes morales également peuvent être considérées comme récidivistes et voir ainsi leur peine aggravée, puisque la seule conséquence attachée désormais à la récidive est l’augmentation de la peine encourue du fait de la relégation avec transportation dans l’économie, une vieille expression des multirécivistes a été abolie en 1970 et la tutelle pénale, venue la remplacer, a, elle aussi été supprimée en 1981, donc uniquement une aggravation de la peine.

Pour qu’il y ait récidive, certaines conditions doivent être remplies :

Une condamnation pénale de la première infraction évidemment par une juridiction française et qui doit être passée en force de chose jugée, ça c’est la première condition.

Deuxième condition : une nouvelle infraction commise – c’est évident, sinon il n’y aurait pas récidive – un crime, un délit voire une contravention de la 5ème classe puisque les contraventions de la première à la quatrième classe ont été supprimées du dispositif de la récidive dans le Nouveau Code pénal, donc une nouvelle infraction commise.

Et enfin, troisième condition un délai de commission de la nouvelle infraction qui va courir à compter de l’expiration ou de la prescription de la première peine.

Mais attention, en vertu de son pouvoir d’individualisation, le juge n’est jamais obligé de tenir compte de la récidive lors de la fixation de la peine. Mais, lorsqu’il le fait, lorsqu’il décide d’appliquer la récidive, et bien il va être tenu de respecter les modes de calcul tout à fait particuliers et les maxima légaux surtout prévus par les articles 132-8 à 132-11.

Un mot pour terminer sur cette question, sur le casier judiciaire qui va évidemment jouer un rôle essentiel en matière de récidive dans la mesure où c’est lui qui mémorise évidemment le passé pénal du délinquant en enregistrant toutes les condamnations pour crimes, délits et contraventions et c’est bien entendu au vu de ce fichier que la juridiction va prononcer sa sanction et que la récidive pourra être mise en application.

Donc voilà pour la récidive dans son principe général en tout cas.

Autres circonstances aggravant la situation du condamné : les circonstances aggravantes spéciales cette fois.

Elles sont prévues par le législateur et généralement attachées à une ou plusieurs infractions bien déterminées et elles ont pour conséquence, là encore d’aggraver la peine prononcée par la juridiction.

Ces circonstances sont très nombreuses et il est impossible de toutes les citer ; elles peuvent tenir soit à la qualité de l’auteur, par exemple lorsqu’il est dépositaire de l’autorité publique ; lorsqu’il a la qualité d’ascendant ou de descendant par exemple. Cela peut tenir également à la qualité de la victime, cela peut être un mineur, cela peut être une personne particulièrement vulnérable en raison de son âge ou vulnérable en raison d’une maladie ou d’une infirmité ou encore d’un état de grossesse – cela aussi est une circonstance qui va aggraver la situation du délinquant – soit encore aux conditions ou moyens utilisés pour commettre l’infraction ; parce que le délinquant va user de violence ou parce qu’il va commettre des destructions ou des dégradations d’un local d’habitation.

Voilà pour toutes ces circonstances aggravantes d’une façon générale.

Le Code pénal se contente d’en définir lui quelques-unes simplement et on va les citer : il s’agit de la bande organisée qui est une circonstance aggravante bien entendu (article 132-71), à la suite on trouve à l’article 132-72, la préméditation, on trouve également l’effraction, l’escalade, l’utilisation d’une arme et puis de façon beaucoup plus récente, depuis 2003, le racisme, lorsque le mobile est un mobile raciste c’est une aggravation de la peine ou encore l’homophobie créée également en 2003 lorsque l’orientation sexuelle de la victime vient, là encore, aggraver la peine qui sera prononcée à l’encontre du délinquant et enfin, encore plus récemment en 2004, le législateur a jugé que l’utilisation de moyens cryptologiques pour certaines infractions notamment en matière financière par exemple ou économique peut être une cause d’aggravation de la peine prononcée contre le délinquant, donc maintenant nous en avons huit précisément décrites dans le Nouveau Code pénal.

Voilà donc pour les circonstances spéciales qui viennent aggraver la situation du condamné.

Autre situation qui aggrave considérablement la situation du condamné, du délinquant, c’est la période de sûreté, elle est prévue à l’article 132-23 et je dis « période » de sûreté pour ne pas faire de confusion avec la « mesure » de sûreté qui est tout à fait différente.

Cette période de sûreté constitue donc une autre forme d’aggravation de la peine prononcée à l’encontre de condamnés présentant une particulière dangerosité. Cette mesure créée en 1978 et qui a été largement critiquée par certains en ce qu’elle constituait un obstacle à l’individualisation de la peine a été reprise et renforcée même par le Nouveau Code pénal.

Il faut savoir qu’elle n’est jamais applicable aux mineurs, donc période de sûreté seulement applicable aux majeurs.

Elle peut être définie comme la période de temps pendant laquelle un délinquant qui va être condamné à une peine privative de liberté donc à un emprisonnement ou alors à une réclusion, ne peut bénéficier des aménagement qui peuvent être apportés à l’exécution d’une peine de prison et donc ne pas pouvoir bénéficier d’une suspension ou d’un fractionnement de peine, ni de bénéficier d’un placement à l’extérieur ou d’une permission de sortir, d’une semi-liberté et ne pas bénéficier non plus d’une libération conditionnelle. Donc cela vient renforcer de façon tout à fait considérable la situation de la personne condamnée, cette période sûreté considérée comme une modalité d’exécution de la peine et non comme une peine à part entière présente comme spécificité depuis le Nouveau Code, d’être dans certains cas automatique. Donc là on retrouve, dans cette situation, une certaine automaticité dans le renforcement de la peine.

— Donc voyons tout d’abord, la période de sûreté automatique. En effet, pour quelques infractions tout à fait prévues précisément par la Loi – crimes contre l’humanité, tortures et actes de barbarie, violences sur mineur de moins de 15 ans, viol ayant entraîné la mort, donc évidemment les infractions les plus graves, et, en cas de condamnation à une peine privative de liberté supérieure ou égale à 10 ans sans sursis – une période de sûreté correspondant à la moitié de la peine ou à 18 ans si la personne a été condamnée à une peine à perpétuité doit obligatoirement être prononcée par la juridiction.

Cette juridiction ne pouvant agir que sur la durée de cette période et encore sur décision spéciale, soit pour l’augmenter, et là le juge peut aller jusqu’aux deux tiers de la peine ou la porter à 22 ans au lieu de 18 ans, soit pour la réduire ; mais souvent c’est plutôt dans le sens d’une aggravation devant justement le caractère souvent ignoble de ce type d’infractions les plus graves. Donc là, la période de sûreté va être automatique pour les crimes les plus odieux.

— Ensuite, la période de sûreté peut être facultative cette fois et ici quel que soit le crime ou le délit. Donc, autant les crimes que les délits sont visés par cette période de sûreté, à la différence de la période de sûreté automatique.

Ici, quel que soit le crime ou le délit, dès lors que la condamnation est une peine privative de liberté supérieure à 5 ans sans sursis, et bien là encore, la juridiction peut décider d’une période de sûreté correspondant là encore aux deux tiers maximum de la peine ou à 22 ans maximum en cas de perpétuité ; mais c’est ici – et je le rappelle – une faculté et non une obligation pour le juge.

Il faut noter, pour atténuer la rigueur de ces dispositions qu’au cours de l’exécution de la peine, si le condamné présente des gages sérieux de réadaptation, la période de sûreté peut être réduite ou modifiée dans ses effets, mais selon une procédure particulière dont l’initiative revient au JAP, ce n’est pas très souvent appliqué.

En outre, si les réductions de peine sont bien sûr sans incident sur la durée de la période de sûreté, en revanche les commutations de peine ou de remises de peines qui sont prévues par un décret de grâce sont prises en compte.

Donc, deux périodes de sûretés, une période de sûreté automatique et une période de sûreté facultative pour les crimes et les délits moins graves prononcés par le juge.

Deuxième aspect de ce renforcement, toujours dans le cadre de la période de sûreté, c’est ce que l’on appelle la perpétuité incompressible, encore appelée perpétuité réelle.

Elle a été introduite en 1994 pour, d’une certaine façon, compenser la suppression de la peine capitale et tenter de trouver une réponse judiciaire à la perpétration de crimes sexuels particulièrement odieux là encore, meurtres ou assassinats, précédés ou accompagnés d’un viol, de torture ou d’actes de barbarie sur mineur de 15 ans notamment. Dans ce cas de figure, si la Cour d’Assises prononce une peine à temps, la période de sûreté pourra être égale à la durée totale de celle-ci, si la réclusion à perpétuité est prononcée, la Cour là peut porter la période de sûreté à 30 ans ou encore pour la totalité de sa durée, c’est une vraie perpétuité, d’où l’expression la perpétuité réelle.

On l’a compris, elle vient aggraver considérablement le sort du condamné en ce que l’objectif visé est ici que ce dernier ne sorte finalement jamais de prison, même si malgré tout, une porte de sortie semble prévue par le législateur après une période de trente ans passée en prison. Donc aggravation tout à fait notable de la situation du condamné.