Les effets du contrat entre les parties

Le contrat est obligatoire pour les parties : l’obligation d’exécuter de bonne foi

L’effet du contrat entre les parties est le suivant : les parties au contrat doivent respecter la loi du contrat (le contrat est la loi des parties — celles-ci se sont engagées à respecter les termes du contrat) et d’autre part que le contrat doit respecter la loi proprement dite. C’est ce qu’on appelle la force obligatoire du contrat.

Ce principe est posé par l’article 1134 du Code civil : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

Cet article fondamental exprime très clairement la force du lien obligatoire issu du contrat et signifie d’une part que les parties doivent respecter la loi du contrat et que le contrat doit respecter la loi proprement dite.

Ce principe de la force obligatoire du contrat appelle forcément une sanction. Dans le cas où l’une des parties n’exécuterait pas ses obligations elle peut contraindre l’autre à l’exécution forcée ou, si cela est impossible, demander des dommages intérêts après avoir engagé une action en justice.

  • I) L’obligation d’exécuter

Celui qui doit exécuter l’obligation est le débiteur, tandis que celui a qui l’obligation doit être faite est le créancier. Conformément à l’article 1134, le créancier est en droit d’exiger l’exécution de la part du débiteur. La question est de savoir comment l’obligation d’exécuter est sanctionnée. Elle peut l’être par une obligation forcée, en nature ou elle alors le débiteur peut obtenir des dommages-intérêts en raison du préjudice subi du fait de l’inexécution contractuelle. Ce qui nous renvoie au troisième chapitre.

  • II) L’irrévocabilité des obligations

L’article 1134 alinéa 2 du code civil dit des parties que « leurs conventions ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise », autrement dit il y a selon cet article deux sources de révocation. D’un côté elle peut être de source conventionnelle et de l’autre de source légale.

A) La révocation conventionnelle

Le contrat se forme par l’accord des parties il ne peut se défaire que si les parties en sont d’accord. Les parties peuvent éventuellement s’entendre sur une révocation conventionnelle, même si la loi peut imposer parfois certaines formes, c’est le cas par exemple en droit des sociétés cass. Comm. 27 fév. 1996, Bull. Civ. 4 n° 69. En principe la révocation entraine l’anéantissement rétroactif instantané mais ne produit des effets que pour l’avenir en ce qui concerne les contrats successifs aucune indemnité ne devant être versée par un contractant à un autre.

En vérité, les parties peuvent faire à priori ce qu’elles veulent. Toutefois certaines conséquences, certains effets passés du contrat ne peuvent être facilement anéantis, ce sera le cas par exemple en vente d’immeuble. Par ailleurs, si les parties peuvent conventionnellement se mettre d’accord sur la révocation du contrat, il est tout à fait possible pour les parties d’insérer dans le contrat des clauses qui vont autoriser une révocation unilatérale. Il en va ainsi des clauses de dédit qui permettent à un contractant souvent contre indemnité de mettre fin au contrat. Dans la vente avec arrhes, celui qui a versé les arrhes ne peut se les faire restituer, quant à l’autre partie elle peut aussi mettre fin unilatéralement au contrat, mais elle doit alors verser le double de la somme qui a été versée par son cocontractant.

B) La révocation légale

1) La révocation directe

Il s’agit du droit de rétractation, du droit de repentir dans le cadre de certains contrats comme par exemple les contrats conclus suite à un démarchage à domicile, voir en ce sens L-121-25 du code de la consommation. Par ailleurs dans certains contrats, le contrat de dépôt 1944 du code civil, ou encore le contrat de mandat 2003 et suivants du code civil, la révocation peut être envisagée mais surtout, la résiliation unilatérale est possible dans les contrats successifs à durée indéterminée comme par exemple le contrat de travail, ou encore le contrat de bail.

2) La révocation demandée au juge

Dans les contrats synallagmatiques, lorsque l’une des parties n’exécute pas ses obligations l’autre peut demander au juge la résiliation du contrat, voir en ce sens l’article 1184 du code civil. Si les parties peuvent insérer dans leur contrat une clause résolutoire autrement dit une clause qui prévoit la résolution automatique du contrat lorsque certaines conditions sont réunies, mais le juge peut être amené à contrôler la mise en œuvre de cette clause résolutoire. Pour que la clause résolutoire soit mise en œuvre il faut que les conditions de mise en œuvre prévues dans le contrat soient remplies, dans le cas contraire la clause résolutoire ne peut être mise en œuvre.

III) L’exigence de bonne foi

L’article 1134 alinéa 3 du code civil dispose que «les conventions doivent être exécutées de bonne foi.», Par ailleurs l’article 1135 du code civil dispose que « les conventions obligent non seulement à ce qui est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature. » de l’exigence de bonne foi, la jurisprudence a déduit un devoir de loyauté et un devoir de coopération.

A) Le devoir de loyauté

Les parties doivent exécuter loyalement leurs obligations. Le débiteur d’une obligation doit s’abstenir de toute fraude dans l’exécution du contrat il ne doit effectuer aucune manœuvre de nature à empêcher l’autre partie de bénéficier pleinement du contrat. Il doit plus particulièrement s’abstenir de tout dol dans l’exécution du contrat.

L’obligation de loyauté impose par exemple au créancier d’éviter au débiteur des dépenses inutiles. Par exemple, un chauffeur de taxi qui choisit de faire un détour pour mener à destination, afin que son client paie plus cher. Autre exemple, un concédant incitant à faire des investissements se comporte de manière déloyale, comm. 23 mai 2000, RTDciv 2001, p. 137. Manque à son devoir de loyauté l’agent commercial qui exerce pendant son mandat une activité concurrentielle à l’insu de son mandant nonobstant l’absence d’engagement l’absence d’engagement d’exclusivité, comm. 15 mai 2007, Bull. Civ. 4 n° 128. Manque à son devoir de loyauté le salarié qui dénigre son entreprise, soc. 25 juin 2002, Bull. Civ 5 n° 211.

B) Le devoir de coopération

Les parties doivent coopérer pour parvenir à la bonne exécution du contrat. Cette coopération est particulièrement nécessaire dans les contrats qui unissent les parties tendant à un but commun, comme par exemple, l’exploitation ou encore la distribution de produits. C’est encore le cas dans les contrats techniques qui supposent que le prestataire soit au courant des besoins du client, par exemple en matière informatique il existe l’obligation de tenir un cahier des charges dans le cadre d’une installation informatique. Ce devoir particulier se retrouve dans certains contrats et pas dans d’autres, il se retrouve de manière plus intense dans certains contrats et moins intense dans d’autres. Il a été jugé qu’un établissement émetteur de cartes de crédit doit mettre en œuvre tous les moyens à sa disposition pour exécuter une opposition et éviter les retraits frauduleux d’un ancien salarié d’une société. C. cass. Comm. 20 oct. 1998, Bull. Civ. 4 n°244. Dans un autre domaine il a été jugé qu’un employeur doit veiller à l’adaptation des salariés à l’évolution de leurs emplois. C.cass soc. 25 fév. 1992, Dalloz 1992 p.390.

C) Les limites de la bonne foi

La notion de bonne foi est très générale, on peut lui donner un contenu plus ou moins étendu, et le fait que ce soit un concept large conduit à permettre au juge de donner une teinte particulière aux conventions, ce qui génère une certaine insécurité juridique. On se demande si à un moment ou un autre la mise en œuvre de cette bonne foi ne pose pas un problème de sécurité juridique.

Il ne saurait être admis que le juge à travers le concept de bonne foi s’octroie un pouvoir général de révision des contrats. La Cour de cassation considère que les juges du fond ne peuvent porter atteinte à la substance même des droits et obligations légalement convenues entre les parties. Voir en ce sens Comm. 10 juillet 2007, Bull. Civ. 4 n° 188. Le juge peut sur le fondement de la bonne foi considérer que telle ou telle attitude d’une partie au contrat est déloyale, abusive, etc. Mais il y a une limite, il ne peut pas porter atteinte à la substance des droits et obligations légalement conclues entre les contractants.