Que sont les ententes illicites?

LES ENTENTES ENTRE ENTREPRISES PROHIBÉES PAR LE DROIT EUROPÉEN

Le droit de la concurrence a pour objet la prévention d’un dysfonctionnement du marché, la protection des intérêts des concurrents loyaux et celle des consommateurs. Pour ce faire, le droit de la concurrence prohibe toute convention tacite ou expresse entre divers opérateurs sur le marché visant à restreindre, empêcher ou fausser le jeu normal de la libre concurrence… autrement dit, le droit de la concurrence prohibe les ententes illicites.

INTRODUCTION SUR LES PRATIQUES ANTICONCURRENTIELLES

L’entente est une des pratiques anticoncurrentielles. Voici la liste des pratiques anticoncurrentielles :

  • Les ententes anti-concurrentielles: article 81
  • L’abus de position dominante: article 82
  • L’interdiction des aides d’états aux entreprises

– Les Entreprises doivent pouvoir se livrer à une concurrence juste et cette concurrence doit être protégée contre des comportements abusifs.
– Pourquoi une protection de la concurrence est nécessaire ? La concurrence est forcément meilleure puisque plus on fait concurrence plus on permet l’allocation optimale des ressources (le marché se régule de lui même)

– Pour éviter que les entreprises nuisent aux marchés, sont interdits :

  • accords entre entreprise qui nuisent au marché (ententes interdites)
  • abus de position dominante


QUE SONT LES ENTENTES INTERDITES ?

– Article 81 : 3 paragraphes
– 81-1 : sont incompatibles avec le marché commun et interdites tous les accords entre entreprises, les décisions d’association d’entreprise et les pratiques concertées qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre états membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence (accords anti-concurrentiels) à l’intérieur du marché commun, et notamment ceux qui…
– 81-2 : les accords en question sont nuls de plein droit.
– 81-3 : les dispositions du paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables pour les accords qui ne sont pas si mauvais que ça pour la concurrence

Paragraphe 1 : les formes de l’entente
A) Les accords formels (entre entreprises)
– accords express (écrit)
accords entre concurrents: moins en moins puisqu’on sait que c’est interdit
accords commerciaux: ex accords de distribution
– C’est un contrat ce qu’il y a de plus formel entre entreprises concurrentes et non concurrentes.

– Jurisprudence :

– Grundig VS Constel -> Chaîne de distribution

– LTM VS MBV-> Producteur VS industriel

-> La cour de justice a affirmé que l’article 81 visait tous les accords entre entreprise même si elles ne sont pas concurrentes

-> 66 : 3 arrêts de cours de justice européenne pour savoir si l’article 81-1 ne visait que les accords conclu entre concurrents où si un accord de distribution pouvait être anti-concurrentiel aussi (accords entre deux opérateurs situés à un niveau différent de la chaîne de production)
-> Article 81-1 peut s’appliquer aux accords de distribution parce qu’ils peuvent également nuire à la concurrence

On distingue 2 types d’accords :

  • – Accords horizontaux : entre agents économiques situés au même degré de l’économie
  • – Accords verticaux : entre agents situés à des niveaux différents de l’économie

-> Tous les accords de distribution tombent sous l’article 81

B) Les pratiques concertées
– Permettent d’appréhender des pratiques qui ne sont pas écrites mais qui ont effectivement lieu
– Si on arrive à prouver un parallélisme de comportement et ce parallélisme doit être étayé par un certain nombre d’indices sérieux et précis.
– Ex : slides des réunions secrètes,
– Ex : Orange, SFR, Bouygues : on avait trouvé les notes prises en réunion par le directeur d’Orange. Titre de la réunion du jour : le Yalta des parts de marché.
– Ex : tous les e-mails et les choses qui restent sur notre ordinateur peuvent être utilisés dans le cas d’une enquête de concurrence

C) Décisions d’association d’entreprise
– Des décisions prises au sein de ces associations donnent lieu à un comportement anticoncurrentiel

– EX : harmonisation tarifaire des avocats

Paragraphe 2 : les protagonistes de l’entente
Quand-est ce qu’il y a entente ?
autonomie
– un véritable accord

– Par le droit des ententes on interdit des comportements collusifs entre des entreprises. En 1974 a été posé pour la première fois une question importante à la cour de justice européenne : accords de distribution entre les filiales et la maison mère. Ex : une filiale distribue en Espagne, une filiale en France etc… partage du marché de façon géographique. Accord intra-groupe peut-on estimer qu’un groupe est privé de la possibilité d’organiser sa distribution. Qui sont les entreprises qui peuvent faire des accords anti-concurrentiels ?

– Pour qu’il y ait entente, il faut qu’il y ait des entreprises différentes au sens de l’unité économique (autonomie). Si une société mère a un pouvoir de décision sur les politiques commerciales, sur le comportement concurrentiel de la filiale, alors la filiale n’est pas autonome. Dans cette circonstance, l’entente intra-groupe ne relève pas de l’article 81-1. (si entreprises autonomes : art 81)

– Pour cette même raison d’absence d’autonomie économique, la commission européenne a exclu que les relations entre une entreprise et son agent commercial relève de l’article 81-1.
Indépendance juridique mais en revanche, en terme de distribution pure l’agent commercial distribue les produits au nom et pour le compte de son mandant. Il ne réalise les ventes qu’en lieu et place de son mandant. Juridiquement, c’est le mandant qui conclut le contrat avec le client. L’agent commercial n’est qu’un intermédiaire.

– Arrêts Bayer. Bayer vend un produit. Ce produit est vendu assez cher (parce qu’il est remboursé par la sécu). En Espagne, il est vendu moins cher. Même produit vendu via les filiales de Bayer à différents prix dans différents pays, pas à cause d’une entente mais à cause des différentes législations sur les médicaments. Un certain nombre de grossistes sont allés acheter le produit en Espagne et le revendaient en France. Bayer : problème d’approvisionnement régulier en Espagne et de profit en France. Bayer a décidé d’interdire dans les accords avec les grossistes de faire des « importations parallèles » ce qui constitue bien une volonté de compartimenter le marché géographiquement. La commission a poursuivi Bayer en leur reprochant un accord anti-concurrentiel. Condamnation de Bayer à des amendes dans un premier temps. Bayer fait appel devant le TPI de cette décision. Ici autonomie mais Bayer faisait valoir qu’il n’y avait pas d’accord entre entreprises, puisque les grossistes n’étaient pas d’accord avec cette clause.

L’adhésion :

  • Lorsque le contrat est oral, comment prouver l’adhésion personnelle ?
  • Il y a un standard de preuves (ex : payer sa cotisation ne suffit pas)
  • EX : jurisprudence Volkswagen -> preuve = carnet de réunion
  • Si adhésion par contrainte, pas d’adhésion


Paragraphe 3 : L’objet ou l’effet anti-concurrentiel
– Quand un accord a un objet anti-concurrentiel, on n’a pas besoin d’apporter la preuve qu’il a eu un effet anti-concurrentiel pour qu’il soit interdit. Il est répréhensible. Affirmer qu’on ne l’a pas suivi n’est pas un moyen de se défendre car l’objet concurrentiel est constitué.

Ex : fixation obligée du prix

– Dans les accords de distribution, il n’y a jamais un accord anti-concurrentiel
– Ententes réprimées lorsqu’elles ont un objet anti-concurrentiel ou non, mais également lorsqu’elles ont un effet anti-concurrentiel, même si cet effet est indirect. Il faut dans ce cas prouver cet effet.

– C’est lorsque l’accord en question a pour effet d’empêcher, fausser ou restreindre la concurrence et notamment ce qui consiste à :

    • Fixer le prix d’achat ou de vente ou autres conditions de transaction
    • Limiter ou contrôler production, débouché, techniques, investissement
    • Répartir les marchés ou sources d’approvisionnement
    • Appliquer à l’égard des partenaires commerciaux la discrimination en leur infligeant des désavantages
    • Subordonner la conclusion de contrat à l’acceptation pour les partenaires de prestations supplémentaires qui n’ont pas de liens avec l’objet de ces contrats


Paragraphe 4 : la sensibilité sur les échanges entre états membres
La communauté n’intervient que quand elle à intérêt à intervenir. Elle n’intervient pas pour des affaires internes à un pays.
– La formation du marché commun se caractérise par la libre circulation des marchandises ou des services. Pour que le droit communautaire s’applique, il faut qu’il y ait une affectation du commerce entre états membres.

– Jurisprudence : si un accord ne concerne qu’une partie substantielle il peut y avoir sensibilité aux marchés communautaires.
– Mais le fait de compartimenter les marchés par états membres ne signifie pas qu’on s’affranchit de la sensibilité des échanges.

– Cas le plus facile pour prouver un problème c’est de prouver que produit à vocation de voyager d’un pays à l’autre et qu’à cause de l’accord, il ne peut pas (empêche la circulation ou l’influence)

– Commission a développé une communication pour aider les entreprises à savoir quand leur accord est susceptible d’avoir une influence sur le commerce intracommunautaire.
Communication de minimis dans laquelle elle explique quand un accord est susceptible ou n’est pas susceptible d’affecter le commerce entre les états membres.

– Avant le critère était le nombre de salariés et le CA pour savoir si une entreprise pouvait avoir une influence. Critère abandonné car lorsqu’une entreprise travaille sur une niche, elle peut avoir peu de salariés mais avoir une influence sur le secteur.

D’où, nouveau critère : la part de marché. Quel seuil de part de marché peut avoir une action sensible ?

Deux situations :
accords horizontaux: entre concurrents

-> accord de spécialisation : OK
accords verticaux: entre autres les accords de distribution (producteur/ grossiste)
– Accord horizontal : n’est pas sensible un accord conclu entre des entreprises qui sont des concurrents existants ou potentiels si la part de marché cumulée des parties à l’accord n’excède pas 10% sur aucun des marchés en cause affectés par l’accord.
– Accord vertical : cet accord n’est pas sensible sur le commerce entre états membres dès lors que la part de marché détenue par chacune des entreprises parties à l’accord n’excède pas 15% du marché pertinent.

– Mais exception, lorsque l’accord contient des restrictions caractérisées de concurrence.

  • Restrictions caractérisées pour les accords horizontaux :
  • Fixation du pris de vente des produits aux tiers
  • Limitation de la production vendue
  • Répartition marché et clients
  • Restrictions caractérisées pour les accords verticaux :
  • Restriction de la capacité de l’acheteur à déterminer le prix de vente. Mais on peut recommander le prix de vente sans moyens de coercition
  • Restriction concernant le territoire dans lequel la clientèle à laquelle l’acheteur peut revendre un bien ou service contractuel
  • Restriction des ventes actives ou passives aux utilisateurs finaux par un système de distribution sélectif au niveau commercial de détails

->Vente active / passive :

  • -Vente active : vente que l’on fait en étant allé chercher le client (pub/ mailing)
  • -Vente passive : vente sans être allé chercher le client
    -> Cette notion est importante par zone géographique

– EX : on décide une marge max par arrondissement. Donc pas de vente active en dehors de la zone. Mais il est interdit de dire : pas le droit de faire de la vente passive en dehors de cet arrondissement, du type « vous habitez le 16ème, allez voir le vendeur du 16ème».

  • Attention, en matière de distribution exclusive uniquement :
  • Restriction des livraisons croisées à l’intérieur d’un système de distribution exclusive
  • Restriction convenue entre une entreprise qui produit des composants et un acheteur incorporant ces composants qui limitent la possibilité pour l’entreprise de vendre ces composants en pièces détachées à des clients finaux.

EX : Valéo produit les sièges pour Renault. Renault a les moyens de bloquer Valeo. Pour éviter cette situation, on interdit à Renault de restreindre Valeo à vendre à d’autres clients.


Dans un accord de minimis on ne relève pas de l’article 81-1, donc on n’a pas à en être exempté par l’article 81-3 sauf s’il contient des restrictions caractérisées de concurrence (les clauses noires)

Conclusion :

  • 4 conditions pour qu’un accord relève de l’article 81
  • Tous les accords semblent pouvoir tomber sous l’article 81, la commission a donc opter des communications pour clarifier des points
  • 70’s : les accords de sous-traitance n’étaient pas des accords ayant un effet anti-concurrentiel (pas de 3ème condition)
  • 62 : les contrats d’agents commerciaux ne relèvent pas de l’article 81 car pas d’autonomie suffisante et repose sur le mécanisme du mandat

EX : un producteur qui ne peut installer de point de vente dans un pays -> pas autonome