Les limites au droit de propriété

Quelles sont les limites au droit de propriété?

> 2eme partie de l’article 544 évoque les limites du droit de propriété « pourvu qu’on en fasse pas un usage prohibé par la loi ou par les règlements ».
> jurisprudence, rôle interprétatif et normatif : les limites posées par la jurisprudence sont notamment l’abus de propriété et les troubles anormaux de voisinage
> Volonté individuelle joue aussi un rôle.
 →Loi et règlements ne sont pas seuls sources de limites.
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Chapitre 1 – Les limitations d’origines légales et réglementaires au droit de propriété.

> Tendance à considérer de nombreux droits comme étant objets de propriétés alors qu’ils n’ont ni nature pécuniaire ni nature patrimoniale ( propriété du nom de famille, d’un grade militaire etc ).
> Vitalité de la notion de propriété. L’expansion de la notion de propriété est allé de paire avec un profond recul des prérogatives du propriétaire privé, surtout quand il s’agit de propriétés immobilières.
> Des restrictions se sont multipliées au fur et à mesure que l’Etat intervenait dans plus en plus de domaines.

Section 1 – Les limitations d’intérêt public.

> La puissance publique peut porter atteinte à la propriété privée au nom de l’intérêt général de deux manières différentes.
 → Tantôt l’administration limite l’exercice des droits du propriétaire, en lui imposant des contraintes. Cela résulte de décisions de l’autorité administrative, par voie règlementaire, particulièrement dans la propriété immobilière. Il peut s’agir d’immeubles urbains ou ruraux, et aussi bien d’immeubles bâtis ou non bâtis. Cela peut être par exemple l’interdiction de construire à une certaine hauteur ou à un certain %tage du sol. Cela peut être l’obligation de s’aligner sur les rues, la nécessité d’obtenir un permis de construire ou cela peut être une obligation de détruire un immeuble insalubre ou qui menace ruine.
Pr les immeubles non bâtis, cela peut être l’interdiction d’une culture (cannabis) etc.
Parfois cela remet presque en question sa qualité de propriétaire. On donne à ces limitations les servitudes d’utilité publique.

 → Tantôt, elle peut s’approprier les biens privés. Atteinte majeure du droit de propriété. Cette appropriation peut être l’expropriation pour cause « d’utilité » publique, et s’est Beaucoup répandue depuis plus d’un siècle avec le développement des réseaux publics. Or en 1804, l’expropriation existait déjà pour les cas de « nécessité » publique. Cela peut être aussi une procédure de réquisition, qui permet sous certaines conditions de mettre à sa disposition les biens immeubles des particuliers.
De même, l’impacte de la pression fiscale est très forte sur la propriété immobilière.

On peut parler de publicisation de la matière du droit des biens. Cela se traduit par une augmentation du nombre des codes qui régissent le droit des biens.

Section 2 – Les limitations d’intérêt privé.

> Assurer la protection des locataires ou permettre à des voisins de vivre correctement.

Paragraphe 1 – Les limitations dans l’intérêt des voisins.

> Loi et règlement peuvent organiser les rapports de voisinage au moyens de servitudes légales d’intérêt privé ( à distinguer des servitudes volontaires ).
 → Signifie que l’aménagement des rapports de voisinage n’est pas laissé à la seule initiative des voisins particuliers.
> Certaines de ces servitudes sont réciproques en ce sens qu’elles pèsent de la même manière sur les deux fonds voisins.
 → Ex. des charges prévues par article 671 à 681 Code civil concernant les distances à respecter pour bâtir ou planter ou percer des ouvertures. Idem pour l’écoulement des eaux pluviales.
> Certaines servitudes ne sont pas réciproques, et ne pèsent que sur un seul fonds, au profit de l’autre. C’est par exemple la servitude de passage.

Paragraphe 2 – Les limitations concernant les locataires.

> Limitation sur les baux.
> En 1804, et pendant longtemps, le bail ( contrat à exécution successive ) relevait pour l’essentiel de la liberté contractuelle. Les dispositions relatives au louage de choses avaient un caractère supplétif du coup.
> En raison de la pénurie de logement (Première guerre mondiale et seconde), législateur a adopté des textes impératifs, à visée sociale, pour protéger les locataires contre l’instabilité et la précarité de leur statut. Il s’est alors s’agit de protéger leur maintient de la chose loué, le renouvellement du bail, ou de leurs accorder un droit de préemption en cas de cession de l’immeuble loué.
 → Toutes ces mesures protectrices se sont traduites par un rétrécissement des droits des propriétaires.
> Les prérogatives reconnues par la loi aux locataires ont tendance à rendre flou la frontière entre droit personnel et droit réel, parceque le droit des locataires, personnel, se teinte d’une dose de réalité.
Ex. Le fait pour les propriétaires indivis de renouveler un bail sur un bien indivis est assimilable à un acte de disposition, alors qu’en droit stricte cela sevrai être un acte d’administration.

> Loi du 1er septembre 1948, aujourd’hui marginale, illustre l’atteinte causée au droit de propriété. De même, statut des baux d’habitation résultant de la loi du 1er Juillet 1989, figurant aujourd’hui comme étant le droit commun de l’habitat locatif.
 → Si l’on regarde le droit de se maintenir dans les lieux à la fin du bail, dans la loi de 1948, le locataire peut conserver la jouissance du bien au delà de l’expiration du bail. La location étant un droit automatique qui dure autant que l’immeuble est régit par la loi de 1948. Le locataire va devenir ‘occupant’. Le droit au maintient se transmet au conjoint et aux ascendants et à ses enfants mineur. Le loyer dû par le locataire échappe à la volonté des parties. La loi le fixe en référence à un barème. Le loueur peut effectuer un droit de reprise pour habitation ou pour construction. Ce dispositif n’a jamais été abrogé, mais concerne une minorité de logement car les immeubles construits après 1948 ne relèvent plus de ce régime.

 → Sur la législation de 1989, les baux sont nécessairement conclus pour une durée minimum de 3ans. Le locataire peut continuer à jouir des lieux au delà du terme contractuel dès lors que le bailleur n’a pas donné congé, il y a tacite reconduction du bail pour 3autres années (6ans si bailleur est PM).
Le congé ne peut être délivré en cour de bail. Il doit être justifié soit par la reprise soit par la vente du logement par le bailleur, ou par un motif légitime et sérieux (ex. le locataire n’exécute pas ses obligations, propriétaire veut rénover). Cette loi donne au locataire un droit de préemption lorsque le propriétaire à donné congé pour vendre.

Chapitre 2 – Limites jurisprudentiels au droit de propriété.

Il y a également des limites d’origines jurisprudentielles. 2 théories.

La théorie des troubles du voisinage : elle recouvre une hypothèse très particulière. Un propriétaire peut être condamné par les juges à réparer des dommages anormaux que cause à autrui par l’usage normal de la propriété.

Ex : une entreprise d’élevage de porcs à l’entrée d’un village

L’exploitation engendre une odeur particulièrement nauséabonde. Mais l’activité de l’entreprise est tout à fait licite. Pour autant, l’exploitation de cet élevage engendre un trouble anormal pour les habitants du village proches de l’élevage. La jurisprudence impose de dédomager les voisins qui subissent un dommage anormal.

Ex 2 : Hotel Georges V en rénovation ces dernières années

Il a fait l’objet de travaux extrêmement implorants (droit d’aménagement). Les occupants des immeubles voisins ont pu obtenir une indemnisation.

La responsabilité pour troubles anormaux du voisinage

Cette responsabilité doit être distingué de l’abus de droit de propriété. Abus de droit de propriété consiste à user de son bien pour nuire (il y a une intention de nuire)
Responsabilité pour trouble du voisinage est une responsabilité sans fautes. La condamnation pourra avoir lieu alors même que le propriétaire utilise son bien sans faute, dès lors qu’il fait subir à ses voisins un trouble anormal.

Ce trouble peut être : nuisances sonores, nuisances visuelles, travaux entreprise

Conditions : il faut que le trouble soit anormal. Il faut que cela soit un trouble répétitif (continu : veut juste dire qu’il est fréquent).

Il faut que le trouble soit grave : le trouble doit dépasser un seuil de tolérance normal. Dès que ce seuile de gravité est dépassé, la responsabilité peut être engagée

Ce sont les juges qui apprécient souverainement le caractère de gravité du trouble.

Un domaine d’application très vaste

  • pour la notion de voisinage : elle peut jouer pour 2 propriétés qui ont un simple rapport de proximité (par forcément de jonction). Ex : aéoroport: l’exploitatn pourra être tenu d’indemniser tous les personnes proches de l’aéroport
  • quant aux personnes responsables : bien sûr, le propriétaire lui mêm. Mais il peut également s’agir de toute autre personne qui se trouverait dans la propriété dans laquelle le trouble prend naissance. Par ex : un locataire, un entrepreneur qui effectue des travaux, peuvent être condamnés pour trouble de voisinage.

Affaire de l’hotel Georges V, totalement rénocé

L’hotel Prince de Galles (voisin du Georges V) a subi des dommages. De plus, de nombreuses nuisances sonores pour les clients de l’Hotel. Hotel Princ de Galles a attaque l’Hotel, mais aussi l’entrepreneur. L’entrepreneur a été condamné. Il avait 18 sous-traitants. Cour de Cassation a admis que l’entrepreneur pouvait se retourner contre les sous-traitants, à condition de prouver leur responsabilité dans le trouble

  • la victime aussi est entendue de manière très large. Cela peut bien sur être le voisin, même s’il n’habite pas dans la propriété (ex : propriétaire d’une maison secondaire peut attaquer pour Troubles Anormaux de Voisinage) : ex : le locataire contre un voisin qui plante des arbres devant une fenêtre
    Il y a des ex concrets de tous ces troubles sous (article
    544 du code civil).

La sanction de cette responsabilité pour troubles anormaux de voisinages

La victime peut obtenir des Dommages et Intérêts. Mais il est aussi possible d’obtenir une réparation en nature, qui doit être préférée dans la mesure du possible.

Le juge ordonne au défendeur d’arrêter la source de la nuisance sonore (ex : juge demande à ce que les travaux commencent plus tard, finissent plus tôt ; ex2 : ordonner de couper les haies trop haute…)

Lorsque le juge condamne ainsi l’auteur du trouble à cesser son activité nuisible, il peut assortir cette condamnation à une astreinte.

Astreinte; condamnation pécuniaire prononcée en fonction du nombre de jours de retards dans l’exécution.

Exception à la responsabilité pour troubles anormaux du voisinage

Prévue depuis loi de 1976 dans le Code de la Construction et de l’Habitation CCH.

CCH 112 prévoit que la victime d’un trouble ne peut engager la responsabilité de l’auteur si elle s’est installé dans une zone ou le trouble existait déjà.

Ex : si c’est une activité économoque

Seulement si le trouble reste constant

Civ, 18 janvier 2005 : élevage de porcs qui causait des nuisances olfactives. Une personnes achète une maison à coté. Du fait que l’installation existait déjà, cette personne ne pouvait engager la responsabilité de l’éleveur. Mais il se trouve que l’exploitant a augmenté son activité. Cass décide que du fait de l’augmentation de l’activité de cet élevage, le propriétaire victime de la nuisance pouvait engager la responsabilité de l’éleveur et obtenir réparation

La théorie de l’abus de droit de propriété : Il y a un principe fondamental en droit français : on ne doit pas faire un usage abusif de son droit. Cela vaut aussi pour le droit de propriété, même s’il est absolu.

Ici (contrairement à la théorie), il y a un usage abusif du droit: il y a une intention de nuire au voisin.

Cette théorie a été consacrée par la C Cass dans un arrêt très célèbre Civ 3 aout 1915, arrêt Clément Bayard (++). 2 terrains voisins : la propriété de Clément Bayard et celle de son voisin
Clément Bayard a édifié un hangar dans lequel il conserve ses montgolfières, qu’il fait s’envoler à partir de son terrain. Il y a une discorde entre les voisins. Coquerel décide d’ériger sur son terrain 2 carcasses de bois : 2 pieux en bois d’une hauteur de 11 m sur laquelle sont fixés des pieux de 3 m. Coquerel souhaitait que les atterissages de Clément Bayard ne soient pas suffisamment précise et que Clément Bayard vienne s’empaler sur les pieux. Il ya eu un accident.

Pour la première fois, la Cour de Cassation a admis qu’il peut y avoir un abus du droit de propriété. Coquerel a été condamné à indemniser Clément Bayard et à détruire les pieux

Ce que l’on trouve très souvent : un voisin qui construit un mur devant la fenêtre devant la fenêtre du voisin (ou planter un arbre).

Chapitre 3 – Restrictions conventionnelles au droit de propriété.

> La cession de l’abusus de la chose, peut être volontairement restreinte sous certains aspects par le cédant, si une clause d’inaliénabilité est insérée pendant une cession. Le nouveau propriétaire n’aura donc pas le droit d’aliéner le bien qu’il va recevoir.
 → L’interdiction peut être absolue ou relative

Section 1 – Le domaine des clauses d’inaliénabilité.

> Rarement contenu dans un acte de cession à titre onéreux.
> Ces clauses sont fréquentes dans les actes à titre gratuit, comme par exemple la donation ou le testament. Le récepteur de la chose n’aura pas le droit de l’aliéner ensuite, et celui-ci est mal fondé à refuser cette clause.
> pour être valable, cette clause doit être fondée sur un intérêt légitime.
> article 537 énonce que « les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent sous réserve des conditions de la loi ».
 → Mais loi 1971 insère article 900-1 pour admettre et règlementer les clauses d’inaliénabilité relatives à un bien donné ou légué par une personne physique.

Section 2 – Les conditions de validité des clauses d’aliénabilité.

> 2 conditions de validité :

 → La clause doit être justifiée par un intérêt sérieux et légitime. L’intérêt peut être soit matériel, soit moral. Il peut être recherché soit dans la personne du disposant ou du gratifié (celui qui reçoit le bien), soit dans la personne d’un tiers par rapport à ces deux là.
On peut imaginer que le disposant consente une libéralité assortie d’une charge, c à dire à charge pour le gratifier de payer une rente viagère à un tiers.
On peut imaginer que le disposant donne un bien en se réservant l’usufruit de son vivant avec interdiction d’aliéner le bien.
C’est au juge du fond d’apprécier le caractère sérieux et légitime de l’interdiction d’aliéner. Si l’intérêt disparaît, le donataire pourra disposer librement du bien.
Cour de cassation est très rigoureuse car dit que la charge de la preuve pèse sur celui qui se prévaut de la clause d’inaliénabilité alors qu’en droit commun, ce serait à celui qui conteste la cause de prouver qu’elle n’est pas régulière.

 → La clause ne doit pas être perpétuelle, l’idée étant qu’il est hors de question de retirer de la circulation un bien qui aura été donné ou légué. Le bien serait frappé de mainmorte.
> Est considérée comme perpétuelle la clause qui empêcherai le destinataire d’un bien d’en disposer pendant toute sa vie.
> Il n’y a pas de limite temporelle, la jurisprudence est donc forcée de préciser les contours de cette limite. L’idée est que le gratifié doit pouvoir recouvrer la pleine liberté du bien qui lui a été donné.
→ La durée de la clause s’apprécie soit par la durée de la vie des parties. La clause sera ou pas considérée comme valable selon qu’elle sera subordonnée à la vie du donateur ou du donataire. Lorsque la différence d’age entre les deux parties est trop faible, la clause d’inaliénabilité jusqu’à la mort du donateur sera nulle.
> L’inaliénabilité, si valable, va avoir pour conséquence de rendre le bien insaisissable. Les créanciers du propriétaire ne pourront pas saisir la chose pour se payer.

Section 3 – Quid si violation de la clause d’aliénabilité ?

> Si l’aliénation a été faite avec le consentement du donateur, la vente sera licite.
> dans le cas contraire, aucun texte ne vient donner de réponse. C’est donc le droit commun qui s’applique.
Ds un premier tps, les tribunaux sanctionnaient en révoquant la libéralité en violation de la clause, pour inexécution des conditions ( 963 Code civil ). La révocation renvoyait donc la plein propriété du bien dans le patrimoine du donateur initial.
Ds un second temps, la Cour de cassation a fini par admettre que la violation de la clause entrainait la nullité de l’aliénation du bien, peu importe la bonne ou la mauvaise foi de l’acquéreur. Nullité relative.
> Un décret de 1955 a soumis l’aliénation à publicité s’il s’agit d’un bien immeuble. Les tiers sont donc en mesure d’être prévenu de l’existence d’une clause d’inaliénabilité.
> Si la PM se trouve être une Sté, la loi (L210-2 Code de.Commerce) impose une limite de durée maximale de 99ans pour la clause.
> Si ce n’est pas une Sté, la jurisprudence est hostile au principe d’interdiction d’aliéner, et jusqu’au milieu du 20eme, la jurisprudence annulait toutes les clauses d’inaliénabilité. Mais Cour de Cassation, 19 octobre 1965, dit que le projet présentait un caractère d’utilité, d’ou la clause était valable. Depuis lors, en 1990, un article est ajouté permettant à une personne de prévoir un lègue au profit d’une fondation non encore né au jour du décès du testateur, à condition que cette fondation obtiennent la condition d’utilité publique.

Un acte à titre onéreux peut-il contenir une clause d’inaliénabilité ?
> On suppose qu’en pratique, ces clauses sont rares car il y a eu une contre partie pécuniaire.
> Les tribunaux admettent que ce types de clauses puissent figurer dans une vente.
Mais Cour de cassation 31 octobre 2007, pose le principe que « pourvu que les limites posées par l’article 900-1 soient respectées »