Les restrictions à l’exercice du commerce

Les restrictions à l’exercice du commerce.

Depuis la révolution française est posé le principe de la liberté du commerce et de l’industrie. En effet, les lois du 2 et 17 mars 1791 appelées décret d’Allard et la loi Le Chapelier 14 juin 1791 ont proclamés la liberté du commerce et de l’industrie.

Repris par la loi Royer du 27 Décembre 1973 article 1er. Dans les faits ce principe se trouve limité par des textes soit pour des raisons de police des affaires ou des motifs d’équilibre économique, qui s’inspirent de deux grandes idées :

  • Protéger la personne qui veut entreprendre une activité commerciale en exigeant d’elle des capacités.
  • Sauvegarder l’intérêt général en écartant des personnes qui pour des raisons diverses ne paraissent pas avoir leur place dans les professions commerciales (personnes indésirables).

§1 : Des restrictions qui visent à protéger les personnes qui veulent entreprendre le commerce.

THALLER, disait au 19ème siècle que « le commerce était le droit des forts ». Expression symptomatique de la différence entre le droit civil et le droit commercial. En effet tout commerçant prend des risques. Toute personne ne pourra faire de commerce. Ce droit adopte une conception plutôt libérale simplifiée par une loi du 11 juillet 1974 fixant la majorité à 18 ans.

A) Le mineur non émancipé.

Celui-ci ne peut devenir commerçant, et ne peut réaliser occasionnellement des actes de commerce. Cette solution est justifiée car les mineurs sont trop jeunes pour mesurer les risques économiques encourus. Cela se traduit en effet puisque jusqu’à 16 ans ils sont soumis à une scolarité obligatoire.

Il s’agit d’une incapacité de jouissance et non pas d’exercice, par conséquent personne ne peut le lever. Il ne peut pas même pas faire de commerce par le biais de son représentant légal, contrairement aux actes de la vie civile.

Cette incapacité peut dans certaines situations présenter certains inconvénients. Le décès d’un commerçant en laissant des héritiers mineurs, ceux-ci ne pourront exploiter ce fonds et ainsi devront vendre le fonds de commerce ou le mettre en location gérance.

La sanction de l’incapacité est double :

  • Il ne peut acquérir la qualité de commerçant, par conséquent il ne pourrait être attrait devant les tribunaux de commerce même si dans les faits il exerce une activité commerciale.
  • Il ne peut faire l’objet d’une procédure collective de liquidation ou de redressement judiciaire.
  • Les actes de commerce même isolés, accomplis par lui sont nuls, article 1308 du Code Civil. Il s’agit de le protéger et ainsi il peut se prévaloir d’une nullité relative, elle ne peut être invoquée que par le mineur devenu majeur ou son représentant légal. En revanche son cocontractant ne pourra invoquer cette nullité. Cette nullité suppose que l’acte ait été défavorable au mineur, ce qui signifie que les actes déséquilibrés demeuraient donc valables.
B – Les mineurs émancipés.

Les mineurs peuvent être émancipés à partir de l’âge de 16 ans.

A-t-il la capacité de faire du commerce ? Non, le mineur n’a pas la maturité suffisante. Ce qui aurait put être admis, et présenter des intérêts, notamment en cas de décès.

Ce mineur peut il occasionnellement accomplir des actes de commerce ?

La question est discutée. Oui au regard des textes, car le mineur jouit d’une entière capacité, mais non au regard des conséquences dangereuses.

C) Les majeurs incapables.

Ceux-ci sont assimilés aux mineurs émancipés. Ce sont les malades mentaux ou faibles d’esprit qui font l’objet de tutelle ou curatelle. Il est normal de les écarter du commerce car ils ne pourraient lutter à arme égale avec les concurrents donc on les protège. Lorsque l’incapacité atteint le commerçant, celui-ci doit cesser ses activités et ainsi son fonds de commerce doit être vendu ou mis en location gérance. Son représentant légal doit demander que cette personne soit radiée du registre du commerce et des sociétés (RCS).

  • &2 : Des restrictions tendant à protéger l’intérêt général.

A – Les personnes.

Il s’agirait dans le but de prévenir des cas de liquidation des sociétés, créer un diplôme obligatoire pour devenir commerçant. Non, car cette condition ne serait pas conforme à notre esprit libéral. L’objectif étant de donner une chance à tous et donc aussi aux non diplômés.

Un décret du 2 Mars 1995 a prévu une initiation à la gestion, les commerçants peuvent à titre facultatif suivre des stages organisés par les chambres de commerce, mais obligatoire pour les artisans depuis une loi de Décembre 1982.

Dans certains pays, on doit prouver que le commerçant futur soit apte à l’être et adopter un plan de financement dans lequel il explique qu’il possède les fonds nécessaires. On pourrait imaginer que l’octroi de certaines aides soit conditionné par des stages.

Le droit français préfère un contrôle à posteriori, s’il y a un problème soit on régularise soit on responsabilise.

Il existe plusieurs types d’interdiction se fondant sur un défaut d’honorabilité, sur une incompatibilité, et le cas particulier des commerçants étrangers.

1. Le défaut d’honorabilité.

3 hypothèses doivent être envisagées :

  • Certaines personnes ont étés condamnées à une peine d’emprisonnement sans sursit. Une loi du 30 aout 1947 portant sur l’assainissement de la profession commerciale aux personnes ayant étés condamnés à une peine supérieure ou égale à 3 mois(le vol, l’abus de confiance, l’escroquerie). Article L 128-1 du Code de Commerce. Ces peines sont justifiées, car les peines en matière d’affaires sont des infractions commises habituellement. Cela s’apparente plus à une mesure de sureté qu’à une peine. Le tribunal peut aussi prononcer une interdiction temporaire. Depuis la loi du 4 Aout 2008 cette peine est complémentaire, les tribunaux peuvent prononcer une interdiction temporaire si elle est justifiée. De plus, depuis la loi LME, le juge peut la prononcer même si la peine n’est pas égale à 3 mois. La violation de cette interdiction est punie de 2 ans de prison et de 30 000 euros d’amende. Il faut que l’infraction soit en relation avec les affaires article L128-1 du Code de Commerce. Celui qui a commis un outrage public à la pudeur ne peut pas être interdit de commerce à ce titre.
  • Les auteurs de fraude fiscale, selon l’article 1750 du Code Général des Impôts, les interdictions frappent les auteurs de fraude fiscale. Selon certains, cette interdiction est discutable d’autant plus qu’elle peut être prononcé à titre observatoire avant toute condamnation.
  • La personne frappée de faillite personnelle se voit interdire l’exercice du commerce. C’est le cas du commerçant ou du dirigeant de société qui a commis des actes gravement contraires aux usages du commerce ayant provoqué l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Celle-ci ruinant les créanciers. On trouve l’interdiction de gérer, administrer, de diriger ou contrôler une personne morale.

La sanction de la méconnaissance de ses interdictions :

  • Les actes de commerces demeurent valables pour protéger le cocontractant, mais le contrevenant s’expose à des sanctions correctionnelles.
  • En cas de récidive, le tribunal peut ordonner la confiscation du fonds, ce qui est très rare, car lors de l’immatriculation au RCS est contrôlé le fait d’avoir été condamné ou non.
2. Les incompatibilités.

L’exercice du commerce est incompatible avec certaines activités, notamment de la fonction publique, de même pour les officiers ministériels (greffiers, notaires…), pour les professions réglementés (avocats, expert comptables, médecins). Décret du 6 Février 1995.

3 fondements :

  • Garantir l’indépendance et la dignité des professions visées.
  • Motif de conscience professionnelle, car le commerce est une profession absorbante.
  • Ces professions ont un esprit différent de celui qui anime le commerce.

La méconnaissance de ces principes entraine des sanctions pénales et disciplinaires, les actes de commerce restent valables et on le qualifiera de commerçant de fait ainsi attrait devant les tribunaux de commerce.

3. Les commerçants étrangers.

Au début du 19ème siècle il s’agissait d’éviter la concurrence menée par les étrangers, ainsi que de protéger les créanciers car les biens saisissables en France des étrangers avaient une faible valeur quand l’établissement principal est situé à l’étranger.

Aujourd’hui ces règles posant l’incapacité de ces personnes se concilient mal avec le développement de relations d’affaires internationales, et sont limitées à 3 types d’incapacité :

  • Les étrangers « ordinaires » sont soumis à un régime restrictif. Ils n’ont pas le droit de devenir commerçant mais est levée dès qu’il y a réciprocité législative, c’est-à-dire que les français, dans leurs pays peuvent devenir commerçants. Cette règle résulte de l’article 11 du Code Civil qui oppose les droits naturels (dont les étrangers sont titulaires de plein droit) notamment de conclure des contrats, au droit civil stricto sensu qui suppose la réciprocité. Afin de respecter cette règle, les étrangers doivent être titulaires de la carte de commerçant délivrée par le préfet en prenant en considération la viabilité de la chambre de commerce.
  • Les étrangers sont soumis à un régime privilégié, lorsqu’il y a des traités entre la France et un autre pays (Suisse et certains pays africains), et ainsi cette carte leur sont délivrée automatiquement.
  • Assimilation complète de certains commerçants avec les nationaux, dès lors qu’ils peuvent faire du commerce sans être titulaire de la carte de commerçant. Il s’agit premièrement des étrangers qui peuvent se prévaloir d’un traité les dispensant de la carte (algériens), les étrangers titulaire de la carte de résident justifiant d’une résidence en France non interrompue pendant 3 ans en France valable 10ans renouvelée, et ainsi que des ressortissants des États membres de l’Union Européenne. L’article L122-3 dispense ces ressortissants de l’UE de toute autorisation préfectorale en la matière. Il existe un principe d’universalité économique du droit communautaire mais souffre de quelques exceptions:
  • Existence de monopole dont bénéficie certaines activités (tabac, allumettes, poudre, explosifs…). Ces restrictions ne sont pas discriminatoires car elles s’appliquent à tous.
  • Exercice de l’autorité publique, les commerçants étrangers ne pourront pas intervenir en ce domaine et sont surtout visés les officiers ministériels, certaines professions libérales…
  • Certaines tiennent à la santé, sécurité publique. Pour cette raison, en France, les exploitants d’énergie doivent être français tout comme les fabriquant d’armes.
  • Des raisons impérieuses d’intérêt général, ainsi certaines raisons peuvent justifier que l’on exclut les étrangers (conservation historique…).

Ces exceptions doivent cependant rester exceptionnelles.

B. Les restrictions relatives à certaines activités.
  • Il existe des activités interdites pour des raisons de moralité ou de sécurité (vente de stupéfiants, denrées falsifiées).
  • D’autres activités sont subordonnées à des autorisations délivrées par des organismes administratifsou professionnels. L’ouverture d’une grande surface est délivrée par des commissions d’urbanisme commercial.
  • Certains commerçants doivent obtenir une licence, les pharmaciens, les transporteurs routiers, les opticiens…Certains commerçants sont soumis à des contrôles administratifs d’hygiène, des dispositions protectrices de l’environnement.

Toutes ces conditions permettent de devenir commerçant. Si l’intéressé se livre de manière habituelle et indépendante à une activité commerciale ; s’il est majeur ; s’il ne fait pas défaut aux conditions d’honorabilité ; s’il ne fait pas l’objet d’une interdiction ; s’il satisfait aux exigences ayant traits aux activités réglementées ; et s’il est étranger, répond aux conditions posées par la loi et aux traités : il est commerçant.

Quelles sont les conséquences de la qualité de commerçant ?