Les sources du droit de la fonction publique

Les sources du droit de la fonction publique.

> Sources matérielles : ensemble des éléments qui inspirent à la création du droit, sans être la règle de droit (conceptions politiques, historiques etc..)
> Sources formelles : procédé de création du droit. Sources écrites & sources non écrites (jurisprudence).
> Beaucoup de similitude avec le Droit administratif.

Section 1 – La jurisprudence.
Paragraphe 1 – Le rôle du Conseil d’État dans l’édification du droit de la Fonction Publique.

> Rôle essentiel du Conseil d’État, notamment a partir de la fin du 19eme et du début du 20ème.

 A – L’ouverture progressive des recours aux agents publics.

1ère période : 19eme.
> Au 19eme, le
Recours en Excès de Pouvoir est ouvert aux fonctionnaires mais de manière limité.
> En cas de mesure disciplinaire par ex. Mais la plupart des actes qui concernent les fonctionnaires sont considérés comme des actes de « pure administration », c’est à dire qu’ils sont insusceptibles de recours.
> donc la Jurisprudence du Conseil d’Etat au 19eme est très peu favorable aux agents publics.
 → Cela s’explique par la volonté de préserver les prérogatives de l’autorité hiérarchique.

2ème période : 3ème république et début du 20eme siècle.
> Évolution spectaculaire de la Jurisprudence qui admet beaucoup plus largement la possibilité pour les agents pu de former des recours contre les décisions qui les concerne.
 → Recours individuels et recours formés par des associations de fonctionnaires.

> Concernant les recours individuels, le Conseil d’Etat admet qu’un simple intérêt à agir permet d’exercer un Recours en Excès de Pouvoir. Évolution car avant cette Jurisprudence Lote de 1903, le fonctionnaire devait démontrer une violation de l’un de ses droits acquis.
Abandon du principe d’irresponsabilité de l’Etat vis à vis de ses agents (CE 1903, Le Berre). Peut donc maintenant engager la responsabilité de l’Etat pour licenciement irrégulier par ex.

> Concernant les Recours en Excès de Pouvoir formés par les association de fonctionnaires, ils sont admis en 1908 par le Conseil d’Etat pour la défense des intérêts collectifs des membres de cette association. Cela suit un Arrêt de 1906 qui admet le Recours en Excès de Pouvoir d’un syndicat des patrons coiffeurs de limoge.
 → Position très audacieuse du REP car à l’époque les syndicats de fonctionnaires étaient interdits. le Conseil d’Etat admet ipso facto la validité du groupement des fonctionnaires. Mais ce n’est pas formellement un syndicat.

B – La consécration des grands principes du Droit de la Fonction Publique.

> L’existence d’un régime juridique spécifique applicable aux agents publics :
 → caractère exorbitant du droit de la Fonction Publique. Consacré par le Conseil d’Etat.

> Le système de la carrière consacré par le Conseil d’État

> Le Principe de la situation statutaire du fonctionnaire.
 → L’agent pu n’est pas lié par un contrat mais est soumis à un statut législatif et règlementaire. Consacré par le Conseil d’Etat en dépit de quelques incertitudes.
 → Arrêt Winkell 1909. le Conseil d’Etat a évoqué la notion de contrat de droit public pour décrire le lien existant entre agents pu et Etat.
→ dans un Arrêt de 1937 Minerre, Conseil d’Etat rejette la thèse contractuelle. Pas de contrat donc. Consécration du principe de la situation statutaire.

> Certains Garanties et droits pour les fonctionnaires par le Conseil d’Etat
 → Droits de la défense lors d’une procédure disciplinaire (CE, Téry 1913). Ca deviendra plus tard un PRINCIPE GÉNÉRAL DU DROIT.

> En bref, rôle prééminent de la Jurisprudence du Conseil d’Etat dans la construction du droit de la Fonction Publique. D’aucuns ont considéré que pendant cette période, la Jurisprudence a élaboré un statut non écrit des fonctionnaires.

Paragraphe 2 – L’évolution du rôle de la Jurisprudence depuis 1946.

> 1946 est la date à laquelle a été adopté la loi établissant le statut général des agents publics.
> Perte d’influence de la Jurisprudence puisque les textes se font plus nombreux et plus précis. Mais elle conserve quand même une influence particulière.

La Jurisprudence a joué un rôle important dans le rapprochement du droit du travail et du droit de la Fonction Publique :
 → Par le biais des PRINCIPE GÉNÉRAL DU DROIT (valeur législative) qui s’imposent à l’administration dans l’exercice de son pouvoir normatif, mesures individuelles etc.
 → Depuis le début des années 70, certains principes et règles du code du travail ont été rendu applicables au agents pu car reconnus comme étant des PRINCIPE GÉNÉRAL DU DROIT.
> Par ex CE Dame Peynet 1973 qui consacre le Principe d’interdiction de licencier une femme enceinte.
> Arrêt Aragnou 1982 consacre comme PRINCIPE GÉNÉRAL DU DROIT l’obligation d’accorder une rémunération au moins égale au SMIC au agent pu non titulaires.
> Arrêt CCI du Conseil d’Etat 2002 consacre le Principe de l’obligation de reclasser ou de licencier un agent atteint d’une inaptitude physique définitive.

La Jurisprudence conserve un rôle essentiel en droit de la Fonction Publique de manière générale :
 → Depuis un certains nombre d’années, le Conseil d’Etat œuvre dans le sens d’un rapprochement entre la situation des agents contractuels avec les agents statutaires. Forme d’unification.

En droit de la Fonction Publique, le Jurisprudence pertinente n’est plus seulement la Jurisprudence du Conseil d’Etat.
 → CC, CEDH, CEUJ.

Section 2 – La loi et le règlement.

> Vont acquérir une place plus importante, et même majeur parmi les sources du droit de la Fonction Publique. La loi notamment. Cette importance accrue se caractérise par la création du statut général de la Fonction Publique.

Paragraphe 1 – L’élaboration des statuts de la Fonction Publique.

> Il s’agit de l’ensemble des dispositions légales et règlementaires fixant la situation des fonctionnaires en ce qui concerne l’entrée au service, le déroulement de la carrière, les droits & obligations, la discipline et la sortie du service.
 → Sens restreint. Car uniquement légal et règlementaire. Or aussi Jurisprudentiel.

A – L’évolution historique.

Absence de statut général jusqu’en 1946 :

> L’absence de statut général ne signifie pas absence de textes législatif et règlementaire en matière de Fonction Publique. Il existe des textes éparses et ponctuels.

> Ce sont surtout les textes règlementaires qui fixent des règles en matière de Fonction Publique (« Régime des décrets »). La situation des agents de la plupart des ministère était fixé par voie règlementaire (souvent par le ministre lui mm).
 → C’est donc une compétence de principe du pouvoir règlementaire reconnue par le Conseil d’Etat dans un Arrêt Sieur Babin de 1906.

> Législateur intervenu aussi de manière ponctuelle.
 → Lois qui concernent certaines catégories de fonctionnaires (La 1ère datant de 1834 sur l’état des officiers). Loi 1883 et 1919 sur les magistrats.
 → Lois qui concernent certaines questions particulières. Loi 1905 consacre pour tous les agents public le droit à la communication de leurs dossier individuel avant toute sanction ou retardement dans l’avancement.

> 2 inconvénients majeurs : la grande liberté voire le pouvoir arbitraire laissé aux ministres dans la gestion de leur personnel & l’absence d’unité des différentes règles applicables selon les ministères.
 → C’est la Jurisprudence qui a joué ce rôle unificateur.

> Existaient de très fortes oppositions à un statut législatif général. Opposition d’une partie de la classe politique et de la Haute administration attachés au pouvoir hiérarchique.
Cette opposition était également le fait d’un grand nombre d’association de fonctionnaires car craignaient que ce statut ne favorise le maintient d’un système autoritaire. pour eux, le meilleur moyen était l’application du droit commun du travail.

Le statut général de la Fonction Publique de 1946 a 1983 :

> En 1941 a été voté le 1er statut général des fonctionnaires, sous régime de Vichy. N’a jamais été appliqué, et surtout cela a été déclaré inexistant juridiquement par ordonnance de 44 relative au rétablissement de la légalité républicaine.
 → Mais on admet de manière général que ce statut s’inscrit dans la continuité de la Jurisprudence du Conseil d’Etat.
 → Ce statut ce caractérisait par une conception autoritaire de la Fonction Publique. Les personnes juives étaient exclues de la Fonction Publique

> Loi 19 octobre 1946 relative au statut général des fonctionnaires. Sur cette loi que repose aujourd’hui très largement le modèle français de la Fonction Publique.
 → Atténuation du Principe hiérarchique. Consécration du Principe de participation. Reconnaissance explicite du droit syndical. Quelques années plus tard, Conseil d’Etat reconnaitra le droit de grève. Développement des droits et garanties des agents publics.

> En 1959 : réforme du statut de 46 qui ne change rien sur le plan des Principe. Cette réforme a été dictée par la constitution de 58 en terme de répartition des compétences entre loi et règlement.

> De 1983 a 1986, réforme du statut de la Fonction Publique est + significative. Elle ne remet pas en cause les grands Principe de 46 mais réforme la structure de la Fonction Publique.
 → Consiste essentiellement dans l’extension du champ d’application du statut aux agents des coll. Territoriales et aux agents hospitaliers.

Le statut obstacle à la modernisation de la Fonction Publique ?

> L’existence de ce statut n’est pas explicitement remis en cause. Mais depuis le rapport de 2003 du Conseil d’Etat, le statut apparaît désormais à certains comme une difficulté à la réforme nécessaire de la Fonction Publique, rigide & couteux qui rendrait impossible une gestion moderne des relations humaines.
 → Dans le livre blanc de 2008, une profonde simplification de l’organisation statutaire de la Fonction Publique est prônée, à travers la question de la structure de la Fonction Publique en corps d’emplois.

B – Statuts général, statuts particuliers et statuts autonomes.

Le statut général.
> Composé de 4 titres qui correspondent aux 4 lois votés en 83 et 86.
 → Titre 1 (loi 13 juillet 83) portant droits et obligation des fonctionnaires.
 → Titre 2 (Loi 11 janvier 84) relatif à la fonction publique de l’état.
 → Titre 3 (Loi 26 janvier 84) relatif à la Fonction Publique territoriale
 → Titre 4 (Loi 9 janvier 86) relatif à la Fonction Publique hospitalière.
> But était de trouver un équilibre entre l’unification du droit de la Fonction Publique et la nécessaire diversité des spécificités des 3 grandes fonctions publiques.

Les statuts particuliers.
1/ Les statut particuliers ordinaires. C’est le statut général qui prévoit que des décrets devront préciser les modalités d’application du statut général pour chaque corps ou cadre d’emploi.

2/ Les statuts particuliers extraordinaires.
→ Les statuts particuliers extraordinaires dérogatoires dérogent à certaines dispositions du statut général en fonction des besoins propres de certains corps de fonctionnaires ou des missions que leurs membres sont destinés à assurer (Corps de fonctionnaires recrutés par la voie de L’ENA, corps d’enseignant et personnel de la recherche, corps reconnus comme ayant un caractère technique).
→ Les statuts particuliers extraordinaires spéciaux ont pour objet d’interdire ou de limiter le droit de grève à certains agents en raison des nécessité du service public ou de l’ordre public. Ces agents bénéficient en contre partie de certains avantages (Police national, administration pénitentiaire, personnels surveillance navigation aérienne).

 3/ Les statuts autonomes.
> Statuts particuliers ne leurs sont pas applicables. Statut général non plus.
> Les fonctionnaires des assemblées parlementaires sont des fonctionnaires de l’Etat mais ce sont le Sénat et l’Assemblée Nationale qui fixent librement les statuts. En pratique, beaucoup de similitude entre le statut général et le statut autonome de ces fonctionnaires. Chaque assemblé organise ses propres concours de recrutement. Les rémunérations sont beaucoup plus attractives.
> Les magistrats de l’ordre judiciaire ont un statut autonome. Article 64 prévoit que leur statut sera fixé par une loi organique. En l’espèce, ordonnance du 22 décembre 1958 qui consacre le Principe d’inamovibilité.
> Militaires : pas de droit de grève et pas de droit syndical.

Paragraphe 2 – La question de la codification du droit de la Fonction Publique.

> Relance depuis 1989, date à laquelle a été créé une commission supérieure de codification ayant pour mission d’œuvrer à la simplification du droit.
> Code de justice administrative adopté en 2000.
> Concernant plus spécifiquement le droit de la Fonction Publique se complexifie d’année en année. A partir de 2003, est en étude l’élaboration d’un code générale de la Fonction Publique.
 → Loi de 2004 avait autorité le Gouvernement à l’adoption de ce code dans un délais de 18mois. Mais code jamais adopté.
 → Loi 5 juillet 2010 accorde au Gouvernement une nouvelle autorisation d’adoption de ce code dans un délais de 18 mois.

Section 3 – La Constitution et le droit Européen.

Paragraphe 1 – Les normes constitutionnelles relatives à la Fonction Publique.

> Depuis 58 les normes constitutionnelles ont acquis un nouveau statut. La CONSTITUTION est devenu la véritable norme suprême et son non respect peut être sanctionné juridiquement par l’intervention du Conseil Constitutionnel.
 → Constitutionnalisation de l’ensemble des branches du droit. (ac la QPC depuis peu !)

A – Les règles de compétence.

> S’agit des délimitation des Article 34 et 37 de la CONSTITUTION.
> Deux matières réservées au législateur :
 → La loi fixe les règles concernant « les garanties fondamentales accordés aux fonctionnaires civils et militaires de l’Etat ». Cette notion a été délimitée par la Jurisprudence du Conseil COnstitutionnel et du Conseil d’Etat (liberté d’opinion, de grève, liberté syndicale, principe du concours de recrutement, principe du droit à rémunération après service fait).
 → La loi détermine les Principe fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources.

B – Les règles de fond.

> La plupart de ces principes existait déjà avant leur consécration constitutionnelle. Mais avait une valeur infra constitutionnelle (PRINCIPE GÉNÉRAL DU DROIT etc).

1 – Le principe d’égalité.

> Se décompose en plusieurs principes plus précis.
 → Principe d’égal accès aux emplois publics : fondement du principe de recrutement par voie de concours. A donné lieu à une Jurisprudence abondante.
 → Principe de l’égalité des sexes : Arrêt Conseil d’Etat Baudet de 1981, le Règlement Intérieur de Air France interdisait au personnel naviguant féminin de servir en vol au delà de 50ans. Conseil d’Etat a jugé que c’était contraire au principe de l’égalité des sexes.
 → Egalité de traitement dans la carrière : s’applique pour les fonctionnaires d’un même corps. Ce Principe s’oppose à ce que ses agents soient traités différemment dans ts les aspects de leur carrière.

2 – Les autres principes constitutionnels.

> Liberté d’opinion et d’expression, liberté syndicale et droit de grève, droits de la défense & des principes applicables à certaines catégories de fonctionnaires comme le Principe d’indépendance des professeurs d’université (PFRLR).

Paragraphe 2 – Les normes européennes relatives à la fonction publique.

> Certaines lois ont pour objet la transposition du droit européen. Ex loi 26 juillet 2005.
> Ici ce droit englobe le droit de l’Union Européenne et le droit de la CESDH, et la Jurisprudence de la CJUE.

1 – Les principes issus du droit de l’UE.

Principe de libre circulation des travailleurs.
> Article 45 TFUE. Ce Principe doit permettre l’accès non discriminatoire de ts les citoyens de l’Union Européenne aux emplois sur l’ensemble du territoire de l’UE.
 → Implique de supprimer barrières et restrictions adressés aux non nationaux.
Ce Principe n’est pas applicable aux emplois dans l’administration publique.
 → CJCE a développé une conception restrictive de cette notion d’emploi dans l’administration publique.
→ Ce sont essentiellement les emplois « de souveraineté » qui sont concernés par cette restriction. Conception de plus en plus restrictive de cette exception.
Commission Européenne : « Les fonctionnaires sont du pt de vue du droit communautaire, des travailleurs comme les autres »
Cette interprétation du Principe a poussé la France à abandonner certaines restrictions des étrangers membres de l’Union Européenne en ce qui concerne l’accès à la Fonction Publique.

Principe de non discrimination.
> Egalité H/F. Egalité plus extensive que celle développée en droit France.
 → Arrêt Griesmar 2001. CJCE a considéré que le dispositif de bonification pour la femme était contraire au Principe d’égalité des sexes.
> Principe général de non discrimination a été consacré, au delà des discriminations fondées sur le sexe, sur les opinions religieuses, sur l’orientation sexuelle etc.. voir Droit pénal spécial..
 → Directive 2000 transposée par loi 2001 qui intègre au statut général de la Fonction Publique la prohibitions de ces discriminations.
2 – Les garanties procédurales issues du droit de la CESDH.

> Article 6 sur le droit à un procès équitable.
 → Application de cet Article au contentieux de la Fonction Publique par un Arrêt de revirement ‘Pellegrin’, CEDH, 1999, qui considère que désormais le droit à un procès équitable est applicable en matière de contentieux disciplinaire de la Fonction Publique, à l’exception de certaines catégories de fonctionnaires.
 → Arrêt 2007 Eskelinen. Les conditions ont été encore assouplies pour application Article 6.

> Contrôle des lois rétroactives au regard du droit à un procès équitable.
 → Repose sur le Principe de la non rétroactivité sauf cas de motifs impérieux d’intérêt général et que la loi a un caractère prévisible.
> Avis 2005 Provins du CE. Conseil d’Etat a jugé contraire à la CEDH une loi rétroactive en matière de pension de fonctionnaires.