Territorialité et Conflit de loi pénale dans l’espace

Application du droit pénal dans l’espace

Un conflit de loi dans l’espace se pose dès qu’une situation juridique pose un élément « d’extranéité » dans une situation juridique. Soit l’infraction est commise à l’étranger, soit l’auteur est un étranger, soit la victime est un étranger). Cet élément d’extranéité peut justifier l’application de plusieurs droits donc la compétence de juridiction internes ou étrangères.

En droit pénal, il existe un automatisme : dès que la loi pénale française est applicable, cela signifie que la juridiction pénale française est compétente et inversement : principe d’unité.

Le Droit Pénal est d’inspiration étatique, marqué par la souveraineté. En tant qu’attribue monopolistique de l’Etat, il va s’appliquer sur son territoire. Le principe de compétence des juridiction pénales Français est territorialisé. Par exception, une infraction commise à l’étranger peut justifier l’application du

Droit Pénal Français est donc de la compétence des juridiction Françaises.

& 1. La territorialité

Elle explique que les infractions commises ou réputées commises sur le territoire Français entrainent l’application du Droit Pénal Français.

  • A) la notion de territoire

Article 113-1 du Code Pénal : « le territoire de la république inclus les espaces maritimes et aériens qui lui sont liés.

Article 113-2 du Code Pénal : « la Loi Pénale Française est applicable pour les infraction commises à bord des navires qui battent pavillon français ou à l’encontre de tels navires. ID navires de la marine nationale ».

Article 113-4 du Code Pénal : Même extension pour les aéronefs immatriculés en France.

  • B) l’expression de la souveraineté

Dès lors que l’Etat est souverain, il a un espace qui est son territoire et où le Droit Pénal s’applique en tant qu’expression de la souveraineté. Cet État applique sa législation dès lors qu’une infraction est commise sur son territoire, quelque soit la nationalité des contrevenants ou de la victime (article 113-2 du Code Pénal).

Au-delà, une extension est prévue : Article 113-2 al 2 : « l’infraction est réputée commise sur le territoire de la République dès lors qu’un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire ».

La notion de fait constitutif est plus large que celle d’élément constitutif. Il suffit que soit commis sur le territoire de la République un des faits suivants :

  • un des éléments constitutifs de l’infraction, et surtout un élément matériel
  • un acte en l’infraction (Ex : faux papiers faits en France pour escroquerie en Espagne)
  • une simple condition préalable de l’infraction (Ex : l’infraction de recel : ici la condition préalable est que l’objet provienne d’une infraction)
  • une infraction indivisiblement liée (Ex : un vol commis en Espagne et recel en France)

La loi applicable aux actes de complicité

En ce qui concerne les actes de complicité commis à l’étranger d’une infraction principale commise en France, la loi française est applicable au complice. La jurisprudence l’a dégagé dans un arrêt de la Cour de Cassation du 30/04/1908.

La seconde situation est régit par l’article 113-5 du Code Pénal, c’est la situation ou le complice agit en France pour une infraction commise à l’étranger : « pour que Loi Pénale Française soit applicable, il doit s’agir d’un crime ou d’un délit puni d’une peine de prison dans les 2 législations. L’infraction doit avoir été constatée par une décision définitive de la juridiction étrangère ».

L’article prévoit donc 2 conditions :

  • 1- la réciprocité d’incrimination,
  • 2- la constatation de l’infraction principale par une décision définitive de la juridiction étrangère.

& 2. Les infractions commises à l’étranger

Il s’agit uniquement de compétence par exception. Dès lors qu’on parle des infractions commises à l’étranger, ce qui justifie la compétence française n’est pas la territorialité. En la matière, il existe 4 notions permettant de retenir l’application du Droit Pénal Français lorsque l’infraction est commise à l’étranger :

  • la personnalité,
  • la réalité,
  • l’universalité,
  • la subsidiarité.

A) la personnalité

Permet de raccrocher la compétence pénale selon la nationalité des protagonistes de l’infraction.

On distingue entre personnalité active ou passive.

  1. La personnalité active : quand l’auteur qui est français (article 113-6 du Code Pénal)

Pendant longtemps la France refusait d’extrader ses nationaux. La personnalité active a été inventée pour éviter l’impunité. Ainsi, la Loi Pénale Française suit tout Français où qu’il se trouve.

Article 113-6 du Code Pénal : « la loi Pénale Française est applicable à tout crime commis par un français à l’étranger ».

Article 113-6 al 2 Code Pénal : « la loi Pénale Française est applicable aux délits commis par des français à l’étranger si les faits sont punis par la loi du pays ou ils ont été commis ».

Article 113-6 al 3 du Code Pénal ces dispositions (al 1 et al 2) sont applicables même si le prévenu a acquit la nationalité française postérieurement à l’infraction qui lui est reprochée ».

3 observations :

  • la réciprocité d’incrimination n’est exigée qu’en matière délictuelle
  • la personnalité active joue pour ceux qui ne sont pas Français au moment de l’infraction mais qui vont le devenir
  • la personnalité active ne joue pas en matière contraventionnelle

  1. La personnalité passive (113-7 du Code Pénal)

La loi Pénale Française accompagne et protège les français victimes d’infraction à l’étranger.

Les conditions : Article 113-7 du Code Pénal : « la loi Pénale Française est applicable à tous crime ainsi qu’a tout délit puni d’emprisonnement lorsque la victime est de nationalité Française au moment de l’infraction (pas de réciprocité) ».

3 observations :

  • pas de réciprocité en matière délictuelle,
  • cette extension ne fonctionne que si la victime directe est française,
  • plus exigeant car il faut vraiment avoir la nationalité au moment des faits (pour la victime).

  1. Les conditions de forme commune (à la personnalité active et passive) (Articles 113-8 et 113-9 du Code Pénal)

Article 113-8 du Code Pénal : prévoit que pour les délits, la poursuite ne peut être exercée qu’à la requête du ministère public. En outre, l’art ajoute que la poursuite par le ministère public doit être précédée d’une plainte de la victime ou de ses ayants droits ou d’une dénonciation officielle par l’autorité du pays ou le fait a été commis.

Article 113-9 du Code Pénal : « la poursuite en France de ces infractions commises à l’étranger soit par un français (personnalité active) soit contre un français (personnalité passive) ne peut être exercée contre une personne justifiant qu’elle a été jugée définitivement à l’étranger pour les mêmes faits et, s’il y a eu condamnation à l’étranger, que la peine a été subi ou prescrite » : pour les personnalités active et passive, on ne peut pas rejuger en France ce qui l’a été à l’étranger

  1. Le régime dérogatoire : les infractions sexuelles (loi du 17.06.1998)

C’est la loi du 17.06.1998 relative à la répression des infractions sexuelles en matière d’application du Droit Pénal Français dans l’espace et qui concerne aussi certains types d’infraction : viol et agression sexuelles, atteinte sexuelle sur mineur, corruption de mineur, pornographie infantile.

L’objectif de la loi est de faciliter la répression en cas d’impunité à l’étranger du tourisme sexuel.

La condition de réciprocité d’incrimination n’est pas nécessaire. Il n’est pas nécessaire que la victime ait déposé plainte ou que l’Etat étranger ait officiellement dénoncé l’infraction.

En outre, il n’est pas nécessaire que l’auteur soit français ou qu’il le soit devenu par la suite, il suffit juste qu’il réside habituellement sur le territoire français.

B) La réalité (art 113-10 du Code Pénal)

Elle consiste à pouvoir sanctionner une atteinte à des intérêts supérieurs français ou étrangers. Ce principe permet de rendre applicable la Loi Pénale Française même si aucun élément ne permet de rattacher l’infraction au territoire ou à un ressortissant français : la trahison, l’espionnage, le complot, le mouvement insurrectionnel, la levée de la force armée, les atteintes aux secrets de la défense nationale, provocation à s’armer illégalement, la falsification ou contre façon du saut de l’Etat, des pièces de monnaie, des billets ; les infractions commises contre les agents ou les locaux diplomatiques ou consulaires…

C) l’universalité

L’universalité ou compétence universelle est un concept permettant à une juridiction pénale de juger des infractions quelque soit le lieu de commission et la nationalité des délinquants. La seule exigence est que l’individu soit sur le territoire de l’Etat qui veut le juger.

Le régime juridique du principe d’universalité est aux articles 689-1 et suivants du Code de Procédure Pénale.

Les conditions : (article 689-1 du Code de Procédure Pénale)

  • 1- la compétence universelle ne peut résulter que d’une convention internationale,
  • 2- joue que pour les infractions prévues par cette convention internationale,
  • 3- le suspect doit être sur le territoire.

La Cour de Cassation a précisé dans une décision du 21/01/91 : le suspect doit être soit l’auteur, soit le complice.

  • Article 689-2 et suivant du Code de Procédure Pénale: les différentes compétences universelles
  • article 689-2 du Code de Procédure Pénale: convention de NY, 1984, c/ torture, traitements inhumains et dégradants
  • article 689-5 du Code de Procédure Pénale: convention de Rome, 1988, c/ actes de piraterie
  • article 689-6 du Code de Procédure Pénale: convention de LA HAYE, 1970, c/ la capture d’aéronefs
  • article 689-9 du Code de Procédure Pénale : Convention New-York, 1998, c/ les attentats terroristes…

Pour toutes les infraction prévues par les Convention, les Etats signataires sont compétents pour juger les auteurs dès lors qu’ils sont sur le territoire.

D) la subsidiarité

Article 113-8-1 Code Pénal : principe qui permet aux juridictions pénales françaises de juger des individus étrangers que nous aurions refusé d’extrader soit car à l’étranger on prévoit une peine contraire à l’ordre public français, Soit car l’individu aurait été jugé à l’étranger selon une procédure ne respectant pas les garanties fondamentales ou les droits de la défense, soit car l’infraction est une infraction politique.

Les limites : concerne les crimes et délits punis d’au moins 5 ans de prison, tout en sachant qu’ici seul le ministère public peut engager des poursuites et que ces poursuites doivent être précédées d’une dénonciation officielle de l’Etat étranger qui a demandé l’extradition.