Cours de Droit pénal des affaires

 DROIT PÉNAL DES AFFAIRES

  Le droit pénal des affaires est l’ensemble des règles de droit relatives aux infractions caractérisées dans le monde des affaires. La délinquance d’affaire est le fait des commerçants, dirigeants, industriels….) et ses infractions (il peut s’agir d’infractions de droit commun ou spécifiques à la vie des affaires, comme les infractions au droit des sociétés

 

Introduction

Section 1 : l’identification du droit pénal des affaires

Il s’agit de situer le droit pénal des affaires dans la matière juridique, c’est la place du droit pénal des affaires dans le droit criminel qui sera précisé. On ne peut avoir une perception correcte de sa place si on ne sait pas exactement ce que recouvre ce dernier.

  1. I) Présentation du droit criminel.

Les composantes du droit criminel doivent êtres distinguées les unes des autres.

  1. A) Les composantes du droit criminel

On désigne l’ensemble du droit pénal dont l’objet commun est la criminalité, on entend droit criminel au sens large. Le phénomène criminel c’est le fait contraire à l’ordre social qui est prévu et réprimé par la loi. Il y a trois principaux blocs dans le droit criminel. Le droit pénal général, le droit pénal spécial et la procédure pénale. Le droit pénal des affaires c’est du droit pénal spécial.

 

– le droit pénal général : il a pour objet de fixer les règles générales qui sont relatives à l’infraction et notamment aux classifications des infractions, à leurs éléments constitutifs. Le droit pénal général concerne également l’interprétation et l’application de la loi pénale dans le temps, dans l’espace. Le droit pénal général a trait aussi aux conditions de la responsabilité pénale et à la fixation des peines. Le principe de la légalité qui est le principe fondateur du droit pénal en ce sens qu’il fonde l’existence même du droit pénal, ce principe dont on va voir quelles sont ses principales applications signifie qu’en droit pénal c’est la loi qui est la source prédominante. Les règles du droit pénal général on les trouve dans le Livre I du Code pénal. En particulier le droit pénal général c’est le droit qui détermine la classification des infractions selon leurs gravités. Il y en a une qu’il faut avoir à l’esprit, c’est la classification tripartite des infractions. L’article L111-1 du Code pénal énonce que les infractions sont classées suivant leurs gravités en crimes, délits, et contraventions. Le crime, ici, il faut l’entendre au sens strict du terme. Cette distinction ne doit rien au code pénal actuel, le code pénal ancien donnait aussi cette classification dans ce premier article et c’est sur cette classification que repose la répression du droit pénal. Elle est fondée sur la gravité des infractions donc sur la gravité de la peine. Il faut donc se reporter à la peine prévue par le législateur et c’est cette peine qui déterminera la nature de l’infraction. Dès lors les crimes se reconnaissent par les peines suivantes : la réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité, la réclusion criminelle ou la détention criminelle de 30 ans et plus, de 20 ans et plus mais encore de 15 ans et plus. Ces peines criminelles sont édicté es à l’article L131-1 du Code pénal. Les délits sont les infractions sanctionnées de peines correctionnelles, les peines de référence en la matière ce sont l’emprisonnement et l’amende, article L131-3 du Code pénal. En matière correctionnelle l’amende est fixée par le législateur à partir de 3750€. Quant à l’emprisonnement il est d’une durée maximale de 10 ans et les peines d’emprisonnement reposent sur une échelle qui comporte 8 degrés allant de 10 ans à 2 mois et cette échelle est prévue par l’article L131-4 du Code pénal. Un délit peut être assorti de peines d’autres nature, ex : TIG. Une même infraction peut selon les circonstances être constitutive d’un crime ou d’un délit. Ex : le vol est incriminé à l’article L311-1 du Code pénal, dans ce Livre III qui concerne les infractions contre les biens c’est la première qu’envisage le législateur qui nous en donne la définition, le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui. Ainsi définie le vol peut ensuite être d’une gravité extrêmement variable selon les circonstances. Il faut aller voir le texte qui en prévoit la sanction, cette sanction est très variable. En effet le vol simple (sans circonstances aggravantes) est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000€ d’amende, la peine d’emprisonnement accompagnée d’une peine d’amende nous fait comprendre que c’est un délit mais les articles L311-4 à L311-6 du Code pénal prévoient des causes d’aggravation qui font augmenter la peine mais tout en laissant le vol dans la catégorie des délits. Article 311-6 qui punit le vol de 10 ans d’emprisonnement et de 150 000€ d’amende lorsqu’il est précédé ou suivi de violences sur autrui ayant entrainé une ITT de plus de 8 jours. Le vol peut devenir un crime tel est le cas lorsqu’il est accompagné de ce que prévoit les articles L311-7 à L311-10 du Code pénal. L’article L311-10 du Code pénal permet de punir le vol de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’il a été précédé de violences qui ont entrainée la mort ou bien de torture et d’actes de barbarie. Enfin les contraventions, elles sont punies de peines de peines contraventionnelles. L’article L131-12 du Code pénal prévoit que les peines contraventionnelles sont l’amende, qui n’excèdera pas un certain montant prévu par l’article L131-13 du Code pénal. L’amende en matière correctionnelle n’excède pas 3000€, au sein de la catégorie des contraventions le législateur a instauré une gradation. Il y a 5 classes, 131-13 1ère classe 38€ au plus ; 2ème 150€ ; 3ème 450€ ; 4ème 750€ ; 5ème classe de 1500€ au plus ce montant peut être porté à 3000€ en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit.

 

  • la procédure pénale : a pour objet l’étude des règles qui ont trait au procès pénal étant précisé qu’elle englobe mais dépasse le seul procès pénal. Elle recouvre les règles relatives à la recherche des preuves des infractions, qui se déroulent en amont d’un éventuel procès pénal de sorte qu’il y a la procédure pénale alors qu’il n’y a pas encore procès pénal, peut déboucher sur des décisions de classement sans suite, sur des non lieus, on est pourtant dans le cadre de la procédure pénale. Les règles qui sont relatives à l’organisation et à la compétence des juridictions répressives, les règles qui sont relatives à la recherche et à la constatation des infractions ainsi qu’à la poursuite de leurs auteurs, ce qui débouchera sur un jugement du délinquant. Enfin entre dans la procédure pénale si un jugement pénal est rendu les règles relatives à l’autorité du jugement à ses effets de même qu’elle contient les règles qui concernent les voies de recours susceptibles d’êtres exercées.

 

  • le droit pénal spécial : le droit pénal spécial, quel sens donner au terme spécial ? Dans la langue juridique ce qui est spécial peut avoir plusieurs acceptions. On parle parfois de telle ou telle branche du droit qui constitue un droit spécial par rapport à un autre. Exemple droit de la conso avec le droit des contrats. Une branche du droit est spéciale lorsqu’elle apparaît dérogatoire à un certain nombre de règles, de principes qui font figure de droit commun. Il est spécial parce qu’il déroge au droit des obligations, il vient infléchir les principes du droit des obligations. Mais parfois des règles dites de droit spécial sont qualifiées ainsi parce qu’elles viennent s’ajouter et se combiner dans un domaine particulier à des règles générales avec lesquelles elles devront coexister en les complétant, en les prolongeant. Ainsi on parle de droit général des obligations auquel s’ajoutent les règles particulières propre à chaque contrat que règlemente individuellement le Code civil. Il a pour objet les règles qui sont propres à chaque infraction, il détermine les éléments constitutifs de chaque infraction isolément. Le droit pénal a pour objet la généralité, le droit pénal spécial met l’accent sur les spécificités de chaque infraction. Ainsi on sait que le vol comme toute infraction a une structure composée d’un élément matériel et moral, et le droit pénal spécial va préciser en quoi consiste l’élément matériel et en quoi consiste l’élément moral. Ici ce n’est pas un droit commun et dérogatoire mais un droit qui pose les principes et le droit pénal spécial applique pour chaque infraction considérée. Le droit pénal spécial est une matière intéressante car elle fait apparaître quel est le projet de la société quant aux valeurs qu’elle souhaite protéger. C’est une matière vivante, car constamment soumise à deux tendances contradictoires, une tendance à la pénalisation et une tendance à la dépénalisation. Les valeurs que protège une société ne sont pas toujours les mêmes. Certaines infractions existent aujourd’hui qui n’existaient pas autrefois. Le droit pénal spécial est un droit très vivant car au delà de l’énumération sur laquelle il repose on va voir quel est le projet d’une société. Et on verra ainsi que l’existence même du droit pénal des affaires est révélatrice d’une société qui en étant libérale veut insuffler un moralisme dans les relations d’affaires. Le droit pénal spécial en général est un droit qui ne cesse de croître. Le droit pénal spécial est éclaté dans un nombre considérable de lois et de codes, on trouve dans le code pénal une partie du code pénal. On les trouve dans le Livre II à V du Code pénal qui comporte les infractions que le législateur a décrites avec les peines qui s’y rapportent. Le livre II infractions relatives aux personnes, le Livre III infractions relatives aux biens, le livre 4 infractions contre la nation et le Livre V c’est une sorte de livre fourre tout dans lequel ont été inséré de sanctions différentes les unes des autres. Le Livre III a évidemment des liens avec le droit pénal des affaires. Mais le droit pénal spécial est bien au delà de ces livres du Code pénal. Les infractions peuvent êtres prévues dans tous les codes possibles et elles se multiplient ainsi hors du code pénal dans des textes nombreux et divers. Ex : infractions en matière de presse, loi de 1981 avec la diffamation, il y a aussi de très nombreuses infractions qui se trouvent dans des codes, ledélit d’abus de biens sociaux on le trouve dans le Code de commerce mais pas dans le Code pénal. Le délit qui n’existe plus de publicité trompeuse remplacée par pratique commerciale trompeuse, ce délit on le trouve dans le code de la consommation. On peut prendre un autre exemple les infractions relatives aux chèques et aux cartes de paiements elles se trouvent dans le code monétaire et financier. Le droit pénal spécial se trouve éclaté bien au delà du code pénal. Et à mesure que le droit pénal spécial s’étend on observe fatalement une tendance très forte à une spécialisation du droit pénal spécial. Il y a de plus en plus d’infractions spécialisées en ce sens qu’elles sont propres à certains secteurs. On trouve ainsi par exemple de nombreuses infractions dans des domaines aussi variés que le droit du travail, le droit de la santé, le droit de la bioéthique, le droit de la consommation, le droit financier, le droit de la communication. C’est l’inflation législative. Il y a une multiplication d’infractions et qui ne sont pas toujours utiles mais ça rassure. Cet aspect quantitatif peut être considéré comme ayant des effets pervers puisque à créer trop d’infractions le risque est de banaliser la sanction pénale, en effet de façon idéale la sanction pénale doit être dissuasive. Or la multiplication d’infractions très techniques a ses conséquences perverses de dévaluer la sanction pénale en effet, dans la conscience des individus si le droit pénal se multiplie d’une façon immodérée, si tout ou presque devient une infraction pénale alors cela dévalorise l’intervention du droit pénal qui est traditionnellement chargé d’assurer la protection des valeurs les plus importantes dans une société. Or il y a beaucoup de textes qui sont assorti de sanctions pénales, mais ce faisant le législateur brouille les repères puisqu’il ne s’agit plus de protéger des valeurs essentielles mais d’ajouter la sanction pénale à des sanctions civiles pour en renforcer l’efficacité. L’autre effet pervers est qu’à la longue on ne les connaît plus. L’effet pervers c’est de mettre en échec la présomption de connaissance de la loi, elle justifie normalement la condamnation de l’auteur d’une infraction quand bien même celui ci n’aurait pas eu connaissance du texte qu’il a violé. Il peut naitre alors un sentiment d’injustice.

 

  1. B) Le principe de la légalité, principe fondamental du droit criminel.

 

Les termes sont variables on parle aussi de principe de textualité. On parle également de principe de légalité criminelle ou de légalité des délits et des peines. C’est le principe fondamental du droit criminel, il sous tend l’ensemble du droit pénal et donc le droit pénal des affaires même si parfois il prend ses distances.

 

  • Le contenu du principe de la légalité.

 

  • Nulum crimen nula poena sine lege », pas d’infractions pas de peines dans lois. Cela peut donner l’impression que ce principe est cantonné au droit pénal général et spécial, le droit pénal de fond. Et on pourrait croire qu’il ne concerne pas la procédure pénale qu’on appelle le droit pénal de forme. Mais il s’applique à tous les domaines du droit criminel et il va donc produire ses effets. Le principe de la légalité doit être respecté par le législateur mais aussi par le juge.

 

  1. a) Le principe et le législateur.

 

Il s’impose à plusieurs égards, en ce qui concerne les incriminations et les sanctions. Pour les incriminations (description du fait de l’acte, du comportement que le législateur décide d’ériger en infraction, c’est une infraction que si y a une sanction pénale), il implique que ce soit le législateur qui détermine les incriminations, il appartient au législateur d’apprécier la gravité des comportements qui sont anti sociaux, et de les incriminer en en faisant la description dans la loi pénale, description qui sera assortie de la sanction pénale qui permet de déterminer la nature de l’infraction. Et la s élection des comportements incriminés relève de la politique criminelle. Le législateur dans le souci du respect du principe de la légalité ne peut se contenter d’énumérer la liste des actes et comportements incriminés. En matière de vol l’article L311-1 du Code pénal le législateur précise les éléments constitutifs de l’infraction, il précise que le vol est la soustraction de la chose d’autrui et pas seulement la peine et cette définition est possible par le principe de la légalité. En droit pénal des affaires certaines incriminations ne sont pas toujours clairement rédigées ce qui nuit à la sécurité juridique. La constitution de 1958 a opéré de façon générale une modification de la répartition des compétences entre le parlement et le pouvoir règlementaire. Avant 1958 le domaine delà loi avait vocation à être plus important qu’il ne l’est aujourd’hui par rapport au domaine du règlement. En effet avant 58 la répartition des domaines de compétences s’opérait de la façon suivante, principe selon lequel al loi pouvait intervenir dans tous les domaines. Et de l’autre côté les règlements ne pouvaient d’intervenir que dans le respect de la loi. Soit dans des domaines où la loi, n’était pas intervenue, soit afin de permettre l’application des lois. Cette répartition a été chamboulée en 1958. Avec la constitution la loi et le règlement se sont vus attribuer 2 domaines différents clairement déterminés l’un par rapport à l’autre. L’article 34 de la Constitution de 1958 énumère de façon limitative les matières dans lesquelles c’est la loi qui a vocation à s’appliquer. Et tout ce qui n’est pas visé par l’article 34 de la Constitution va relever du domaine règlementaire. Or l’article 34 de la constitution prévoit que l’incrimination ainsi que la sanction des seuls faits constitutifs d’un crime ou d’un délit relèvent de la compétence exclusive du législateur. Donc le pouvoir règlementaire se voit reconnaître ainsi compétence en matière d’incrimination et de sanction contraventionnelle. On observera qu’en droit pénal des affaires il y a donc beaucoup de contraventions. Et des contraventions dont la rédaction laisse parfois à désirer. Le principe de la légalité quant à la sanction pénale, elle impose au législateur de déterminer les sanctions pénales dans leurs natures, leurs taux ou leur durée. Le principe de la légalité implique aussi le principe de la nécessité de la peine, ainsi que celui de sa proportionnalité. Le principe de la nécessité de la peine est contenu dans l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789. Le législateur ne doit incriminer que des faits suffisamment graves. Quant à la proportionnalité elle implique que celle ci ne soit pas excessivement sévère par rapport à la gravité du comportement prohibé. L’idéal c’est que le même texte prévoit la description de l’acte érigeant l’infraction et la sanction qui lui est réservée. Mais ça n’est pas toujours le cas, car le législateur fait un usage immodéré de la technique de la pénalité par référence. Pour fixer une peine afférente à une incrimination déterminée le législateur procède par renvoi à la peine d’une autre incrimination. Le droit pénal de la conso illustre cette tendance.

 

  1. b) Le principe de la légalité et le juge.

 

Se manifeste à divers égards qui font traditionnellement l’objet de développement en droit pénal général. L’interprétation que le juge est amené à faire de la loi pénale. Le juge est dans une nette situation de subordination par rapport à la loi, il doit être le serviteur de la loi, et l’une des conséquences de ce principe est que la loi pénale est d’Interprétation stricte, article L111-4 du Code pénal. L’Interprétation stricte n’est pas pareille que restrictive. La première c’est l’interprétation qui a pour objet de donner à un texte toute sa portée mais rien que sa portée. Restrictive elle réduit sa portée. Autre conséquence qui découle du principe de la légalité en matière d’interprétation de la loi, le juge pénal ne peut sanctionner un comportement qui n’est pas incriminé par la loi (et règlement). Le juge, ne peut donc créer lui même des infractions, ce pouvoir appartient au pouvoir règlementaire, il n’appartient pas au juge. Le juge pénal ne peut raisonner par analogie. Ainsi il est arrivé dans la vie des affaires que l’on se demande si certains comportements indélicats moralement répréhensibles pouvaient êtres pénalement sanctionnés. Et dans deux cas il a été jugé que certains comportements dont l’honnêteté est très discutable ne constituaient pas des comportements dont l’auteur pouvait être sanctionné. Ex : il a été jugé que ne tombait pas sous le coup de la loi pénale la personne qui profite du mauvais fonctionnement d’un distributeur d’essence, parce que ce distributeur va lui donner une quantité supérieure à celle dont elle va en réalité payer le prix. Ce supplément est un comportement qui peut sembler douteux, la Cour de cassation a considéré que ce n’était ni un vol, ni une escroquerie, et qu’il ne pouvait être pénalement sanctionné, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 1er juin 1988, de même si le titulaire d’un carte bancaire l’utilise dans un distributeur auto défectueux et lui donne plus d’argent il a été jugé que cette personne qui conserve l’argent ne commettait aucune infraction son comportement consiste simplement en l’inobservation d’une obligation contractuelle, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 24 novembre 1983. Il faut mentionner que le juge ne peut pas refuser d’appliquer une loi pénale, même s’il estime qu’elle est démodée. C’est ce qu’il s’est passé en matière de chèques sans provision. Dépénalisé par le législateur. Il ne peut pas créer une sanction pénale. Il doit appliquer celles prévues par le législateur. Pour une peine d’une nature donnée, il doit se sentir au quantum prévu. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 19 juin 2007 : vendeur de vin condamné pour usurpation d’Appellation d’Origine Contrôlé (A.O.C.) et tromperie, un an d’emprisonnement et amende. Les juges avaient en outre ordonné l’affichage de la décision. Dans cette affaire, le vendeur avait été condamné à cet affichage pour trois mois. Sévérité a l’égard d’une malhonnêteté avérée. Sauf qu’en matière de tromperie, l’article L216-3 du Code de la consommation prévoit que l’affichage de la décision de tromperie ne peut excéder sept jours. En ce qui concerne l’autre délit dont il avait été jugé coupable, usurpation d’A.O.C., l’article L115-16 du Code de la consommation prévoit que l’affichage de la condamnation ne peut excéder deux mois. Les juges du fond étaient allés trop loin. Application de la loi pénale dans le temps. Principes déterminés par le Code pénal. En droit pénal des affaires, on est dans un droit en effervescence. D’où l’intérêt de connaitre ces principes. L’article L112-1 du Code pénal dispose en son alinéa 1er que seuls sont punissables les faits constitutifs d’une infraction a la date a laquelle ils sont commis. L’alinéa 2 précise que peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables a la même date. Principe de non-rétroactivité de la loi pénale. Conséquence du principe de la légalité. En droit pénal, il a une importance particulière, ce qui lui donne une valeur qu’il n’a pas dans les autres branches juridiques puisque le Conseil constitutionnel estime que ce principe n’a valeur constitutionnelle qu’en matière répressive. Dans les autres matières, le législateur a la faculté d’énoncer des dispositions rétroactives (18 décembre 2001). Ce principe signifie qu’il n’est pas possible de punir une personne sur le fondement d’un texte d’incrimination qui n’existait pas au moment ou elle a commis les faits. En effet, ca serait particulièrement injuste. Le principe ne concerne que les lois pénales sévères. Les lois pénales plus douces sont une exception.

 

2) Justifications du principe de la légalité.

 

Garantie contre l’arbitraire, garant des libertés individuelles. En lisant les textes de nature pénale, il faut que les citoyens puissent comprendre ce qui leur est permis et ce qui ne leur est pas permis. Cette exigence, ce principe fondamental, n’est pas propre au droit pénal français. Il est valable dans beaucoup de démocraties. Il apparait dans la convention européenne des droits de l’homme dont l’article 7 est une expression des libertés individuelles : une infraction doit être clairement définie par la loi. L’article 7 posant l’exigence d’une détermination précise des incriminations, la Cour européenne rappelle avec vigueur cette nécessité au législateur dans sa rédaction des incriminations. Arrêt du 25 mai 1993 de la Cour de Justice des Communautés Européennes : à partir du texte de la loi, le justiciable doit pouvoir savoir quels actes et omissions engagent sa responsabilité. Le législateur ne peut pas tout prévoir, il ne le pourrait pas, d’où l’interprétation nécessaire du juge. Elle doit rester stricte. Parfois il prend ses aises. Le droit pénal des affaires est un des éléments du droit pénal dont on vient de nous faire la description.

 

  1. II) La place du droit pénal des affaires dans le droit criminel.

 

C’est essentiellement un droit spécial appliqué aux affaires. Il n’aurait alors plus de rapports avec le droit pénal général ? Ce serait inexact. Le droit pénal des affaires a des liens très étroits avec le droit pénal général et la procédure pénale générale.

 

  1. A) Un droit pénal spécial appliqué aux affaires.

 

Il y a deux propositions :

 

 

1) Un droit pénal spécial.

 

Le droit pénal des affaires est essentiellement un droit spécial. Les infractions en droit des sociétés, en matières financières ou boursières, bancaires, en droit de la consommation, de la concurrence. Importance de ces règles est devenue telle qu’il est apparu nécessaire de les rassembler dans une matière qui est enseigné à coté du droit pénal spécial.

 

 

L’émergence du droit pénal des affaires comme une matière qui s’enseigne de façon autonome est révélatrice de deux phénomènes abordés hier, ici parfaitement illustrés :

– Extension du champ pénal avec la pénalisation de la société. De plus en plus d’infractions dans le domaine des affaires.

– Spécialisation du droit pénal spécial qui devient de plus en plus spécialisée. Ces infractions présentent la particularité de ne pouvoir être commises que par certaines (catégories de) personnes. Exemple : abus de biens sociaux que par les dirigeants. En tant que droit spécial, le droit pénal des affaires est étudié par le biais d’un certain nombre d’infractions qui le constituent et les sanctions qui lui sont applicables.

 

2) Un droit pénal spécial spécialisé dans le monde des affaires.

 

Qu’est-ce que recouvre ce terme d’« affaires ». Il est loin d’être clair, déterminé une fois pour toutes. C’est un terme dont a l’impression qu’il est limité d’une sorte de flou dont il semble difficile de l’extraire. Pour bien cerner cette notion, il faut procéder par étapes.

 

  1. a) Le domaine des affaires.

 

Une première réflexion s’impose : imprécision du terme. On parle de droit (pénal) des affaires, mais le mot « affaires » n’est pas en soi juridique, déterminé. Il y a autour de ce terme un certain flou, il y a même parfois une connotation péjorative « de drôles d’affaires », ou flatteur « avocat d’affaires ». Bien souvent, le terme reste empreint d’une certaine imprécision. Ca rappelle l’argent et l’envie d’en gagner. Y-a-t-il des différences entre « droit des affaires » et « droit commercial » ? On observe que la qualification de droit commercial est antérieure. Traditionnellement, c’est le droit qui régit les activités de distribution, on pense ici principalement au commerce, ainsi que la plupart des activités industrielles. Mais des auteurs (dont Yves Guyon) font remarquer qu’aujourd’hui, un certain nombre de juristes préfèrent parler de « droit des affaires ». On considère que le droit des affaires est plus large et que le droit commercial en fait ainsi partie. La doctrine commercialiste considère dans son ensemble que le droit des affaires englobe également des questions qui relèvent du droit public, tout ce qui attrait a l’intervention de l’état dans l’économie, mais également le droit fiscal ou bien encore le droit du travail. Certains estiment même que le droit des affaires en vient à se saisir de questions qui relèvent du droit civil, notamment en droit de la consommation. Ce dernier est absorbé par le droit des affaires (il existe un droit pénal de la consommation !). Droit pluridisciplinaire et qui englobant le noyau dur commercial embrasse bien au-delà de lui des branches de droit très différentes. Etude transversale qui ne se cantonne pas au seul droit commercial. Ainsi, le droit des affaires englobe les activités de production, distribution et des services. Importance croissante reconnue au droit des affaires est révélatrice d’un besoin d’éthique/moral nécessaire pour instaurer un minimum de r règles. S’il fallait simplement s’en tenir a la morale de chacun et a la seule loi du marché, il y aurait un certain nombre de comportement immoraux qui resteraient sans sanction. D’où l’intérêt du droit pénal des affaires qui vient encadrer ces comportements. Les sanctions peuvent être civiles mais semblent être dépourvues d’effets dissuasifs. Aujourd’hui on parle d’un droit commercial et d’un droit des affaires, il n’a jamais été question d’un droit pénal commercial ou d’un droit pénal du commerce. Toutefois, les pénalistes se demandent s’il conviendrait de faire une différence entre un droit pénal des affaires et un droit pénal économique. Si on se reporte a quelques ouvrages, la question est posée ou non et la réponse est variable.

 

Parfois distinction rapidement écartée. Notamment par la prof. D’autres cherchent à nuancer. Ils estiment « que le droit des affaires est le droit du capitalisme libéral, en ce sens que ses règles viennent assigner des limites dans le dessein de moraliser les rapports d’affaires ». Le droit pénal des affaires serait composé du droit pénal des sociétés et du droit pénal des entreprises. A coté du droit pénal des affaires, ces auteurs distinguent le droit économique qui prend volontairement figure de l’interventionnisme dirigiste. Il ne s’agit par de moraliser mais de planifier. Ordonnance du 30 juin 1945 en matière de prix et de concurrence dont l’adoption marque pour cette partie de la doctrine la naissance du droit pénal économique. On étudiera le droit des affaires.

 

  1. b) Les infractions relatives aux affaires.

 

Difficulté sur le plan scientifique. L’identification de cette matière répond à une logique pédagogique et éditoriale. Où trouver ces infractions de droit pénal des affaires ? Il n’existe pas de Code pénal de droit des affaires. Il faut rechercher les infractions dans divers codes ou diverses lois non codifiées. C’est une démarche individuelle. Il n’y a pas une liste établie, une liste officielle. La détermination du droit pénal des affaires est l’œuvre de la doctrine. Dans cette œuvre de la doctrine, on constatera que chaque auteur, chaque enseignant a sa propre conception du droit pénal des affaires. Donc les limites du droit des affaires sont variables, mais on peut tout de même faire apparaître des grandes lignes générales qui permettent de dessiner le contour du droit pénal des affaires. Division entre les infractions pénales de droit commun, et les infractions pénales des affaires.

 

– les infractions de droit commun : celles que prévoit le Code pénal et qui peuvent s’appliquer à la vie des affaires sans pour autant être prévues à des fins exclusives de règlementation de la vie des affaires. Ces infractions qui ont une vocation générale sont assez nombreuses.

 

– infractions qui n’ont pas trait au droit des affaires : infractions du Livre II du Code pénal. Ces infractions sont celles contre la personne. Les infractions d’atteinte à la vie, de violence, d’imprudence (homicide par imprudence par exemple), sexuelles, et d’autres relatives à la protection des mineurs, …

– les infractions prévues par les articles L226-16 et suivants du Code pénal en matière de traitement de données et de fichiers informatiques : infractions contre les personnes qui consistent à mettre en mémoire des informations sur celles-ci sans respecter la loi. Ces infractions sont souvent commises dans les entreprises, de sorte qu’il y a un lien avec le droit pénal des affaires.

 

– Le Livre III du Code pénal présente des liens plus étroits avec le droit pénal des affaires puisque concerne les crimes et délits contre les biens. En effet, de nombreuses infractions contre les biens peuvent être commises dans la vie des affaires. Principalement le vol, l’extorsion, le chantage, l’escroquerie, l’abus de confiance, le recel, ou bien encore le blanchiment, ou les infractions de fraude informatique. Sociologiquement il est exact de considérer que ces infractions trouvent un terrain privilégié de commission dans le domaine des affaires.

 

– Le Livre IV du Code pénal présente des liens avec le droit pénal des affaires. Il concerne les crimes commis contre la nation. Certains de ces crimes peuvent être commis dans la vie des affaires. Infraction de faux et d’usage de faux, la corruption, le trafic d’influence, la prise illégale d’intérêts.

– infractions pénales propres à la vie des affaires : on les trouve dans des codes ou lois non codifié es. Un certain nombre se trouve dans le Code de commerce comme l’abus de biens sociaux, les infractions relatives aux comptes sociaux, le délit de banqueroute. D’autres infractions relatives à la vie des affaires se trouvent dans le Code de la consommation, par exemple les délits de fraude (tromperie et falsification), le délit de pratiques commerciales trompeuses (appelé es auparavant le délit de publicités trompeuse), délit de publicité comparatives illicites, le délit de faiblesse ou d’ignorance, les infractions relatives au crédit à la consommation ou au crédit immobilier, ou bien encore le délit de démarchage. Le Code monétaire et financier fait aussi état d’infractions relatives à la vie des affaires comme les délits boursiers, le délit d’exercice illégal de la profession de banquier, les infractions relatives au chèque et à la carte bancaire. D’autres codes encore apportent des infractions comme le Code général des impôts pour les délits en matière de fraude fiscale, ou encore le Code du travail qui contient les infractions à la législation du travail comme le non-respect des règles d’hygiène ou de sécurité. Il peut aussi y avoir une loi non codifiée comme la loi du 21 mai 1936 qui contient l’incrimination de loterie prohibée.

 

Ces infractions relatives à la vie des affaires sont très nombreuses, si on devait toutes les passer en revue dans un cours ce serait impossible, il faut donc abandonner cette technique. Il faut faire une s élection. Traditionnellement l’enseignement du droit pénal spécial a pour objet essentiellement les infractions contenues dans le Code pénal. Le vol, l’escroquerie, l’abus de confiance, le recel sont des infractions qui sont du ressort du cours de droit pénal spécial, et ne seront donc pas étudié es dans ce cours, sauf quelques précisions sur l’abus de confiance. Ce cours de droit pénal des affaires sera consacré aux infractions relatives à la vie des affaires et aux infractions non étudiées en droit pénal spécial.

 

  1. B) Les liens du droit pénal des affaires avec le droit pénal général et la procédure pénale.

 

Le droit pénal des affaires suppose qu’on connaisse bien la structure des infractions, et bien maîtriser les classifications des infractions, en particulier celles qui reposent sur l’élément matériel des infractions. Ainsi, la question du point de départ de la prescription de l’action publique pour une action donnée fait parfois naître certaines difficultés. Quel est le point de la prescription de l’action publique pour l’abus de biens sociaux ? Concernant certaines infractions propres à la vie des affaires, il apparaît que des règles particulières leur sont applicables, et sont prévues par le législateur après le texte d’incrimination.

 

Le droit pénal des affaires est un élément du droit criminel, une partie du droit pénal spécial, et spécial parce qu’applicable à la vie des affaires. Le droit pénal des affaires entretient des liens étroits avec le droit pénal spécial, et s’envisage en relation avec le droit des affaires.

 

Section 2 : la description du droit pénal des affaires

  On exclut ici les infractions de droit commun applicable à la vie des affaires.

 

 

  1. I) Les caractéristiques du droit pénal des affaires.

Le droit pénal des affaires est influencé par son objet. Il présente par rapport aux autres domaines du droit pénal spécial des particularités qui semble inspiré par des caractéristiques de la vie des affaires. Cependant, tous les traits du droit pénal des affaires aujourd’hui n’est pas influencé par la seule vie des affaires. Parce qu’il est une partie intégrante du droit criminel, il va également être influencé par les grandes évolutions du droit pénal dans son ensemble. D’où deux séries de caractéristiques qui révèlent ces influences : il est le reflet de la caractéristique de la vie des affaires, et le reflet des tendances contemporaines du droit pénal.

 

  1. A) Le droit pénal des affaires, reflet des caractéristiques de la vie des affaires.

Certains auteurs de droit commercial ont considéré qu’en parlant de droit des affaires, l’expression permettait d’inclure non seulement le droit des affaires, le droit social ou le droit fiscal, mais aussi le droit pénal. C’est une conception un peu conquérante des commercialistes qui procède ainsi à une intégration du droit pénal dans leur domaine. Le droit pénal des affaires ne peut être réduit à une partie du droit des affaires parce que ce serait nié la logique propre qui est la sienne. Donc le droit pénal des affaires est avant tout un droit pénal, mais influencé par la vie des affaires parce qu’il a des racines doubles : le droit pénal et le droit des affaires. Et donc ce double rattachement va lui donner des particularités qu’on ne retrouve pas dans d’autres branches du droit pénal spécial. C’est une délinquance sans violence, et positivement c’est une délinquance astucieuse, une délinquance « en col blanc ». Certains délits financiers supposent de la part des policiers et des juges une expertise financière très élevée.

 

L’incrimination désigne deux choses :

 

  • L’acte du législateur qui choisit d’ériger en infraction des comportements qui méritent par leur gravité la sanction pénale. C’est une s élection
  • Le résultat de ce choix, de cette politique.

 

Les choix du législateur font transparaitre des caractéristiques qu’il entend sanctionner. Tant sur la nature de l’infraction que sur la forme de celle-ci. Nature particulière en droit pénal des affaires car il s’agit essentiellement de contraventions et de délits. Peu de crimes. Délinquance d’affaire n’est pas jugée suffisamment grave pour créer ici des crimes. Eléments constitutifs différents également : élément injuste relevé par l’absence de justification (typique). Tendance : consistance des éléments matériel et moral :

 

– Elément matériel consiste souvent en une simple omission/abstention et non pas en un acte positif. En 1810, on trouve plus attentatoire à la liberté la sanction d’une omission

Incrimination en 1944 de l’abstention de porter secours à autrui (223-6). Ouverture du droit pénal a ses omissions. Droit pénal des affaires très accueillant des infractions d’omission. En effet, en droit pénal des affaires, les infractions d’omissions n’ont pas de dimension morale : simple sanction d’une obligation non remplie. Pas d’intérêt général ou autre.

 

  • Non formalisme d’un contrat de consommation est une infraction aux articles L311-34 et L311-35 (crédit à la consommation) ainsi qu’aux articles L312-32 du Code de la consommation.

 

  • Droit pénal des affaires renferme des délits d’omission en comptabilité :

 

  • Article L241-4 exige l’établissement de comptes sociaux

 

  • Article L242-10 du code de commerce : défaut de présentation des comptes sociaux à l’Assemblée Générale
  • Elément moral des infractions en droit pénal des affaires présente également une particularité dans ce sens que les infractions en droit pénal des affaires ont un élément moral de faible consistance. Souvent faute d’imprudence. Fautes non intentionnelle.
  • Volonté du législateur de réprimer les pratiques commerciales trompeuses. Evolution :

 

  • Loi du 2 juillet 1963 voulait réprimer la publicité faite de mauvaise foi. Exigence d’intentionavait pour effet de limiter le champ de la répression.

 

  • Loi du 27 décembre 1973 a substitué à l’incrimination de publicité faite de mauvaise foi cellede publicité trompeuse. Infraction indifférente à la mauvaise foi. La jurisprudence avait précisé qu’il s’agissait d’une infraction d’imprudence.

 

Wilfried Jeandidier a écrit :

 

  • l’élément moral des infractions d’affaires ou l’art de la métamorphose dans les mélanges Decocq Litec 2004 (p.369)
  • l’élément matériel des infractions d’affaires ou la prédilection de l’inconsistance de pour Gassin PUAM 2007 (p.245)

 

2emement : l’interprétation de l’infraction par le juge

 

Le juge pénal ne se sent pas toujours concerné par le principe de la stricte interprétation des textes pénaux/loi pénale. Ce principe est plus théorique que réel. Tendances jurisprudentielles d’un éloignement des textes. Le juge pénal n’hésite pas à créer des présomptions de mauvaise foi. Il arrive que le juge pénal en droit pénal des affaires se contente de constater l’élément matériel ou simplement la qualité du prévenu (un professionnel) pour en induire l’élément moral. Présomption de culpabilité bien affirmée par la jurisprudence en ce qui concerne l’infraction de tromperie.

 

Interprétation remarquable en ce qui concerne le point de départ de la prescription de l’action public de certaines infractions notamment l’abus de biens sociaux. Le juge cherche à reculer le point de départ. Pourquoi tant d’éloignement du principe ? Infractions parfois mal rédigé es. Interprétation presque créatrice. Il y a aussi une considération pour la délinquance d’affaires qui cherche dans la mesure du possible à se dissimuler. Souvent difficile à détecter, le juge va essayer de réagir aussi efficacement que possible. L’abus de biens sociaux est une infraction occulte, dissimulé e. D’où la jurisprudence qui cherche à faire reculer le point de départ de la prescription. Présomptions de culpabilité aussi

 

  1. B) Le droit pénal des affaires, reflet contemporain du droit pénal général.

 

Droit pénal des affaires hétérogène car domaines de couverture variés. Droit pénal des affaires = droit pénal de la bourse + droit pénal de la consommation + droit pénal des sociétés.

 

1) Différentes conceptions du droit pénal à l’œuvre dans le droit pénal des affaires.

 

Plusieurs façons de concevoir le rôle du droit pénal dans une société, dans un ordre juridique donné. On peut voir en droit pénal un droit qui fait preuve d’autonomie. Il édicte ses propres normes. Exemple de l’obligation de porter secours a autrui. En droit pénal des affaires on constate un bon nombre d’infractions qui viennent poser un certain nombre de règles qui sont autonome : les règles sur la tromperie pour protéger le consentement. Règles posées par le droit pénal de façon autonome du droit civil et son vice du consentement. Abus de faiblesses, ignorances aussi.

 

Autre rôle du droit pénal aussi : droit pénal cantonné à une fonction de droit purement « sanctionnateur ». En l’occurrence, le droit pénal des affaires vient sanctionner des normes qui ont été posé es par d’autres branches du droit. Permet d’assurer le respect de la règle. D’où le doublage de sanctions civiles par des sanctions pénales. Rang secondaire du DP(A). Fonction d’auxiliaire des autres branches du droit. Prêt de main fort quoi.

Dévalorisation du droit pénal réduit a un rang secondaire. En outre, cette façon de considérer le droit pénal facilite le recours à la sanction pénale. On ne protège plus forcement des valeurs essentielles. On ne sanctionne plus des comportements graves. Cela se traduit par une inapplication.

 

Deux grandes catégories d’infractions :

 

  • Grand nombres de poursuites :

 

  • Abus de biens sociaux

 

  • Tromperie

 

  • Falsification

 

  • Pratiques commerciales trompeuses

 

  • Simples contraventions, règles pas toujours appliquées, peu de poursuites.

 

Incriminations peu nombreuses, jurisprudence peu fournie. Dispositions ignorées. Infractions d’inégale importance. Droit pénal autonome, puis purement sanctionnateur.

 

2) La faiblesse d’incrimination de certains règles du droit pénal des affaires.

 

Les règles d’incrimination ne sont pas exemptes d’un certain nombre de défauts de fond ou de forme. « Le déclin de la loi ». La loi qui porte l’incrimination (au sens large la loi) peut prévoir des défauts formels.

 

  1. a) Défauts formels des incriminations.

 

Principe de la légalité a pour corolaire la précision, la clarté des incriminations. Favorise la sécurité juridique. Or, on constate d’une façon générale en droit pénal, et en particulier en droit pénal des affaires qu’il y a de nombreux défauts formels des textes. On impute cela au fait qu’un bon nombre textes du droit pénal des affaires sont rédigées par les bureaux de l’administration, souvent le ministère des finances. Aussi est utilisée la technique de pénalité par référence : sanction d’un comportement renvoie à la sanction d’un autre comportement dans un autre texte. Par ailleurs le législateur et le pouvoir réglementaire ont trop tendance à incriminer par la forme « le non respect des dispositions prévues à l’article X est sanctionné de X années d’emprisonnement et de X euros d’amendes ». Sauf que le texte de renvoi n’était pas forcé ment rédigé pour sanctionner un comportement. Aussi, les parties législatives renvoient aux parties réglementaires ! C’est une méconnaissance du principe de légalité.

 

  1. b) Défauts de fonds : difficile cohérence entre les incriminations.

 

Il existe des doublons d’incrimination. Le droit pénal spécial contient ainsi parfois des infractions qu’on a l’impression de retrouver à l’identique en droit pénal des affaires. D’où un problème de cohérence avec des incriminations qui ont sensiblement le même objet sans être totalement identique. L’abus d’ignorance ou de faiblesse est ainsi un doublon, en droit pénal spécial le Code pénal incrimine l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse. C’est l’article L223-15 2°) du Code pénal punit cette infraction de 3 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende. Cette infraction du droit pénal spécial coexiste avec une autre infraction d’abus d’ignorance et de faiblesse qui concerne le consommateur, cet abus étant relative aux consommateurs on ne la trouve pas dans le Code pénal mais dans le Code de la consommation des articles L122-8 à L122-10. Ces textes permettent de réprimer dans le domaine de la consommation l’abus de la faiblesse ou de l’ignorance de la personne pour lui faire souscrire des engagements et notamment par des visites à domicile. Il peut y avoir une hésitation sur le fondement à retenir, en présence d’actes constitutifs d’abus de faiblesse et d’ignorance il y a des peines très disparates, d’où l’importance d’une cohérence entre le droit pénal spécial et le droit pénal des affaires. L’idéal de la codification est mis à mal dans cette situation, et l’évolution du droit pénal des affaires pourrait mettre un terme à cette incohérence.

 

  1. II) L’évolution du droit pénal des affaires.

 

Bref rappel de l’historique de cette matière. Quel est son passé ? Quel est son présent ? C’est un passé qui continue à se manifester à l’heure actuelle. Le passé est marqué par une extension ou expansion continue du droit des affaires. L’époque contemporaine pourrait privilégier une certaine dépénalisation du droit pénal des affaires.

 

  1. A) L’expansion constante du droit des affaires.

 

Ce droit pénal s’est forgé par des conquêtes successives. Le XIXe siècle était un siècle très attaché au principe d’égalité, ce qui n’était pas favorable à l’essor d’un droit pénal des affaires, parce que s’attachait une prévention, il concernait certaines personnes, et l’idée d’un droit pénal des affaires semblait contredire l’idéal de l’égalité devant la loi, puisque nous serions dans une spécialisation du droit pénal. Le droit pénal des affaires pourrait engendrer des inégalités dans un domaine répressif !! Pourtant, l’idéal de l’égalité devant la loi a du céder devant des préoccupations concrètes. Dès le XIXe siècle, a commencé à s’imposer l’idée de protéger les personnes qui contractaient avec les professionnels. Le droit pénal des affaires a trouvé ses premiers fondements dans les dispositions du Code de commerce relatives à la faillite et à la banqueroute. Par ailleurs, une loi du 27 mars 1851 est venue préciser et aggraver la répression contre les auteurs de falsification d’aliments et de boissons. L’enjeu était suffisamment important pour une intervention du droit pénal. Au XIXe siècle développement de la législation industrielle destinée à protéger les ouvriers. Ici encore, il s’agissait de les protéger dans leur intégrité physique, assurer leur sécurité, le droit pénal a été évidemment sollicité. Le droit pénal des affaires a continué à se développer dans d’autres directions. Loi du 1er août 1905 considéré comme première loi d’importance en droit de la consommation, elle va incriminer la tromperie qui aujourd’hui est une des infractions principales du droit pénal de la consommation. Il faudra attendre la période de l’entre deux guerre pour voir arriver le droit pénal des sociétés commerciales, et on peut citer les décrets-lois des 8 août et 3 octobre 1935 Après la Seconde Guerre mondiale on voit se développer un dirigisme économique, et dans ce contexte les pouvoirs publics ont jugé utile d’intervenir pour encadrer la concurrence et les relations entre les professionnels et les consommateurs. Certaines infractions créées n’existent plus aujourd’hui comme par exemple la dépénalisation du droit de la concurrence, ou le refus de vente entre professionnels seulement le refus de vente d’un professionnel à un consommateur. A partir des années 1960 on a assisté à l’apparition soutenue de lois dans le domaine de affaires : loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés, loi du 23 décembre 1970 sur les délits boursiers, ou encore la loi du 25 janvier 1985 qui vont contenir plus ou moins un certain nombre d’incriminations. Enfin, à partir des années 1970, en raison de la crise économique de cette époque, se développe le droit de la consommation, droit qui se s épare du droit civil, qui gonfle de plus en plus, deux grandes lois relatives à la règlementation des contrats de consommation loi du 10 janvier 1978 et loi du 13 juillet 1979, et ces lois ont également apporté des sanctions typiques. De nouvelles infractions continuent à voir le jour. Loi du 3 janvier 2008 qui a créé une nouvelle infraction en droit pénal de la consommation qui est l’infraction de la pratique commerciale agressive et par ailleurs c’est cette loi qui a substitué à la qualification de publicité trompeuse celle de pratique commerciale trompeuse. Il faut tenir compte depuis quelques années d’une certaine dépénalisation.

 

  1. B) La dépénalisation contemporaine du droit pénal des affaires.

 

Cette dépénalisation n’équilibre pas encore la pénalisation.

 

 

1) Les étapes de la dépénalisation.

 

Certaines dépénalisations ont eu lieu ces dernières années. Mais si on se tourne vers l’avenir on pourrait croire à une certaine dépénalisation.

 

  1. a) Les dépénalisations acquises.

 

Depuis un peu moins de 25 ans on observe une certaine tendance à la dépénalisation du droit pénal des affaires. Cette tendance était déjà remarquée par la doctrine en 1988. De fait, si on remonte aux années 1980, les dernières années de cette décennie, on constate que plusieurs domaines du droit pénal des affaires ont connu une dépénalisation. Tout d’abord le droit de la concurrence a été modifié par une ordonnance du 1er décembre 1986 qui a marqué un large retrait du droit pénal en matière de pratiques collectives anticoncurrentielles. Il y a eu un large retrait. Par ailleurs, la loi du 25 janvier 1985 sur le redressement judiciaire a supprimé certains cas de banqueroute. Une dépénalisation qui a continué par une loi du 30 décembre 1991 qui a dépénalisé l’émission de chèques sans provision. Les années ont continué ce mouvement comme par la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques qui a commencé une dépénalisation du droit des sociétés en supprimant plus d’une dizaine d’infractions qu’on devait principalement à la loi du 24 juillet 1996. Peu de temps après, les lois de sécurité financière et initiative économique du 1er août 2003, ont été supprimés une quinzaine de délits qui étaient eux aussi prévus par la loi de 1966 et tout récemment, la loi du 4 août 2008 sur la modernisation de l’économie a également continué cette dépénalisation des ventes en soldes effectué es en dehors des dates autorisé es. A ces dépénalisations acquises pourraient s’ajouter dans un avenir plus ou moins proche une autre vague de dépénalisation.

 

  1. b) L’éventuelle dépénalisation à venir.

 

L’année dernière une commission avait été chargée par la Garde de Sceaux de réfléchir à une dépénalisation du droit des affaires et les réflexions de ce groupe de travail ont donné lieu à un rapport intitulé « rapport de la dépénalisation du droit des affaires » qui a été remis à la Garde des Sceaux le 28 février 2008. Pour se fixer sur certains domaines du droit pénal des affaires, ce groupe de travail a écarté le droit pénal du travail et le droit pénal de l’environnement. Il s’est concentré sur le droit pénal des sociétés s. Les principales propositions sont les suivantes :

 

– la première proposition est la réduction du champ pénal des affaires par la suppression de certaines infractions qui méritent d’être abrogé es pour deux raisons principales : infractions tombé es en désuétude, infractions dont l’utilité n’est pas avérée car la valeur qu’elles protègent n’est pas assez importante pour le droit pénal. Il existe par ailleurs des infractions qui méritent d’être dépénalisé es car elles sont redondantes par rapport à d’autres infractions et notamment le rapport envisage cette dualité d’infractions en matière d’abus de faiblesse et d’ignorance, le rapport propose d’harmoniser le droit pénal en cette matière en supprimant l’une des deux incriminations, et la proposition du rapport est de supprimer l’incrimination proposée dans le Code de la consommation, ce choix est justifié par le fait que l’incrimination du Code pénal a un domaine d’application plus large que l’infraction prévue dans le Code de la consommation qui n’a comme champ d’application que les rapports entre les professionnels et les consommateurs. De même, à des fins de cohérence, le rapport Coulon propose la dépénalisation de loteries publicitaires illicites, infraction prévue et réprimée par les articles L21-36 et suivants du Code de la consommation. Pourquoi abroger cette incrimination ? Car le rapport met en évidence que les comportements qu’on peut incriminer pourraient l’être sous d’autres qualifications comme la publicité trompeuse ou l’escroquerie, et il existe une loi du 21 mai 1836 qui érige en infraction les loteries exigeant une contrepartie. L’abus de biens sociaux n’a pas vocation à être dépénalisé.

 

– la deuxième grande proposition est la mise en place de mécanisme de substitution. Dépénalisé ne signifie pas nécessairement qu’on rend licite un comportement, leur dépénalisation serait l’occasion de substituer des sanctions civiles ou administratives : par exemple une infraction du Code de la consommation qui est l’interdiction des ventes avec primes le rapport constate que cette incrimination, qu’on trouve à l’article L121-35 du Code de la consommation, ne donne pas lieu à une condamnation, il suffirait donc simplement de donner une sanction civile qui serait la nullité du contrat ; de même, une autre infraction, la publicité comparative illicite constitue une infraction dans le Code de la consommation, il y a quelques décisions en cette matière de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, le rapport Coulon propose une sanction assurée par une action civile en cessation d’agissement illicite si la publicité ne répondait pas aux obligations de la loi. Dans un autre domaine, un dernier exemple de cette proposition de mise en place de sanctions de substitution, il est proposé de supprimer les infractions du Titre du Livre IV du Code de commerce en matière de concurrence, et y substituer des sanctions administratives que le rapport donnait compétence au Conseil de concurrence pour les prononcer, devenu Autorité de la concurrence chargée d’appliquer les sanctions administratives en cas de violation des règles relatives à la concurrence.

 

– dernière proposition qui concerne la procédure pénale, elle est relative à la prescription de l’action publique, le rapport Coulon propose de modifier les règles de deux façons en posant comme point de départ de la prescription, un point de départ intangible qui serait la date des faits, et il serait question d’allonger les délais de prescription de certaines infractions, et cette proposition concerne en pratique la prescription de l’abus de biens sociaux.

 

2) Les raisons de la dépénalisation.

 

La dépénalisation est un phénomène  global. On l’observe depuis les années 1970 dans le droit pénal de la famille et des personnes, comme la dépénalisation de l’adultère qui constituait un délit jusqu’à la loi du 11 juillet 1975. Au milieu des années 1975 a commencé une dépénalisation progressive de l’avortement. Loi du 4 août 1982 qui a dépénalisé les relations homosexuelles entre un majeur et un mineur de 15 ans consentant. Mais ces deux mouvements ne s’expliquent pas par les mêmes raisons. Pour le droit des personnes et de la famille c’est la libération des mœurs qui explique la dépénalisation. Ce sont donc des raisons qui semblent différentes de celles auxquelles on peut s’attendre dans la dépénalisation du droit des affaires. Ces raisons, on peut les rechercher en regardant les dépénalisations … Dans le domaine du droit pénal des affaires la dépénalisation reflète notamment la volonté de réduire dans un droit pénal qui est trop volumineux, qui a pris trop d’expansion et cela au détriment de la cohérence entre les textes. C’est ainsi qu’une des premières raisons de la dépénalisation est de rétablir cette cohérence en supprimant dans le droit pénal des affaires des infractions très  proches dans le droit pénal commun. Autre justification, par le souci de libéraliser un secteur économique. Il peut paraître opportun de restreindre le champ du droit pénal, ainsi dépénalisation partielle des ventes aux soldes due à la loi du 4 août 2008 parce que cette loi a prévu un nouveau régime juridique des soldes et désormais une partie des soldes peut se dérouler dans une période de deux semaines dont les dates sont choisies par le commerçant. Ces dispositions sont inscrites dans un chapitre « développement du commerce ». Autre justification possible, la dépénalisation de ce domaine peut révéler une inadaptation de la sanction pénale à un comportement qui doit rester illicite mais qui serait plus opportunément sanctionner sur le plan civil ou administratif. Compte tenu du fait qu’il existe beaucoup d’incriminations en droit pénal des affaires, et que certaines ne sont plus appliqué es, elles ne font plus grand peut et donc leur pouvoir de dissuasion est affaibli et la sanction civile peut être plus dissuasive. Par exemple en matière de concurrence où les sanctions administratives peuvent être très lourdes, les amendes peuvent énormes en droit de la concurrence !! La dépénalisation peut aussi révéler l’échec de la sanction pénale. Dans les années 1970-1980, à mesure que la population était dotée de chéquier on a constaté une explosion du nombre de ce qui constituait une infraction qui était l’émission de chèques sans provision, il y avait tellement d’infraction qu’il n’était plus possible de toutes les juger. Donc le législateur a pris en compte cet engorgement, la loi du 30 décembre 1991 a dépénalisé cette infraction, la sanction de l’émission de chèques sans provision est confié aux banques et peut être beaucoup plus durement ressentie.

 

Le droit pénal des affaires est essentiellement un droit pénal spécial. Mais faire du droit pénal des affaires ce n’est en aucune façon se couper de la procédure pénale. Certaines infractions de droit pénal des affaires sont soumises à des dispositions qui leur sont propres. Ces règles ont les soulignera. Le droit pénal des affaires se nourrit aussi du droit pénal général. Les enseignements du droit privé général sont indispensables à connaître. L’étude des règles du droit pénal général font partie intégrante de l’étude des règles du droit privé pénal des affaires. On procèdera à une étude classique du droit pénal des affaires en suivant deux pistes : observer quelques infractions du droit commun, et quelques infractions du droit pénal des affaires, puis l’étude d’un certain nombre d’infractions propres au droit pénal.

 

 

 

 

 

 

Partie préliminaire : règles de responsabilité appliquées au droit pénal des affaires

 

 

 

Ces règles présentent des particularités au droit pénal des affaires. Les règles relatives à la tentative par exemple. Il en va différemment des règles de responsabilité qui doivent faire l’objet d’une étude particulière. Cette particularité peut être d’ordre juridique, la responsabilité pénale du chef d’entreprise présente certaines particularités par rapport à la responsabilité pénale d’un justiciable commun. L’étude de la responsabilité pénale du chef d’entreprise fera l’objet d’un premier chapitre. En droit pénal des affaires, la responsabilité pénale des personnes morales présente une importance particulière, ce qui fera l’objet d’un second chapitre.

 

Chapitre 1 : la responsabilité pénale du chef d’entrepris

 

 

Notion que la loi ne définit pas. Certains auteurs le définisse comme la personne ayant les pouvoirs les plus étendus, de fait ou de droit, et qui les exerce de manière indépendante. On peut y englober le directeur général, le gérant de la S.A.R.L., ou le président du directoire de la S.A. Il est question aussi de l’employeur. La responsabilité pénale du chef d’entreprise est soumise au principe de la responsabilité générale du fait personnel. Mais il faudra très  vite se poser la question de savoir s’il existe des cas de responsabilité pénale du fait d’autrui et qui consisterait donc des exceptions. Cette question de la responsabilité pénale du chef d’entreprise fera l’objet d’une deuxième section. Il faudra, dans une troisième section, préciser qu’il existe un mécanisme propre au droit pénal des affaires qui permet au chef d’entreprise de s’exonérer de sa responsabilité pénale qui est la délégation de pouvoirs.

 

Section 1 : le principe de la responsabilité générale du fait personnel

 

 

Ce principe vaut aussi bien pour les personnes physiques que pour les personnes morales. En effet, le droit civil admet sans difficulté une responsabilité civile du fait d’autrui. En droit pénal, la responsabilité pénale repose sur un fait personnel. Le caractère purement personnel de la responsabilité pénale interdit qu’une condamnation pénale soit prononcée contre une personne qui n’est ni auteur ni complice d’une infraction. Ce principe a été traditionnellement affirmé par la Cour de cassation, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 décembre 1948 dans lequel elle affirme que nul n’est punissable qu’à raison de son fait personnel. Ce qu’affirmait ainsi la jurisprudence est aussi exprimé dans le Code pénal à l’article L121-1 en énonçant que « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait ». Les dispositions de l’article L133-1 du Code pénal dont l’alinéa 1er rappelle que le décès du condamné empêche ou arrête l’exécution de la peine, celle-ci n’est donc pas transmissible à ses héritiers. Comment se fait-il qu’on parle parfois d’une responsabilité pénale du fait d’autrui ?

 

Section 2 : la question de la responsabilité pénale du fait personnel

 

 

Cette responsabilité pénale connaîtrait des limites lorsque le chef d’entreprise serait pénalement responsable du fait d’autrui. Quand on observe la loi ou la jurisprudence, on pourrait croire que notre droit pénal admettrait une responsabilité du fait d’autrui, et dans des cas de plus en plus fréquent. En réalité c’est trompeur. On englobe sous cette même expression de responsabilité pénale du fait d’autrui plusieurs cas.

 

 

Pour essayer de mettre un peu de clarté il faut distinguer deux cas de figures. Il faut distinguer entre la sanction du fait d’autrui et la culpabilité par le fait d’autrui.

 

  1. I) La sanction du fait d’autrui.

 

Il faut d’abord identifier les cas de sanction du fait d’autrui. Ces cas ne constituent pas une responsabilité du fait d’autrui.

 

  1. A) Les cas de sanction pénale du fait d’autrui.

 

Dans certains cas une personne va subir la peine qui frappe une autre personne qui a été condamnée pénalement. Ce mécanisme se rencontre non pas de façon exclusive, mais dans une bonne partie de ses applications dans le domaine des affaires. Cette répercussion de la sanction pénale sur une personne autre que la personne qui a été condamnée soit indirectement soit directement. La peine peut être senti indirectement par un tiers par des sanctions pénales à caractère réelle, ces peines se caractérisent par le fait qu’elles portent sur les choses, par exemple constitue une telle peine la confiscation du fonds de commerce. C’est une peine que prévoit l’article L225-22 du Code pénal et qui pourra consister en la confiscation du fonds ou la fermeture définitive ou provisoire de l’établissement qui a servi à la prostitution. Le propriétaire n’est peut-être pas à l’origine de ces faits, il a simplement loué l’immeuble. La peine peut être directement ressentie, c’est quelquefois une personne autre que le condamné qui va devoir exécuter la peine, et précisément concerne le paiement d’une amende. C’est un mécanisme de retentissement direct sur autrui qui est prévu par quelques textes. Par exemple le Code de la route prévoit que le conducteur est responsable de la conduite de son véhicule, mais toutefois il est prévu que lorsque le conducteur a agi en qualité de préposé le tribunal pourra, compte tenu des circonstances de fait et des conditions de travail de l’intéressé, décider que l’amende du paiement des amendes de police sera en totalité ou en partie à la charge du commettant dès lors qu’il sera cité à l’audience, lesquelles amendes qui auront été dressé es en raison d’une infraction du préposé.

 

  1. B) Analyse : absence de responsabilité du fait d’autrui.

 

A priori, on pourrait se dire que l’employeur qui sera tenu de payer l’amende en raison de l’infraction que son employé a commise. Au delà de ces apparences, il convient de démontrer l’absence de responsabilité du fait d’autrui. L’employeur sera certes condamner à payer l’amende, mais n’est pas condamné à payer comme auteur de l’infraction. Tout au plus, on peut considérer que ce report de l’exécution de la peine sur une personne tierce non coupable, constitue une atteinte de la personnalité de la peine, mais ne remet pas en cause le principe de responsabilité du fait d’autrui. En effet, constitue une responsabilité pesant sur le chef d’entreprise mais qui n’est pas pénale. En effet, le juge ne le reconnaît pas comme coupable lui-même de l’infraction, ni coauteur, ni complice. Aucune responsabilité ne figurera dans son casier judiciaire. Cela explique qu’une peine liée à une infraction commise par une personne dont l’exécution de peine incombera à une autre, qu’il ne s’agisse pas d’un mécanisme propre au droit pénal mais un mécanisme de nature civile : la peine d’amende seule peut se répercuter sur l’employeur mais sa responsabilité n’étant pas engagée. A l’inverse, si l’employé est passible d’une peine d’emprisonnement : seul lui pourra l’exécuter.

 

 

  1. II) Culpabilité du fait d’autrui.

 

 

Cas dans lesquels une personne sera déclarée personnellement responsable d’un acte illicite commis par un tiers. En pratique, ce mécanisme concerne le plus souvent un chef d’entreprise.

 

 

 

  1. A) La responsabilité pénale du chef d’entreprise par le fait de son préposé.

 

Cela concerne souvent le chef d’entreprise mais ça ne le concerne pas exclusivement. Il peut arriver qu’une personne, quelque soit sa qualité, soit déclarée coupable d’une infraction par imprudence par le fait d’autrui. Cette personne déclarée coupable du fait d’imprudence aura elle-même commis un acte d’imprudence, et c’est par cette négligence qu’est la sienne qu’un tiers aura pu commettre l’infraction. Ex : père de famille qui laisserait traîner une arme sans précaution, un de ses enfants s’en empare et blesse ou tue une personne, le père de famille pourra être déclaré coupable du délit de blessures ou d’homicide involontaire, sa négligence permet de retenir sa responsabilité pénale même si le résultat ont été rendu possible par l’intervention d’un tiers, l’enfant. Nous retrouvons ce schéma dans le cadre de l’entreprise et dans ce contexte de l’entreprise la responsabilité pénale qui va être celle du chef d’entreprise va être fonctionnelle, c’est en effet une responsabilité pénale qui s’attache à sa fonction de chef d’entreprise. On constate que sa responsabilité pénale est obtenue de façon quasi-automatique. C’est une responsabilité de plein droit. Ce type de responsabilité pénale est prévu aussi bien par les textes que par la jurisprudence.

 

1) Les textes.

 

Certains textes prévoient cette responsabilité pénale du chef d’entreprise par le fait d’un tiers. Par exemple en matière d’infraction de presse, il existe une responsabilité pénale particulière, qu’on appelle la responsabilité pénale en cascade. Elle concerne les infractions de presse dans le cadre de la presse écrite et de la presse audio-visuelle. Pour la presse écrite, loi relative à la liberté de la presse du 29 juillet 1881 qui prévoit en son article 42 que lorsqu’une infraction de presse est là c’est le directeur de la publication qui en est pénalement responsable en tant qu’auteur principale de l’infraction, et le journaliste qui a écrit l’article qui contient les propos illicites ne sera poursuivi qu’en tant que complice. Le non-respect de la législation sur le travail donne lieu à une responsabilité pénale du dirigeant par des dispositions du Code du travail qui prévoient la responsabilité pénale de l’employeur en cas de violation des règles de santé et de sécurité de l’entreprise. Aussi dans le Code de la sécurité sociale, article R244-4 prévoit qu’est passible de peines l’employeur qui ne s’est pas conformé aux prescriptions de la législation sur la sécurité sociale, alors qu’en pratique l’employeur, si l’entreprise est un peu développé e, n’est pas réellement chargé de cela.

 

2) La jurisprudence.

 

Elle a élaboré un régime de responsabilité pénale du chef de l’entreprise du fait de ses préposés assez audacieux. Depuis le XIXe siècle, la jurisprudence fait peser une telle responsabilité sur le chef d’entreprise. Cela concerne essentiellement les entreprises et professions règlementées. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 décembre 1892 : la Cour de cassation avait d’abord rappelé qu’en principe nul n’est passible de peines qu’à raison de son fait personnel, mais c’était pour ajouter aussitôt une dérogation en disant que la responsabilité pénale peut cependant naître du fait d’autrui dans les cas exceptionnels où certaines obligations lé gales imposent le devoir d’exercer une action directe sur les faits d’un auxiliaire ou d’un préposé, et la Cour de cassation avait précisé ce qu’elle entendait par cette idée générale, elle a déclaré qu’il en était dans les industries ou commerces règlementés où la responsabilité pénale remonte au chef d’entreprise à qui sont personnellement imposées les conditions et le mode d’exploitation de leur industrie ou commerce. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 6 janvier 1938, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 28 février  1956 reprennent cette solution. On trouve quelques variantes de cette formule comme dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 novembre 1950 : il incombait au chef d’entreprise de veiller personnellement à la stricte application par ses subordonnés des prescriptions légales ou règlementaires destinées à assurer la sécurité du personnel. Dans quelle direction cette jurisprudence s’est développée ? Le chef d’entreprise serait responsable de deux séries d’infractions commises par des tiers :

 

– celles commises en méconnaissance des règles pénales applicables à l’activité de l’entreprise du chef d’entreprise : l’expression d’entreprises règlementées trouve ici son sens, cela évoque ces entreprises qui ont une règlementation propre et dont la méconnaissance pourra donner la responsabilité pénale du chef d’entreprise. Ainsi le chef de gare est responsable d’une erreur d’aiguillage (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 26 juillet 1872). De même, l’entreprise de pharmacie, un pharmacien a été pénalement condamné pour infraction à la législation pharmaceutique commise par son préparateur (deux arrêts de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 mai 1893 et du 30 novembre 1944). Aussi le directeur d’une usine qui a vu sa responsabilité retenue du fait d’un délit de pollutions des eaux, et ce délit avait été commis en son absence et il en était pénalement responsable (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 28 février 1956). De même, l’exploitant du débit de boisson est pénalement responsable de l’inobservation des règles du code de débit de boissons même si le fait illicite a été commis par un garçon de café (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 mai 1996). La violation de la règlementation d’une activité n’est pas la seule de nature à retenir la responsabilité pénale du chef d’entreprise

 

– inobservation des dispositions lé gales ou règlementaires qui s’appliquent à l’ensemble des entreprises, principalement les règles relatives à la santé et à la sécurité des employés.

 

  1. B) Analyse de la responsabilité pénale du chef d’entreprise par le fait du préposé.

 

Cette responsabilité pénale du fait d’autrui ne constitue qu’une apparence.

 

 

1) La simple apparence d’une responsabilité pénale du fait d’autrui.

 

La responsabilité pénale du chef d’entreprise du fait d’autrui constitue bien une responsabilité pénale avec tout ce qui s’en suit, et notamment la mention de la condamnation sur son casier judiciaire. Mais cette responsabilité pénale est-elle pour autant une responsabilité pénale du fait d’autrui ? Cette responsabilité pénale du chef d’entreprise est bel et bien une responsabilité pénale qui lui est personnelle mais déclenchée par le fait d’un tiers, il a commis une infraction conditionnée par le fait d’un tiers, donc culpabilité personnelle du chef d’entreprise. Pourquoi y -a-t-il cette culpabilité personnelle ? Elle se comprend au regard des pouvoirs qui sont les siens, qu’il tient de sa fonction. On pourrait être tenté de penser à la théorie des risques, responsabilité pour risque. Le chef d’entreprise accepterait les risques attachés à sa fonction.

 

 

 

2) Les conditions de la responsabilité pénale du chef d’entreprise pour les infractions commises par le préposé.

 

Dans ces cas de responsabilité pénale, le chef d’entreprise est tenu d’assurer le respect des règles issues de la loi ou des règlements, et des règles applicables à son entreprise ou son industrie. Le chef d’entreprise est donc coupable d’une faute personnelle de négligence que révèle la violation de ces règles, et la jurisprudence considère qu’elle est présumée du seul fait qu’une infraction a été commise par l’employeur. Et si une faute, une négligence a été commise dans l’observation de ces règles, c’est qu’il n’a pas pris assez de mesures pour qu’elles soient respectées. Trois conditions :

 

– une responsabilité pénale qui s’inscrit dans le cadre d’une entreprise ou d’une profession règlementée (domaine de prédilection de la responsabilité pénale) : jurisprudence constante (ex : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 2 mars 38) : le chef d’entreprise est tenu d’assurer, dans l’exploitation de son entreprise, l’observation de la réglementation imposée dans un intérêt public. La jurisprudence en fait une Interprétation large : dans les faits concerne :

 

  • quasiment toute entreprise.

 

  • les entreprises auxquelles sont applicables une responsabilité spéciale (cf. : règles présidant à l’élaboration de produits pharmaceutiques, Code des débits de boisson).

 

  • les entreprises relevant d’une règlementation générale.

 

  • toute règlementation.

 

  • toute la législation sur le droit du travail : hygiène, sécurité, sécurité sociale.

 

  • suppose qu’une infraction a été commise par le préposé, l’employé : 2 précisions :

 

  • auteur de l’infraction :

 

  • Le préposé étant lui-même auteur de l’infraction, il sera à ce titre susceptible de poursuites pénales

 

 

– nature de l’infraction : il convient de distinguer selon que infraction intentionnelle ou non.

 

– si condition d’une infraction non intentionnelle : difficulté à retenir la responsabilité du chef d’entreprise (ex : employé oubli de respecter telle ou telle prescription contenue dans une loi ou un règlement)

  • si condition d’une infraction intentionnelle :

 

  • en théorie : il faudrait exclure la responsabilité du CFE

 

puisqu’elle a pour fondement une négligence que le préposé a lui-même commise, et ne sera pas reconnue à l’encontre du chef d’entreprise, de telle sorte qu’on considère qu’il devrait y avoir une distinction de nature entre infraction commises par préposé et celle du chef d’entreprise, aboutissant à exclure celle du chef d’entreprise.

– en pratique : arrêt de la Chambre criminelle du 6 octobre 1955, du 21 novembre 1963 admettent la responsabilité pénale du chef d’entreprise alors même que l’infraction commise par le préposé était non intentionnelle (doctrine : solution audacieuse).

 

 

– une faute doit être imputable au chef d’entreprise : cette exigence montre que le fondement de la responsabilité pénale du chef d’entreprise réside dans une faute personnelle du chef d’entreprise.

  • Origine de la faute : 2 hypothèses selon la taille de l’entreprise :

 

  • entreprise de petite taille : permet au CFE de procéder lui même, personnellement, au contrôle de la législation et de la règlementation applicable à son entreprise. Dès lors, l’infraction commise par l’employé établira celle du CFE, car montrera une défaillance de ce dernier dans la surveillance, négligence, imprudence du respect des règles, faute avéré e.

– entreprise de grande taille : de telle sorte qu’il ne peut procéder à un contrôle personnel. Il lui appartient de prendre les mesures nécessaires au respect de ces règles, et de déléguer à ce titre à une ou plusieurs personnes déterminée (selon les secteurs) chargée de procéder au contrôle à sa place. Le défaut de délégation caractérisera sa faute de négligence imputable au chef d’entreprise s’il apparaît que ma règlementation n’a pas été respectée.

 

  • Preuve par le CFE :

 

  • dans un tel cas, l’employeur dispose de deux moyens de se défendre en établissant qu’il n’a pas commis de faute.

 

– tenter de rapporter la preuve que malgré les apparences, absence de faute car aucun défaut de contrôle (négligence, imprudence) ne peut lui être reproché, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 octobre 1986 : faute du chef d’entreprise non retenue en raison de :

  • sa longue expérience dans l’activité exercée.

 

  • et son comportement dangereux ne pouvait être ni prévu ni empêché par le chef d’entreprise.

 

– procéder à une délégation de pouvoir :

 

 

Section 2 : délégation de pouvoir

 

Régime déterminé par la jurisprudence qui admet que : le chef d’entreprise s’exonère de sa responsabilité pénale en cas de non respect de ses obligations légales ou règlementaires imposé es à son entreprise, en déléguant à l’un de ses subordonné s, la charge de veiller à l’application de ces règles. Ex : délégation à un subordonné la surveillance d’un chantier charge pour ce dernier de vieller à l’application des textes relatifs au secteur dans lequel il se voit confier la mission.

 

  1. I) domaine de la délégation de pouvoir.

 

 

  1. A) Jusqu’en 1993.

 

Domaine de la délégation de pouvoir connaissait exclusion majeure en matière économique, et droit des sociétés. L’imputation de culpabilité au chef d’e/ était traditionnellement prévue par la loi de façon explicite. La jurisprudence estimait alors que les fonctions ainsi concernées devaient être assumées personnellement par le CFE, sans qu’il puisse y avoir de délégation de pouvoir.

 

 

  1. B) 1993 : élargissement par la jurisprudence.

 

5 arrêts de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 11 mars 1993 : sauf si la loi en dispose autrement.

 

  • le CFE qui n’a pas personnellement pris part à la réalisation de l’infraction peut s’exonérer de sa responsabilité pénale.
  • s’il rapporte la preuve qu’il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue de la compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires (*)

Désormais, la délégation de pouvoir consentie par le CFE pourra produire effet dans tous les domaines, sauf ceux où elle est expressément interdite par la loi (revirement).

 

  • Domaines concernés admis par la jurisprudence.

 

  • pratiques commerciale trompeuse

 

  • dé bits de boisson

 

  • contrefaçon

 

  • achats sans facture

 

  • règlementation/ m-o

 

  • règlementation sur la fixation des prix

 

  • obligations fiscales

 

  • arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 19 octobre 1995 : ilsemble qu’elle l’admet implicitement en ??

 

Conclusion : étant donné ce grand champ d’application reconnu par la jurisprudence, il apparaît que la délégation de pouvoir est un mode normal de gestion de l’entreprise.

 

2) Domaines non concernés.

 

Concerne les pouvoirs que la loi réserve exclusivement et explicitement au chef d’entreprises, en nombre limités, énumérés dans l’article L247 du Code de commerce (aller voir).

 

  1. II) Conditions de la délégation de pouvoir.

 

Pour jouer un rôle exonératoire // chef d’entreprise.

 

 

  1. A) Conditions relatives aux personnes.

 

  • personnes en présence :

 

  • délégant : bénéficiaire de la délégation de pouvoir.

 

  • délégataire : reçoit la délégation de pouvoir.

 

 

1) Conditions quant au délégant (CFE).

 

 

  1. a) Participation personnelle à l’infraction.

 

Il ne doit pas avoir lui-même participé personnellement à la commission de l’infraction.

 

a-1) Question de la subdélégation.

 

Qsp/ possibilité d’une subdélégation : le délégataire peut-il devenir à son tour délégant, après la 1e intervenue ?

 

– 1er temps : la jurisprudence réservée à l’égard de ces pratiques : en considérant que la subdélégation était soumise à la condition préalable que le chef d’entreprise ait autorisé son délégataire à devenir lui-même délégant en procédant à la subdélégation

– revirement de 1993 : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 8 février  1993 : autorisation du chef d’entreprise non nécessaire à la validité des subdélégations de pouvoirs, dès lors que ces dernières sont régulièrement consenties et que les subdélégataires sont pourvus de la compétence, de l’autorité et moyens nécessaires à l’accomplissement de leur mission.

 

La subdélégation de pouvoir est soumise aux mêmes conditions que la délégation de pouvoir.

 

 

2) Conditions quant au délégataire.

 

 

  1. a) Personne du délégataire.

 

Le délégataire est un préposé faisant partie de l’entreprise que dirige le CFE qui procède à la délégation de pouvoirs. Le plus souvent, il s’agit d’un cadre.

 

a-1) Membre de l’entreprise.

 

– Exclusion du tiers : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 6 mai 1964 : le chef d’entreprise était poursuivi pour contravention aux règles de mise en circulation des véhicules appartenant à l’entreprise qu’il dirigeait, il avait procédé à une délégation de pouvoir à une société tierce, propriétaire des véhicules en cause, chargée de l’entretien de leurs pneus. Cette délégation de pouvoirs n’est pas valable, ne peut jouer un rôle exonératoire de la responsabilité pénale du chef d’entreprise → exclu un tiers.

– Raison de l’exclusion du tiers : nécessité d’un lien de subordination entre délégant et délégataire. Dès lors qu’il y a délégation de pouvoir, il est donc logique que la personne exerçant sa mission à la place du chef d’entreprise fasse partie de l’entreprise.

 

a-2) Personne désignée précisément.

 

Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 7 juin 2006 : une délégation de pouvoir qui avait été attribuée « de fait aux cadres de l’entreprise » a été jugée non valable car les délégataires n’étaient pas suffisamment désignés.

 

  1. b) Qualités du délégataire.

 

La Chambre criminelle de la Cour de cassation (ex : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 21 février  1968) rappelle régulièrement qu’il doit être doté de la compétence et de l’autorité nécessaire pour veiller efficacement aux mesures édicté es.

 

b-1) Compétence suffisante pour l’application des pouvoirs.

 

 

Ces pouvoirs consistent à veiller au respect de la règlementation, de sorte que les compétences sont doubles : techniques, mais aussi juridique.

 

b-2) Autorité.

 

La Chambre criminelle de la Cour de cassation (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 31 mai 1983) : il n’y a pas de délégation de pouvoir efficiente si le délégataire doit s’en remettre à la direction avant de prendre ses décisions.

 

b-3) Moyens.

 

Il doit avoir les moyens de mener sa mission, de nature variée : passer des commandes, engager des dépenses… C’est pourquoi, la délégation de pouvoir est souvent réalisée à un cadre qui dispose d’une certaine responsabilité, pouvoir d’encadrement. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 19 août 1997 : un délégataire qui bénéficiait d’une délégation de pouvoir en matière de paiement de TVA, mais dépourvu de moyens nécessaires à l’accomplissement de sa mission (car pas la possibilité de signer les chèques payés).

 

b-4) Conséquence pratique tirée par la jurisprudence : délégation de pouvoir à plusieurs personnes.

 

– Principe : la Chambre criminelle : la délégation de pouvoir donnée à plusieurs personnes concurremment n’est pas efficiente, car aucune n’aura l’autorité suffisante pour accomplir la mission qui leur est confiée de façon indivise.

– Cas particulier : notamment arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 novembre 2004 : le CFE ne peut réaliser une délégation de pouvoir à plusieurs personnes pour l’exécution d’un même travail, un tel cumul étant de nature à restreindre l’autorité et à entraver les initiatives de chacun des prétendus délégataires.

 

  1. c) Acceptation par le délégataire.

 

Le délégataire doit avoir accepté la délégation de pouvoir de façon expresse. Ex : la simple réception d’un courrier électronique est insuffisante.

 

  1. B) Les conditions relatives à l’acte de délégation.

 

Dans le fond, la délégation ne peut être générale, c’est-à – dire qu’elle doit conserver une activité, un secteur déterminé. La délégation, par ailleurs, doit être antérieure à la commission de l’infraction, et il a été jugé qu’elle était inopérante si elle avait été réalisée le jour même de l’infraction (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 10 juin 1980). Elle doit aussi avoir été acceptée avant la commission de l’infraction.

Concernant la forme, aucun formalisme particulier, que ce soit pour sa validité ou sa preuve. Il n’est pas nécessaire qu’elle soit écrite ou consignée dans un acte spécifique (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 11 mars 1993). La preuve de la délégation peut être rapportée par tous moyens. Elle doit être certaine, précise, acceptée. Mais un écrit rapportera facilement la preuve. Cet écrit peut être l’organigramme de l’entreprise (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 26 juin 1979).

L’existence et l’efficacité de la délégation sont souverainement appréciées par les juges du fond. Comme il s’agit d’un moyen de défense pour le chef d’entreprise, elle peut être invoquée par la chef d’entreprise jusque devant la cour d’appel, mais ne peut plus le faire devant la Cour de cassation, et il lui appartiendra donc de rapporter tous les éléments de preuve.

 

III) Les effets de la délégation de pouvoir.

 

Son premier effet est d’exonérer la responsabilité pénale du chef d’entreprise. Toutefois, cette exonération ne vaut que dans la mesure où lui-même n’a pas pris personnellement part à la commission de l’infraction (auteur ou complice). S’il a pris part à la commission de l’infraction en auteur, co-auteur ou complice il ne peut s’exonérer en invoquant la délégation de pouvoir (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 mars 1995).

Son deuxième effet est de retenir la responsabilité pénale du délégataire, et ce serait lui (délégataire) et seulement lui qui sera poursuivi. La Cour de cassation a jugé que la responsabilité pénale des infractions poursuivies ne pouvait être cumulativement retenue contre le chef d’entreprise et un préposé en raison de même manquement dès lors que la délégation de pouvoir valable avait pu jouer ses effets (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 mars 2006). C’est une institution extrêmement importante.

 

Chapitre 2 : la responsabilité pénale des personnes morales

 

 

Elle est admise de façon assez récente, depuis la réforme du Code pénal. Si auparavant elle n’était pas admise c’est parce qu’il semblait que le principe de la responsabilité pénale du fait personnel se concilierait mal avec une personne morale. Le Code pénal de 1810 ne s’était pas penché sur cette question, parce qu’à cette époque le rôle des personnes morales était bien moindre dans la société qu’il ne l’est devenu par la suite. Les premiers tiers du XIXe siècle est plutôt par des entreprises individuelles du commerçant, donc personne physique, donc pas de personnes morales. Puis progressivement on a vu le rôle néfaste des personnes morales, d’où la tentation de les mettre en cause pénalement. Il est progressivement apparu nécessaire de pouvoir obtenir la responsabilité pénale des personnes morales. Dans la seconde moitié du XXe siècle, il y a eu la question de l’admission de la responsabilité pénale des personnes morales. Cette évolution est une révolution considérable qui a eu ses adeptes et qui a suscité aussi des réserves. Il faut rappeler les arguments qui sont favorables ou moins favorables à la responsabilité pénale des personnes morales.

 

Section 1 : le débat concernant l’admission de la responsabilité pénale des personnes morales

 

 

Ce débat a précédé l’admission, mais c’est un débat dont il reste aujourd’hui des traces.

 

 

  1. I) La thèse hostile à l’admission de la responsabilité pénale des personnes morales.

 

Il a été soutenu que les personnes morales n’ont pas de volonté ou de discernement et l’élément moral suppose la réunion de ces composantes.

Les sanctions pénales prévues pour les personnes physiques ne sont pas adaptées pour les personnes morales. Si c’est au dirigeant de l’entreprise, c’est contraire à la responsabilité personnelle.

 

Autre argument sur l’esprit du droit pénal et la responsabilité pénale. Certains auteurs ont considéré que le fait de soumettre une personne morale à des sanctions pénales ne prendrait tout le rôle, tous les aspects du droit pénal. Mais le droit pénal est aussi un droit dissuasif, pédagogique, qui, en formulant les interdits, est censé dissuader les personnes de la commission des infractions. Ce n’est pas simplement un droit sanctionnateur, répressif. Ses détracteurs dirent que cette responsabilité ne pouvait jouer qu’avec une volonté, une intelligence de la personne.

 

  1. II) La thèse en faveur de l’admission de la responsabilité pénale des personnes morales.

 

Un argument tiré de la jurisprudence civile qui a tranché le débat entretenu sur le point de savoir si la personne morale était une réalité ou une fiction juridique. Un arrêt de la Chambre civile de la Cour de cassation du 28 janvier 1954 a consacrée la réalité juridique. Dès lors, les auteurs pénalistes favorables invoquaient cet argument de la réalité juridique. Les entreprises commettent de nombreux actes illicites et le meilleur moyen de sanctionner est de retenir la responsabilité pénale de la personne morale avec une amende très élevé e. Au sujet de ces sanctions pénales, les partisans de cette responsabilité pénale, faisaient remarquer que certaines sanctions pénales applicables aux personnes physiques sont applicables aux personnes morales comme l’amende, la fermeture, la confiscation d’un bien qui a permis l’infraction. Des sanctions pénales spécifiques aux personnes morales pouvaient être facilement conçues comme la dissolution qui équivaut à la peine de mort.

 

Argument de droit comparé qui s’appuyait sur le fait que de nombreux pays avait accepté la responsabilité pénale des personnes morales.

Cette admission l’a emportée lors de la réforme du Code pénal. Mais il existait certains cas dans lesquels le législateur avait prévu cette responsabilité pénale. Ordonnance du 30 juin 1945 sur les prix prévoyait la responsabilité pénale de la personne morale pour la concurrence. Article L212-2 du Code pénal énonce ce principe de responsabilité pénale des personnes morales.

 

Section 2 : l’admission en droit positif de la responsabilité pénale des personnes morales

 

 

Si l’alinéa 1er de l’article L121-2 du Code pénal consacre cette responsabilité, son alinéa 3 précise que la responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits. Cette disposition permet une double poursuite contre la personne morale et contre la personne physique qui a commis l’infraction. Certaines juridictions sont favorables à la double poursuite, et d’autres se cantonnent à la poursuite de la personne morale. La doctrine dit que la personne physique ne doit être poursuivie que si elle a pris une part déterminante dans la commission de l’infraction. Circulaire du 13 février 2006 : en cas d’infraction intentionnelle, il est suggéré de poursuivre à la fois la personne morale et la personne physique. En revanche en cas d’infraction non intentionnelle, il est suggéré de poursuivre seulement la personne morale sauf s’il y a une faute sérieuse avérée de la personne physique justifiant qu’elle soit aussi poursuivie. Les sanctions applicables aux personnes morales sont contenues dans une section aux articles L131-37 à L131-49 du Code pénal.

 

  1. I) Le domaine de la responsabilité pénale.

 

 

  1. A) Domaine quant aux personnes morales.

 

Exclut de cette responsabilité pénale les groupements qui n’ont pas la personnalité morale comme la société en participation et la société créée de fait. Ce principe de responsabilité pénale a des limites concernant les personnes morales. Toutes les personnes morales ne peuvent voir leur responsabilité pénale engagée, article L121-2 du Code pénal qui évoque les personnes morales à l’exclusion de l’Etat. En outre, l’article L121-2 alinéa 2 du Code pénal prévoit un statut particulier pour les collectivités territoriales et leur groupement qui ne sont responsables pénalement des infractions commises d’activités susceptibles de faire l’objet de convention de délégation de services publics. Sous réserve de ces limites, toutes les personnes morales peuvent être pénalement responsables, qu’elles soient de droit privé ou de droit public. Pour celles de droit privé, peu importe qu’elles soient à la recherche de profit. Le principe qui concerne la responsabilité pénale du CFE concerne aussi les personnes morales. C’est ce que consacre : l’article L133-1 du Code pénal : « le décès du condamné ou la dissolution de la personne morale empêche ou arrête l’exécution de la peine ». Personnes physiques et personnes morales sont mises sur le même plan, rapproché par la dissolution d’une part et le décès de l’autre. Importantes conséquences en pratique : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 juin 2000 (dans le même sens, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 mai 2003) : une société poursuivie pénalement sera absorbée par une autre avant le jugement. Qui de la société absorbée ou absorbante doit être condamnée ? La société absorbante ne peut voir sa responsabilité pénale engagée à la place de la société absorbée car la responsabilité pénale est personnelle. Or, la société absorbée ayant disparu, plus de responsabilité pénale possible à son égard aucun arrêt ne peut être engagé.

 

 

  • Domaine quant aux infractions.

 

 

  • Limitation de la responsabilité pénale de la personne morale dans certains domaines.

 

 

  1. a) Divergence entre responsabilité pénale de la personne morale et responsabilité pénale de la personne physique.

 

La responsabilité pénale de la personne morale a été consacrée par le Code pénal nouveau que dans une certaine mesure selon les infractions divergences entre responsabilité pénale de la personne morale et responsabilité pénale de la personne physique car toutes les infractions peuvent être commises par une personne physique, qu’elle ait ou non une qualité définie par la loi. En revanche, le législateur avait prévu que les personnes morales engageraient leur responsabilité pénale que dès lors que la loi l’aurait expressément précisé, souligné par l’article L121-2 du Code pénal : « les personnes morales sont pénalement responsables dans les cas prévus par la loi ou le règlement ».

 

 

  1. b) Stabilité du principe de spécialité.

 

Cette exigence d’une prévision expresse était appelée le principe de spécialité : seules certaines infractions étaient susceptibles d’être commises par les personnes morales.

 

Problème 1 : elles étaient en revanche en grand nombre (diff.Codes), à telles point qu’on pouvait se demander, en pratique, si ce principe de spécialité valait encore.

 

Problème 2 : le législateur n’avait cessé d’intervenir à plusieurs reprises, de sorte que le nombre d’infractions commises par les personnes morales ne cessaient de croitre. Cette dernière justification est faible : malgré ces infractions, il demeurait des domaines pour lesquels ni la loi ni le règlement ne prévoyait la responsabilité pénale de la personne morale (notamment en droit pénal des sociétés, droit pénal de la consommation, terrains de prédilections de la responsabilité pénale des personnes morales). Le législateur prévoyait la responsabilité pénale de la personne morale pour viol ou agression sexuelle pour éviter le développement de sectes dirigées par un gourou, usant de dérives sectaires, mais n’avait pas prévu d’infraction dans le droit pénal des affaires (x ?).

 

  • Disparition du principe de spécialité : généralisation.

 

  • loi du 9 mars 2004 (en vigueur le 31 décembre 2005) : adaptation de la justice auxévolutions de la criminalité (dite Perben II) : disparition du principe de spécialité : article L121-2 du Code pénal supprime « dans les cas prévus par la loi ou le règlement ». Généralisation de la responsabilité pénaledes personnes morales : toute infraction pénale peut être commise par une personne morale. Exception : les infractions de presse prévues par la loi du 29 juillet 1881 pour lesquelles le législateur a voulu limiter la responsabilité pénale des personnes morales.
  • interprétations de la loi :

 

  • Doctrine : certains auteurs saluent une évolution satisfaisante car plus grande cohérence, et équitable à l’égard des personnes physiques qui agissent pour le compte de la personne morale, à l’égard de laquelle la loi n’avait pas prévue la responsabilité pénale des personnes morales, seule la responsabilité pénale des personnes physiques pouvait être engagée (désormais, celle de la personne morale aussi). D’autres auteurs sont sceptiques et regrettent une évolution excessive. Il aurait été préférable de la limiter au seul domaine du droit pénal des affaires. Elle est une forme de « pénalisation » de l’activité des personnes morales. Argument : à cette généralisation, répond en outre, une Interprétation large des conditions de la responsabilité pénale des personnes morales.

 

Circulaire du 13 février  2006 : liste des infractions autrefois commises par les personnes physiques pour le compte des personnes morales : infractions/ démarchage illicite, méthodes de commercialisations illicites, en droit du travail relatives à l’hygiène et la sécurité.

 

  1. II) Les conditions de la responsabilité pénale des personnes morales.

 

Article L121-2 du Code pénal : les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises pour leur compte, par leur organes ou représentants.

 

 

  1. Infraction commise par un organe ou représentant de la personne morale.

 

  • Infractions » : toutes les infractions sauf celles prévues par loi de 1881 sur la presse.

 

 

  • Signification de cette condition.

 

 

  1. a) Infraction commise par une personne physique.

 

Cette condition rappelle que la responsabilité pénale de la personne morale suppose qu’une infraction ait été commise par une personne physique, la personne morale, entité abstraite ne pouvant elle même accomplir l’élément matériel de l’infraction (rappelée à plusieurs reprises : arrêts de la Chambre criminelle des 2 décembre 1997 et 7 juillet 1998).

 

  1. Infraction commise par un organe ou un représentant.

 

  • Nécessité d’une identification de la personne physique : la Chambre criminelle a rappelé aux juges du fond à plusieurs reprises (arrêt de la Chambre criminelle du 18 janvier 2000) qu’il fallait établir qu’une infraction pénale avait été commise par un organe ou représentant de lapersonne morale. Permet de penser qu’il est nécessaire d’identifier la personne physique ayant commis l’infraction. C’est ainsi que l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 mai 2006 semblait considérer que l’organe ou le représentant devait être précisé ment identifiée.

 

  • 2 arrêts ont semé le trouble :

 

  • arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 juin

 

2006 : l’infraction n’a pu être commise que par l’organe ou le représentant de la personne morale, de sorte qu’il n’était pas nécessaire d’identifier celui-ci (NB : non publié par la Cour de cassation, laissant à penser qu’elle n’a pas voulu en donner une portée trop importante).

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 26 juin 2007 qui semble confirmer l’arrêt de 2006 : accident du travail, ayant causé des blessures à un préposé. Les juges du fond avaient retenu une imprudence et engagé la responsabilité pénale de la société, sans pour autant identifier l’identité de la personne physique ayant commis la négligence constitutive d’une infraction. Pourvoi rejeté par la Cour de cassation : cette infraction n’a pu être commise que par ses organes ou représentants.

  • Conséquences :

 

  • le Cour de cassation n’exige pas que les juges du fond précisent positivement l’identité des organes ou représentants. Interprétation des juges du fond : compte tenu des faits que l’infraction ait été commise par un organe ou un représentant, la responsabilité était présumée introduit une certaine souplesse dans l’appréciation de la constitution d’une infraction par un organe ou un représentant.

 

– la Cour de cassation n’est pas hostile à la responsabilité pénale de l’organe ou représentant de la personne morale.

 

2) Responsabilité pénale des organes ou représentants de la personne morale.

 

Le législateur, dans l’article LL121-2 du Code pénal, a eu essentiellement le concept du droit des sociétés. Or, les personnes morales existent en dehors de ce domaine, de sorte qu’il est apparu souhaitable de ne pas interpréter les notions de O ou R, en étant pas trop lié au contenu, sens qui peut en être donné en droit des sociétés.

 

  1. a) Organes.

 

En droit des sociétés : l’organe est une personne physique investie du pouvoir de gérer, décider de la vie des sociétés. Se trouvent dans : dirigeant (jurisprudence non hostile à intégrer dirigeants de fait ou de droit), associé, administrateurs du conseil de surveillance ou du directoire.

 

En droit public : un organe dirigeant la commune : le maire, le conseil municipal.

  1. b) Représentants.

 

On peut considérer que cette notion à un intérêt vis-à- vis des :

 

– personnes morales pour lesquelles la loi ne fixe pas précisément le cadre légal de leur organisation : SC, association, GIE. Pour déterminer le règlement, nécessaire de se reporter aux statuts : Ex : dans une association, le représentant peut être le Trésorier ou ?

– personnes morales pour lesquelles les organes de groupements sont défaillants, auquel cas l’organe compétent peut désigner un administrateur provisoire, qui sera le représentant. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 9 novembre 1999 : le titulaire d’une délégation de pouvoir peut engager la responsabilité pénale d’une personne morale, réaffirmé par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 mai 2000 :

– le salarié d’une société titulaire d’une délégation de pouvoir en matière d’hygiène ou de sécurité est une personne morale.

– et pouvait donc à ce titre engager la responsabilité pénale de la personne morale en cas d’atteinte involontaire à la vie ou à l’intérêt public.

– qui trouvait sa cause dans un manquement à une règle d’hygiène et de sécurité qu’in convenait de respecter en vertu de sa délégation de pouvoirs.

 

  1. B) Infraction commise pour le compte de la personne morale.

 

Signification de la condition : elle signifie que l’organe ou le représentant de la personne morale a agi ès qualité, dans l’exercice ou à l’occasion de ses fonctions. Si l’organe ou le représentant a commis une infraction dans son propre intérêt ou dans celui d’un tiers, il est logique que la responsabilité pénale de la personne morale ne puisse être retenue. Positivement, l’organe ou le représentant aura agi pour le compte de la personne morale, lorsqu’il aura agi au profit et dans l’intérêt de celle-ci, notions entendues largement :

 

  • « profit » : de nature variée (non nécessairement pécuniaire) : financier, maté riel, //réputation de la personne morale.
  • arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1998 : le recrutement detravailleurs clandestin par l’organe ou le représentant de la personne morale a été effectué pour le compte de la personne morale qui devait exécuter plusieurs marchés.

 

 

 

Partie 1 :

Infractions de droit commun applicables à la vie des affaires

 

 

Infractions non prévues par le droit pénal des affaires, trois principales sur les atteintes aux biens : vol, escroquerie, abus de biens sociaux.

Infraction entretenant avec la vie des affaires un lien étroit dans le livre IV du Code pénal : infractions contre la nation :

  • infractions de moyens : infractions permettant à leur auteur de bénéficier d’un avantage indu : corruption, trafic d’influence, favoritisme, prise illégale d’intérêt.
  • atteintes au devoir de probité : se caractérisent par le fait qu’elles ne font pas honneur en la confiance que l’Etat a pu donner à certaines personne, une atteinte à la société dans son ensemble est caractérisée

 

Section 1 : la corruption

 

 

Délinquance n’ayant pas de frontière, et même encouragée dans les relations internationales. La France est tenue par des accords au sein de l’Union Européenne. Convention du 26 janvier 95 sur la protection des intérêts financiers des Communautés Européennes. Convention du 26 mai 1997 sur lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés Européennes ou des Etats membres de l’Union Européenne. Convention de l’OCDE du 17 décembre 1997 sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers. Convention du 31 octobre 2003 des Nations Unies contre la corruption. La France a transposé des règles contenues dans ces Conventions par : loi 30 juin 2000 à des fins de lutte contre corruption internationale, loi du 13 novembre 2007 sur la lutte contre la corruption :

 

  • est venu modifier sur certains points ces dispositions, pour meilleure adaptation aux exigences internationales.
  • ajoute une section sur les « atteintes à la justice » ayant pour objet de réprimer les atteintes à l’action de la justice au plan international → réprimer les actions qui se développent à l’égard du personnel judiciaire international.

En matière interne, il existe une pluralité d’incrimination :

 

  • article 439-9 : réprimande la corruption des autorités judiciaires.

 

  • articles 441-8 et suivants : délivrance de faux certificats.

 

Deux infractions de corruption sur la vie des affaires :

 

  • infraction de corruption passive (article 432-11).

 

  • infraction de corruption active (article 432-1).

 

Point commun : le corrompu présente une certaine qualité par la loi : exerce une fonction publique :

 

  • article 432-11 : « exerce une fonction publique ».

 

  • article 432-1 : à l’encontre d’une personne « exerçant une fonction publique ».

 

A coté de ces deux incriminations sur le secteur public, il existe une incrimination dans le secteur privé, autrefois, on parlait d’infractions commises par les salariés d’une entreprise privée, et figuraient dans le Code du travail. Depuis la loi 4 juillet 2005 transposant une décision cadre du Conseil de l’Union Européenne, elle trouve désormais sa place dans les articles 445-1 à 445-4 du Code pénal : prévoit l’infraction de corruption active commise par des personnes n’exerçant pas une activité publique. Elle n’est pas fondamentalement différente de celle commise dans secteur publique. La seule distinction essentielle : la qualité du corrompu.

 

 

Cet éclatement des incriminations dans le secteur pénal témoigne :

 

  • une influence des sources internationales, et du fait que la France, étant tenue par divers engagements internationaux, se doit de les transposer en droit interne (c : loi 2000/2007).
  • un souci croissant de moralisation dans le secteur public, privé, dans la justice, se traduisant par une pénalisation croissante.

A la lecture de ces infractions, on pourrait penser que la nature active ou passive de l’infraction révèle l’élément moral de l’infraction :

  • Infraction de corruption passive : correspond à des abstentions.

 

  • Infraction de corruption active : correspond à des actes positifs.

 

  • révélant la distinction en droit pénal : infraction d’action/d’omission.

 

La distinction est en réalité relative à l’auteur de l’infraction :

 

  • Infraction de corruption passive : commise par la personne corrompue.

 

  • Infraction de corruption active : commise par la personne qui corrompt.

 

C’est ainsi que l’article 432-11-1° incrimine la corruption dans le secteur public : « 1) le fait pour une personne, dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, ou d’un mandat électif public ; 2) de solliciter sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, promesses ,dons, présents et avantages quelconque ; 3) pour elle-même ou pour autrui ; 4) pour accomplir ou s’abstenir d’accomplir, un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou faciliter celui-ci ». Article 433-1 : corruption active est le fait par quiconque, de proposer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres ou promesses dons, présents et avantages quelconques pour elle-même, ou à une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif…..etc..

 

Distinction infraction de corruption passive/infraction de corruption active

 

  • Matérialité différente : les infractions de corruption sont des actes qui, dans la matérialité, revêtent une nature différente :
    • Infraction de corruption passive : le corrompu se rend coupable : aussi bien

 

  • le fait de répondre aux sollicitations de corruption,

 

  • que de proposer, de la part de la personne exerçant une fonction publique, de verser un avantage en échange de sa corruption
  • Infraction de corruption active : se rend coupable

 

  • de répondre au sollicitant émanant de la personne exerçant une fonction publique,

 

  • soit en sollicitant elle-même cette personne à des fins de corruption

 

  • Intérêt de la dualité de l’incrimination : présence de deux infractions autonomes, indépendantes, en ce sens qu’elles répondent à des EC propres

permet de détacher la répression du corrupteur par rapport à celle du corrompu

 

le corrompu/corrupteur pourront être poursuivi de manière indépendante l’une de l’autre : présence de 2 auteurs d’infractions différentes

 

permet de la distinguer de l’infraction de concussion (article 432-10 réprime le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique, ou chargée d’une mission de service public, de recevoir, exiger ou ordonner de percevoir à titre de droits ou contributions impôts ou taxes publiques, une somme qu’elle sait ne pas être due ou excéder ce qui est dû. réprimé de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amendes).

  • Points communs :

 

  • commise dans un contexte général de pouvoir.

 

  • protègent la même valeur sociale : pour objet de dissuader les personnes exerçant une fonction publique, de s’enrichir en faisant un usage abusif des pouvoirs qu’elles détiennent. La personne se rend coupable de l’infraction en utilisant les prérogatives attaché es à sa fonction afin d’en faire un usage détourné. Cette infraction est évoquée dans le Livre IV.
  • Différence :

 

  • la personne exerçant une fonction réclamera une somme excessive ou même totalement indue à une personne qui est sa victime. Illustré par la Chambre criminelle : s’est rendu coupable de concussion, le maire qui imposait à chaque promoteur ou particuliers, le paiement d’une certaine somme d’argent, souhaitant construire un logement nouveau ou sollicitant un permis de construire, les sommes étaient ainsi déposé es sur un compte occulte.
  • Dès lors que la proposition de corruption sera acceptée par celui qui la sollicite, repose sur une dualité de délinquant. Cependant, il se peut que la démarche entreprise par l’un (proposition de corruption), ne reçoit pas l‘agrément de son destinataire. L’infraction sera dès lors commise par celui qui l’aura commise en sollicitant la corruption sans succès. Arrêt de la Cour de cassation du 4 novembre 1948 : l’infraction de corruption passive constitue un délit distinct de celui de l’infraction de corruption active.

 

  • Conséquence pratique : l’infraction de corruption active ne saurait jamais être envisagée sous l’angle d’un acte de complicité de l’infraction de corruption passive : (rappelé par un arrêt de la Chambre criminelle du 30 janvier 1989)

 

Conclusion : bien que Infraction de corruption active/infraction de corruption passive : différentes, points commun essentiel tenant à la qualité du corrompu : personne exerçant une fonction publique. On peut voir en cette qualité une condition préalable, préexistantes à ces infractions,

 

  1. I) Condition préalable commune tenant à la qualité de corrompu.

 

Corrupteur : toute personne peut être corrupteur et se rendre coupable d’une infraction de corruption active (article 433-1 vise « quiconque »)

Corrompu : en revanche, tant pour l’infraction de corruption active/infraction de corruption passive, seules certaines personnes peuvent être corrompues : personnes dépositaires de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investit d’un mandat électif. Le corrompu est soit :

 

  • auteur de l’infraction de corruption passive (article 32-11 « celui qui se rend coupable »..) : celui qui commet l’infraction de corruption passive.
  • celui que le corrupteur, auteur de l’infraction de corruption active, aura voulu corrompre ou aura effectivement corrompu.

 

  1. Personnes dépositaires de l’autorité publique.

 

 

  • représentants de l’Etat : Président, membres du gouvernement, préfets, sous-préfets, ambassadeurs consuls
  • fonctionnaires de l’Etat : membre de l’administration qui exercent quelque soient leur place dans la Hiérarchie, des attributions de puissance publique, dans l’ordre administratif :
    • fonctionnaires de l’administration fiscale.

 

  • fonctionnaires de police/gendarmerie, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 5 février 2001 : commissaire de police délivrait des autorisations tardives de débits de boissonsen contrepartie d’avantages (repas gratuits..) sont des dépositaires de l’autorité publique.

 

  •  

 

  • professeurs : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 1985 : étudiant en droit, ajourné de ses examens glisse un chèque dans la poche de son correcteur pourréévaluation de ses notes : l’enseignant est coupable d’une infraction de corruption passive.

 

  • fonctionnaires de l’administration pénitentiaire.

 

  • magistrats ne sont pas concernés, car infractions particulières leurs sont propres.

 

 

  1. Personnes chargées d’une mission de service public.

 

Doctrine : personne dont il résulte de son statut légal ou réglementaire que, sans disposer de pouvoirs qui lui seraient conférés en vertu d’une délégation de service public, est cependant chargé, à titre permanent ou temporaire, d’exercer une fonction, ou d’accomplir des actes qui ont pour but de satisfaire à un intérêt général, permet de retenir :

  • pré posés et agents de l’administration placés sous le contrôle de la puissance publique :

 

  •  

 

  • chambre de commerce et d’industrie.

 

  • hôpitaux (arrêt de la Chambre criminelle de 2006 : employé d’une morgue est une personne chargée d’une mission de service public).
  • auxiliaires de justice (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1998 : AJ, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2005 : mandataire judiciaire).
  • membres des commissions ayant pour objet de donner des avis à des autorités publiques (A.M.F., C.O.B., arrêt de la Chambre criminelle de 2003 : journalistes engagés par une chaine de TV de service public).

 

  1. Personnes investies d’un mandat électif.

 

  • élus traditionnels :

 

  • membres d’un Conseil général, municipal,

 

  • arrêt de la Chambre criminelle de 1966 : président élu d’une Chambre d’héritiers.

 

  • sont exclus : personnes élus dans le cadre d’un mandat privés (ex : PDG d’une SA).

 

 

  1. Du point de vue international

 

Si le corrompu est un fonctionnaire européen ou membre de la Commission Européenne ou président Européen, ou plus largement, personne dépositaire de l’autorité publique, chargé d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif public, dans un Etat étranger, ou au sein d’une organisation internationale publique application des articles 435-1 et 435-3 sur la corruption internationale

 

 

  1. II) Eléments constitutifs.

 

 

  1. A) Corruption passive.

 

Commise par la personne exerçant une fonction publique. Le corrompu est l’auteur.

 

 

1) Actes prohibés.

 

La personne exerçant une fonction publique :

 

  • solliciter ou agréer sans droit ou à tout moment, directement ou indirectement.

 

  • des offres, promesses, dons, avantages quelconque, pour elle-même ou pour autrui.

 

 

  1. Matérialité des actes (sollicite ou agréer).

 

Ces actes de sollicitation ou d’agrément sont le fait de la personne exerçant une autorité publique, qui sollicitera un avantage ou acceptera l’offre qui lui a été proposée envisagé par le législateur sous deux angles différents.

 

 

a-1) Sollicitation.

 

Il a un rôle actif, en prenant l’initiative de faire une proposition de corruption à un tiers. En relevant la simple sollicitation, le législateur n’a pas besoin d’incriminer la tentative, car correspond en pratique précisé ment à l’infraction de corruption : même si la proposition n’est pas acceptée par le tiers elle pourra néanmoins être réprimée en tant que tentative de délit de corruption. L’infraction est donc constituée indépendamment de l’éventuelle acceptation par le tiers

 

a-2) Agrément.

 

Le corrompu peut se rendre coupable de l’infraction de corruption passive, en acceptant la proposition de corruption émanant d’un tiers. L’infraction sera constituée s’il accepte cette proposition (« qu’elle agrée »), même si par la suite, non suivie d’effet.

 

a-3) Points communs.

 

– accomplissement directe ou indirecte : la sollicitation émanant de la PSP à un tiers et l’agrément donnée par le corrompu à l’égard du tiers peuvent se faire directement (sans intermédiaire) ou indirectement (intervention d’un tiers, faisant part de la proposition du tiers au corrompu ou inversement x).

– absence de résultat matériel : pour que l’infraction soit constituée : la sollicitation d’un tiers dans la proposition de corruption ou de l’offre faite au corrompu suffit : un résultat matériel n’est pas nécessaire il n’est pas nécessaire que le corrompu ait accomplit ou se soit abstenu d’accomplir l’acte. Il s’agit donc d’une infraction formelle, comme l’a rappelé un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 9 novembre 1995 : le délit de corruption est consommé dès la conclusion du pacte entre le corrupteur et le corrompu.

 

 

– acte matériel sans droit : article 432-11 : la sollicitation ou l’agrément doit être faite « sans droit » : laisse entendre que le corrompu cherche à obtenir une rétribution anormale par l’accomplissement d’un acte ou l’abstention dans l’exercice de sa fonction. Mais cette notion est ambigüe : a contrario peut laisser entendre que la PSP serait en droit d’accepter une rémunération pour exercer un acte de sa fonction ou s’abstenir de l’accomplir.

 

– infraction intentionnelle : présence d’une infraction intentionnelle : la somme ou avantage doit être accomplie intentionnellement par le corrompu, étant entendu que souvent peu caractérisée, car l’élément intentionnel est inhérent à la nature des actes incriminés.

 

  •  

 

  • Offre, promesse, dons, présents, ou avantages quelconques, pour le corrompu ou pour autrui ».

 

Cette désignation des avantages sollicités ou acceptés par le corrompu est large :

 

  • biens mobiliers, immobiliers.

 

  • somme d’argent (le plus souvent) :

 

  • liquide (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 17 novembre 1955 et du 3 juin 1997).

 

– chèque ou EC remis au corrompu (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 22 avril 1937).

  • avantage en nature :

 

  • arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 janvier 1988 : montre en or.

 

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 octobre 1995 : appartement.

 

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation d’octobre 1997 : croisière en Méditerranée, assortie du paiement des billets d’avion.

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 6 février 1968 : fournitures de marchandises à un prix très < prix normal.

Difficulté : l’avantage peut-il constituer un avantage extrapatrimonial, ou encore d’ordre sensoriel, moral.

 

Tribunal Des enfants de Sargomine du 11 mai 1967 : questions des relations sexuelles constitutives d’une infraction de corruption : mineur surpris en délit outrage publique à la pudeur par un gendarme qui accepte de s’abstenir de dresser un procès-verbal en échange de relations sexuelles avec le mineur. Le mineur est condamné pour infraction de corruption active.

 

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 octobre 1975 : le prévenu était chef des subdivisions des ponts et chaussés et avait réclamé à l’entreprise le licenciement de l’un de ses salariés, sous peine d’exclusion de tous les marchés de travaux publics dont aurait pâti l’entreprise : le juge du fond refuse la qualification du délit de corruption, la Cour de cassation confirme son analyse : l’assouvissement d’une haine ne constitue pas un avantage entrant dans le champ d’application de la corruption. Remarque : cette jurisprudence a été rendue sous l’empire de la codification ancienne qui ne faisait pas référence à la notion « d’avantage quelconque », introduite par la réforme du Code pénal.

 

Conclusion.

 

Or, il semble que « l’avantage quelconque » puisse désigner avantage aussi bien moral qu’extra-matrimonial En l’absence de jurisprudence déterminante, probante sur ce point, on reste dans l’incertitude

 

  1. a) Moment de la sollicitation ou agrément.

 

 

a-1) Jurisprudence.

 

La jurisprudence a considéré de manière constante que la corruption d’un agent public ne pouvait être constatée que si l’accord entre corrompu/corrupteur était antérieur à l’acte que la corruption a pour objet de rémunérer (positif ou abstention). Dans la logique de cette jurisprudence, il n’y a pas d’infraction de corruption lorsque la personne exerçant une fonction publique réclame un avantage à un tiers mais qui n’est sollicité qu’après que la personne a accomplit ou s’est abstenu de l’accomplir. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 mai 1986 : inspecteur des impôts entré en contact avec un contribuable soumis à un remboursement fiscal, en lui proposant ses services sur la situation délicate, en lui demandant, en contrepartie de ces renseignements, une rémunération de 100 000 francs. A défaut de toute sollicitation du corrompu, antérieure à la réclamation de cet avantage, infraction de corruption non caractérisée puisque le fait de remettre à une personne exerçant une fonction publique un avantage après ce service rendu par celui-ci ne permet pas de caractériser la corruption. Il faut qu’il existe un pacte antérieur à l’acte, qui prévoit un avantage, contrepartie de l’acte.

 

a-2) Critiques relevés.

 

Certains auteurs ont estimé que la distinction délicate entre le pacte antérieur et la contrepartie sous quelque forme que ce soit qui interviendrait ultérieurement est non conforme à la lettre de l’article 432-11 qui se contente de faire état d’une somme ou avantages, et qui ne paraît pas exiger l’existence d’un pacte antérieur.

 

a-3) Loi 30 juin 2000.

 

Modification par le législateur de l’article 432-11 en ajoutant le terme « à tout moment ». Volonté de briser la jurisprudence de la Cour de cassation, en élargissant le champ d’application de l’infraction par rapport à celui dessiné par la Cour de cassation en exigeant un pacte antérieur. En l’état du droit positif : constatation d’un pacte antérieur non nécessaire. Permettrait de condamner un maire qui se rendrait ainsi coupable d’infraction de corruption, un maire qui a délivré un permis de construire, en faisant comprendre qu’il attend un remerciement. Problème : le législateur est intervenu pour opérer une modification d’un texte, sans prendre en compte l’architecture globale de celui-ci : il a peut être ainsi perdu de vue le fait que la lettre du texte indique que la somme ou avantage est antérieur à l’acte positif ou abstention (le fait que l’avantage est réclamé pour …) → indique une chronologie. Doctrine est réservée sur la portée de cet article, et invite même à le remodifier pour un texte plus cohérent

 

  • Finalité des actes.

 

 

  1. Caractéristique de l’entreprise individuelle.

 

L’infraction de corruption passive est une infraction intentionnelle : le corrompu, en sollicitant ou agréant l’avantage du corrupteur, le fait en toute conscience de l’atteinte à son devoir de probité s’attachant à sa fonction.

Dol spécial : Mais on est en présence d’une infraction pour lequel l’élément moral implique dol spécial : l’acte doit avoir été effectué dans un but/résultat recherché, incriminé par la loi, faisant du mobile, un dol spécial.

Relations causales : les actes décris dans le I. doivent répondre à cette finalité la somme ou avantage ont eu lieu pour accomplir ou s’abstenir d’accomplir, un acte de sa fonction, mission ou mandat ou faciliter par sa fonction, sa mission ou son mandat. Il faut donc établir une relation causale entre l’avantage sollicité ou agrée et l’acte positif ou l’abstention de cette personne.

 

 

  1. b) Actes positifs ou d’abstention.

 

Le législateur distingue deux catégories d’actes positif ou abstention en fonction de leur objet :

 

– 1- le fait pour le corrompu d’accomplir ou de s’abstenir d’accomplir, un acte de sa fonction, mission ou mandat : il peut s’agir d’actes contenus dans une attribution expresse de sa fonction, ou qui, plus largement, sont à rattacher avec la déontologie qui doit encadrer l’exercice de sa fonction.

– Actes positifs : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 19 mars 2003 : rédacteur en chef d’une chaine de TV public. L’acte qui lui était reproché consistait dans le fait d’assurer la couverture médiatique et retransmission d’évènements sportifs, contre rémunération, alors que ces prestations devaient être gratuites. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 2 avril 1998 : le fait pour l’inspecteur ppal de la RATP, de confier un chantier à une entreprise de bâtiments-travaux-publics contre rémunération. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2007 : délivrance de permis de conduire contre rémunération.

 

– Abstention : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 15 avril 1932 : le fait pour un greffier de ne pas transmettre au Trésor Public, un jugement portant condamnation à une amende.

2- le fait pour le corrompu d’accomplir, ou s’abstenir d’accomplir un acte facilité par sa fonction, mission ou mandant : permet de condamner le corrompu, alors même que n’entre pas directement des prérogatives/attributions dans le cadre de sa fonction, mission ou mandat, mais facilité par celles-ci. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 28 janvier 1987 : fonctionnaire de police, qui adressait à une officine privée, qui avait pour objet de rechercher des renseignements sollicités par des agents privé s, des documents et renseignements contre rémunération, (non contenue dans ses fonctions) permettant à cette officine de gagner des clients. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 juin 1997 : fonctionnaire, en poste dans une préfecture au service du logement, utilisait ses fonctions pour délivrer un titre de séjour (n’entrant pas dans ses fonctions), contre remise de somme d’argent.

 

  1. B) Corruption active.

 

 

L’infraction de corruption passive est appréhendée par le législateur sous l’angle du corrompu, qui en est l’auteur, alors que l’infraction de corruption active sous l’angle du particulier, jouant le rôle de corrupteur. La différence tient donc à la qualité de son auteur :

  • auteur de l’infraction de corruption passive : PSP

 

  • auteur d’une infraction de corruption active : particulier quelconque (L ?)

 

Il s’agit en réalité d’une même infraction, de sorte que de nombreux points communs/de contact/de symétrie. L’infraction de corruption active est en quelque sorte le pendant/miroir de l’infraction de corruption passive.

Article 433-1 alinéa 1 1°= l

 

  • 1) le fait, par quiconque, de proposer, sans droit à tout moment, directement ou indirectement,

 

  • 2) des offres, promesses, dons, présents ou avantages quelconques,

 

  • 3) à une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un MEP,
  • 4) pour qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir, un acte de sa mission, fonction, mandat, ou facilité par sa mission, fonction ou mandat. complété par l’alinéa 2 : « le fait de céder, dépositaire de l’autorité publique, chargé d’une mission de service public, ou investie d’un MEP, qui sollicite « … »

 

  • Actes prohibés.

 

 

  1. a) Matérialité des actes.

 

Elle est le pendant des actes incriminés d’infraction de corruption passive.

 

 

a-1) Actes incriminés.

 

Est incriminé au titre d’infraction de corruption active, le fait de faire une proposition à une personne exerçant une fonction publique, en contrepartie d’un avantage quelconque si elle prend un acte ou s’abstient de le prendre. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 1985 : étudiant. L’acte de l’étudiant est constitutif d’une infraction de corruption active, caractérisé par la proposition faite à une PSP. Jugement du Tribunal Correctionnel de Paris du 1er juin 1982 : De même, commet un délit de corruption active, la personne qui s’est engagée à verser une somme d’argent pour obtenir un marché d’un office public d’HLM (non publié e).

 

a-2) Caractéristiques.

 

Absence d’acceptation : il n’est pas nécessaire pour que l’infraction de corruption active soit constituée, que la PSP ait acceptée la proposition. L’existence même de la proposition caractérise l’infraction de corruption active (de part est d’autre : comme infraction de corruption passive).

 

Tentative : la seule proposition permet également de caractérisation de l’infraction de corruption active rend inutile l’incrimination de tentative de corruption. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 10 juin 1988 : l’offre d’une somme d’argent à une personne exerçant une fonction publique, constitue non pas une tentative, mais cette simple proposition constituant le délit même de corruption.

 

Acceptation de la proposition de l’article 433-1 alinéa 2 : permet également de réprimer au titre d’infraction de corruption active, la simple acceptation par le particulier de la proposition de corruption faite par une personne exerçant une fonction publique (« céder ») : le corrupteur n’a pas pris l’initiative de la corruption, mais accepte proposition faire par PFP. Arrêt Sargemine de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 11 mai 1967 : le mineur surpris en délit d’outrage public à la pudeur qui accepte la proposition faire par le gendarme constitue l’infraction de corruption active.

 

Infraction formelle, l’infraction de corruption active est donc une infraction formelle : il n’est pas nécessaire à la constitution de l’infraction que la proposition ou l’acceptation de proposition soit suivie d’effet

 

  1. b) Avantage sollicité ou agrée.

 

L’article 432-11 comme l’article 433-1 font références aux mêmes avantages : « offre, promesse, dons ou avantage quelconque » inspirant à la même Interprétation.

Même difficulté / inclusion d’un avantage extrapatrimonial.

 

 

  1. c) Moment de l’avantage sollicité ou agrée.

 

Depuis la loi du 30 juin 2000 : article 433-1 : « la sollicitation ou l’acceptation peut être faite à tout moment ». Les mêmes caractéristiques s’imposent.

 

2) Finalité des actes.

 

La proposition ou acceptation de proposition a pour finalité (comme infraction de corruption passive ) que la personne exerçant une fonction publique, (1) accomplisse ou s’abstienne d’accomplir, un acte de sa fonction, mission ou mandat, ou un (2) acte facilité par sa fonction, mission ou son mandat.

 

  1. a) Acte d’abstention.

 

Arrêt Sargemine de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 11 mai 1967 : s’abstenir de dresser un procès-verbal.

 

  1. b) Acte positif.

 

Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 novembre 1933 : se rend coupable de corruption active, la personne qui paie le conseiller général pour que ce dernier aide une entreprise à obtenir un marché de travaux publics.

 

  • Répression.

 

 

  1.  

 

 

  • Personne physique.

 

Peines principales applicables aux personnes physiques sont identiques, qu’il s’agisse de punir infraction de corruption passive/infraction de corruption active :

– dans le secteur public (articles 432-11 et 433-1) : 10 ans et 150 000 euros.

 

 

– dans le secteur privé (articles 445 – 1 et 445-2) : 5 ans et 75 000 euros.

 

Peuvent s’ajouter les peines complémentaires des articles 432-17 (infraction de corruption active) et 433-22 (infraction de corruption passive) : elles sont identiques infraction de corruption active/Infraction de corruption passive. Deux fois plus élevée pour la corruption dans le secteur public que privé → témoigne de la sévérité que le législateur veut manifester par rapport au secteur public.

 

2) Personne morale.

 

Article 131-38 : règle générale : amende = quintuple de celle encoure par une personne physiques = 750 000 euros.

 

  1. Procédure.

 

 

  • Prescription de l’action publique.

 

 

  1. a) Durée.

 

Ces infractions sont des délits : durée de l’action publique est de 3 ans.

 

 

  1. b) Fixation du point de départ.

 

Dépend de la nature de l’infraction (instantané e/continue). Or, les infractions de corruption active/infraction de corruption passive sont instantanées le point de départ fixé au jour de la proposition car c’est à ce moment qu’est définitivement consommé l’infraction de corruption.

 

Précision de la jurisprudence (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 31 décembre 1972) lorsqu’il y a une perception d’un avantage corrélatif à cette proposition, c’est au jour de cette perception que le point départ sera fixé.

Il se peut que l’infraction implique une pluralité de remises : Chambre criminelle : chaque remise constitue l’expression d’une criminalité globale. Analyse : les délits successifs se sont renouvelés aussi longtemps qu’a existé le concert frauduleux. Dès lors, la prescription ne commencera à courir qu’à compter du dernier versement (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 9 novembre 1995).

 

2) Exercice de l’action civile.

 

La question qui se pose est de savoir si l’action civile qui aurait pour objet la réparation d’une telle infraction de corruption est recevable, en raison de la valeur protégée par l’incrimination.

 

  1. a) En théorie : protection de l’intérêt général.

 

On peut y voir en effet le souci de protéger l’intérêt général (c’est pourquoi, figurent dans Livre IV « Délits c/ la nation ») ce qui aurait pour conséquence d’exclure toute possibilité d’action civile, cette dernière supposant qu’une personne soit victime à titre particulier d’une infraction.

 

  1. b) Prise de position par la jurisprudence.

 

La Chambre criminelle n’a pas repris cette analyse d’incompatibilité entre infraction de corruption/valeur protégé. Elle considère que, si l’infraction de corruption doit s’analyser comme ayant vocation à protéger l’intérêt général, elle ne doit pas exclure la possibilité de protéger un intérêt particulier.

 

Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 1er décembre 1992 : un contribuable avait été sollicité par un fonctionnaire de l’administration fiscale d’une diminution de l’impôt moyennant rémunération. Est recevable la constitution de partie civile du contribuable ainsi sollicité par le corrompu.

 

Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 21 mai 1997 : recevabilité de l’action civile d’une personne morale (office public d’HLM) victime d’une infraction de corruption.

 

Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 8 février  2006 : la ville de Cannes demandait la réparation de son préjudice moral résultant d’une infraction de corruption commise par le maire de la ville. La victime, qu’elle soit personne physique ou personne morale, peut demander réparation de son préjudice résultant de l’infraction de corruption, qu’il s’agisse d’un préjudice maté riel ou même moral.

 

Section 2 : le trafic d’influence

 

 

Parenté avec infraction de corruption d’ordre criminologique : il s’agit d’une délinquance du même genre que celle relevant d’une infraction de corruption, car elle témoigne d’une absence d’intégrité des personnes exerçant une fonction publique. Cet aspect est en corrélation avec la place de cette infraction dans le Code pénal, qui se situe dans les mêmes articles que infraction de corruption active/infraction de corruption passive dans le secteur public. Il existe donc une dualité d’incrimination, supposant de reprendre le caractère actif et passif de l’infraction. Cependant, le législateur ne reprend pas exactement cette distinction mais consacre :

 

Article 432-11 alinéa 1 : trafic d’influence commis par une personne exerçant une fonction publique.

 

Article 433-1-2° : trafic d’influence commis par un particulier, à l’égard d’une personne exerçant une fonction publique.

 

  1. I) Condition préalable.

 

Comme infraction de corruption active/infraction de corruption passive, le trafic d’influence actif/trafic d’influence passif font référence à une « personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif ». Cette personne est :

  • Article 432-11-2° trafic d’influence actif : l’auteur de l’infraction

 

  • Article 433-1 trafic d’influence passif : elle le sera à l’égard de cette personne.

 

 

  1. Eléments constitutifs.

 

 

  1. Actes prohibés.

 

 

  • Trafic d’influence actif.

 

Article 432-11 il s’agit pour cette personne de solliciter ou d’agréer, à tout moment, directement ou indirectement, un avantage pour elle ou pour autrui (cf. infraction de corruption).

 

2) Trafic d’influence passif.

 

Article 433-1 : consiste de la part d’un particulier :

 

– à proposer, à tout moment, un avantage à une personne exerçant une fonction publique, pour elle ou pour autrui.

  • ou bien, de céder à la personne publique qui a cédé à l’avantage/sollicitation précité.

 

 

  1. Finalité des actes.

 

 

  • Trafic d’influence passif.

 

On constate que les actes constitutifs d’une telle infraction tombent sous le coup de la loi pénale. Article 432-11 : lorsque la personne publique aura sollicité ou agrée cet avantage pour abuser de son influence réelle ou supposée, en vue de faire obtenir, d’une autorité ou d’une administration publique, des distinctions, emplois, marchés ou tout autres décisions favorables.

 

2) Trafic d’influence actif.

 

Article 433-1 : réprime la proposition du particulier, ou le fait, pour lui, de céder aux sollicitations de l’agent public, pour que ce dernier abuse de son influence dans les mêmes conditions que le trafic d’influence passif.

 

  1. C) Caractéristiques de la finalité.

 

La finalité est d’exercer un abus d’influence, en vue d’obtenir une faveur trafiqué e

 

 

1) Abus d’influence.

 

 

  1. a) Notion d’abus d’influence.

 

Il s’agit pour la personne incriminée d’exercer un abus d’influence réel ou supposé. L’agent public ne se place pas dans le cadre de sa fonction (différent de la corruption), mais se place en dehors de ses limites. Il joue alors un rôle d’intermédiaire, révélé par le fait qu’il va tenter d’exercer une influence.

Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 1er octobre 1984 :

 

– décrit l’auteur de cette abus d’influence : personne qui est considérée ou se présente comme un intermédiaire, dont l’influence peut permettre l’obtention d’une certaine faveur

– précise que la personne publique use ou abuse du crédit qu’elle possède ou croit posséder, du fait de sa position dans la fonction publique, des relations professionnelles ou personnelles qu’elle a pu nouer en raison de sa position, des liens qu’elle a pu établir avec d’autres fonctionnaires.

 

  1. b) Distinction abus d’influence/infraction de corruption.

 

En pratique, il est difficile de distinguer l’infraction de corruption lorsque la personne publique exerce un acte facilité par sa fonction/trafic d’influence peut conduire à une relative difficulté de qualification par le juge.

 

Illustration :

 

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 6 juin 1989 : directeur régional du service de la garantie. Or, il avait sollicité d’un bijoutier un versement d’une certaine somme d’argent, en lui faisant miroiter qu’il interviendrait en sa faveur afin que des procès-verbaux qui étaient intervenus à son encontre n’aient pas de suites pénales. Or, il n’appartient pas à un directeur régional d’opérer le classement de procès-verbaux, de telle sorte qu’on pouvait se demander s’il s’agissait d’une corruption par un acte facilité par les fonctions ou d’un trafic. Les 1ers juges avaient opté pour la question d’une infraction de corruption : s’il n’avait pas la possibilité de classer les procès-verbaux, il pouvait profiter de ses fonctions pour l’obtenir. La Cour d’appel procède à une requalification : trafic d’influence passif, le directeur régional s’étant placé hors de ses fonctions. La Chambre criminelle approuve la Cour d’appel d’avoir substitué la qualification.

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 7 juin 2000 : interprète en langue turc, inscrite sur la liste des experts d’une Cour d’appel (relevant ainsi de l’article 432-11) avait sollicité des sommes d’argent, pour intervenir auprès des autorités administratives, en vue de pouvoir obtenir la libération de ressortissants turcs maintenus en situation d’attente pour cause de situation irrégulière. Trafic d’influence passif, cet interprète étant sorti de sa fonction en voulant ainsi intervenir et exercer une influence à l’égard de l’autorité administrative.

 

2) Faveur trafiquée.

 

La personne publique qui exerce un trafic d’influence agit, « en abusant de son influence, en vue d’obtenir d’une autorité ou d’une administration publique ….. ».

 

  1. a) Destinataires.

 

Celle auprès de laquelle la personne publique exerce son influence, celle dont la faveur est attendue est une autorité ou administration, qui sont, selon la jurisprudence ancienne, françaises (arrêt de la Cour d’appel de Paris du 15 février 1941 fixe cette jurisprudence).

 

  1. b) Nature de la faveur.

 

Enumérée limitativement : « distinctions, emplois, marché ou tout autre décision favorable » :

 

– « distinctions » : entendues traditionnellement : médaille, récompenses, recommandations.

 

  • « emploi » : Interprété comme désignant :

 

  • les postes intégrés dans la hiérarchie administrative ou

 

  • ceux au sein d’un ensemble placé sous le contrôle de la personne

 

– « marché » : doit s’entendre comme les conventions conclues avec l’autorité publique ou des administrations placées sous le contrôle des administrations ou autorités publiques. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 9 novembre 1995 : le maire de commune, qui était par ailleurs conseiller général avait obtenu d’une entreprise qu’elle mette gratuitement à sa disposition des autocars afin de faire venir des militants d’un partie politique, en s’engageant, en contrepartie, à favoriser le trafic des transports, en usant notamment de son influence auprès de la Commission des transports du Conseil Général.

– « toute autre décision favorable » : la jurisprudence interprète traditionnellement (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 janvier 1943) tout acte favorable qui, au lieu d’être obtenu et poursuivi par des moyens légitimes, a été obtenu ou poursuivi par des influences coupables → notion large, la jurisprudence montre qu’il s’agit généralement de l’obtention d’une autorisation, de l’obtention d’une subvention, etc.….

 

III) Répression.

 

 

  1. A) Peines.

 

Peines prévues à titre principale sont identiques à celle prévues par infraction de corruption car mêmes textes d’incrimination, prévoyant pour trafic d’influence passif/trafic d’influence actif : 10 ans et 150 000 euros d’amende.

Peines complémentaires : articles 432-17 (trafic d’influence passif) et 432-22 et 432-33 (trafic d’influence actif).

 

  1. Procédure.

 

 

  • Prescription de l’action publique.

 

Délai de 3 ans (identique à l’infraction de corruption). Point de départ : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 décembre 1989 : jour de la proposition illicite ou de la perception de l’avantage.

 

2) Action civile.

 

Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 7 février  2001 : l’action civile en vue d’obtenir une réparation est irrecevable lorsqu’elle est exercée par une personne qui, de mauvaise foi, a remis une certaine somme d’argent à l’auteur ou complice du trafic d’influence, en vue d’obtenir l’une de ces faveurs.

 

Section 3 : favoritisme

 

 

Favoritisme (article 432-1) (ou passation irrégulière de marchés publics) : délit d’atteinte à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les marchés public. En incriminant ces pratiques, le législateur a montré que l’intérêt de l’entreprise rejoint celui de la collectivité. Les valeurs protégées par l’infraction visent en effet :

– favoriser une concurrence aussi saine que possible entre entreprises candidates à la conclusion d’un marché public.

 

 

– tout en permettant à la collectivité de bénéficier d’un produit plus avantageux.

 

Infraction récente, car issue de la loi du 3 janvier 1991 (article 432-1) sur la transparence et régularité des procédures de marché

Esprit de l’incrimination : il s’agit de sanctionner le fait pour une personne de procurer ou tenté de procurer à autrui un avantage injustifié, en le favorisant par un acte contraire aux dispositions sur la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans le marché public et de délégation de service public.

 

  1. I) Condition préalable : qualité de la personne.

 

L’énumération des personnes susceptibles d’être incriminé es est longue (article 432-14), et tient à sa qualité :

 

  • personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif public → regroupe la catégorie que la doctrine qualifie de « classique » que l’on retrouve // infraction de corruption et trafic d’influence mais à la différence de ces dernières, ne sont pas les seules à pouvoir commettre l’infraction.
  • personnes exerçant les fonctions de représentant, administrateur, ou agent de l’Etat :

 

  • des collectivités territoriales.

 

  • des établissements publics.

 

  • des SEM d’intérêt national chargé d’une mission de service public.

 

  • et des SEM locales.

 

  • ou par toute personne agissant pour le compte de l’une de celle susmentionné.

 

  • Personnes ayant le pouvoir d’intervenir dans une procédure d’attribution de marché.

 

 

Conclusion.

 

Peuvent donc commettre cette incrimination :

 

  • personne exerçant une fonction publique ou

 

  • mais ouvre le champ à les personnes autres que les agents publiques → celles dont les qualifications professionnelles imposent, justifient qu’elles interviennent à un titre ou à un autre dans une procédure d’attribution de marché public (architecte, responsable d’un cabinet d’étude…).

 

  1. Eléments constitutifs.

 

 

  1. Elément matériel.

 

L’agent doit avoir deux facettes :

 

  • procuré ou tenté de procurer à autrui, un avantage injustifié

 

  • par un acte contraire aux dispositions législatives ou règlementaires, ayant pour objet de :

 

  • garantir la liberté d’accès et

 

  • l’égalité des candidats, dans les marchés publics et les délégations de service public.

 

 

  • Avantage injustifié à autrui.

 

 

  1. a) Avantage.

 

 

On analyse, aux vues de la jurisprudence, deux types d’actes :

 

– transmission d’une information privilégiée (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 juin 2003) lorsqu’elles sont confié es à une entreprise attributaire du marché public (sur le coût des travaux, nombre, qualité des autres candidats..), constituent un avantage injustifié.

 

– peut être caractérisé par la seule violation à une disposition encadrant les marchés publics, ayant pour objet d’assurer l’égalité entre les candidats.

Par cette interprétation large, elle réduit la portée de cet élément, car il tend à se confondre avec le défaut de justification de l’avantage.

 

  1. b) A autrui.

 

L’avantage doit profiter soit :

 

  • directement à l’attributaire du marché,

 

  • soit à une entreprise sous-traitante

 

Chambre criminelle : il n’est pas nécessaire que l’auteur de l’infraction ait retiré un bénéfice personnel. Mais la plupart du temps, l’auteur aura commis un tel acte en contrepartie d’un avantage ou d’une rémunération, bien que ne soit pas une EC de l’infraction.

 

2) Méconnaissance d’une disposition législative ou règlementaire.

 

L’acte est définit comme étant « contraire à une disposition législative ou règlementaire, ayant pour objet de garantir la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics ».

 

  1. a) Dispositions encadrant les « marchés publics ».

 

Les dispositions doivent être relatives aux « marchés publics ». Elles sont pour la plupart regroupées dans :

– le Code des marchés publics, depuis décret du 7 mars 2001, puis sensiblement modifié es par décret du 7 janvier 2004, portant notification sur les seuils à partir desquels une procédure d’appel d’offre doit intervenir, fixés à 150 000 € pour l’Etat, 230 000 € pour les collectivités territoriales. Lorsque l’enjeu est en deçà de ces seuils, article 432-14 n’a pas vocation à s’appliquer puisque les marchés peuvent être conclus de gré à gré (donc pas de procédure d’appel d’offre à suivre)

 

– la loi du 3 janvier 1991 sur la transparence et régulation des procédures de marché Illustrations : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 13 décembre 2000 : pratique consistant à fractionner un marché public en une pluralité de marché, permettant pour chacun d’entre eux, de rester en deçà des seuils prévus par le Code pénal : le fractionnement d’un marché public, pour éviter le recours à une procédure d’appel d’offre constitue une infraction de favoritisme (sorte de fraude à la loi). Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 17 décembre 2008 : un président d’université qui traite de gré à gré avec des prestataires de services, pour des montants > seuil légal au delà duquel la mise en c/c est obligatoire, commet une infraction de favoritisme

 

 

  1. b) Dispositions concernant les « délégations de service public ».

 

Article L1411-1 du Code Général des Collectivités Territoriale : Délégation de service public : contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public, dont elle a la responsabilité : à un délégataire public ou privé dont la rémunération est substantiellement lié au résultat de l’exploitation du service.

 

Conclusion.

 

But poursuivi par l’article L432-14 de mettre sur le même plan a) et b): éviter une fraude consistant à recourir à une délégation de service public en vue de contourner les dispositions sur les « marchés publics ». Comme les marchés publics, les délégations de service public font l’objet d’une procédure spéciale de publicité.

 

  1. B) Elément moral.

 

C’est une infraction intentionnelle donc l’agent a conscience de violer les dispositions réglementaires ou législatives. A ce dol général, on peut également associer un dol spécial, qui consiste dans le but que recherche l’agent qui commet le favoritisme. Ce dol spécial est révélé par la finalité de l’acte et consiste pour l’agent à octroyer un avantage injustifié. Ainsi caractérisé dans ces deux aspects, dol général et dol spécial (conscience plus volonté de procurer un avantage injustifié), on peut penser que c’est dur à prouver, mais la jurisprudence est bien peu exigeante quant à l’établissement de cet élément intentionnel. La Cour de cassation tend à considérer qu’il y a une Présomption qui facilite donc largement l’établissement de l’élément moral puisqu’elle estime que l’intention de favoriser est établi par l’exécution en connaissance de cause d’un acte contraire aux dispositions réglementaires ou législatives qui s’appliquent aux marchés. Un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 janvier 2004 témoigne de cette présomption. C’est révélateur d’une certaine sévérité de la jurisprudence qu’on retrouve dans beaucoup d’infractions.

 

III) La répression.

 

 

  1. A) Les peines.

 

Les peines principales sont prévues par l’article L342-14 du Code pénal, elles consistent en deux ans d’emprisonnement et 30 000€ d’amende. L’article L432-17 prévoit des peines complémentaires qui peuvent s’ajouter aux peines principales. La tentative est incriminée et est donc punissable ce qui ressort de la lettre de l’article 342-14 du Code pénal qui incrimine le fait de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié.

 

  1. B) La procédure.

 

 

La prescription de l’action publique: le délit de favoritisme est une infraction instantanée. Dès lors, le point de départ de la prescription est fixé au jour où les faits consommant l’infraction ont été commis. La difficulté qu’on observe est que ce délit est souvent commis de manière occulte, dissimulée, comme nombre d’infractions en droit des affaires. La difficulté est alors de savoir si tant qu’il n’est pas connu, la prescription est en train de courir? La jurisprudence au sujet de l’abus de confiance ou de l’abus de biens sociaux favorise un report du point de départ de la prescription et cette règle qu’elle a dégagé pour ces infractions est transposé e, appliquée par la jurisprudence pour d’autres infractions commis de façon occulte comme le délit de favoritisme donc la Cour de cassation admet un report du point de départ lorsque les actes constitutifs sont dissimulés. La Cour a dit que la prescription ne commence à courir qu’à partir du jour où les faits sont apparus dans les conditions permettant l’exercice de l’action publique, donc à partir du jour où ils sont révélés avec suffisamment de précisions, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 27 octobre 1999 en ce sens. Solution reprise par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 19 mai 2004.

 

Section 4 : la prise illégale d’intérêt

 

 

Il y a en cette matière deux incriminations que je présente à titre liminaire mais je n’en étudierais qu’une par la suite: articles L432-12 et L432-13.

Finalités communes : Ces incriminations ont un point commun qui est d’éviter l’ingérence d’agents publics dans la vie des affaires et donc, il s’agit d’inciter ces agents à faire preuve de probité, d’impartialité dans le cadre de l’exercice de leur fonction. On est donc dans des infractions qui visent à moraliser la vie des affaires en préservant la confiance que la Nation peut avoir dans les agents publics.

 

Contextes différents : au-delà de ces finalités qui sont communes, il faut distinguer ces deux incriminations qui se rapportent à des contextes différents. L’article L432-12 incrimine la prise illégale d’intérêt par un agent public en fonction. En revanche, l’article L432-13 est relatif à la prise illégale d’intérêt par un ancien agent public, un ancien fonctionnaire. On parle aussi à l’égard de cette infraction de délit de « pantouflage ». Cet article L432-13 qui ne sera pas étudiée est extrêmement long, c’est un texte lourd. C’est un article qui a fait partie de lui ces derniers temps lors de la nomination de M. Vérol à la tête du groupement des Caisses d’Epargne: plainte donc cet article a récemment fait les gros titres. Revenons à l’infraction que l’on va étudier : L’article L432-12 incrimine dans son premier alinéa « le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public le fait de prendre recevoir ou conserver directement ou indirectement un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a au moment de l’acte, en tout ou en partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement ». Il s’agit d’éviter ci qu’un agent public profite de ses fonctions pour prendre un acte qui lui rapporte un intérêt pour lui même ou pour autrui et qui serait constitutif d’un manquement à la probité que doit lui inspirer l’exercice de ses fonctions. On retrouve la condition préalable tenant à la qualité de l’agent, éléments constitutifs et répression

 

  1. I) La condition préalable tenant à la qualité de l’agent.

 

C’est la même qualité que pour la corruption ou trafic d’influence, c’est une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public.

 

Personnes dépositaires de l’autorité publique: Au titre des personnes s’étant rendu coupable de ce délit, on rencontre un inspecteur des impôts, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 avril 1991. Ou encore un directeur des services techniques des communes, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 juin 1972.

Personnes chargée d’une mission de service public : président d’une chambre de commerce et d’industrie ayant en charge du service public de gestion d’apport, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 novembre 1980.

Personne investi d’un mandat électif public: maire d’une commune par exemple, c’est l’un des auteurs les plus fréquent de ce délit, par exemple en délivrant à une entreprise dont il est le gérant un permis de construire. Illustration par exemple dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 7 octobre 1976.

 

  1. II) Les éléments constitutifs de l’infraction.

 

Il faudra classiquement envisager l’élément matériel puis l’élément moral. On terminera par une précision dans la loi pour les petites communes.

 

  1. A) L’élément matériel.

 

Si on se reporte à la lettre de l’article L432-12, le fait de prendre recevoir ou conserver directement ou indirectement un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a au moment de l’acte, en tout ou en partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement. C’est donc assez large. Accumulation de détails, de précisions qui ont pour objet d’écarter le champ d’application de l’article, d’autant plus que la jurisprudence les interprète largement.

 

La prise d’intérêt peut être directe ou indirecte.

 

Illustration de prise d’intérêt direct, par exemple, l’infraction est commise en cas de vente d’un terrain municipal par le maire qui est en même temps rémunéré entant que mandataire de l’entreprise de construction qui acquiert le terrain: cet agent public se rend coupable de la prise d’intérêt direct. Cela a été rappelé dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 février 1996. De même commet cette infraction de prise d’intérêt de manière direct un adjoint délégué à l’urbanisme qui en sa qualité, signe les avis du maire dans les dossiers de permis de construire administratif, mais il était l’architecte auteur des projets produits à l’appui de ces domaines faites auprès de la municipalité. D’un côté, en tant qu’agent, il signe les avis donné par le maire en ces demandes de permis de construire, en même temps, il est architecte. Rappelé par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 18 juin 1996.

 

La prise illégale peut être indirecte, on est dans l’hypothèse où intervient un intermédiaire. La Cour dit que cela permet de sanctionner les actes commis par le prévenu au profit par exemple des membres de sa famille ou bien au bénéfice de personnes qui lui sont proches. Dans les faits, principalement la famille, cercle restreint autour de l’agent. Exemple donné par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 avril 2007 : il s’agit d’un prévenu président d’un conseil départemental de la Croix Rouge et en cette qualité, il avait confié l’organisation de stages dont les prestations sont régulées par la Croix Rouge à une entreprise (jusque là, c’est normal), mais cette entreprise était gérée par son fils qui était gérant de droit et dont sa belle fille était gérante de fait. Il s’est ainsi rendu coupable de prise indirecte d’intérêt.

 

La notion d’intérêt.

 

Par ailleurs, la jurisprudence a précisé cette notion d’intérêt. C’est notion susceptible d’une Interprétation large et la Cour de cassation ne s’en prive pas.

Le plus souvent, il s’agit d’un intérêt matériel et la Cour de cassation considère que la recherche d’un enrichissement ou d’une contrepartie pécuniaire n’est pas un élément constitutif de l’infraction dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 juin 2000. Dès lors, on peut considérer que l’intérêt peut être simplement moral et c’est donc dans ce contexte amical, familiale que cet élément moral va pouvoir se vérifier. Le fait de la part d’un agent public d’attribuer en raison de sa qualité un marché à une entreprise gérée par sa famille constitue cette prise d’intérêt indirect mais qui pour l’agent constitue un simple intérêt moral et non pécuniaire. Outre l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 avril 2007 on a un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 9 février 2005 où il s’agissait du président d’un conseil régional qui fait attribuer un marché à une entreprise gérée par ses enfants, il n’en retire pas à titre personnel un avantage maté riel.

 

  1. B) L’élément moral.

 

On est dans une infraction intentionnelle donc la caractérisation suppose que le prévenu ait pris sciemment un intérêt dans une affaire soumises à sa surveillance, sans qu’il soit nécessaire de caractériser la rechercher par lui d’un intérêt directement personnel donc il n’y a pas ici de dol spécial à caractériser constituant dans la recherche pour lui d’un intérêt direct donc pas de dol spécial. Ici, la jurisprudence fait encore preuve de sévérité car de nouveau elle présume l’élément intentionnel qui est caractérisé par le seul fait que l’agent a accompli es qualité d’agent public, l’acte constitutif de l’infraction, autrement dit la jurisprudence présume l’élément intentionnel à partir de la nature des fonctions de l’agent.

 

La logique est la suivante: C’est un agent public donc il est au courant des règles qui s’appliquent dans l’exercice de ses fonctions: s’il a attribué un marché par une entreprise gérée par sa famille, la matérialité de l’acte présume l’intention qu’il avait de commettre l’infraction. Cette logique est diabolique car cette présomption n’est pas irréfragable en droit mais dans les faits, cette preuve est quasiment impossible à rapporter si la preuve de l’intention résulte de la nature de la fonction exercée par l’agent. Par exemple, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 21 novembre 2001 ou arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 27 novembre 2002.

 

  1. C) La permission de la loi pour les petites communes.

 

Les alinéas 2 et suivants de l’article L432-12 du Code pénal introduisent cet assouplissement, techniquement une permission de la loi qui bénéfice d’une petite commune. L’idée est de leur permettre de ne pas avoir à aller chercher trop loin les entreprise dont elles peuvent avoir besoin alors qu’elles auraient parmi leurs maires ou au sein de leurs conseils municipaux les professionnels dont on a besoin. Cela mènerait à des dépenses inutiles donc il a instauré cette permission. Conditions: l’alinéa 2 précise que ces mesures d’assouplissement bénéficient aux communes qui ont 3500 habitants au plus. Il leur est permis de traiter avec leur maire, adjoints ou conseillers municipaux pour un certain nombre de travaux d’entreprises, notamment la fourniture de services, mais dans la limite d’un montant qui se veut raisonnable, d’un montant annuelle de 16 000€.

 

III) La répression.

 

 

  1. A) Les peines.

 

Les peines principales sont prévues par l’article L432-12 du Code pénal et consiste en une peine de 5 ans d’emprisonnement et 75 000€ d’amende. L’article L432-17 du Code pénal prévoit des peines complémentaires qui sont applicables. La tentative, à défaut d’incrimination expresse n’est pas punissable.

 

 

  1. B) La procédure.

 

 

1) L’action publique.

 

Il s’agit d’observer la question de la prescription ce qui invite à préciser la nature de l’infraction. En raison des actes incriminés à l’article L432-12, on constate que la nature n’est pas la même. En effet, ici, ce qui est d’abord incriminer est le fait de prendre ou de recevoir un intérêt dans l’affaire ou l’agent public a la surveillance. Prendre ou recevoir un intérêt sont des actes révélateurs de la nature instantanée de l’infraction. Donc, si l’infraction est commise par le fait d’avoir reçu un intérêt, le point de départ de l’infraction est fixée au jour où le prévenu a pris ou a reçu cet intérêt dans l’affaire dont il avait la surveillance. Par ailleurs, l’article L432-12 incrimine également le fait de conserver un intérêt, de sorte qu’à cet égard, si l’infraction est constituée par la conservation d’un intérêt, c’est une infraction continue, qui s’inscrit dans le temps donc le point de départ de la prescription sera fixé au jour de la cessation de l’activité délictueuse.

 

2) L’action civile.

 

Il faut préciser que lorsque cette infraction est commise par le maire d’une commune ou d’un adjoint, il est prévu que les contribuables de cette commune peuvent se constituer partie civile mais seulement dans le respect des conditions de l’article L2132-5 du Code général des collectivités territoriales. On a ainsi un premier panorama riche et varié du droit pénal des affaires. Souvent ces infractions qui sont pour la plupart commises par des agents de la fonction dans les relations qu’elles ont avec des entreprises donc moralisation de la vie des affaires et protection de la confiance que la collectivité peut avoir dans les personnes qui exercent la fonction publique.

 

Partie 2 :

 

les infractions propres à la vie des affaires

Il y a d’autres aspects qu’on va découvrir en sortant du code pénal: infractions réparties dans des lois, des codes nombreux. On ne peut pas tout étudier. Donc 4 titres dans la seconde partie.

 

  • Titre 1: droit pénal de la consommation
  • Titre 2: droit pénal des société commerciales
  • Titre 3: droit pénal bancaire
  •  
  • Titre 4: doit pénal boursier

 

Titre 1 : le droit pénal de la consommation

 

Propos liminaires de présentation.

 Avant d’entrer dans l’étude des infractions, sachant qu’on ne pourra pas tout étudier, on aura quelques propos liminaires pour présenter la matière. Le droit de la consommation et son droit pénal est un droit relativement récent. La consommation en tant qu’objet d’une branche juridique ne s’est imposée qu’il y a relativement peu de temps dans l’histoire de notre droit, en toute logique avec le développement de la société de consommation qui a engendré un mouvement de protection des consommateurs monté en puissance dans la seconde moitié du vingtième siècle. Ce mouvement trouve ses origines aux Etats-Unis, et a gagné progressivement au cours de la seconde moitié du XXe siècle les pays européens par le truchement des pays scandinaves qui ont été les plus sensibles à cette protection des consommateurs. En France, on a pu assister à une implantation très progressive: c’est uniquement à partir des 70’s qu’on parle de droit de la consommation, qu’on utilise cette expression mais le droit existait déjà avant: il explose dans les années 1970 avec le choc pétrolier. On avait avant des textes protecteurs mais on ne parlait pas de droit de la consommation: l’ordonnance du 30 juin 1945 est un des premiers textes a imposé une protection des consommateurs notamment par la publicité des prix. Ce n’est pas la première, loi du 1er août 1905 relative à la répression des fraudes dans la vente de marchandises et des falsifications des denrées alimentaires et agricoles. La doctrine considère que cette loi marque véritablement la naissance du droit de la consommation, mais et on peut en tirer une légitime fierté en tant que pénaliste, c’est une loi de droit pénal : donc le droit de la consommation est né sous le signe du droit pénal.

 

Caractéristiques du droit pénal (important, hétérogène, fuyant).

 

 Depuis lors, il n’a cessé de réserver au droit pénal une part substantielle. Pourquoi cette importance du droit pénal? Certaines valeurs du droit de la consommation, comme la santé publique, et leur importance justifie l’implication du droit pénal. Autre raison de la part importante occupée par le droit pénal tient à l’objectif premier du droit de la consommation qui est la protection du consommateur dans son intérêt. Le consommateur est réputé partie faible face au professionnel, donc il peut sembler opportun d’associer le droit pénal au droit de la consommation pour renforcer la protection. Donc, le droit pénal de la consommation et devient quasi autonome, il fait l’objet d’articles propres dans les revus de droit pénal. C’est un droit difficile à cerner car on n’a pas de textes constituant un code pénal de la consommation, il faut donc rechercher les dispositions dans des textes varié s. Le code de la consommation est le berceau du droit pénal de la consommation, mais on ne peut limiter le droit pénal de la consommation à ces seules infractions. Il y en a d’autres dans le code de la santé publique, les dispositions relatives au tabac ou à l’alcool résulte du droit de la santé mais aussi de la consommation De même, on peut trouver des infractions à rattacher à la consommation dans le secteur bancaire donc dans le Code monétaire et financier, mais également dans le code de commerce: vente en solde, en dépannage…vente dérogatoires au droit commun de la vente. Donc, c’est un droit hétérogène et fuyant, il n’y a pas de certitudes sur les limites de ce droit pénal, il n’en demeure pas moins que c’est un droit très étendu, très large. A cela s’ajoute qu’il est pétri de considérations hétérogènes de sorte que cela donne à ce droit pénal des infractions à géométrie variable, tout dépend de l’intérêt protégé.

 

Quelles sont les valeurs protégées? (consommateur et saine concurrence).

 

Il a vocation à protéger le consommateur. Il est naturellement voué à la protection du consommateur et ainsi, certaines infractions ne peuvent être commises qu’à l’encontre d’un consommateur: infraction de refus de vente ou de prestations de services prévues par l’article L121-1 du Code de la consommation. On voit donc que le législateur veut protéger le consommateur exclusivement. Néanmoins, il y a de nombreuses dispositions du Code de la consommation qui n’ont pas pour objet exclusif la protection du consommateur. Ce sont des dispositions qui profitent aux professionnels, concurrents donc le champ n’est pas limité aux relations entre professionnels et consommateurs.

 

  • C’est le cas notamment de la législation sur les fraudes issue de la loi de 1905 dont les dispositions ont été inséré es dans le code de la consommation: bien souvent, un consommateur sera victime mais un professionnel peut l’être également.
  • De même encore, diverses dispositions du code de la consommation relatives aux pratiques commerciales trouvent à s’appliquer indépendamment de la qualité des personnes concerné es qui peuvent être victime de ces pratiques: par exemple, on trouve réprimée la publicité comparative qui peut l’être au détriment d’un professionnel, c’est le cas le plus fréquent en pratique. De même encore, autre infraction importante, l’infraction de pratiques commerciales trompeuses dont je vous ai dit que c’était une nouvelle incrimination puisqu’elle a été introduite dans le code par la loi du 3 janvier 2008, elle se substitue à l’ancienne plus connue de publicité trompeuse, il s’agit de protéger les consommateurs mais les professionnels peuvent être victime de ces pratiques et l’infraction peut être constituée à leur égards donc un certain nombre d’infractions ne protège pas exclusivement les consommateurs mais également les professionnels pour garantir une saine concurrence.

 

Le législateur estime qu’il y a un lien indissociable entre une saine concurrence et la protection des consommateurs donc double objectif: garantir une concurrence qui soit loyale, honnête ce qui sert l’intérêt des consommateurs. Par ailleurs, certaines infractions se trouvent en dehors du code de la consommation, notamment code de commerce, on retrouve cette dualité d’enjeu, c’est ce à quoi s’emploie ce droit pénal situé dans le code de commerce qu’on appelle parfois droit pénal économique qui réglemente les méthodes de vente: en matière de solde, de vente en liquidation ou encore de ventes aux enchères. Il s’agit en sanctionnant le non respect de ces réglementations non seulement d’introduire une certaine moralité dans les relations entre professionnelles et consommateurs, mais également d’instaurer une sorte de règles du jeu entre professionnels.

 

Ce champ d’application du droit pénal de la consommation est large. On en extrait deux infractions majeures. Avant cela, il faut faire une photographie générale du droit pénal de la consommation pour signaler qu’elles sont celles qui sont considérées comme appartenant au droit pénal de la consommation. On peut envisager trois grandes catégories :

  • la première vise les infractions constitutives d’atteinte à l’intégrité du consentement, du consommateur ou du professionnel : infractions de fraude qui recouvre la tromperie et les falsifications, en font également partie les pratiques commerciales trompeuses, la publicité comparative illicite, les incriminations d’abus de faiblesse ou d’ignorance ou encore les pratiques commerciales agressives. Protection contre les pressions, les mensonges, es manipulations
  • la seconde catégorie vise les infractions en cas de contrat de consommation. Le code réglemente divers contrats qui sont réglementés de façon très minutieuse et la plupart des dispositions sont assorties de sanctions pénales : sont concernées le crédit à la consommation, e crédit immobilier mais également le démarchage et il y a en ce domaine un nombre importants d’infractions que prévoit le Code de la consommation pour chacun des contrats qu’il réglemente.
  • la troisième catégorie vise les infractions relatives aux méthodes de vente et de prestations de services. On peut y inclure le refus de vente à l’égard d’un consommateur, ou encore les infractions en matière de vente et de prestation de service avec prime, les réglementations sur les ventes prévues par le code de commerce.

 

Infractions nombreuses qui ont une importance variable en pratique. Les crédits immobiliers donnent lieu à nombreuses incriminations qui ne sont jamais appliqué es: soit le professionnel respecte les règles, soit c’est un droit pénal qui est in effectif (voir introduction sur la dépénalisation). D’autres sont des piliers en ce sens que ces incriminations contribuent largement à une moralisation des relations entre pro et consommateurs et entre pro entre eux. Il s’agit d’une part de la tromperie et d’autre part de l’incrimination de pratiques commerciales trompeuses, l à où on parlait avant de publicité trompeuse.

 

Chapitre 1 : la tromperie

 

 

Elle fait partie de la catégorie des fraudes. C’est donc à la loi du premier août 1905 qu’on doit cette incrimination. D’autres lois existaient avant mais de façon ponctuelle et limité donc le texte de 1905 est fondateur. En particuliers, on lui doit la création du service de la répression des fraudes, création en date de 1907, devenu ensuite la Direction Général de la Concurrence, de la Consommation et de la répression des Fraudes (D.G.C.C.R.F.). La législation sur les fraudes a été insérée dans le Code de la consommation par la loi du 26 juillet 1996 qui crée le code. En matière de fraude, notre droit positif est complexe, technique. La législation sur les fraudes repose sur deux incriminations: l’infraction de tromperie et les falsifications. Le délit de tromperie est prévu et réprimé aux articles L213-1 à L213-2-1 du Code de la consommation. L’infraction de tromperie est voisine dans le code de la consommation avec les infractions de falsifications prévues et réprimé es dans les articles L213-3 à L213-5 du Code de la consommation. Il y a entre les deux incriminations des liens, des passerelles, notamment en ce qui concerne les règles de procédures. Au delà de cette parenté, on peut essayer de distinguer ces deux catégories d’infractions en mettant l’accent sur les valeurs qu’elle protège. Pour la tromperie, le législateur veut protéger l’intégrité du consentement. En revanche, les falsifications sont perçus comme constituant un danger dans le domaine de la santé publique car on joue avec la qualité des aliments, des médicaments de sorte que les falsifications sont dangereuses pour l’intégrité physiques des personnes et donc un danger en terme de santé publique. Les falsifications ne seront pas étudiées ici, je cite seulement l’article L213-3 de ce Code qui incrimine plusieurs variétés de falsifications et notamment celle-ci: les falsifications de denrées servant à l’alimentation de l’homme ou des animaux, des substances médicamenteuses, des boissons et des produits agricoles ou naturels destinés à être vendus. La première de ces incriminations est grave dans ses conséquences. Il faut préciser que ces infractions de falsifications sont punies des peines prévues par l’article L213-1 du Code de la consommation, or ces peines sont les peines applicables à al tromperie donc on retrouve ce point commun entre tromperie et falsifications. L’article L213-1 du Code de consommation permet de sanctionner quiconque, qu’il soit ou non partie au contrat, qui aura tromper ou tenté de tromper de contractant par quelques moyens ou procédés que ce soit, même par l’intermédiaire d’un tiers, et une tromperie qui porte sur un certain nombres d’éléments qu’énumère l’article L213-1 du Code de la consommation et notamment l’objet du contrat. Les conclusions du Rapport Coulomb porte notamment sur la tromperie, la proposition a été faite de modifier la rédaction de cette incrimination qu’on estime complexe. Proposition faite de la part de Messieurs Jacquelin et Robert: « constitue une tromperie le fait de dire ou de suggérer, même par réticence, lors de la formation ou de l’exécution d’un contrat à titre onéreux, des informations mensongères relatives aux qualités substantielles de l’objet de la convention lorsqu’il consiste en un objet matériel ou en une prestation de service ». Cette définition permet d’avoir une idée générale de ce que cette infraction incrimine et c’est intéressant car elle est la synthèse des interprétations jurisprudentielles qui se sont développés sur l’article L213-1.

 

Cette infraction de tromperie est proche de certains concepts du droit civil des contrats: un contrat, réticence dolosive, on est dans un contexte voisin des vices caché s. Il faut pour que cette infraction soit constituée une condition préalable relative au contrat (section 1), puis éléments constitutifs (section 2), et la répression (section 3)

 

Section 1 : la condition préalable à l’infraction, le contrat

 

 

  1. I) L’existence d’un contrat.

 

Ce contrat va déterminer le champ de l’article L213-1 du Code de la consommation qui incrimine la tromperie. C’est une condition préalable qui détermine le champ d’application est entendu largement, aussi bien par les dispositions de la loi qui concernent ce contrat que par la jurisprudence donc plus large sera le champ d’application de cet article. Plusieurs observations doivent être faites: il va falloir décider quel est le moment de la tromperie(A), la nature du contrat(B), l’auteur de l’infraction et sa qualité par rapport au contrat(C).

 

  1. A) Le moment de la tromperie par rapport au contrat.

 

Le plus souvent, la tromperie a lieu lors de la conclusion du contrat. La victime va conclure sous l’influence de cette tromperie. Cela n’exclut pas d’autres hypothèses temporelles ou la tromperie est commise au stade de l’offre de contrat ou lors de l’exécution de celui-ci.

Il peut y avoir tromperie lors de l’offre sans que la tromperie soit suivie d’un contrat. On est en présence d’une tentative de tromperie, article L213-1 du Code de la consommation l’a érigé en fait autonome donc il y a une prévision expresse du législateur pour réprimer la tentative de tromperie. C’est par exemple le fait de mettre en vente un produit avec des caractéristiques affiché es qui ne correspondent pas à la réalité. Le fait de mettre en vente ce produit va caractériser une tentative de tromperie. Le fait d’exposer à la vente des voitures dont les caractéristiques ne correspondent par à la réalité, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1984 : c’est une tromperie au stade de l’offre du contrat. De même, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 mai 1974 au sujet d’un négociant en vin qui se rend coupable de tentative de tromperie pour avoir envoyé à des acheteurs éventuels des échantillons de vins qui étaient présentés sous des appellations d’origine ou de provenance qui n’étaient pas légitime car ces vins ne pouvaient y prétendre. Il a été jugé que ces envois constituent un commencement d’exécution. Le fait qu’aucune commande n’ait été passée est une circonstance indépendante de la volonté de l’auteur et il y a donc bien tentative de tromperie.

 

Concernant l’époque de l’exécution du contrat, constitue une tromperie le fait par un vendeur d’affirmer qu’il livre tel quantité de marchandises alors que la quantité livrée est inférieure. C’est une hypothèse que vise l’article L213-1 du Code de la consommation : la tromperie sur la quantité des choses qui sont livrées, la livraison correspond bien à l’exécution du contrat.

 

  1. B) La nature du contrat.

 

Au fil du temps, le législateur a élargi le périmètre du fait de la nature des contrats :

 

  • la loi de 1905 avait limité la répression de la tromperie au domaine de la vente. C’était donc le seul contrat de vente qui pouvait donner lieu à une tromperie.
  • il a fallu attendre des décennies pour une extension. Loi du 10 janvier 1978 a en effet modifié quelques peu les termes de l’incrimination et a étendu le domaine d’application de la répression de la tromperie aux contrats sans autres précisions. Si on observe la jurisprudence, la vente est le contrat principal mais il s’agit de l’ensemble des contrats à titre onéreux, ce qu’a précisé la jurisprudence. Autrement dit, les contrats à titre gratuits sont exclus du domaine d’application de l’article L213-1 du Code de la consommation ce qui a pour conséquence que le contrat de donation ne peut donner lieu à la répression d’une tromperie au sens de l’article L213-1 du Code de la consommation. La Cour de cassation a précisé qu’il en allait ainsi même lorsque le motif de la donation était d’ordre commercial. Notamment, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 8 mars 1990.

 

Dans les contrats à titre onéreux, on aura les contrats qui ont pour objet les marchandises, notamment le contrat de vente, mais encore l’échange, ou bien il peut y avoir tromperie dans le cadre d’un contrat de société, en cas d’apport d’une chose. Sont également concerné par la législation sur la tromperie les contrats de fourniture de service. Cela dessine donc un périmètre large à l’incrimination.

 

 

  1. C) L’auteur de l’infraction et sa qualité par rapport au contrat.

 

Comme l’infraction de tromperie suppose comme condition préalable un contrat, on pourrait être tenté de penser que l’auteur de l’infraction est nécessairement partie à ce contrat, autrement dit qu’il est dans les liens d’un contrat avec la victime de la tromperie ou à tout le moins, qu’il est celui qui a ait l’offre de contracter. Mais, précisé ment, ce n’est pas le cas, l’auteur de la tromperie n’est pas nécessairement partie au contrat. C’est d’ailleurs ce que précise sans ambiguïté l’article L213-1 du Code de la consommation qui vise « quiconque, qu’il soit ou non partie au contrat ». Il n’y a donc pas de qualité nécessaire de cocontractant. Cela permet une extension car cela permet de réprimer pour tromperie ou tentative de tromperie un premier vendeur qui va avoir vendu de la marchandise à un grossiste ou un détaillant, lequel premier acheteur peut être au courant de la mauvaise qualité, mais l’achète pour la revendre à quelqu’un qui va être de bonne foi. Ce second acquéreur va de bonne foi acheter ces marchandises et donc être victime de la tromperie. Cela permet par exemple de réprimer un directeur de supermarché qui avait vendu à un restaurateur une centaine de kg de sole qui était à la limite de la fraîcheur. Le restaurateur connaissait la qualité moyenne de la marchandise. Il est possible de rechercher la responsabilité du directeur qui n’est pas directement en contrat avec le consommateur mais il a vendu ces soles et se rend donc coupable. Un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 6 décembre 1990 l’a rappelé. Concernant l’auteur du délit, il faut préciser que le plus souvent, c’est la personne qui fournit la marchandise ou qui exécute la prestation de service. Mais l’infraction peut également être commise par la personne qui reçoit la marchandise, ce qui a été jugé par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 7 mars 1956 au sujet d’un usager qui avait altérer le fonctionnement de son compteur d’électricité. Il a été déclaré coupable de tromperie. C’était lui qui recevait l’objet du contrat, l’électricité.

 

  1. II) L’objet du contrat.

 

L’objet du contrat, autrement dit l’objet de cette obligation contractuelle sur laquelle porte la tromperie. Le champ a été progressivement étendu. La loi du 1er août 1905 visait les marchandises ce qui était déjà larges, rupture avec la législation du XIXe qui cantonnait la tromperie au domaine alimentaire. Il faut préciser ce qui vise les marchandises et il faut ensuite voir l’extension de la loi du 10 janvier 78 en la rendant applicable aux prestations de services (article L216-1 du Code de la consommation).

 

  1. A) Les marchandises.

 

Article L213-1 du Code de la consommation vise les marchandises, il est également question de produits. Ce terme de produit, dans l’application de l’article L213-1 du Code de la consommation est tenu pour synonyme de marchandises. La jurisprudence interprète le terme de marchandises comme désignant des biens mobiliers corporels.

Exclusion :

 

Les dispositions sont inapplicables aux contrats qui portent sur des biens incorporels par exemple sur des droits de créances, sur des droits d’auteurs ou qui ont pour objet un fond de commerce, un logiciel.

 

Sont également écartés les contrats qui portent sur des biens immeubles, exemple: le fait pour un vendeur de majorer la superficie de l’appartement qu’il vend ne constitue pas une tromperie punissable, un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 24 mai 1982 l’a rappelé. Là où on serait dans un vice du consentement, le droit pénal ne réprime pas donc le champ d’application n’est pas exactement le même.

 

Exemples positifs :

 

  • En dépit de ces exclusions, il reste beaucoup de marchandises sur lesquelles peut porter la tromperie. Ce sont des choses mobilières qui peuvent se compter, se peser, se mesurer ce qui débouche sur une grande variété d’application.
  • L’observation de la jurisprudence montre que ce sont des meubles meublants, les voitures, les denrées alimentaires, le maté riel informatique, mais encore de plus en plus souvent, on constate des condamnations en matière de ventes de jouets (non conforme à la législation sur la sécurité), sans qu’entre en ligne de compte la valeur qui peut être dérisoire.
  • La jurisprudence a parfois une Interprétation qui peut surprendre, affaire du sang contaminé e, la distribution en connaissance de cause de produits sanguins contaminés constitue un empoisonnement (non) ou justifier des poursuites de tromperie. La jurisprudence a considéré que le sang humain et ces dérivés entraient dans le champ de la tromperie car ce sont des marchandises, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 22 juin 1994. Opinion publique choquée de cette qualification.

 

  • Les prestations de service.

 

Loi du 10 janvier 1978. C’est donc l’article L216-1 du Code de la consommation qui étend lapression de la tromperie aux prestations de services. La jurisprudence fait une large applicable de cet article, et ainsi, on peut voir de nombreuses condamnations pour tromperie sur une prestation de service de restaurateur, de professionnels de l’enseignement pour des cours donnés à domicile. Un autre secteur qui donne lieu à un certains nombres d’applications: services offerts par les agences immobiliers, agence de mannequins. On a donc des secteurs très variés qui recouvrent le commerce, les activités libérales donc champ d’application très large. Précision intéressante qui présente une certaine subtilité : cette extension a eu pour effet de faire entrer indirectement les biens immobiliers et incorporels dans le domaine de la tromperie par le biais de prestations de services: en effet, ces biens sont exclus des marchandises sur lesquelles peut porter la tromperie. Néanmoins, ces biens peuvent être l’objet d’une prestation de service de sorte que la tromperie qui sera commise dans ce contexte d’une prestation de service pourra être réprimée sur le fondement de l’article L216-1 du Code de la consommation même si cette prestation porte en tout ou en partie sur un bien immobilier ou incorporel. En pratique, cela signifie que la location d’un immeuble n’entre pas dans les prévisions de la tromperie car l’immeuble n’est pas une marchandise donc le contrat de location ne peut donner lieu à une tromperie punissable au sens de l’article L213-1 du Code de la consommation. En revanche, un agent de voyage peut proposer l’organisation d’un voyage qui inclura la location d’un bien immobilier donc en cas de tromperie sur les biens proposés par cette agence, cette tromperie pourra être réprimée sur le fondement de l’article L216-1 du Code de la consommation. En ce sens, un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 17 mai 1993. Ce qui vaut pour les biens immobiliers vaut pour les biens incorporels=> arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 2 novembre 2005 pour un logiciel : lorsqu’il y a une prestation de service qui consiste en la livraison d’un logiciel, cela peut donner lieu à tromperie qui sera punissable alors que la vente d’un logiciel ne peut donner lieu à tromperie.

 

Section 2 : les éléments constitutifs de l’infraction de tromperie.

 

 

On va voir classiquement l’élément matériel et l’élément moral. L’un et l’autre de ces éléments font l’objet d’une interprétation large.

 

 

  1. I) Elément matériel.

 

Il se décompose en deux éléments: l’acte de tromperie et l’objet de cette tromperie.

 

 

  1. A) L’acte de tromperie.

 

Qu’entend-on par tromperie au sens de l’article L213-1 du Code de la consommation ? C’est un terme fréquent en droit pénal, dans d’autres qualifications. Par exemple dans le cadre des pratiques commerciales trompeuses, en matière d’escroquerie. Cela peut donc désigner des infractions différentes. Mais parler de tromperie sans autres précisions, c’est parler de l’infraction de tromperie stricto sensu. Cette tromperie va recevoir une définition propre à cette incrimination, définition qui évoque à certains égards le Code civil. Elle a pour objet de donner au cocontractant ou à l’éventuel contractant une présentation erronée de la réalité. Donc, on évoque le dol ce qui écartée la qualification de tromperie lorsque l’acquéreur a demandé en toute connaissance de cause d’insérer dans le contrat des mentions fausses relatives à l’objet de la vente. Cela peut se produire pour des raisons d’ordre fiscal. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 septembre 2002 dit qu’il n’y a pas tromperie.

 

Quand donc un cocontractant sera victime ? Si on se reporte aux termes de l’article, on ne peut que constater leurs caractères imprécis. L’article L213-1 du Code de la consommation vise en effet, quiconque aura trompé ou tenté de tromper le cocontractant par quelques moyens ou procédé que ce soit ce qui donne toute latitude à la jurisprudence pour donner à la notion de tromperie une portée large. Il apparaît que l’acte de tromperie peut revêtir des formes diverses ce qui retenti sur la nature de l’infraction. En effet, selon la forme de la tromperie sera une infraction de commission ou une infraction d’omission.

 

1) Une tromperie par commission.

 

C’est donc la tromperie qui procède d’actes positifs qui eux-mêmes peuvent présenter une certaine diversité.

Il s’agit parfois de véritables manœuvres qui ont pour objet de modifier l’apparence de la réalité qui est présentée au contractant. Cela suppose une certaine mise en scène, une certaine ingéniosité puisqu’il y a de la part de l’auteur de la tromperie un mensonge élaboré, il ne se contente pas d’affirmer une contre vérité mais tente de donner une apparence, il cherche à altérer l’apparence des choses et la jurisprudence donne un certain nombre d’illustrations. Par exemple, un vendeur d’animaux de boucherie=>augmentation du poids des bêtes: assoiffer ces animaux en leur donnant du sel et les avait ensuite fait abondamment boire. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 29 octobre 1937. De façon plus contemporaine, il a été également jugé que commettait l’infraction de tromperie le vendeur de coquille Saint-Jacques qui les fait tremper dans l’eau pour augmenter leur volume, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 31 mai 2005. On constate que ces formes de tromperie par modification de l’apparence des choses sont souvent commises dans la vente de véhicules d’occasion, en particuliers en cas de manipulation du compteur km. Par exemple, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 mai 2006.

 

La tromperie peut consister en un simple mensonge. L’auteur va simplement affirmer le contraire de la réalité. Le mensonge peut être sous différentes formes (orale, écrite…). Si le mensonge est oral, difficulté de preuve mais peut constituer l’acte. C’est une manière plus simple de réaliser l’infraction, c’est une forme de tromperie qui parce qu’elle est facile, se rencontre souvent. Jurisprudence massive avec des domaines varié s: vente d’objet d’art, alimentaire…Evidemment, lorsque l’agent affirme une chose faute, c’est une façon de passer la réalité sous silence mais il se peut qu’il n’énonce rien de faux mais qu’il se taise sur un élément déterminent. Il s’agit alors d’une tromperie par omission, la réticence.

 

2) La tromperie par omission.

 

C’est une simple réticence, qui se trouve au diapason du code civil pour le dol. Si dès lors, le droit pénal sanctionne au titre de la tromperie le fait pour le vendeur d’avoir gardé le silence, cela révèle l’existence d’une obligation d’information que le code vise dans l’article L111-1 du Code de la consommation qui énonce une obligation générale sans sanctions. La tromperie est un moyen de sanction=>vendre une voiture d’occasion sans dire qu’elle avait été gravement endommagé, le fait de vendre des cosmétiques sans dire qu’elles contiennent des substances interdites par la loi, arrêt de la Cour d’appel de Paris de 2007. De même, ne pas mentionner un traitement chimique appliqué à des dentées alimentaires, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 décembre 1988. Egalement, c’est cette tromperie qu’on retrouve pour l’affaire du sang contaminé : les personnes hémophiles n’étaient pas informé es des caractéristiques du sang.

 

  1. B) L’objet de la tromperie.

 

Article L213-1 du Code de la consommation établie une liste qui fait apparaître trois objets possibles de la tromperie :

– 1°) La tromperie peut porter sur la nature, l’espèce, l’origine les qualités substantielle, la composition, ou la teneur en principe utile de toutes marchandises.

– 2°) Elle peut porter également, sur la quantité des choses livré es ou sur leur identité par la livraison d’une marchandise autre que celle déterminée qui agit l’objet du contrat.

– 3°) Elle peut porter encore sur l’aptitude à l’emploi, les risques inhérents à utilisation du produit les contrôles effectuées, le modes d’emploi ou les précautions à prendre ».

C’est une liste limitative ce que révèle l’absence de l’adverbe notamment. Donc, un objet non visé par cet article ne peut être le siège d’une tromperie punissable. L’exemple classiquement donné de cet objet non prévu est précisément la valeur de la chose. Il est donc de jurisprudence constante que le fait de vendre une chose à une valeur supérieure à sa valeur réelle n’est pas en lui-même le délit de tromperie. La Cour de cassation la rappelé dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 25 octobre 1990. La Cour précise que cette vente n’est pas en elle-même constitutive : en effet, c’est seulement d’une façon directe que la tromperie ne peut être sanctionnée au sens de l’article L213-1 du Code de la consommation. En revanche, la valeur de la marchandise est un élément qui peut être prise en compte indirectement lorsque la tromperie porte sur une qualité substantielle qui a pu faire croire à l’acquéreur que la marchandises qu’il achète est de grande valeur et qu’en réalité, cette qualité fait défaut et que la valeur de la chose est en réalité dérisoire. Il s’agirait par exemple d’une tromperie qui consisterait à vendre un tableau comme un tableau de maître alors que c’est une copie. Cela peut se traduire par une différence de prix considérable : la tromperie peut être sanctionnée non du fait de la valeur mais du fait du mensonge sur la qualité de la chose. Si le bien est vendu sans aucune qualité particulière, l’acquéreur ne saurait se plaindre d’une tromperie au sens de l’article L213-1 du Code de la consommation. Cette exclusion faite, il reste que les objets sur lesquels peut porter la tromperie sont nombreux et variés et peuvent être regroupés en trois catégories: les qualités substantielles(1), la quantité ou l’identité de la chose (2) ou l’usage de la chose.

 

1) Les qualités substantielles de la chose.

 

La tromperie peut porter sur la nature, l’espèce, l’origine, les qualités substantielles, la composition, ou la teneur en principe utile de toutes marchandises. Les qualités substantielles ne représentent qu’un élément parmi les autres mais représente en pratique un élément plus important et le plus large. En effet, à bien y regarder, le législateur ne fait que décliner certaines des qualités substantielles, la nature et l’origine étant des qualités substantielles donc le critère apparaît comme un critère général que la jurisprudence a largement développé. Si on reprend cette première liste d’objet, on remarque que le législateur envisage :

 

– la nature de la chose : ce qui désigne l’ensemble des propriétés qui définissent une chose une marchandise, la jurisprudence dira par exemple que vendre de la margarine pour du beurre en est un exemple.

– sur l’espèce : sur ce point, peu de jurisprudence, elle se rapporte à l’espèce animale ou végétale.

 

l’origine est quant à elle souvent l’objet de la tromperie. Il peut s’agir de l’origine géographique. Arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux du 19 janvier 1999 a rappelé que constituait une tromperie sur l’origine le fait de vendre des truffes chinoises en les faisant passer pour des françaises. Ce peut être une fausse indication de provenance de la marchandise. Il existe sur ce point des dispositions spéciales que sont celles de l’article L217-1 du code de la consommation. Par exemple, en ce qui concerne le mode de fabrication. La tromperie sur l’origine peut être également la tromperie sur l’appellation d’origine : elle est définie dans le Code de la consommation à l’article L115-1 du Code de la consommation et désigne la dénomination d’un pays ou d’une région servant à désigner un produit avec certains caractères. Il est également question dans cette première catégorie de la tromperie sur la composition: ingrédients avec lesquels auraient été composées des denrées alimentaires.

 

– tromperie sur la teneur en principe utile, ce qui signifie que la chose ne présente pas les qualités qui lui permette de présenter toutes les qualités que pouvait en espérer l’acquéreur : affaire célèbre avec une livraison de graines de vers à soie qui étaient stérile donc l’obtention de fil de soie n’avait pas pu être réalisé, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 février 1860.

 

Ces éléments peuvent être tous perçus comme des applications particulières de la tromperie sur les qualités substantielles, critères visés à l’article L213-1 du Code de la consommation, critère qui est plus large car la jurisprudence l’a considérablement développé au point d’en faire l’un des éléments principaux de la tromperie. On l’entend comme la qualité déterminante du consentement de la victime :

 

-une qualité subjective: La jurisprudence pénale en ce qui concerne la tromperie considère que cette qualité peut être subjective, en ce sens qu’elle est attendue d’une catégorie particulière de personne. L’illustration la plus classique porte sur la viande cacher. Par exemple, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 mai 1971 : la qualité casher d’une viande peut être considérée comme constituant pour certains acheteurs une qualité substantielle de la marchandise vendue. Le délit sera constitué si une viande non cacher et vendue comme telle.

-une qualité objective: Le plus souvent dans la jurisprudence, il apparaît que la qualité substantielle, qui est déterminante du consentement est une qualité substantielle non pour une catégorie de personne mais pour l’ensemble des acheteurs, dans ce cas, la qualité devient objectivement substantielle en ce sens qu’on peut considérer que n’importe quel acheteur attend qu’elle présente cette caractéristique. Illustrations de la jurisprudence: on retrouve la question de la définition. Il faut procéder à une appréciation in abstracto pour déterminer ce qui va constituer un fond commun de qualité que toute personne à l’occasion d’un contrat donné, considère comme substantielle. Parfois, pas de souci : arrêt de la Cour d’appel de Paris 8 juin 2007 : le fait qu’un pain ou une pâtisserie ne soit pas composé avec de la farine mélangé à des produits souricides est une qualité essentielle. De même, l’authenticité d’un objet d’art: une personne qui fait l’acquisition d’un tableau d’é poque s’attend à ce que l’objet soit authentique. Mais, il y a des qualités substantielles objectives plus techniques: dès lors qu’une qualité que doit présenter un produit donné, est fixée par une réglementation, cette qualité constitue une qualité substantielle quand bien même le contractant n’en aurait pas conscience car il ignorerait cette réglementation. Notamment en matière alimentaire: règles sérieuses. Par exemple, il a été jugé que la mise sur le marché d’un produit non conforme à la réglementation qui en fixe la composition constitue l’élément maté riel du délit de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 mars 1994.

 

2) La quantité ou l’identité de la chose.

 

Elle peut porter sur la quantité ou sur l’identité par la livraison d’une marchandise autre que la chose déterminée qui fait l’objet du contrat. La tromperie est alors commise au stade de l’exécution. La jurisprudence est nombreuse sur la quantité, moins sur l’identité. La tromperie sur le poids de la marchandise, sa taille. Pour l’identité, peu de jurisprudence, donc on donne souvent l’exemple de l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 8 octobre 1974 : un propriétaire de débit de boisson avait transvasé une bouteille de Pastis 51 et avait reversé le reste dans une bouteille de Ricard et servait ensuite comme du Ricard.

 

3) L’usage de la chose.

 

C’est le l’article L213-1 3°) du Code de la consommation qui précise qu’il peut y avoir tromperie sur l’aptitude à l’emploi, les risques inhérents à utilisation du produit les contrôles effectué es, le mode d’emploi ou les précautions à prendre. Cette catégorie est la plus récente, on la doit à la loi du 10 janvier 1978. Cela peut donner lieu à des applications différentes :

– pour l’inaptitude à l’emploi. Voiture d’occasion déjà immatriculée donc impossible d’obtenir une carte grise en France, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 mai 1995. L’inaptitude peut également être d’ordre technique ce qu’illustre le fait de vendre une TV, sans préciser qu’elle n’est pas apte à recevoir canal +, arrêt de la Cour d’appel de Paris du 30 septembre 1995. De même éditeur de CDs dotés d’un système anti-copiage et qui les avait mis en vente en omettant d’informer les acheteurs sur les restrictions et en particuliers le fait qu’il n’était pas possible de les lire sur certains lecteurs.

 

Arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 30 septembre 2004. Les conséquences ne semblent pas graves.

 

– Il n’en est pas ainsi pour ce qui concerne les risques à la sécurité. Il y a tromperie lorsqu’une chose est vendue sans qu’elle soit conforme aux normes obligatoires en matière de sécurité. Risque d’accident : il a été jugé que la tromperie peut consister à vendre du maté riel électrique non conforme aux normes de sécurité. Egalement, beaucoup de jurisprudence sur les jouets don t certains importés de Chine ne sont pas conformes aux normes européennes, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 7 avril 1999. Pour savoir la marchandise présente ce défaut, ce sont les juges du fond qui déterminent s’il y a ou non conformité à la norme qui est applicable aux dits produits. Ce peut être une appréciation très technique, difficile donc il y aura souvent des expertises. Egalement, tromperie sur le contrôle, pas seulement dans la cadre de la vente, tromperie sur les contrôles effectués dont se rend coupable le garagiste qui altère les résultats du contrôle technique de voiture, plusieurs arrêts de la Cour d’appel, arrêt de la Cour d’appel de Paris du 29 avril 1992.

 

  1. II) Elément intentionnel.

 

 

C’est une infraction intentionnelle donc dol général : l’individu a eu conscience des caractères inexacts qu’il prêtait au produit incriminé. C’est la conscience de l’inexactitude de la présentation de ces marchandises ou de ses services. L’idée que ce soit un délit intentionnel est étrange car il peut y avoir tromperie sans mensonge. Les juges du fonds doivent donc trouver les éléments qui prouvent la conscience du prévenu. Cette exigence est souvent rappelée par la Cour de cassation, mais elle se révèle en pratique peu contraignante. On est ici en présence d’une jurisprudence qui montre une manière souple des juges pour apprécier l’élément intentionnelle d’une infraction. C’est typique d’une jurisprudence qui se développe dans le domaine des affaires, compte tenu de la qualité de l’auteur. L’infraction de tromperie peut être commise par toute personne, il peut s’agir d’un simple particuliers, d’un vendeur occasionnel, l’article vise quiconque sans qualité particulière :

 

– les professionnels : Mais le plus souvent, l’infraction de tromperie est commise, non pas un vendeur occasionnel mais par un professionnel. A leur égard, l’élément intentionnel subit des infléchissements. La Cour estime que lorsque le prévenu est un professionnel, les juges peuvent déduire la mauvaise foi de celui-ci du fait qu’il s’est soustrait aux obligations qui lui incombait personnellement d’exercer les contrôles nécessaires. La jurisprudence le répète, par exemple l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 novembre 1993. Une solution réaffirmée e notamment dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 mars 2003. C’est une jurisprudence constante. Pour autant, la Cour de cassation tend à conserver une rigueur théorique en disant qu’il faut une intention, et que cette intention n’est pas présumé e. Mais, il n’en demeure pas moins qu’en pratique, dans la façon dont les juges du fonds apprécient cet élément, cela équivaut à une présomption de culpabilité en pratique, qui concerne principalement les fabricants, vendeurs et grossistes. La jurisprudence est donc sévère envers ces personnes car en vue de leur qualité, ces personnes sont considérées comme de facto n’ayant pas accompli les contrôles qui auraient permis de détecter le défaut de la chose vendue ou l’objet de la prestation de service. La Cour de cassation, la plupart du temps approuvent les juges du fond qui se fondant sur la qualité du prévenu, vont considérer que compte tenu des circonstances de l’espèce, sa mauvaise foi est caractérisé car la mise en vente du produit révèle l’absence de contrôle de sa part. Et il est extrêmement rare que le prévenu parvienne à renverser cette Présomption. Bien sûr, en droit cette Présomption n’est pas irréfragable mais dans les faits, il est très difficile de rapporter la preuve pour le prévenu qu’il ignorait le défaut. C’est donc de façon exceptionnelle que les juges du fonds admettent que le prévenu professionnel avait correctement mis en œuvre les contrôles sur la qualité de la marchandise qui lui incombait, auquel cas l’élément moral ne sera pas caractérisé. Arrêt de la Cour d’appel de Grenoble du 30 avril 2007 donne un de ces rares exemples : il s’agissait d’une affaire qui ne présente pas d’intérêt juridique mais qui est intéressante dans ses faits. Un consommateur avait acheté un paquet de pâtes et avait trouvé dedans un mulot desséché. Qualité substantielle objective du fabricant de pâte car tout acheteur peut légitimement s’attendre à ce que le paquet ne contienne pas un mulot momifié. L’élément matériel était donc caractérisé. En revanche, c’est l’élément moral qui a fat défaut car la CA de Grenoble à considérer que le prévenu, président de la société qui fabriquait les pâtes avaient procédé à un contrôle de la chaîne de fabrication des pâtes, qui était irréprochable et qu’était par le plus malencontreux des hasards et par les termes d’une possibilité infime. Les juges ont considéré que l’élément moral faisait défaut et le prévenu a été relaxé. Le prévenu doit présenter une preuve convaincante de ces contrôles.

 

– cela concerne également les importateurs car la mauvaise foi des importateurs résultent de l’absence ou de l’insuffisance de contrôles de conformité antérieurement à la mise sur le marché français. La jurisprudence invoque ici fréquemment l’article L212-1 du code de la consommation, visée avec l’article L213-1 du Code de la consommation qui est le siège de la répression de la tromperie. Article L212-1 alinéa 2 du Code de la consommation : il est prévu que le responsable de la première mise sur le marché d’un produit est tenu de vérifier que celui-ci est conforme aux prescriptions en vigueur. La Cour de cassation assimile l’importation d’un produit, d’une marchandise à la première mise sur le marché que vise ce texte. Ce qui est pratique a pour conséquence d’imposer à l’importateur qu’il vérifie un certain nombre de points, par exemple, il doit vérifier la composition des produits et à cet égard, il ne peut se fier aux seules informations données par le fabricant étranger, il doit vérifier la qualité des produits qu’il importe. Par exemple, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 17 octobre 1991, du 10 décembre 1996 : jurisprudence constante étant précisé que ce contrôle à la charge de l’importateur doit avoir lieu lorsque les lots arrivent sur le territoire national. En pratique, il donne délégation pour que soit vérifié la qualité, les contrôles de la marchandise. Il doit vérifier que c’est conforme aux normes CCE, normes de sécurité européennes, donc il doit refuser de mettre sur le marché les produits qui ne correspondent pas à ces normes, mais il doit également veiller aux normes françaises. Et même a t il été précisé, le contrôle doit le cas échéant porter sur la conformité des marchandises aux usages commerciaux en vigueur. Ce contrôle a été rappelé dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 17 janvier 1996 rappelle cette dernière exigence (usages commerciaux en vigueur). Depuis quelques années, on constate que ce sont souvent les importateurs de jouets venant de la Chine qui sont condamnés pour tromperie car ils sont mis en vente alors qu’ils ne répondent pas aux normes de sécurité et il y a eu ces dernières années un certain ombre de condamnation. La Cour a précisé que l’importateur n’est pas dispensé de son obligation de vérification personnelle de la conformité des produits importés, même lorsque l’importateur dispose d’un certificat de conformité des jouets aux normes européennes, certificat qui a pu être établi par un laboratoire chinois qui bénéficiait d’un label délivré par l’organisme d’accréditation de Hong-Kong. Ce document n’avait aucune valeur auprès de la Cour de cassation. Il n’y a donc qu’une hypothèse qui sera peu vérifier en pratique où l’importateur pourra s’exonéré: lorsqu’il aura procéder aux vérifications de manière normales.

 

Section 3 : la répression

 

 

  1. I) Les peines encourues par les personnes physiques.

 

 

  1. A) Il y a tout d’abord des peines principales.

 

Des peines qui s’appliquent aussi bien à la tromperie consommée qu’à la tentative de tromperie car le simple fait de tenter de tromperie est incriminé à l’article L213-1 du Code de la consommation. Emprisonnement de 2 ans ou une amende de 37 500€ ou bien l’une ou l’autre de ces deux peines seulement. Le plus souvent, c’est l’amende, il est rare qu’une peine d’emprisonnement soit prononcée. A ces peines, peuvent s’ajouter des causes d’aggravation de la sanction qui ont pour conséquence de porter les peines de l’article L213-1 du Code de la consommation au double. C’est le cas prévu à l’article L213-2 du Code de la consommation : lorsque la tromperie est dans l’une des circonstances aggravantes, deux séries de circonstances aggravantes :

 

  • la première cause d’aggravation tient au fait que la tromperie aura eu pour conséquence de rendre l’utilisation de la marchandise dangereuse pour la santé de l’homme ou de l’animal (cette dernière catégorie retentit sur l’homme car ce sont des animaux qui seront consommés). C’est cette circonstance aggravante qui a été retenue dans l’affaire du sang contaminé.

 

  • la seconde circonstance aggravante prend en compte le fait que la tromperie a été dans le cadre d’une manœuvre particulièrement organisé e, ce qui est le cas si la tromperie ou sa tentative ont été commises par le biais de manœuvre ou de procédé qui tendent à fausser des rapports d’analyse ou à modifier frauduleusement la composition des marchandises.

 

  • A ces peines principales s’ajoutent des peines complémentaires.

 

Il s’agit de peines complémentaires facultatives ou obligatoires. Plusieurs séries sont prévues, ces peines sont nombreuses, et précisés par des textes complexes. Elles consistent, pour les grandes catégories, en deux séries de mesure. Tout d’abord des mesures de confiscation et de destructions de marchandises, ce qui sera utile si ce sont des marchandises dangereuses pour la santé mais également des mesures qui consistent en l’information du public sous forme d’affichage. Le public est alors informé des pratiques des auteurs. Les articles L216-2 et L216-3, L213-1 et L213-2 du Code de la consommation prévoient ces peines.

 

  1. II) Les peines encourues par les personnes morales.

 

Il faut rappeler qu’avant que le législateur généralise la responsabilité des personnes morales, une loi était intervenue pour prévoir ne matière de fraude soit tromperie et falsification, la responsabilité des personnes morales, loi du 12 juin 2001 relative au renforcement de la prévention et de la répression des mouvements sectaire. Le code de la consommation, article L213-6 du Code de la consommation prévoyait la responsabilité des personnes morales. Aujourd’hui encore, article L213-6 du Code de la consommation prévoit cette responsabilité pénale, laquelle de toute façon, découlerait aujourd’hui de la généralité de la responsabilité des personnes morales. Ces peines peuvent, en vertu de l’article L213-6 du Code de la consommation, être l’amende, qui est déterminé suivant les modalités du Code pénal, en son article L131-38 qui prévoit que l’amende encourue par une personne morale pour une infraction donnée est portée à un taux maximum qui est égale au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques. D’autres parts, sont prévues pour les personnes morales, en vertu de l’article L213-6 du Code de la consommation, un certain nombre de peines que mentionnent l’article L131-39 du Code pénal : placement sous surveillance judiciaire ou encore la fermeture définitive ou temporaire de l’établissement qui a servi à commettre l’infraction.

 

On a donc fini l’étude de l’infraction de tromperie, premier pilier du droit pénal de la consommation, la seconde étant les pratiques commerciales trompeuses.

 

Chapitre 2 : les pratiques commerciales trompeuses.

 

 

Avant, on parlait de publicité trompeuse et avant même qu’il soit question de publicité trompeuse, il s’agissait de publicité mensongère donc on a connu en ce domaine une évolution des incriminations, dont les étapes les plus récentes sont issues de deux grandes lois de 2008 puisque l’incrimination de pratiques commerciales trompeuses est issue de la loi dite Châtel du 3 janvier 2008 et la loi LME est venue modifier certains des points relatifs prévus par la loi de janvier. C’est une infraction substituée à celle de publicité trompeuse. Cela ne se réduit pas à une modification terminologique. Il s’agit dans le fond du droit d’une évolution de l’infraction elle-même mais sans qu’il y ait de rupture frontale, brutale avec le droit antérieur puisque les pratiques commerciales trompeuses constituent une infraction qui va continuer d’avoir pour noyau dur la publicité trompeuse. Cette infraction a un périmètre plus large, elle va donc permettre de réprimer des comportements qui n’auraient plus l’être avant par la publicité trompeuse: c’est donc une innovation extensive. Pour bien comprendre cette innovation, il faut rappeler dans une brève introduction l’évolution du droit en matière de publicité qui a donné lieu à l’incrimination de pratiques commerciales trompeuses.

 

Il faut remonter aux années 1950, le législateur s’est rendu compte que la publicité commerciale alors en plein essor pouvait représenter un danger pour les consommateurs. La publicité commerciale est un discours qui a pour objet de prôner, de venter les qualités de tel ou tel objet et donc n’a pas pour objet d’informer, ce qui relève de la publicité légale. Le but est ici de séduire donc utilisation de procédés comme l’humour, la dérision, l’emphase donc pas de reflet scrupuleux de la réalité, au contraire: représentation élogieuse, plaisante. Dans une certaine mesure, c’est parfaitement acceptable et c’est le principe de la liberté d’expression qui s’applique. Dans une certaine mesure, c’est une pratique licite. Parfois, il y a des excès qui ont pour effet, pour conséquence d’abuser de la crédulité des consommateurs et le pas est vite franchi entre une description emphatique et ce qui va constituer une présentation trompeuse de celle-ci. Avant toute intervention du législateur, si une publicité avait trompé le consommateur, on pouvait envisager les poursuites de droit commun comme l’escroquerie mais les éléments constitutifs sont parfois difficiles à prouver car suppose l’existence de manœuvre. Donc, cela a révéler une lacune juridique donc intervention du législateur. Loi du 2 juillet 1963. C’est la première intervention du législateur en France. Par cette loi de 1963, le législateur a incriminé la publicité mensongère pour réprimer certaines abus dans l’usage du discours commerciale mais cette incrimination s’est vite révélée trop étroite, seules était visé la publicité mensongère qui est plus étroite que la publicité trompeuse ou de nature à induire en erreur. Qui dit mensongère dit mensonge. Or le mensonge n’est pas établi en droit pénal par la seule fausseté de l’affirmation. Il faut que soit caractérisée la conscience qu’avait l’agent d’énoncer des propos contraire à la réalité. Or cette intention de tromper autrui en énonçant un mensonge ne caractérisait pas toujours les discours publicitaire qui pouvaient être dangereux pour les consommateurs mais ne reposait pas sur une mauvaise foi de l’agent qui n’avait pas la volonté de tromper. Or, il fallait aussi sanctionner ces actes.

 

D’où la nécessité d’une nouvelle loi qui débouche sur la loi du 27 décembre 73 dite loi Royer. Cette loi est venue incriminer la publicité trompeuse ou publicité de nature à induire en erreur. C’est donc un élargissement de l’incrimination qu’apporte cette loi puisque désormais la publicité peut être réprimée parce que trompeuse sans être mensongère. Cela contribue à renforcer la protection des consommateurs. Les dispositions issues de la loi de 1973 ont été inséré es dans le Code de la consommation aux articles L121-1 à L121-7 du Code de la consommation. L’article L121-1 du Code de la consommation : définition longue et lourde. Dans son ancienne rédaction était interdite toute publicité comportant sous quelques forme que ce soit des allégations, indications ou présentations fausse ou de nature à induire en erreur lorsqu’elle porte sur l’un des éléments ci-après, s’en suit une liste très longue. Le législateur avait voulu embrasser largement les pratiques de publicité trompeuse. De fait, le législateur avait réussi de façon satisfaisante à cerner la publicité trompeuse. Ce texte a donné lieu à une jurisprudence très fournie. L’infraction était en effet l’une des infractions les plus fréquemment commise en droit pénal de la consommation: jurisprudence qui ne se contente pas d’appliquer mais interprète. Cette incrimination est une incrimination dont on ne peut se désintéresser. Aujourd’hui encore, la pratique commerciale trompeuse continue de consister en une publicité trompeuse donc pas de rupture avec le droit antérieur: Prolongement qui consiste en un élargissement de l’incrimination : loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence…qui a modifié L121-1 du Code de la consommation qui substitue les pratiques commerciales trompeuses à la publicité trompeuse. Ce n’était pas prévu, cela s’est fait au hasard d’un amendement. Transposition d’une directive du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à- vis des consommateurs. Est ce que cette transposition était nécessaire? En effet, on avait déjà un droit très protecteur des consommateurs, ce n’est pas certain. On peut avoir le sentiment que le législateur a voulu faire preuve de zèle. Sont donc introduites dans le code les pratiques commerciales trompeuses mais à peine avait-on pris acte de cette modification qu’une autre loi est encore intervenue.

 

C’est la loi du 4 août 2008, LME qui est venue modifier certaines des dispositions de la loi du 3 janvier 2008 ce qui est révélateur d’une façon de légiférer : le législateur procède touche par touche en modifiant au gré, si ce n’est au hasard, des textes très récents ce qui confère au droit pénal une certaine insécurité juridique : un texte est à peine reçu qu’il fait l’objet d’une modification.

 

Ces pratiques commerciales trompeuses sont un des aspects des pratiques commerciales déloyales définies à l’article L120-1 du Code de la consommation. Cet article dit que ces pratiques sont interdites. L’article précise notamment, afin de définir de manière peu précise mais donnant des éléments de compréhension : en tant que pratiques commerciales qui sont contraires aux exigences de la diligence professionnel et qu’elle altère ou est susceptible altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Les pratiques commerciales déloyales englobent les pratiques commerciales trompeuses, mais également les pratiques commerciales agressives issues de la loi du 3 janvier 2008 qui sont définies aux articles L122-11 et L122-11-1 du Code de la consommation.

 

Les valeurs protégées doivent être mises en évidence car permettent de mieux comprendre ce que le législateur veut protéger par ces divers textes. L’évolution des incriminations relèvent une évolution des valeurs que le législateur veut protéger. Dans un premier temps, pour réprimer la publicité mensongère, le législateur l’a fait autant pour protéger le consommateur que pour protéger les concurrents entre eux. La ratio legis, la valeur protégée était autant la protection du consommateur que celle d’une saine et loyale concurrence. Progressivement et à mesure que le droit de la consommation devenait important, le législateur a voulu protéger d’avantage les consommateurs. C’est cette évolution que parachève la directive du 11 mai 2005 à l’origine de l’incrimination des pratiques commerciales trompeuses. En transposant cette directive, le législateur montre qu’il agit ici désormais essentiellement dans l’intérêt des consommateurs à l’égard de certaines pratiques développé es par les entreprises. Cette évolution des valeurs se répercutent sur les personnes qui peuvent être victime ou auteur.

 

Enfin, il faut signaler que cette infraction, et avant l’infraction de publicité trompeuse possède des points communs avec d’autres qualifications pénales, que ce soit du droit pénal de la consommation ou du droit pénal des biens. En particuliers, ces pratiques peuvent être proches de l’infraction de tromperie, on a ce même élément qui consiste dans le fait qu’une personne est abusée e dans l’idée qu’elle se fait d’un service mais également, on trouve des liens avec l’escroquerie du code pénal. La question est alors de savoir si une même pratique peut être saisie sous ces différentes qualifications : la jurisprudence s’attache à savoir qu’elle est la valeur protégée :

 

  • En ce qui concerne l’escroquerie, la valeur protégée est la propriété qui est une valeur différente de celle sous-jacente à l’incrimination de pratique commerciales trompeuses où on cherche la validité du consentement. Donc, dans la mesure où la valeur procédée est différente, si les éléments sont réunis, il est possible de cumuler.
  • De même, cumul avec la tromperie: pour la tromperie, il s’agit de réprimer un comportement positivement malhonnête alors que la publicité trompeuse repose sur la simple possibilité d’induire en erreur donc des arrêts de la Cour de cassation ont admis le cumul de la tromperie et des publicités trompeuses. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 mai 2005. Mais bien souvent, on remarquer que les juges du fonds retiennent cette double qualification. Jugement du TGI de Paris de 2007 : pour un site internet de vente en ligne qui présentait des sacs comme étant de grandesmarques alors que ce n’étaient pas des sacs de marques.

 

Section 1 : les éléments constitutifs

 

 

  1. I) Elément matériel.

 

L’étude de l’élément maté riel suppose que soit définie la pratique commerciale.

 

 

  1. A) La pratique commerciale.

 

Incriminer aujourd’hui les pratiques commerciales trompeuses au lieu de la simple publicité, c’est une extension car la qualification est plus large. Mais si cette incrimination permet de réprimer des comportements qui n’auraient pu l’être avant, il n’en demeure pas moins qu’une partie non négligeable d’application de ce texte résidera dans les publicités trompeuses : cela restera le noyau central donc il ne faut pas faire l’impasse sur ce en quoi consistaient ces pratiques de publicité commerciales trompeuses.

 

1) L’extension réalisée par le passage de la publicité à la pratique commerciale.

 

Trois points:

 

– le premier point a pour objet de préciser en quoi consiste cette notion nouvelle. Le législateur s’est abstenu de lui donner une définition. L’article L120-1 du Code de la consommation définit les pratiques commerciales déloyales mais on n’a pas de définition sur la pratique commerciale en elle – même ce qui est regrettable car cette notion est au cœur de plusieurs incriminations pratiques commerciales trompeuses pratiques commerciales agressives. Or, c’est une notion dont on peut penser qu’elle est une définition large. La non-précision introduit donc, sinon une insécurité, une certaine incertitude ce qui n’est pas satisfaisant au regard du principe de légalité qui suppose une certaine précision dans les incriminations. Quoi qu’il en soit, la notion de pratiques commerciales est sensé être une extension comme le suggère le fait que pour qu’il y ait une publicité au sens de l’incrimination, il faut un message destiné à un public. Pour qu’il y ait publicité, commerciale ou légale, il faut un caractère de publicité, il faut qu’un public soit visé, autrement dit, rationnellement, c’est différent d’une audience purement privée: si audience purement privée, il ne peut y avoir publicité trompeuse. En revanche, la pratique commerciale n’exige pas une publicité destinée à un public. Donc, on peut penser que la pratique permet de réprimer les comportements qui n’ont pas fait l’objet de publicité, qui serait resté privé : par exemple un message destiné à un consommateur dans une relation privée.

 

– la pratique commerciale doit avoir un objet déterminé. Il faut d’abord se demander à quelle opération tend la pratique commerciale; à quoi la pratique commerciale incite-t-elle le consommateur. Jusqu’à sa modification par la loi du 3 janvier 2008, l’article L121-1 (ancien) qui incriminait la publicité trompeuse visait la vente de bien et la prestation de service. Aujourd’hui, l’article L121-1 du Code de la consommation continue, mais de façon moins nette, de renvoyer à la vente ou la prestation de service qui apparaissent donc comme étant l’objet de ces pratiques commerciales trompeuses. Par ailleurs, autre précisions sur cet objet, le législateur s’il n’a pas défini la notion de pratique commerciale a établi une liste qui est fournie, longue de pratiques commerciales qui sont trompeuses et cette liste fait apparaître un nombre important d’objets sur lesquels peut porter le caractère trompeur de la pratique incriminé e. On constatera ainsi en se reportant aux textes crées par les lois de 2008 que la liste des pratiques commerciales réprimées car trompeuse est longue donc diversité d’objet sur lesquels portent la tromperie à l’image de ce que prévoyait le législateur dans la publicité trompeuse.

 

– les destinataires : enfin, pour terminer d’évoquer l’extension, il faut préciser quelles sont les personnes qui pourront être destinataires ou auteurs de ces pratiques ce qui invitent à se demander quelles sont les personnes qui pourront être victimes ou auteurs. A cet égard, si on distingue pratique et publicité, c’est l’une des innovations les plus frappantes. Cette évolutions se vérifie à un double égard par une sorte de chassé croisé qui se rattache à une évolution des valeurs, de plus en plus accent sur la protection du consommateur alors qu’avant, il s’évertuait à instaurer une concurrence saine.

 

– Les victimes : sous l’article L121-1 ancien du Code de la consommation, la jurisprudence dit que cela ne concernait pas la seule publicité destinée aux consommateurs mais aussi celle destinée au professionnel, ce qui était conforme à la ratio legis initiale de l’incrimination puisque le but était aussi de protéger les professionnels. L’incrimination de pratiques commerciales trompeuses se recentre sur la protection du consommateur dans l’esprit de la directive de 05. Le professionnel est en partie écarté de la protection de la loi aujourd’hui : l’article L121-1 du Code de la consommation nouvellement rédigé énumère en effet toute une série de pratiques commerciales trompeuses. A la fin de cet article, dernier alinéa dit que certaines de ces pratiques peuvent concerner des professionnels. Donc, il y a toute une série de pratiques qui ne peuvent être commises qu’à l’encontre de consommateur donc les professionnels ne peuvent en être victime donc cloisonnement. C’est par cette disposition ultime de l’article, §3 que le législateur accorde sa protection au professionnel.

– Les auteurs: Pour ce qui concerne les auteurs, sous l’empire de l’article L121-1 ancien, il était de jurisprudence constante que la publicité illicite pouvait émaner d’un simple particuliers, ou même, cette infraction pouvait être commise par une association à but non lucratif. Cette jurisprudence paraît être remise en cause par l’incrimination de pratiques commerciales trompeuses. En effet, la directive du 11 mai 2005 transposée a pour objet de protéger les consommateurs contre les pratiques développées par les entreprises. Dès lors, cette incrimination de pratiques commerciales trompeuses d’inscrit dans le contexte d’une activité commerciale et on peut donc avoir l’impression que cette jurisprudence peut être remise en cause car un simple particuliers ne peut développer des pratiques commerciales. Il faudrait donc considérer que désormais, les simples particuliers ne pourraient se voir reprocher une pratique trompeuse car il faut que ce soit une pratique commerciale alors même qu’ils pouvaient se rendre coupable d’une publicité trompeuse.

 

2) La publicité aspect principal de la pratique commerciale.

 

Lorsqu’on étudie aujourd’hui les pratiques commerciales trompeuses, on a peu de recul sur cette incrimination mais on peut continuer à se référer à ce que la jurisprudence avait précisé au sujet de la publicité trompeuse, car si toute pratique n’est pas une publicité, toute publicité est une pratique. Donc, ce qui a été précisé par la jurisprudence pour cette incrimination reste applicable, sauf que ce sera sous une nouvelle qualification. La publicité n’était pas définie, c’est la jurisprudence qui s’était employé à préciser cette notion et l’Interprétation de cette notion reste d’actualité. Pour la Cour de cassation, cela consiste en tout moyen d’information destiné à permettre au client potentiel de se faire une opinion sur les caractéristiques des biens ou services qui lui sont proposé. Plusieurs arrêts, exemple arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 octobre 1998. Cette définition de la publicité telle qu’elle résulte de cette jurisprudence permet de réduire la publicité commerciale à sa plus simple disposition. Le seul affichage du prix, même s’il ne s’accompagne d’aucune autre circonstance ou mention peut être constitutif d’une publicité : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 mars 1994. Solution reprise par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 octobre 1998.

 

Cela donne donc à la notion une large portée qui met l’accent sur la simple fonction informative de la publicité : information destinée à permettre au client de se faire une opinion. C’est donc une définition qui est trop restrictive car mettant l’accent sur le caractère informatif, elle omet le caractère incitatif. Je vous l’ai dit, au début de la présentation que la publicité n’a pas nécessairement pour objet l’information, c’est la publicité légale qui informe, la publicité commerciale a pour objet la s éduction. Il n’y a pas que l’information => la jurisprudence semble considérer qu’il ne pouvait y avoir de publicité dans des films d’informations ou articles de presse donc la jurisprudence n’omet pas le caractère incitatif, arrêt de la Cour d’appel d’Aix en Provence de 1980.

 

L’existence d’une publicité semble dire qu’elle suppose une publication donc il faut un public, autrement dit, la jurisprudence exige pour qu’il y ait publicité, qu’un message soit porté à connaissance du public ce qui exclut toute publicité lorsque la mention litigieuse est invisible d’acheteurs potentiels. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 15 mars 1990 l’affirme. De même, il a été jugé d’une façon qui est conforme à l’étymologie que l’envoi d’un document par lettre ne saurait constituer une publicité lorsqu’il est adressé dans le cadre d’une correspondance privée à une personne déterminée, personne à laquelle est réservé le document: cela exclut la qualification de publicité comme l’a précisé un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 novembre 1986. Aujourd’hui, l’envoi d’un document dans ce cadre pourrait tomber sous la qualification de pratique commerciale.

Support : article L121-1 ancien du Code de la consommation ne faisait preuve d’aucunes exigences particulières sur la forme ou le support de la publicité. Au contraire, les termes sont larges puisque la publicité était interdite sous quelques formes que ce soit: la jurisprudence sur la publicité reste applicable: une publicité trompeuse peut être réalisée par des sons, des écrits, des images: la doctrine pense même que la publicité pourrait être réalisée par des odeurs. La jurisprudence montre que dans ce domaine, l’imagination est sans limite: supports novateurs, surprenant: on a la presse écrite, audiovisuel(cinéma, radio, TV), les affiches placardées dans les lieux publics, à cela s’ajoute des modes différents: mentions qui figurent aux verso d’assiette (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 28 novembre 1983), l’étiquette apposée sur des marchandises : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 15 mai 2001 en ce sens au sujet d’étiquettes apposé sur des bouteilles et qui comportait une fausse mention de médaille d’or. Egalement, nombre d’étoiles d’un hôtel : arrêt de la Cour d’appel de Paris du 10 mars 1995. De même dans les documents contractuels, facture, bons de commande. Dernier support en date de publicité qu’on doit à l’innovation technologique: sites internet qui sont venus rejoindre cette liste jurisprudentielle de support.

 

  1. B) Le caractère trompeur.

 

On pouvait déjà estimer que l’ancien article était long, ce n’est rien en rapport avec le nouvel article L121-1 du Code de la consommation. Cet article prévoit les cas dans lesquels une pratique commerciale est trompeuse. Ces cas feront donc l’objet d’une présentation générale, puis on verra l’appréciation

 

1) Présentation générale : les cas dans lesquels la pratique commerciale est trompeuse.

 

De l’ancien article à l’actuel article L121-1 du Code de la consommation, il y a une constante qui est dans l’usage que le législateur fait de la liste. Ce procédé est repris dans l’article L121-1 du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008 retouchée par la LME mais la rédaction actuelle est beaucoup plus complexe et surtout, sur un plan purement quantitatif, il apparaît comme étant nettement plus long que l’ancien article. Les premiers termes de cet article sont les suivants: « une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes »: suit une série de circonstances dans lesquelles une pratique sera trompeuse. Mais à cela s’ajoute un autre paragraphe : une pratique commerciale est également trompeuse. Autrement dit, l’article établi dans ses deux premiers paragraphes une summa divisio qui repose sur ce premier et deuxième paragraphe. Chacun de ces paragraphes décrit une catégorie de pratiques commerciales trompeuses: dans le premier paragraphe, les pratiques ont pour point commun de supposer un acte positif, quand au second paragraphe, elles reposent sur une abstention, précisément sur une rétention d’information. Sur les pratiques décrites dans le premier paragraphe : elles supposent un acte positif, elles peuvent être commises dans trois séries de circonstances. Deux d’entre elles paraissent nouvelles par rapport à l’incrimination de publicité trompeuse ce qui confirme l’extension de la nouvelle incrimination :

 

 

– il s’agit tout d’abord de la pratique commerciale qui crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d’un concurrent. A priori, on a donc le sentiment qu’on va au delà de la publicité trompeuse mais une interprétation large de la publicité avait donné à la Cour de cassation la possibilité de réprimer les actes ici décrits sous publicité trompeuse, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 23 février 1989 : interprétation qui permettait de considérer que constituait une publicité trompeuse l’usage d’un nom créant une confusion dans l’esprit du public.

– de même, une autre série de circonstance est sensée représenter une innovation (3° du §1) : une pratique est trompeuse si la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n’est pas clairement identifiable, il peut sembler que c’est une innovation mais l’innovation semble avoir une portée limitée donc la doctrine considère que l’apport est limité.

– la troisième catégorie évoque elle la publicité trompeuse. En effet, parmi les pratiques commerciales trompeuses du §1, on retrouve des pratiques commerciales qui évoquent, ne serait ce que par les termes employés, l’ancienne publicité trompeuse: une pratique commerciale est trompeuse si elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments qui suivent: on retrouve au titre de ces éléments des éléments qui évoquent largement ceux visés au titre de la publicité trompeuse: nature du bien, service, prix, mode de calcul de celui-ci, portée de l’engagement de l’annonceur, ce sont autant de points sur lesquels portera l’allégation fausse. On retrouve donc ici une continuité manifeste par rapport à la publicité trompeuse. C’est pour cela que les enseignements de la jurisprudence sur la publicité restent d’actualité pour cette nouvelle incrimination.

 

Le §2 de l’article L121-1 du Code de la consommation décrit d’autres séries de pratiques qui sont également trompeuses et ce sont des pratiques commerciales qui seront trompeuses car elles reposent sur une rétention d’information. En effet, la pratique commerciale sera trompeuse si le silence a été conservé sur un certains nombres d’éléments qui sont des éléments importants pour le consentement et à cet égard, l’article L121-1 du Code de la consommation vise une information substantielle. L’alinéa suivant recourt de nouveau au procédé de la liste pour énumérer comme substantielles un certain nombre d’information. Ces informations portant sur les caractéristiques principales du bien ou du service, ou encore sur l’adresse et l’identité du professionnel, ou encore sur les modalités de paiement ou de livraison.

 

Etant précisé que son dernier alinéa qui fait l’objet du §3 est celui qui précise que certaines de ces pratiques peuvent viser les professionnels: ce sont celles du §1 qui se caractérisent par un acte positif. Donc, la seconde série ne concerne que les consommateurs qui peuvent seuls en être victime.

 

Cet article procède donc à une nette distinction. Le procédé peut sembler artificiel puisque dans les faits, la différence est parfois ténue entre ce qui relève d’une abstention ou ce qui relève d’une indication fausse ou de nature à induire en erreur. La différence est parfois difficile à établir car garder le silence, cela revient parfois à énoncer quelque chose de faux donc on peut être réservée sur cette distinction d’un point de vue méthodologique: l’intérêt est surtout de faire la part des choses en ce qui concerne ou non les professionnels. Précisément, si on observe les appréciations faites par la jurisprudence pour la publicité trompeuse, on constate que cela peut résulter d’un acte positif consistant à affirmer des choses inexactes ou un acte négatif par le fait de ne pas révéler une information substantielle. La publicité trompeuse peut par exemple prendre la forme d’une représentation tendancieuse de la réalité, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 mars 1984 constitue une publicité trompeuse le fait sur un paquet de cigarette de mettre e valeur des textes anglais qui donnait ainsi à l’ensemble une connotation anglo-saxonne qui suggérait que ce n’était pas un produit français alors que c’en était un. La publicité peut également consister en un mensonge qui supposera que l’agent ait affirmé des faits inexacts en ayant conscience de leur fausseté: mise sur un site de vente aux enchères des sacs sous des marques prestigieuses alors que ce n’en est pas. La publicité peut être commise par un simple silence: exemple, banque qui avait fait passer une pub pour un compte épargne destiné au mineur: tu peux retirer de l’argent sans demander à personne alors que le mineur avait besoin de l’autorisation parentale pour ouvrir le compte. Il a été jugé que l’usage de caractère réduit, certaines publicité comportant des mentions en petits caractères que c’était assimilable à une forme de réticence=> arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 27 novembre 1990. Certaines mentions trop petites pour que les automobilistes puissent les lire. On voit par cette jurisprudence que cela transcende la distinction entre acte positif et négatif.

 

Ces pratiques commerciales telles que définie dans l’article L121-1 du Code de la consommation seront incriminés dans les circonstances mais si on est dans ce cadre, cela ne veut pas dire qu’il y aura un caractère trompeur.

 

2) L’appréciation du caractère trompeur de la pratique commerciale.

 

Quand on se reporte à l’article L121-1 du Code de la consommation qui prévoit ces deux grandes catégories de pratiques commerciales trompeuse, il faudra que le juge apprécie s’il y a eu tromperie. La pratique sera trompeuse si par exemple elle crée une confusion ou si elle repose sur des allégations fausses ou de nature à induire en erreur. Ces éléments sont révélateurs de la tromperie et le juge devra les apprécier. Il y a lieu de se reporter à la jurisprudence de la publicité trompeuse qui peut être repris dans le cadre de la nouvelle incrimination. Il était de jurisprudence que le juge doit se livrer à une appréciation in abstracto de la publicité trompeuse: il faut qu’il prenne un consommateur moyen de référence dans l’idée que certaine pratique peuvent induire une personne en erreur si elle n’est pas assez perspicace pour distinguer un discours qui peut être excessif et la réalité: on a beau être consommateur et être protégé, il n’en demeure pas moins qu’on doit être avisé. La loi pénale n’a pas vocation à protéger les sots, naïfs qui sont excessivement victime d’une tromperie parce qu’ils n’auraient pas l’esprit de faire la part des choses entre la réalité et des exagérations qui peuvent paraître supportables. C’est pourquoi le juge pénal, pour apprécier le caractère trompeur, va se demander si la publicité ou la pratique était de nature à tromper un consommateur moyen qui ne sera pas suffisamment abruti pour prendre au premier degré le discours commerciale. Ce consommateur moyen doit donc être normalement attentif et intelligent. Par exemple, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 2007 évoqué dans la chronique un an de droit pénal de la consommation de la revue de droit pénal de mai 2008. Les juges du fonds font souvent référence à ce consommateur moyen, jugement du TGI de Paris du 11 décembre 1996 ou arrêt de la Cour d’appel de Paris du 16 novembre 2007 faisant référence à un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. La Cour de Justice des Communautés Européennes s’est également positionner sur cette ligne de consommateur moyen, normalement avisé, arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes du 16 juillet 1998 en ce sens. Exemple qui montre que le consommateur ne doit pas être trop crédule. Cette référence à un consommateur moyen qui a un minimum de bon sens permet de faire la part des choses entre des pratiques commerciales qui sont illicites car trompeuses et celles qui peuvent induire en erreur le consommateur mais ceux-ci ne pourront s’en prendre qu’à eux-mêmes. On a un arrêt de la Cour de cassation qui montre que certaines publicités peuvent induire en erreur ceux qui la prennent au premier degré. Arrêt au sujet d’une publicité trompeuse, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 21 mai 1984 : il s’agissait d’un spot TV de publicité qui avait pour objet de promouvoir une certaine marque de bagage sensé être résistant: le spot reposait sur une scène de football qui se jouait entre bulldozer et ce qui fait office de ballon était la valise. A l’issue de cette partie, la valise apparaissait intacte. Il était évident, si on avait un minimum de bon sens, qu’un tel traitement infligé à une valise ne pourrait que l’affecter dans sa substance et pour le tournage, plusieurs valises avaient été utilisé es. La Cour de cassation avait considéré que ce n’était pas une publicité mensongère, la loi de 1973 n’interdisait pas la publicité hyperbolique qui se traduit par la parodie ou l’emphase dès lors qu’il est établi par référence à l’optique du consommateur moyen et en tenant compte du degré de discernement et du sens critique de la moyenne des consommateurs, que l’outrance ou l’exagération de l’ouvrage publicitaire ne peut finalement tromper personne: c’est donc une invitation à prendre un certain recul vis-à – vis des messages publicitaires qui ont vocation à embellir la réalité. Cette appréciation est donc celle du juge en référence au consommateur moyen mais innovation de 2008, il y a des pratiques commerciales qui sont réputé es trompeuses. Le législateur a inséré l’article L121-1-du Code de la consommation issue de la loi du 4 août 2008. C’est un article très long, qui est d’une lourdeur incomparable et qui a pour objet d’énumérer des pratiques qui sont réputé es trompeuses : l’article énonce en effet que « sont réputés trompeuses au sens de l’article L121-1 du Code de la consommation les pratiques commerciales qui ont pour objet: « . S’en suit une liste immensément longue puisqu’elle consiste en 22 rubriques, on a atteint des proportions déraisonnables, qui ont vocation à caractériser ces pratiques qui sont réputées trompeuses :

 

– parmi elles, sera une pratique commerciale réputée trompeuse le fait de proposer l’achat de produit et ensuite de refuser de présenter au consommateur le bien qui a fait l’objet de la pratique,

 

– de même le fait de déclarer qu’une personne est sur le point de céder son activité (pour vendre à des prix bas).

– de même, entre dans cette catégorie le fait d’affirmer d’un produit ou d’un service qu’il augmente les chances de gagner aux jeux de hasard ou encore la pratique commerciale qui a pour objet de déclarer ou de donner l’impression que la vente d’un produit ou la fourniture d’un service est licite alors qu’elle ne l’est pas.

Telle qu’elle est, elle est limitative mais il n’est pas exclu que le législateur vienne l’étoffer pour prendre en compte la pratique. Le juge n’a pas ici à apprécier le caractère trompeur en ce sens qu’il faudra considérer que plus d’une présomption, c’est une règle de fonds qui aura donc pour conséquence de dessaisir le juge de l’appréciation du caractère trompeur. Il faut enfin préciser au sujet de l’article L121-1-1 du Code de la consommation qu’il est applicable aux pratiques qui visent le professionnel=ce sont des pratiques qui peuvent être considérées comme particulièrement trompeuse donc il faut protéger les professionnels.

 

Il reste qu’on attend la jurisprudence sur les éléments nouveaux de cette infraction.

 

 

  1. II) Elément moral.

 

Il faut aussi prendre en compte ce qui avait été dégagé pour la publicité trompeuse. Pour ce qui concerne l’élément moral de la publicité trompeuse, celui ci avait connu une évolution intéressante: réprimer aussi largement que possible la profusion des telles publicités.

 

Au départ, la publicité incriminée e était celle de mauvaise foi. On parlait dans la loi de 1963 de publicité mensongère: le mensonge en droit pénal suppose un élément maté riel de fausseté et au plan moral, le mensonge exige également que l’auteur du discours ait eu conscience de la fausseté et les ait énoncé avec une intention de tromper. Il fallait donc caractériser cet élément intentionnel qu’avaient l’agent, à savoir la conscience du caractère erroné du discours et la volonté de tromper.

 

La loi de 1973 a voulu élargir les termes de l’incrimination: on a donc publicité trompeuse, de nature à induire en erreur: Incrimination plus large car c’était l’élément moral qui était étendu: la jurisprudence avait précisé que la suppression de la référence à la mauvaise foi révélait une modification de la structure de l’infraction, celle-ci étant désormais constituée indépendamment de toute mauvaise foi de l’agent : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 décembre 1978. Solution reprise régulièrement, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 novembre 1997. Précisément, cela révèle la nature de l’infraction qui constituait un délit non intentionnel. Ce délit supposait donc simplement une faute d’imprudence ou de négligence. La loi du 3 janvier 2008 n’a pas entendu modifier l’élément moral. Ce qui est conforme au souci de protection renforcé du consommateur.

 

En pratique, l’élément moral peut recouvrir plusieurs aspects : a fortiori, si la simple faute est suffisante, l’infraction est constituée en cas de mauvaise foi flagrante: par exemple, le fait d’avoir consciemment fondé une pratique publicitaire fondée sur des faits faux. La négligence ou l’imprudence étant suffisante, l’infraction est constituée dès lors que l’agent n’a pas vérifié la sincérité et la véracité du message publicitaire avant d’en assurer la diffusion. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 15 octobre 2002 qui reste d’actualité au regard de la nouvelle incrimination. La jurisprudence est abondante:

 

Par exemple le responsable du rayon boucherie d’une grande surface, qui était titulaire d’une délégation de pouvoir pour tout ce qui concerne la vérification de la législation applicable au commerce des viandes et notamment sur la réglementation de l’origine française: obligation de faire état de l’origine française des viandes mises en vente: il avait apposé un écriteau qui certifiait que la viande vendue était exclusivement française or il était avéré que certains morceaux avaient une provenance étrangère: publicité trompeuse=>ce responsable n’avait pas pris toutes les précautions propres à assurer la véracité du message. Peut être été il lui-même de bonne foi mais il fallait qu’il s’en assure et le fait qu’il y avait des morceaux d’origine étrangère attestait du manque de précautions.

 

Dès lors que l’agent aura fait preuve de diligence, l’élément moral de l’infraction fera défaut. Mais, pour un professionnel, il est très difficile de rapporter la preuve qu’il a bien pris toutes les diligences: la jurisprudence attache en réalité à l’obligation des professionnels une obligation renforcée de la vérification. On retrouve la même tonalité que pour l’élément moral de l’infraction de tromperie : arrêt de la Cour d’appel de Rennes du 31 mai 2007 : un agent immobilier, l’élément moral de la publicité trompeuse était caractérisé par le défaut de vérification de l’exactitude des informations donné es (informations sur la surface réelle d’un appartement mise en vente). L’agent a été déclaré coupable de publicité trompeuse, la Cour insiste sur la qualité de professionnel, il s’agissait de données objectives que l’agent pouvait vérifier ce que lui imposait sa qualité de professionnel de l’immobilier. Cela semble confirmer que cette infraction vise les professionnels (élargissement avec pratiques commerciales trompeuses).

 

Section 2 : la répression

 

 

  1. I) La prescription de l’action publique.

 

La question n’est pas de savoir le délai qui est de 3 ans (délit) mais de savoir quel est le point de départ. Pour déterminer le point de départ, il faut se reporter à la nature de l’infraction: instantanée ou continue ? De la nature dépend la fixation du moment où commence la prescription. La jurisprudence est constante: infraction instantané e: il n’y a pas lieu de considérer qu’il en ira autrement pour ce qui concerne les pratiques commerciales trompeuses. Dès lors qu’on retient la nature instantanée de l’infraction: exemple avec l’envoi de spam publicitaire, le fait de mettre dans un lieu public une affiche avec un caractère trompeur. Un premier enseignement à en tirer, en cas de modification, de rectificatif, cela n’influe pas sur l’infraction qui a été consommé e: cela ne remet pas en cause l’existence de l’infraction. En ce sens, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 mai 1989. Dès lors, en toute rigueur, le point de départ de la prescription de l’action publique, devrait être situé au moment où l’infraction a été commise, par exemple au moment où le message publicitaire a été mis à disposition du public. Cette solution de droit commun a semblé inopportune à la Cour de cassation pour une infraction dont elle cherche à favoriser la répression donc celle-ci cherche à reporter le point de départ. C’est ce qu’elle fait en a matière: la Cour de cassation considère que le point de départ de l’infraction est reportée au jour où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l’exercice des poursuites : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 février 1986. La Cour a considéré que dans le cas de certaines publicité trompeuse, les victimes ne se rendent pas immédiatement compte qu’elles sont victimes: achat d’un objet mais c’est à l’usage qu’il apparaît que le bien ne répond pas aux mentions apparues dans la publicité. La Cour prend en considération le moment où les victimes ont pu se rendre compte de la fausseté des allégations car auront pu le constater. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 22 mai 2002. Cette solution qui a donc été de jurisprudence constante vient d’être rappelée par la Cour de cassation qui l’étend aux pratiques commerciales trompeuses : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 novembre 2008. La Cour de cassation approuve une Cour d’appel qui avait, en matière de publicité trompeuse, reporté classiquement le point de départ: la Cour de cassation pratique ici par un obiter dictum : précision qui n’est pas utile pour l’affaire en cause mais un signal qu’elle envoi pour les juristes pour lui faire comprendre qu’à l’avenir, si la question se pose, c’est cette solution qu’elle consacrera. L’affaire concernait la publicité trompeuse mais la Cour de cassation fait référence incidemment aux pratiques commerciales trompeuses pour montrer qu’il y aura un lien. « La Cour d’appel qui a justement rappelé qu’en matière de publicité de nature en erreur, devenues pratiques commerciales trompeuses le point de départ du délai de prescription de l’action publique est fixé au jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l’exercice de cette action ». Donc, continuité entre les incriminations.

 

 

 

  1. II) Les peines.

 

La personne responsable est celle pour le compte de laquelle la pratique commerciale trompeuse est mise en œuvre, c’est ce que précise l’article L121-5 du Code de la consommation. En pratique, cela désigne la personne qui a vocation à bénéficier de l’erreur induite par la pratique commerciale trompeuse, qui peut être une personne physique ou une personne morale. C’est un délit dont la tentative n’est pas incriminée. Pour ce qui concerne les peines applicables aux personnes physiques, l’article L121-6 du Code de la consommation renvoi aux peines qui sont prévues au premier alinéa de l’article L213-1 du Code de la consommation. Ces peines sont celles prévues pour la tromperie. Ces peines consistent en un emprisonnement de 2 ans et une amende de 37 500 € ou l’une de ces deux peines seulement. Pour ce qui concerne les pratiques commerciales trompeuses, dispositions propre qui prévoit que lorsqu’une amende sera prononcée, elle peut être portée à 50% des dépenses de la publicité ou de la pratique constituant le délit. C’est l’article L121-6 alinéa 2 du Code de la consommation. Cela peut être considérable en cas de gros budget publicitaire: c’est dissuasif. Pour ce qui concerne les peines complémentaires : publication du jugement. Pour les personnes morales, il a fallu attendre une loi du 12 juin 2001 pour que leur responsabilité pénale soit reconnue en matière de publicité trompeuse. Pour ce qui concerne les peines qui leur sont aujourd’hui applicables, ce sont des peines qui consistent en une peine d’amende qui est fixé selon les modalités prévues par l’article L131-38 du Code pénal : taux maximum égal au quintuple de l’amende prévue pour les personnes physiques. S’appliquent également les peines mentionnées à l’article L131-39 du Code pénal du 2°) au 9°).

 

Titre 2 : droit pénal des sociétés

 

 

Chapitre 1 : évolution du droit pénal des sociétés commerciales

 

 

Section 1 : construction du droit pénal commercial : pénalisation massive

 

 

On constate que le droit pénal est contemporain de l’évolution du droit des sociétés lui-même. Il est apparu très vite au législateur que le terrain du droit des sociétés était une source d’infractions qu’il fallait réprimer.

Si on remonte au Code pénal de 1807 : très peu de droit pénal, seulement des dispositions isolé es/notamment l’infraction de banqueroute.

 

XIXe siècle.

 

La pénalisation a donc commencé au XIXe siècle et a coïncidé avec la révolution Industrielle :

 

  • L’apparition du droit pénal en droit des sociétés est due à la loi du 17 juillet 1956 qui a réglementé les SCA, et a introduit en même temps certaines incriminations pénales (ex : distribution de dividendes fictifs).

 

  • De même, loi du 24 juillet 1967 marque une autre étape dans l’évolution du droit des sociétés :

 

  • apport principal : liberté des créations des Sociétés Anonymes.

 

  • contient un volet pénal : création de délits de votes frauduleux dans le cadre de vote en Assemblée Générale.

 

Conclusion : fin XIXe siècle, le droit français comportait donc déjà un embryon du Code pénal des sociétés, constituant un important dans l’arsenal répressif.

 

1ère moitié du XXe siècle :

 

A partir du XIXe siècle, n’ont cessé de se développer des infractions, fruits d’interventions ponctuelles du législateur. Les textes qui se sont multipliées sont d’importances inégales.

 

Parmi les interventions importantes :  loi du 7 mars 1925 : organisant la SARL, prévoit dans le même temps un certain nombre d’incrimination la concernant.

  • quelques années plus tard, scandales politico-financiers plusieurs Décrets-Lois (8 aout puis 7 octobre 1935) favorisant la pénalisation du droit des sociétés. C’est à ces Décrets-Lois que l’on doit :

 

  • l’abus de gestion, qui recouvre l’abus de biens sociaux.

 

  • créations de certains délits.

 

– sanctions applicables aux Assemblées Générales d’obligataires. Cette vague de pénalisation a été confortée par d’autres textes :

 

  • Décrets-lois de 1937.

 

  • Loi du 4 mars 1943.

 

 

Bilan au tournant de 1950-1960 : le droit pénal commercial était déjà un droit nourrit d’incriminations nombreuses bien que d’importance inégale.

 

Après 1960.

 

Réforme du droit pénal commercial : loi du 24 juillet 1966. A l’occasion de cette réforme, qsp/ conservation d’un volume important des infractions ou procéder à une dépénalisation, alléger la présence du droit pénal. Si on se tourne :

 

1) Deux doctrines.

 

Doctrine pénaliste : arsenal répressif en droit pénal commercial ne devait pas être abandonné, car même s’il apparaissait que les textes peu nombreux, ils incitaient sur la nature dissuasive des infractions.

 

Doctrine commercialiste :

 

  • Droit pénal trop présent en droit des sociétés, lui apportant une sorte de rigidité, s’harmonisant mal avec rapidité, fluidité d’application du droit des sociétés.
  • De plus, textes souvent peu appliqués révèle l’absence de volonté de les appliquer.

 

 

  1. Thèse pénaliste.

 

C’est la thèse de la pénalisation qui l’a emporté par la loi de 1966. C’est donc un corps très nourri qui a fondé la loi de 1966 : nombreux articles du Code de commerce, comportant environ 200 incriminations, auxquels s’est ajouté le décret du 23 mars 1967, qui comprenait de nombreuses contraventions. De telle sorte qu’on a pu qualifier évolutions : « âge d’or » du droit pénal commercial, ou même « apothéose ».

 

  1. b) Critiques.

 

Il est apparu rapidement que cette pénalisation du droit des sociétés n’était pas à l’abri de la critique. Le législateur a même été qualifié de « furie répressive ».

L’opinion et les pénalistes ont pris acte de cette pénalisation excessive. Il était souligné une discordance entre : trop grand nombre de textes répressifs/trop peu d’application jurisprudentielle. La majorité des dispositions applicables étaient les abus de biens sociaux, donc océan d’incriminations dont on considérait qu’elles restaient lettre morte. On aurait pu y voir un aspect favorable : si les textes pénaux trouvaient peu à s’appliquer, c’est précisément parce que la nécessité répressive était efficace. En réalité, le droit pénal a donné lieu à une délinquance obscure en matière de droit des sociétés, de sorte que le nombre très faible des textes pénaux étaient moins le texte de l’efficacité de la dissuasion qu’une négligence des autorités d’engager des poursuites, voie ignorance de la nécessité d’incriminer certains rapports.

 

En 1999, il y avait, au regard de la totalité des délits du droit pénal :

 

  • plus de 440 000 condamnations en France.

 

  • 532 condamnations pénales en matière de société.

 

  • sachant qu’il y avait 1 400 000 sociétés en France. Prise de conscience d’une inefficacité des textes.

 

Années 1990 : tournant à partir duquel le législateur a montré signes de faveur d’une dépénalisation. Cette forte pénalisation est passée de mode. C’est un autre volet qu’on peut observer en droit pénal commercial. Le législateur, depuis fin des années 1980 s’es tourné vers une dépénalisation du droit pénal commercial.

 

Section 2 : dépénalisation du droit des sociétés

 

 

Il s’agit d’une dépénalisation éparse, mais demeure un signe qui fonde une tendance qui n’a fait que s’accentuer. Il a fallu attendre les années 2000 pour que soit mise en œuvre une dépénalisation plus profonde.

 

Fin des années 1990 : rapport rédigé par la Commission Marigny/ modernisation du droit des sociétés, publié en 1996 a joué rôle important dans ce tournant. Suggérait une dépénalisation du droit des sociétés, trop marqué par un droit pénal. Il a fallut attendre les années 2000 : loi du 15 mai 2001 : donne le coup d’envoi d’une dépénalisation :

  • supprime environ 15 incriminations (notamment envers des dispositions assurant l’information à transmettre avant l’Assemblée Générale…)
  • textes souvent remplacés par des sanctions civiles, le comportement incriminé ne devient pas pour autant libre.

 

Dépénalisation se poursuit en 2003, marqué notamment par :

 

  • loi LSF du 1er aout 2003 et loi NRE du 1er aout 2003 : abrogent environ 20 incriminations,peu utilisé, et dont on estimait même qu’elles étaient inconnues du parquet : en matière de simulation de la qualité d’actionnaire, incrimination du défaut de feuille de présente en Assemblée Générale, publicité.
  • loi du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit, l’a chargé de procéder àune certaine dépénalisation du droit des sociétés. Il est cependant demeuré en dehors du cadre donné par la loi 2003.

C’est pourquoi, l’origine réelle de la dépénalisation est l’ordonnance du 25 mars 2004 portant simplification du droit en matière d’entreprise. Elle n’a fait qu’abroger certains délits (délit de défaut de communications de renseignements aux actionnaires pour la P ° aux assemblées ; défaut d’envoi d’un formulaire de procuration) en y substituant des injonctions de faire ou nullité.

 

Ordonnance du 24 juin 2004 portant réforme du régime dans VM émises par les sociétés commerciales. Les infractions qui ont été supprimés n’étaient pas visé es par loi d’habilitation : délit concernant les actions à dividendes prioritaire.

 

Conclusion :

 

Du point de vue quantitatif, le bilan de cette dépénalisation est non négligeable car suppression d’une dizaine d’infractions. On considère qu’1/3 des infractions crées par la loi de 1966 ont été abrogées.

 

Du point de vue qualitatif, la doctrine s’accorde pour considérer que

 

  • ces dépénalisations manquent de cohérence globale.

 

  • le législateur n’a pas procédé à une dépénalisation dans sont ensemble, qui serait le signe d’une réflexion d’ensemble du droit pénal. Ainsi, la dépénalisation est apparue relativement maladroite.

 

  • ce manque de cohérence se retrouve également en matière de droit pénal du chèque.

 

 

Résultat :

 

  • bilan tenu au terme de ce mouvement de dépénalisation doit donc être mitigé.

 

  • cependant le législateur a persévéré. Rapport Coulon / dépénalisation de la vie des affaires, contient un certain nombre de solutions en matière de droit pénal des sociétés principales propositions.

 

Les rédacteurs ont insisté sur :

 

  • la nécessité de maintien de certaines infractions : abus de biens sociaux, abus de pouvoir, infractions / répartitions de dividendes fictifs, / liquidations, / présentation des comptes infidèles.

 

  • la suppression de certaines sanctions pénales / injonction de faire : permettrait d’éviter une sanction pénale, tout en maintenant une forme de contrainte. Serait concerné le défaut du gérant de la SARL à présence en Assemblée
  • le fait que certaines infractions se verraient substitué des sanctions civiles : violation par le liquidateur de son obligation de rembourser les actions à dividendes prioritaire sans droit de vote, avant les actions ordinaires.
  • la dépénalisation pure et simple (dé pénalisation s èche) : ce n’est pas la sanction qui disparaît mais le comportement incriminé lui-même, emportant disparition de sa sanction : abus des voies (forme d’abus de gestion), banqueroute par tenue d’une comptabilité incomplète ou irrégulière.

 

Chapitre 2 : abus de gestion

 

 

La doctrine considère qu’en matière de droit pénal des sociétés, incrimination phare : abus de biens sociaux (qui n’a pas vocation à être dépénalisé) :

  • Il fait partie d’une catégorie plus large : abus de gestion.

 

  • Infraction peu ancienne : apparue en 1935.

 

 

Avant 1935.

 

Pourtant, auparavant, diverses indélicatesses pouvaient être mises en œuvre par les dirigeants sociaux, au détriment de la société. C’était alors l’abus de confiance qui apparaissait le moins éloigné de cette forme de délinquance, réprimé sur l’article 408. En présence de tels comportements, les juges pénaux étaient hardis, car tentative de réprimer certains comportements au détriment du principe de légalité, car l’abus de confiance ne semblait pas apte à réprimer certains comportements réprimés aujourd’hui au titre de l’abus de biens sociaux. Elle supposait qu’il existe une remise contre un prix. Seuls 6 contrats pouvaient relever de l’abus de confiance, en ne faisant pas mention du contrat de sociétés. C’est sur le fondement de la question du mandat de gestion que la jurisprudence réprimait certains comportements de dirigeants sociaux. De plus, l’infraction d’abus de confiance s’était vite révélée inadaptée pour réprimer certains actes des dirigeants sociaux, notamment parce que les immeubles étaient exclu du champ d’application de la répression de l’abus de confiance.

 

1935.

 

Eclatements de certains scandales. Il est apparu que le fondement de la répression à partir de l’ABC n’était plus adapté. Décret-loi de 1935 a crée 2 délits pour la SA, repris par la loi du 24 juillet 1966 : abus de biens sociaux et du crédit de la société, et abus de pouvoir et des voies.

 

Aujourd’hui, deux textes principaux incriminant l’abus de gestion.

 

  • pour SA : article L242-6 du Code de commerce dont les comportements sont réprimés par 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende.
  • pour SARL : article L241-3 du Code de commerce.

 

 

On a pris conscience de la nécessité de la répression des comportements concernés car impact économique important, et se manifeste aussi bien au plan macroéconomique (l’analyse économique montre que cette infraction contribue à une déstabilisation économique et à des distorsions de concurrence) qu’au plan microéconomique (la réputation économique de l’entreprise peut se trouver affecter, et par delà, affectation de son patrimoine.

 

Section 1 : domaine des abus de gestion

 

 

  1. I) Sociétés protégées.

 

Le champ d’application de l’incrimination de l’infraction de l’abus de gestion est large. Concerne de manière générale la SARL (article L242-6 du Code de commerce). Article L242-6 du Code de commerce renvoie à d’autres textes permettant de les élargir à :

  • SA avec directoire (article L242-30 du Code de commerce).

 

  • Renvoyant à l’article L242-6 du Code de commerce pour les aligner aux SA avec Conseil d’Administration.
  • SCA (article L241-3 du Code de commerce).

 

  • SAS (article L244-1 du Code de commerce).

 

  • SE (article L244-5 du Code de commerce).

 

  • SARL (article L241-3 du Code de commerce).

 

  • Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 juin 1993: admet quel’infraction peut être commise dans une EURL.

Hors du Code de commerce :

Sociétés coopératives (article 24 de la loi du 10 septembre 1947).

 

  • SC de placement immobilier (article L233-11 du Code monétaire et financier).

 

  • Sociétés d’assurance (article L328-3 du Code des assurances).

 

  • Sociétés immobilières de construction (article L241-6 du Code de la construction).

 

  • un certain nombre de sociétés restent en dehors : SNC, SCS, société de personnes, l’absence du délit d’abus de biens sociaux est vue comme contrepartie de la responsabilité illimitée des dirigeants. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 juin 2004 : exclu du champ d’application del’incrimination de l’abus de gestion, les sociétés de droit étranger.

 

  1. Qualité de la personne protégée.

 

Seules certaines personnes sont désignées par texte d’incrimination comme pouvant être auteur de l’infraction. On y voit un « délit aristocratique », car seules les personnes présentant qualité de dirigeants sociaux peuvent être concerné es.

 

Section 2 : description

 

 

  1. I) Conditions préalables.

 

Incrimination à double branche :

 

  • Article L242-6 3°) du Code de commerce (SARL) : le fait pour les dirigeants concernés defaire de MF un usage abusif des biens ou du crédit de la société
  • Article L242-6-4°) du Code de commerce : l’usage abusif dont se seront rendu coupablesles dirigeants sociaux portent sur le pouvoir ou voies dont il dispose en sa qualité de dirigeant social.

 

Inconvénient de suivre la ligne directrice de l’article L242-6 du Code de commerce.

 

 

  1. Les biens ou le crédit de la société.

 

 

  • L’abus des biens de la société.

 

« Biens » : se prête à une interprétation large, car le législateur, en employant ce terme, qu’il n’y a pas d’exclusion.

La jurisprudence indique qu’il peut s’agir de :

 

  • meubles (fonds société s) ou immeubles.

 

  • biens corporels (matériel) ou incorporel (créances, brevets).

 

L’observation de la jurisprudence montre que souvent, commis sur des fonds sociaux :

 

  • se rend coupable d’abus de biens sociaux le dirigeant social qui

 

  • arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1973 : détourneraun prêt qui a été conclu pour le compte de la société

 

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1978 : fait rémunérer son personnel, par les fonds de sa société

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1974 : se fait payer dettes de jeu par société

 

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1998 : se fait payer véhicules par sa société

 

– cet abus de biens sociaux/fonds sociaux peut revêtir divers visages : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1998, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2004.

– de façon sévère, arrêt de la Cour d’appel d’Angers de 1991 : commet un abus de biens sociaux le dirigeant social qui ne limite pas automatiquement sa R ° alors que la société enregistre des pertes (pas de pourvoi en ce domaine, de sorte qu’on ne sait pas si la Cour de cassation aurait admis cette sévérité).

 

2) L’abus du crédit de la société.

 

Désigne la renommée commerciale d’une société = réputation, crédibilité est en jeu. Importance considérable car éléments qui se fond ressentir sur la surface financière société : capacité à garantir, cautionner. En un mot : confiance qu’elle inspire auprès des tiers, et est déterminante dans ses relations d’emprunt, garantie, cautionnement. Dès lors, si le dirigeant social fait un usage abusif du crédit société, il engage la renommé sociale, en l’exposant à des paiements, décaissements qui seront éventuels, mais pour autant représentent un risque ne correspondant pas à celui supporté par la société. Commet ainsi un abus de gestion par usage abusif du crédit : le dirigeant social qui fera cautionner par la société une de ses dettes personnelles (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1955), ou les dettes de sa maitresse (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1975).

 

Analyse de cette notion.

 

Le fait que le législateur ait voulu mettre sur le même plan les biens sociaux, et crédit de société témoigne d’une volonté très ferme de réprimer aussi largement que possible les abus de gestion pouvant être imputés au dirigeant social. Différence de nature :

  • usage abusif de biens : elle subi un préjudice certain, présent (ex : dirigeant social qui fera rémunérer son personnel).
  • incrimination d’usage abusif de crédit : sanctionnera ce qui représente un simple risque de la société, en infligeant qu’un préjudice éventuel. Il n’est pas certain que la société qui s’est ainsi porté garante aura à honorer ses engagements. Dénote l’ouverture par rapport à l’usage abusif de biens.

 

  • Pouvoirs ou voies détenus en qualité de dirigeant social.

 

Est-ce-qu’il est nécessaire de réprimer l’exercice de ces pouvoirs/ voies détenus par les dirigeants sociaux en cette qualité ?

 

1) Pouvoirs.

 

Utilité d’incriminer l’usage abusif des pouvoirs des dirigeants sociaux de manière autonome par rapport à celle abusif des biens sociaux ? Cette interrogation de la pertinence de son autonomie est celle de la définition de la notion de pouvoirs, question lancinante en doctrine. On pourrait penser que l’abus de pouvoir tend à se confondre avec l’usage abusif du crédit société : ex : si un dirigeant social se fait rémunérer par les fonds de la société (jurisprudence établie sur ce point). Mais on peut se demander si cet abus de biens sociaux n’est pas la résultante d’un abus de pouvoir qu’il aurait en amont réalisé et permis cet abus de biens sociaux. On pourrait considérer dans ce cas que l’abus du crédit de la société révèle en lui-même l’existence en amont d’un abus de pouvoir commis par un dirigeant social attire l’attention sur autonomie de l’incrimination

 

Position actuelle de la doctrine : il faut entendre par « pouvoir » employé dans le cadre de cette incrimination, l’ensemble des pouvoirs, prérogatives, des dirigeants sociaux dans le cadre de leur fonction, englobant l’ensemble des pouvoirs statutaires et l égaux. Cette limite entre usage abusif de crédit et usage abusif de pouvoir reste floue en jurisprudence. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1975 : se rend coupable d’un usage abusif de ses pouvoirs un Président Directeur Général qui avait usé de ses pouvoirs pour organiser une f – a, qui était contraire à l’intérêt de la société, mais avantageuse pour d’autres sociétés dans lesquelles il possédait un intérêt. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1960 : dirigeants sociaux qui avaient voulu vendre leurs actions à une société concurrente, en éludant à leur profit les règles statutaires qui restreignaient de la liberté de cession de ces titres à des tiers non encore actionnaires.

 

On s’est ainsi demandé si derrière l’usage abusif de pouvoir, il n’y avait pas un usage abusif de crédit : remise en question de son autonomie. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1999 : un dirigeant social avait incité les clients de l’établissement bancaire qu’il gérait à retrier les fonds qu’ils avaient mis en dépôt, et à lui confier personnellement la gestion de leurs fonds : retient la question de l’abus de pouvoir, mais on aurait pu y voir un abus de biens sociaux : le gérant a détourné la clientèle de la banque à son profit. Par ce fait, il a privé l’établissement qu’il dirigeait de profiter des fonds mises en défaut. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1972 : un dirigeant social est déclaré coupable d’abus de pouvoir car s’était abstenu de réclamer à une autre société dans laquelle il avait un intérêt, le paiement des livraisons, de sorte que la Chambre criminelle y a vu un usage abusif de pouvoir. Par cette abstention, il prive sa société d’une somme qui lui revenait on aurait pu y voir l’usage abusif de confiance.

 

 

Conclusion : question des abus de biens sociaux/abus de pouvoir n’a pas toujours la netteté que l’on pourrait trouver dans cette distinction. L’autonomie de l’incrimination de l’usage abusif de pouvoir est relative : derrière cette question, on peut voir poindre celle de l’UAS question de la pertinence de ce maintien. Se pose d’autant plus au regard de :

 

 

2) Voies.

 

Souvent interprété au regard des procurations, le plus souvent donnée en blanc, que les actionnaires ont pu donner aux dirigeants sociaux pour qu’ils représentent les dirigeants sociaux dans les Assemblées et votent pour eux.

Sont largement encadrées par la loi. Les garanties apportées par la loi dans ce domaine tendent largement à réduire les risques d’usage abusif de voies. Question de leur maintien :

 

  • pratique des procurations : article L225-106 du Code de commerce.

 

  • vote par correspondance : article L225-107 du Code de commerce.

 

De même, se pose la question de l’autonomie de l’usage abusif de voies par rapport à l’usage abusif de pouvoir, maintien de la question préalable : car le fait pour les dirigeants sociaux de faire un usage abusif de voies revient à faire un usage abusif de pouvoir dont il dispose. Le doute de ce maintien est tel que le Rapport Coulon a conclu à l’utilité de cette forme d’abus de gestion en tant que condition préalable, en considérant que l’abus de pouvoir se confondait avant l’abus de voies. A suggéré l’abrogation pure et simple de son incrimination.

 

Comparaison entre abus de gestion/abus de confiance intéressant à double titre :

 

  • raison historique : jusqu’à ce qu’il soit incriminé les comportements des dirigeants sociaux sous la question d’abus de gestion, la jurisprudence incriminait sous la notion de l’abus de confiance, rendait nécessaire l’abus de biens sociaux.
  • raison de droit positif : les abus de gestion tels qu’incriminé dans le Code de commerce ont un champ d’application doublement limité :
    • au regard des sociétés dans lesquelles ces infractions peuvent être commises.

 

  • seuls certaines personnes peuvent se rendre coupable d’abus de gestion (dirigeant de droit/de fait).

 

Dès lors, la question va se poser de savoir si certains faits indélicats ne pourraient pas être incriminé au titre d’abus de confiance, de telle sorte que quand bien même il existe des incriminations autonomes, ne rend pas inutile la question au titre d’abus de confiance, certains comportements qui ne peuvent être incriminé au titre d’abus de gestion (car par dans le périmètre des textes sur l’abus de gestion), lorsque :

 

  • actes litigieux auront été commis à l’égard de sociétés autres que celles dans lesquelles la question d’abus de gestion peut être appliqué, comme l’a montré : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1983 : retient l’abus de confiance dans une société de personnes, non contenu dans le cadredu champ d’abus de confiance.
  • usage indélicat commis par une personne qui n’a pas la qualité de dirigeant social (ex : salarié ) : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2004 : retient l’abus de confiance dans le cas où un salarié avait fait usage abusif des biens dans le société qui l’employait, consistant à se servir de son maté riel informatique que la société mettait à sa disposition pour l’accomplissement de son travail, à des fins personnelles dans la mesure où il était établit qu’il avait utilisé ce maté riel pour : visite de sites pornographiques, envois de courriers électroniques contenant le nom de la société , c’est-à- dire une détournement du matériel informatique. Intérêt remarqué de cet arrêt car il montre les limites de l’usage de poste informatique et de la connexion internet qui lui ont été fourni dans le cadre de son travail, et montre la dématérialisation des choses pouvant être détournée : a été détourné non seulement le poste informatique, mais aussi la connexion internet.

 

Conclusion : on pourrait ainsi penser qu’abus de confiance /abus de gestion sont très proches car l’abus de gestion dérive de l’abus de confiance mais pour autant différence sur la condition préalable. L’abus de confiance prévu et réprimé à l’article 314-1 du Code pénal : le fait par une personne, de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, valeurs ou un bien quelconque, qui lui ont été remis, et qu’elle a accepté, à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé. Au titre de la condition préalable, sont donc exigés la remise à titre précaire de fonds, valeur ou bien. L’abus de confiance ne peut ainsi porter sur un immeuble (différent de l’abus de biens sociaux). Une suppression a été faite par rapport à la liste de contrats prévue par l’ancien Code pénal : louage, dépôt, nantissement, mandat, prêt à usage en vertu desquelles devait être opéré la remise de la chose au titre de l’abus de confiance. L’article 314-1 du Code pénal ne contient plus cette liste. Est-ce que qu’il y a eu une modification radicale de l’incrimination ?

 

  • oui : la Cour de cassation a tiré les conséquences que l’article 314-1 du Code pénal ne se réf ère plus à des contrats au titre de la remise : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2000 : la chose détournée peut être remise indépendamment d’un contrat
  • non : pour autant, l’incrimination de l’abus de confiance n’a pas changé de nature, mais continue de constituer une appropriation frauduleuse, ce qui suppose que le bien détourné n’appartiennent pas à son auteur. Est toujours exigé une chose remise à titre précaire (ex : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2004 : maté riel informatique dans le cadre de son travail, devant être remis aux termes de cesfonction). Même si liste contrats a disparu, il est toujours exigé implicitement que cette remise soit effectuée en vertu d’un contrat présentant même caractéristiques que ceux figurant dans la liste : contrats emportant remise de la chose : la liste de contrats restent implicitement exigé, car le juge devra qualifier si la chose a été remise au titre d’un contrat emportant transfert de propriété ou à titre précaire seulement. Si transfert de propriété, puis chose ensuite détournée : l’abus de confiance ne pourra être retenu : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2007 : fonds prêtés à l’emprunteur pour qu’il puisse acquérir un fondsde commerce, mais qui les utilise à une autre destination. Il se voit reproché la question de l’abus de confiance par détournement de la chose remise en vertu du contrat prêt. Mais précisément en vertu de contrat de prêt, il était devenu propriétaire des fonds prêté s, de sorte qu’en les détournant de l’usage qui en avait été fait, ne pouvait être auteur de l’abus de confiance.

 

Conclusion : la condition préalable à l’abus de confiance est différente de celle observée en abus de gestion. A défaut de pouvoir incriminer des comportements au titre de l’abus de gestion, il ne sera pas automatique de trouver une Q° de substitution de l’abus de confiance, car il sera nécessaire de déterminer si les conditions strictes posées sont par ailleurs respecté es.

 

  1. II) Etude de l’élément matériel de l’abus de gestion.

 

Article L242-6 du Code de commerce, l’abus de gestion est incriminé pour SA et pour SARL. Quelque soit la condition préalable, l’élément matériel consistera en un usage de l’un des objets précédemment étudié au titre de la condition préalable. L’usage en lui seul se caractérise par l’élément matériel de l’abus de gestion. Il faut qu’il présente un certain caractère : être abusif revient à être contraire à l’intérêt de la société.

 

  1. A) L’acte constitutif de l’usage.

 

En employant le terme usage, les acteurs du décret de 1935 avaient à l’esprit des actes positifs d’usage.

 

1) Usages par commission (acte positif). (Les plus fréquents en pratique)

 

Terme large au regard des différents actes pouvant être incriminés. Dans une position non retenue avant le décret de 1935, la notion qui avait été proposée : « prélèvement ». C’est l’emploi de la notion « usage » qui l’a emporté. Révélatrice de l’intention de la jurisprudence d’en faire un usage large lui permettant d’englober une dissipation du bien. Il peut ainsi comporter :

 

– des actes d’aliénation (ayant pour objet de faire sortir des biens de la société). Il peut donc avoir parfois être associés par une appropriation des biens sociaux par la société (disposition des fonds de la société, à son profit, rémunération des employés de maison par des fonds sociaux).

 

– des actes de dissipation : actes par lequel un bien de la société sortira de son patrimoine. N’ont pas nécessairement pour corolaire une sortie du bien du patrimoine social. Ex : individu qui corrompt une personne chargée d’une mission de service public, moyennant une rémunération, car il souhaite obtenir un marché public qui bénéficiera à la société. Se faisant il commet un abus de biens sociaux (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 19 septembre 2007). Lorsqu’il s’agit d’un usage par appropriation des biens de la société, cet usage est définitivement consommé par l’appropriation, et il importe peu que ce bien soit restitué. L’usage par appropriation peut être simplement temporaire.

 

Précisé par la jurisprudence dès un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1937 : administrateur utilisait des fonds sociaux pour spéculer en bourse, en les restituant au fur et à mesure (application classique de la règle générale édictée par le droit pénal, qu’est l’indifférence du repentir actif. Se retrouve notamment en matière de vol : le voleur qui restitue un bien au propriétaire n’efface pas son infraction). La jurisprudence a montré (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1998) qu’une appropriation même brève pouvait constituer un usage constitutif d’un abus de biens sociaux : un dirigeant social avait versé sur son compte associé une somme revenant à la société, puis a régularisé la situation dès le lendemain, en faisant en outre valoir que l’opération ainsi passée avait été faite sur la demande de la banque. Le fait que l’opération a été régularisée le lendemain ne permettait pas d’effacer l’infraction consommée par l’appropriation révélatrice de la sévérité de la jurisprudence dans l’appréciation de la notion d’usage. Lorsqu’un dirigeant social fait sortir un bien du patrimoine social, on se situe dans une matérialité de l’infraction proche de l’abus de confiance.

 

Par ailleurs, l’usage abusif peut être caractérisé sans que des biens sortent du patrimoine de la société (en l’absence de tout acte de disposition). Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1967 (repris par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1968) : suffit à caractériser l’infraction, en dehors de toute volonté d’appropriation définitive, la simple utilisation abusive des biens. Un simple acte d’administration peut constituer l’usage abusif. La jurisprudence estime de façon générale que l’abus de biens sociaux peut être caractérisé par un usage qui a pour portée des risques auquel l’actif social n’avait pas à être exposé.

 

Autre manifestation de la volonté d’interprétation de la notion largement : acte instantanée. C’est la prise de décision licite qui consomme l’usage. Si on considère que c’est lors de la prise de décision illicite que l’infraction est consommée, c’est à compter de cette date que P ° devrait courir court. La Chambre criminelle considère que lorsque l’usage abusif a été décidé par une convention (dissipation ou aliénation), il résultera de ses modalités d’exécution que l’usage abusif ne se cantonnera pas dans la prise de décision (acte instantanée), mais se renouvellera à chaque exécution de la décision initiale (acte successif). Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 28 mai 2003 : incrimination avait consisté pour des dirigeants sociaux à consentir à des personnes extérieures à la société des contrats de travail, des salaires puisés dans les fonds sociaux mais la prestation de travail de ces derniers n’avait jamais été constaté (emploi fictif). Juges du fond : l’usage abusif consistait dans la conclusion des contrats de travail litigieux. La Chambre criminelle : l’infraction d’abus de biens sociaux a été réitérée à chaque perception indue de salaire par les personne bénéficiaire du contrat de travail, et ne se résumait donc pas à la convention initiale, mais s’était prolongée par réintégration, à chaque versement indu des salaires avait permis de faire reculer PDP°.

 

 

2) Usage par omission (acte négatif).

 

Certains auteurs avancent l’idée que cette notion d’usage abusif devrait être interprétée strictement et être cantonnée à des usages positifs d’utilisation du bien ou d’exercice du pouvoir. Mais il apparaît que le fait de ne pas faire usage d’un droit peut être une forme constitutive d’un usage. Dans une acception plus juridique du terme, on peut considérer que les actes par omission peuvent être inclus dans cette option, sans porter atteinte au principe d’interprétation stricte de la loi pénale. En effet, la Chambre criminelle a, à plusieurs reprises, considéré que l’usage abusif pouvait être caractérisé par une simple abstention, omission fautive de la part d’un dirigeant social. Cette extension est compréhensible : au regard de l’intérêt de la société peut aussi bien être mis en péril par acte de c° que le fait de mal gérer la société. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1984 (déjà exprimé dans un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1972) : commet un abus de biens sociaux le dirigeant social qui s’abstenait de revendiquer un bien ou créance sociale. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2004 : gérant SARL qui avait versé des acomptes de loyers non dus par la société car non prévus dans le contrat de bail à une SCI dont ils étaient eux-mêmes associés. A la suite de celui-ci, ils auraient dû retrancher des loyers ensuite versés le montant des acomptes qu’ils avaient versés indu, de sorte que la SARL disposait d’une créance à l’égard de la SCI. Une abstention leur a été reprochée. Elle était précédée d’un acte de c °, consistant à verser des sommes qui n’étaient pas due. L’ensemble des actes reposaient en 1er lieu dans un acte positif (versement d’une somme indue) et en 2e lieu en des actes d’abstention. Les juges du fond ont déclaré coupables d’abus de biens sociaux par défaut de réintégration de la somme indument débitée. La Chambre criminelle approuve l’analyse des juges du fond : usage des biens ou crédit de la société, contraire à l’intérêt de celle-ci peut résulter non seulement d’une action, mais aussi d’une abstention volontaire (consommant définitivement l’abus de biens sociaux). On peut se demander où se situe cet arrêt au regard d’un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2005 : les juges du fond avaient considérés qu’un président demande société avait fait preuve de tolérance à l’égard d’un directeur général lorsque ce dernier avait dissipé des fonds sociaux pour achat, pour usage personnel, d’une voiture de luxe. La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel : les juges du fond n’ont pas caractérisé la participation personnelle du prévenu à l’infraction. Or, un arrêt de 2004 mettait sur le même plan l’acte de c° ou l’abstention. En réalité, l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2005 ne le contredit pas. Ce qui avait été reproché dans :

 

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2004 : abstention fautive de l’exercice prérogatives qui étaient les leurs au titre de la gestion de la société (résultant de l’absence de déduction)

arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2005 : le président ne s’était pas abstenu de ne pas exercer les pouvoirs qu’il aurait dû exercer au titre de ses prérogatives, car il n’avait pas d’autorité à l’égard du directeur général, de sorte qu’on ne pouvait lui reprocher le non exercice de ses prérogatives la tolérance, qui consistera en une simple indifférence ne constitue pas une commission des prérogatives qui auraient due être exercées au titre des prérogatives de gestion.

 

 

Conclusion : l’ensemble de ces arrêts montre qu’en donnant à cet usage un contenu aussi large, varié que lui permet une Interprétation stricte de loi pénale, volonté de réprimer cet acte.

 

  1. B) Usage abusif car contraire à l’intérêt social.

 

Quelque soit la forme de cet usage abusif, il ne peut donner lieu à répression pénale que s’il est contraire à l’intérêt social. C’est dans la mesure seulement où il y a contrariété à l’intérêt social qu’il y aura usage abusif.

 

1) Analyse générale de la contrariété à l’intérêt social.

 

Sans ce caractère de contrariété de l’usage abusif à l’intérêt social absence d’abstention les juges du fond doivent avec le plus grand soin caractériser la contrariété, sans quoi la Cour de cassation censurera la position comme absence de caractérisation suffisante. De façon générale, la jurisprudence apprécie assez largement la contrariété à l’intérêt social. Sera contraire à l’intérêt social l’acte qui causera à la société un préjudice matériel (ex : fait pour un dirigeant de puiser dans fonds sociaux), dès lors que l’actif social a couru un risque auquel il ne devait pas être exposé (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1975). Souvent, un risque économique, financier davantage que pénal. Pour apprécier ce risque, les juges du fond doivent tenir compte du contexte économique et financier dans lequel s’intègre le comportement. En effet, pour la jurisprudence, le risque encouru par la société doit être apprécié au jour où les dirigeants sociaux ont effectué l’opération litigeuse. Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1991 : abus de biens sociaux non retenu au terme d’une analyse complexe : les dirigeants sociaux se sont vues reproché d’avoir fait acquérir par une société, des actions surévalué es d’une autre société, et d’avoir par ailleurs pris un fonds de commerce en location-gérance à des conditions désavantageuses. Juge du fond : l’opération d’avec° des actions n’était pas dans son ensemble dénué d’intérêt pour la société au moment où acte réalisé, mais ont considéré que résidait dans cet acte une contrepartie économique que les dirigeants sociaux ont pu légitimement cru pouvoir prendre en compte. De façon générale, cette analyse économique avait permis aux juges du fond de considérée qu’au jour de l’acte, il ne pouvait être retenu une contrarié té à l’intérêt social. La Chambre criminelle valide la position de la Chambre criminelle, il ne faut pas se limiter à une analyse stricte mais concrète

 

 

1.

La contrariété à l’intérêt social et la commission d’une infraction par le dirigeant social

 

 

Jurisprudence importante dans 1990’s, médiatisée car s’agissait d’affaire de corruption impliquant des personnes politiques de haut rang, et sur le plan juridique se posait la question : Directeur Général qui commet une infraction à l’aide des fonds sociaux (corruption) avec l’intention de favoriser sa société commet-il une infraction d’Abus de Biens Sociaux ?

 

Cour de cassation ° a eu une Jurisprudence évolutive :

 

– Crim 22 avril 1992 « Carpaye » : s’agissait de 2 Directeurs Généraux d’une société de transport qui ont cherché à corrompre le maire en lui offrant de l’argent en échange du marché du transport scolaire. Ces fonds ont été prélevés sur les caisses de la société = infraction de corruption active caractérisée mais Directeurs Généraux refusent l’infraction d’Abus de Biens Sociaux du fait de l’acte dans l’intérêt de la société car l’enjeu était d’obtenir l’attribution d’un marché. Ils ont été condamnés d’Abus de Biens Sociaux d’autre part car l’usage des biens de la société est nécessairement abusif lorsqu’il est fait dans un but illicite.

Critique doctrine : peut être parfois nécessaire pour des Directeurs Généraux de commettre une corruption dans l’intérêt de la société. Cette rigueur juridique méconnaissait donc la réalité économique de la vie des affaires. Etait également reproché à la Cour de cassation ° de ne pas tenir compte de lettre de l’Abus de Biens Sociaux selon laquelle l’usage abusif doit avoir été fait dans l’intérêt personnel du Directeurs Généraux.

 

  • Revirement Crim 11 janvier 1996 « Rosemain » : Gérant d’un hôtel avait constitué une caisse noire alimentée par une partie des recettes de l’hôtel. Sur ces sommes, 25% étaient utilisés pour rémunérer des employés non déclaré s, les 75% pour des dépenses personnelles. Condamné pour Abus de Biens Sociaux. Cour de cassation° tient compte du fait que seule une partie des sommes était utilisée pour payer au noir des employés (infraction de travail non déclaré). Condamnation justifiée par le fait d’avoir conserver 75% de ces sommes pour son usage personnel. On peut interprétant cet arrêt comme signifiant qu’a contrario, si le Directeur Général avait utilisé la totalité de cette caisse noire pour rémunérer les employés non déclarés, il n’y aurait pas eu Abus de Biens Sociaux car répondait à l’intérêt de la société (économie des charges sociales).

 

  • Crim 6 février 1996 « Noir – Botton » : Président d’une Société avait fait verser par sa société des sommes importantes au son gendre du ministre de l’intérieur (Noir), afin qu’il intervienne auprès du ministre de l’Intérieur pour que celui agisse auprès du Trésor. La société avait bénéficié au final d’une réduction. Le DG de la Société a été condamné pour Abus de Biens Sociaux par la Cour d’Appel outre le cas de corruption. Cour de Cassation casse et reproche à la Cour d’Appel d’avoir statué ainsi alors que la démarche du Directeur Général avait pu avoir résultat de minorer substantiellement la dette de sa société envers le Trésor. Cour de Cassation a précisément reproché à la Cour d’Appel de ne pas avoir mis la Cour de Cassation en mesure de s’assurer de la légalité de sa décision (manque de motivation) de sorte que la portée de cet arrêt à fait l’objet d’interprétation diverses selon les auteurs.

 

Pour la majorité de la doctrine, cet arrêt est significatif : prélèvements abusifs effectués sur les fonds sociaux ne constituaient pas pour autant un Abus de Biens Sociaux car l’infraction commise par le Directeur Général l’avait été dans la recherche de l’intérêt de la Société.

De nouvelles critiques : Cour de Cassation° justifie une infraction prétendument commise dans l’intérêt de la société et admet que l’intérêt d’une société pouvait se satisfaire de la commission d’une infraction.

 

  • Crim 27 octobre 1997 « arrêt Carignon » : Directeurs Généraux de 2 groupes de société avaient obtenir la concession du service des eaux de la ville de Grenoble. Ont dépensé des sommes importantes pour corrompre le maire condamné pour Abus de Biens Sociaux par la Cour d’Appel. Cour de cassation ° rejette le pourvoi contre l’arrêt et affirme cette fois de façon claire : quelque soit l’avantage à court terme qu’elle peut procurer, l’utilisation des fonds sociaux ayant pour seul objet de commettre un délit tel que la corruption est contraire à l’intérêt social en ce qu’elle expose la PM au risque anormal de sanctions pénales ou fiscales contre elle même et ses Directeurs Généraux et porte atteinte à son crédit et à sa réputation.

Cet arrêt a fixé la Jurisprudence qui n’est plus critiquée aujourd’hui. Réaffirmée en 2007. Solution inverse présentait le vice rédhibitoire d’admettre qu’un acte illicite c’est à. dire contraire à l’intérêt social pouvait néanmoins être considéré comme répondant à l’intérêt de la société = paradoxe.

 

 

  1. L’usage contraire à l’intérêt social dans un groupe de Société

 

 

Dans un groupe de société il se peut qu’un acte qui soit perçu a priori comme contraire à une société (appauvrissement), peut néanmoins se révéler bénéfique à l’échelle du groupe car profite à une autre société. On ne peut donc pas se contenter d’apprécier la contrariété à l’ordre social de la seule société autre de l’acte.

 

Jurisprudence apprécie souplement les actes d’appauvrissement d’une société dès lors qu’il a pu bénéficier à une autre. On y voit l’existence d’un fait justificatif tirée de l’intérêt de groupe.

Conditions : Crim 4 septembre 1996 « le concours financier apporté par le Directeurs Généraux d’une société à une autre entreprise dans laquelle il est intéressé n’échappe aux prévisions des textes incriminant le délit d’Abus de Biens Sociaux que si d’une part l’existence d’un groupe de société est établie et si d’autre part, ce concours est dicté par les intérêts du groupe appréciés au regard d’une politique commune, n’est pas dépourvue de contrepartie ou ne rompt pas l’équilibre entre les engagements respectifs des diverses société et n’excède pas les possibilités financières de celle qui en supporte la charge ».

  • considérations pragmatiques et économiques, analyse globale des intérêts de l’ensemble du groupe, tout en préservant les intérêts de la société appauvrie = EQUILIBRE.
  • fort pouvoir créateur de la Jurisprudence mis au service non pas de la répression mais au service de la souplesse commandée la réalité économique.

 

  • Comparaison avec l’élément matériel de l’abus de confiance :

 

L’abus de confiance repose sur un acte de détournement alors que l’abus de gestion repose sur un acte de déviance par rapport à une gestion normale. On peut envisager un concours d’infraction, mais dans ce cas, ces qualifications sont exclusives l’une de l’autre car protègent la même valeur, c’est donc la qualification spéciale c’est à dire  l’Abus de Biens Sociaux qui l’emporte.

 

Intérêt social et commission d’une infraction

 

 

Le dirigeant social qui commet une infraction avec l’intention de favoriser sa société se rend il coupable par ailleurs au delà de la corruption d’une infraction d’abus de biens sociaux. La cour de cassation a rendu plusieurs arrêts sur ce point avec l’arrêt du 22 avril 1992 l’arrêt Carpaye. Dans cette affaire il s’agissait de transporteurs cherchant à corrompre le maire d’une commune en échange du marché de transport scolaire ces fonds ayant été puisés dans ceux de la société ayant ainsi puisé dans les fonds de la société y avait il aussi abus de biens sociaux. Pour les dirigeants il n’y avait pas délit d’abus de biens sociaux car les actes répondaient à l’intérêt de la société et qu’il n’y avait pas acte contraire à l’intérêt de la société de sorte qu’il n’y avait pas abus de biens sociaux mais pour la cour de cassation l’usage de fonds de la société et nécessairement abusif lorsqu’il fait dans un but illicite ce qui est le cas en l’espèce. La cour de cassation a été critiqué car pour certains auteurs ils pouvaient être nécessaire dans certains cas de commettre des infractions de corruption car dans le cas contraire on méconnaissait la vie réalité économique et la cour s’était vu reproché une approche trop théorique de l’économie et au delà de cet aspect économique il était reproché à la cour d’avoir méconnu le fait que les dirigeants n’avaient en vue que l’intérêt de la société et non pas un intérêt personnel. D’ou 2ème arrêt du 11 janvier 93 arrêt Rosemain qui avait prévu une caisse noire et sur les sommes soustraites 25% étaient prévu pour rémunérer au noir ces salariés et le reste pour un usage personnel ce dernier a donc été accusé d’abus de biens sociaux ; pour la cour seule une partie des sommes ainsi soustraites à la comptabilité étaient utilisée pour payer au noir les salariés et le dirigeant s’est vu accusé d’abus de biens sociaux et ¾ des sommes soustraites à la comptabilité pour ces propres dépenses. Il n’y aurait donc pas eu lieu de le condamner pour abus de biens sociaux si la totalité de la caisse noire avait été employée à la rémunération au noir de ces salariés. Ici il y a revirement par rapport à l’arrêt de 1992 car si la totalité des sommes avaient été affectée a la rémunération de la société et donc répondait à un objectif précis il n’aurait pas été condamné pour abus de biens sociaux. Puis en 1998 arrêt Noir Boton le dirigeant d’une société avait effectué des versements pour 750 000 F au gendre du ministre pour que ce dernier intervienne en faveur de la société auprès du trésor public pour une aide à l’exportation et si celle-ci lui était refusée il devait verser 15 millions de francs au trésor. Cette somme a été ramenée à 5 millions de francs contre 750 000 F le dirigeant de la société a été condamné par la cour d’appel de Lyon pour abus de biens sociaux. L’arrêt a été cassé car la cour de cassation a reproché à la cour d’appel d’avoir statué ainsi car l’approche du dirigeant social a pu avoir pour résultat en échange d’un versement de 760 000 F de diminuer la dette de la société envers le trésor public. Pour la cour de cassation la cour d’appel n’a pas mis en mesure la cour de cassation de vérifier sa décision de sorte que la portée de l’arrêt à fait l’objet de controverses et cet arrêt a été significatif alors que d’autres auteurs ont estimé sa portée incertaine. La portée en réalité est que les prélèvements réputés abusifs car ils avaient permis une infraction de corruption ne constituait pas un abus de biens sociaux car l’infraction de corruption l’avait été dans l’intérêt de la recherche de la société et il ne pouvait y avoir prélèvement contraire à la société dans la mesure où la dette de celle ci était diminué. La cour de cassation s’est vu reproché d’accepter une infraction sous prétexte que celle ci était commise dans l’intérêt de la société et l’intérêt d’une société pouvait se satisfaire de la commission d’une infraction. D’ou arrêt de la chambre criminelle octobre 1997 arrêt Carignon au bulletin 352 des industrielle savaient voulu obtenir la concession des services d’eaux de Grenoble et pour cela ont offert au maire différent biens. Ces derniers ce sont vu condamné par la cour d’appel de Lyon pour abus de biens sociaux ce qui a été confirmé par la cour de cassation car quelque soit l’avantage qu’elle peut procurer à court terme l’usage de biens sociaux qui a pour seul objet l’intérêt de la société est contraire à l’intérêt social dans la mesure ou elle expose la personne morale au risque anormale de sanctions pénales et fiscales contre elle même et ses dirigeants et porte atteinte a son crédit et sa réputation. Arrêt qui a fixé la jurisprudence et repris dans un arrêt du 10 mars 2004 ou criminelle 19 septembre 2007 et l’utilisation de fonds sociaux pour commettre le délit de corruption expose la société à un risque anormal de sanctions pénales et fiscales et relève une contrariété à l’intérêt de la société. Cette solution est juridiquement plus satisfaisante que celle de l’arrêt Carpaye car la solution inverse admettait qu’un acte illicite donc contraire à l’objet social pouvait néanmoins être considéré comme répondant à l’intérêt de la société d’ou un paradoxe soulevé pour critiquer la jurisprudence.

 

3 Appréciation d’un usage de fonds sociaux qui peut avoir pour objet de répondre à l’intérêt d’une autre société (le cas des groupes de sociétés)

 

Opération qui profite à une autre société partie du groupe et en contrepartie de l’appauvrissement d’une société il y a enrichissement d’une autre société et il faut avoir une vision plus générale de la contrariété à l’intérêt social et la jurisprudence apprécie avec souplesse la contrarié té à l’intérêt d’une société dès lors que l’opération profite à une autre société. On y voit un fait justificatif tiré de l’intérêt de groupe (criminelle 4 février 85 ou 4 septembre 96. Ce dernier formule les conditions d’admissions de ce fait justificatif et le concours financier apporté par le dirigeant d’une société à une autre entreprise dans laquelle il est intéressé n’échappe aux prévisions des textes incriminant le délit d’abus de biens sociaux que si d’une part l’existence d’un groupe de société est établi et si d’autre part ce concours est dicté par les intérêts du groupe apprécié au regard d’une politique commune n’est pas dépourvu de contrepartie ou ne rompt pas l’équilibre entre les engagements respectifs des diverses sociétés et n’excède pas les possibilités financières de celles qui en supporte la charge.

 

Cette jurisprudence est créatrice car ce fait justificatif c’est la cour de cassation qui l’a élaboré et elle joue un rôle qui n’est pas normalement celui du juge et sont en général de la compétence du législateur et il y un fort pouvoir créateur de la jurisprudence pas mis au service de la répression mais introduit grâce à un fait justificatif une souplesse commandée par la réalité économique

L’abus de confiance se caractérise au regard de sa matérialité par un détournement du biens et entre l’abus de gestion et l’abus de confiance il y a au regard de leur matérialité des recoupements possibles et l’abus de confiance repose sur un acte de détournement alors que les abus de gestion se caractérise par des actes de déviance par rapport à une gestion normale et on peut envisager un concours idéal d’infraction et les faits peuvent à la fois recevoir la qualification d’abus de biens sociaux et de confiance mais il s’agit de qualification exclusive et dans les deux cas on chercher à préserver l’intérêt de la société et si les éléments constitutifs de chaque infraction c’est la qualification spéciale d’abus de biens sociaux qui l’emporte

 

  • 3 l’élément moral de l’abus de biens de gestion

 

 

L’intention frauduleuse ne doit pas être confondue avec l’intention de nuire comme l’avait apprécié un arrêt de la chambre criminelle février 1970 et la cour de cassation prend en compte le fait de faire courir pour la société un acte anormal et compte tenu de ses fonctions l’agent ne pouvait pas ne pas se rendre compte qu’il agissait dans un sens contraire à l’intérêt de la société. Le dom spécial pour l’incrimination des abus de gestion l’usage des biens contraire à l’intérêt de la société doit aussi présenter la particularité d’être commis par des dirigeants à des fins personnels ou pour favoriser une autre société dans laquelle il est intéressé ce qui justifie l’exigence d’un dol spécial. Le législateur fait entrer dans l’incrimination ce qui pourrait rester hors champ car le législateur érige un mobile en élément constitutif de l’élément moral et ce mobile est révélé par l’exigence de biens personnels en connaissance de cause et commis à des fins personnels ou pour favoriser une autre entreprise dans laquelle il a des intérêts. Lorsque le dirigeant social commet en connaissance de cause l’acte abusif il y a dol général et ce prélèvement contraire à l’intérêt de la société a pu être fait pour diverses raisons et ce mobile est intégré dans l’incrimination par l’exigence du dol spécial qui vient restreindre le champ d’application de l’incrimination et il ne suffit pas que le dirigeant social est commis un usage abusif car contraire à l’intérêt de la société encore faut il qu’il l’ait fait de façon volontaire. La cour de cassation a pu imiter le dol spécial il est réduit à néant et la jurisprudence réduit la portée pratique de cette exigence et l’intérêt personnel peut correspondre à un intérêt maté riel ou enrichissement mais la jurisprudence admet aussi que l’intérêt personnel puisse être morale crédit de la société pour la défense de la réputation de la famille mais sous couvert d’intérêt moral on pouvait se demander si l’usage abusif des biens répondaient un intérêt de la société ou de l’agent. Pour la cour de cassation l’intérêt personnel peut être morale ou matériel et résulter du souci d’entretenir de bonnes relations avec in tiers proche des sphères politiques et ce qui est retenu à des fins personnels est le mobile de l’auteur et la cour de cassation réduit à néant l’exigence de l’intérêt personnel en tant que dol spécial et elle considère que dès lors qu’il n’est pas justifié par le prévenu que les fonds ont été utilisés dans le seul intérêt de la société ces fonds prélevés de manière occulte l’ont été dans sont intérêt personnel (11 janvier 1996) avec la conscience et la volonté d’agir dans l’intérêt contraire de la société.

 

Répression des abus de gestion et réparation

 

 

Les règles de fonds

 

Les personnes punissables

 

Les abus de gestion constitue des délits de fonction que certains auteurs considèrent comme des délits aristocratiques et seules des personnes déterminé es de droit ou de fait peuvent les commettre ( directeur adjoint… L241-3) le texte vise les gérants qui sont les personnes pouvant commettre les délits des abus de gestion et les dirigeants de fait peuvent se rendre coupable de l’infraction et ils sont sur le même plan que les dirigeants de droits et dans le domaine des SARL c’est l’article L241-9 du code de commerce qui étend les dispositions qui répriment les abus de gestion aux personnes qui directement ou par personnes interposées aura en fait exercé la gestion d’une SARL a la place de son gérant légal. Et les actes du complice pour être punissables doivent être commis en connaissance de cause des actes commis par l’infracteur principal mais il n’est pas nécessaire que le complice présente la qualité de dirigeant de droit ou de fait et un salarié peut être complice. Pour les personnes qui ne se sont pas rendu coupables mais qui ont eu un avantage à la commission de cat abus de gestion

 

  • 3 L’élément moral

 

 

Crim, 6 février  96 Noir Bouton : dirigeant de société condamné par la CA de Lyon pour Abus de Biens Sociaux B.

L’arrêt a été cassé. La Cour de Cassation a reproché à la CA d’avoir statué ainsi alors que la démarche du dirigeant a pu avoir pour résultat en échange d’un versement de minorer substantiellement la dette de sa société envers le trésor public. Et cet arrêt a été cassé car la Cour de Cassation a reproché à la CA de ne pas avoir la Cour de Cassation en capacité de juger de la légalité de sa décision.

 

 

La portée de cet arrêt a fait l’objet d’interprétations différentes selon les auteurs.

 

Certains auteurs en ont tiré une portée certaine : pour ces auteurs, les prélèvements abusifs prélevés sur les fonds sociaux ne constituaient pas pour autant un Abus de Biens Sociaux car l’infraction de corruption qu’avait commise le dirigeant l’avait été dans la recherche de l’intérêt de la société

 

Cet arrêt a été critiqué : on reproche à la Cour de Cassation de mettre en œuvre le dicton « le fin justifie les moyens » et de dire que l’intérêt d’une société privée pouvait se satisfaire de l’intérêt d’une infraction.

Donc de nouveau, la Cour de Cassation a changé son fusil d’épaule (après 92 et 96)

 

 

Crim, 27 octobre 97 arrêt Carignon (nom du maire de Grenoble) (Bulletin n°352) : les dirigeants de deux groupes de société de Grenoble avaient boulu obtenir la concession du service des eaux de Grenoble et on dépensé 31 millions de francs pour entrer dans les bonnes grâces du maire, ils lui ont offert un appartement à Paris, lui ont réglé plus de 120 déplacements en avion taxi entre Paris et Grenoble de sorte qu’au final, ils se sont vus attribuer cette concession. Ils ont été condamnés pour Abus de Biens Sociaux par la CA de Lyon. Cour de Cassation a rejeté le pourvoi contre cet arrêt. La Cour de Cassation a affirmé que quelque soit l’avantage a court terme qu’elle peut procurer, l’utilisation des fonds sociaux ayant pour seul objet de commettre un délit tel que la corruption, est contraire à l’intérêt social en ce qu’elle expose la personne morale au risque anormal de sanctions pénales ou fiscales contre elle-même et ses dirigeants et porte atteinte à son crédit et à sa réputation.

 

Cet arrêt a fixé la jurisprudence qui n’est plus contestée aujourd’hui.

 

Crim, 10 mars 2004 et Crim, 19 septembre 2007 : « l’utilisation de fonds sociaux pour commettre

 

 

le délit de corruption expose la société à un risque anormal de sanction pénale ou fiscale et cela

 

relève une contrariété à l’intérêt de l’associé ».

 

 

Cette solution est plus satisfaisante que la solution inverse de 92.

 

L.

La solution inverse présentait ce vice rédhibitoire d’admettre qu’un acte contraire à l’objet social

 

et donc illicite pouvait néanmoins être considéré comme répondant à l’intérêt de la société d’où

 

un paradoxe qui avait été soulevé. Et finalement, la Cour de Cassation a entendu la critique et a

 

changé.

 

On vient de finir la contrariété à l’intérêt social

 

 

 

 

 

3e point (bonus) : nous présente la question de l’appréciation d’un usage de fonds sociaux qui

 

dans le cadre d’un groupe de sociétés peut avoir pour objet de répondre à l’intérêt de l’autre

 

société.

 

 

Dans un groupe de société, un acte qui de premier abord pourrait être contraire à une société, cet

 

acte peut se révéler bénéfique à l’échelle du groupe de société parce qu’il va profiter à une autre

 

société faisant partie du groupe. Donc dans ce cas, on ne peut pas que se livrer à la contrarié té à

 

l’intérêt social dans la seule société ou l’acte a été commis. Il faut avoir une vision plus générale.

La jurisprudence apprécie dans ce contexte, avec beaucoup

de souplesse les actes

 

d’appauvrissement d’une société dès lors que ce prélèvement de fonds sociaux dans une société a

 

pu bénéficier à une autre. On y voit l’existence d’un fait justificatif tiré de l’intérêt de groupe. Ce

 

fait est présent dans plus arrêts de la Cour de Cassation : Crim, 4 février 85 Bulletin, 4 septembre

 

1996, 20 mars 2007.

 

. Quelles sont les conditions de ce fait justificatif ?

 

.

L’arrêt du 4 septembre 96 est très intéressant car il formule les conditions d’admission de ce fait

 

justificatif : « le concours financier apporté par la dirigeant d’une société à une autre entreprise

 

dans laquelle il est intéressé n’échappe aux prévisions des textes incriminant le délit d’abus de

 

biens sociaux que si d’une part l’existence d’un groupe de société est établi et si d’autre part, ce

 

concours est dicté par les intérêts du groupe apprécié au regard d’une politique commune n’est

 

pas dépourvue de contrepartie ou ne rompt pas l’équilibre entre les engagements respectifs des

diverses sociétés et n’excède pas les possibilités financières de celles qui en supportent la charge »

On voit par l’énoncé de ces conditions qu’il y a des considérations pragmatiques et économiques. Il ne faut pas que les prélèvements soient excessifs pour la société. Il doit y avoir un équilibre des intérêts.

Il faut remarquer que cette jurisprudence est très créatrice car ce fait justificatif c’est finalement la Cour de Cassation qui l’a élaboré. Or, ce faisant, la Cour de Cassation joue ici un rôle qui n’est pas celui du juge.es faits justificatifs qui sont de nature à neutraliser un texte d’incrimination sont de la compétence du législateur et seulement lui. Donc ici, fort pouvoir créateur de la jurisprudence et ce pouvoir créateur est mis au service non pas de la répression mais au profit d’une souplesse dans l’application des textes d’incrimination, souplesse commandée par la réalité économique.

 

 

 

Voilà pour l’élément matériel de l’abus de biens sociaux.

 

Parallèle avec l’élément matériel de l’abus de confiance : détournement du bien qui aura fait l’objet de la remise à titre précaire. Entre l’Abus de Biens Sociaux et l’abus de confiance, il peut y avoir des recoupements possibles dans leur incrimination sur l’élément maté riel. Pour distinguer la doctrine ajoute des subtilités : l’abus de confiance repose sur un acte de détournement alors que les abus de gestion se caractérisent par des actes de déviance par rapport à une gestion normale. Quoi qu’il en soi, on peut envisager un concours idéal d’infractions c’est à dire que les faits peuvent dans certains cas recevoir aussi bien la qualification d’abus de confiance et d’abus de gestion mais ici il s’agit de qualifications qui seront exclusives l’une de l’autre car dans les deux cas il faut protéger la société. S’il y a doute, c’est la qualification spéciale qui l’emporte donc celle d’abus de biens sociaux.

 

 

                                                                                   ———————

 

  • 3 L’élément moral des abus de gestion

 

 

 

Il se décompose en deux éléments

 

 

 

  1. Le dol général

 

 

 

Les abus de gestion sont des délits intentionnels et c’est ce qu’expriment les textes d’incrimination (R242-6 du code de commerce). A deux reprises les rédacteurs de ce texte attirent l’attention sur le caractère intentionnel du délit. Ce qui est incriminé c’est de faire de mauvaise foi un usage des pouvoirs des biens, des… un usage qu’ils savent contraire à la société.

 

Le dol général : la jurisprudence n’est pas très exigeante. Le dol général est facilement caractérisé. Il désigne une faute intentionnelle, la conscience qu’a le dirigeant social de commettre un acte contraire à l’intérêt de la société. On trouve aussi dans la jurisprudence l’expression d’intention frauduleuse. L’intention frauduleuse n’est pas à confondre avec l’intention de nuire (Crim, 3 février  70 ; pas d’intention de nuire est requise pour caractériser l’infraction) Cour de Cassation, 16 janvier 89 : il y a dol général quand le dirigeant a conscience de faire courir à la société un risque anormal.

La jurisprudence s’achemine vers une Présomption très dure à renverser par le dirigeant social.

 

 

Ce qui est plus difficile c’est le dol spécial qui doit se cumuler au dol général.

 

 

 

  1. Le dol spécial

 

Il est révélé par le fait que l’incrimination des abus de gestion précise que l’usage des biens contraire à l’intérêt de la société doit aussi présenter la particularité d’avoir été commis par le dirigeant à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle il est intéressé.

 

Le dol spécial est loin d’être toujours présent dans une infraction intentionnelle. C’est une particularité d’un élément intentionnel.

 

En quoi consiste le dol spécial ?

 

Le législateur prévoit une infraction qui intègre un dol spécial. Le législateur fait entrer dans l’incrimination ce qui resterait hors du champ de l’incrimination parce que constituant un mobile. Le législateur érige en mobile un élément constitutif de l’élément moral.

Dans les faits c’est cette exigence de fin personnelle qui est à l’origine de la jurisprudence la plus intéressante à observer.

 

Lorsque le dirigeant social commet en connaissance de cause cela caractérise le dol général.

 

Pourquoi a -t-il prélevé ces fonds de la société ?

 

 

Il a pu le faire par exemple pour s’acheter une voiture, pour payer des vacances à sa famille et sans cette indication du texte, cela resterait hors des éléments constitutifs de l’infraction mais maintenant ça en fait partie. L’exigence de ce dol spécial vient restreindre le champ d’application de l’incrimination. Il ne suffit pas en toute rigueur que le dirigeant social ait commis un usage qu’il savait abusif parce que contraire à la société, il faut encore s’assurer qu’il l’a fait à des fins personnelles.

De sorte que la Cour de Cassation, quelque peu embarrassée chercher et arrive à limiter la portée de ce dol spécial à un point tel qu’en observant la jurisprudence, on voit que le dol spécial est réduit à néant par la Cour de Cassation.

 

La jurisprudence réduit la portée pratique de cette exigence.

 

 

 

L’intérêt personnel du dirigeant peut correspondre à un intérêt maté riel (son enrichissement qu’il recherche), mais la jurisprudence admet également que son intérêt personnel puisse être simplement moral. Ca peut être ainsi une volonté de soustraire sa famille du déshonneur (Crim, 3 mai 1967 : un dirigeant social avait consenti à son frère des ouvertures de crédits irrégulières et qui faisait courir à la société des risques anormaux aux biens et au crédit de sa société. L’intérêt personnel était d’aider son frère et de protéger l’honneur de sa famille.

 

Sous couvert d’intérêt moral, la jurisprudence a fini par donner une signification très extensive à l’intérêt personnel : Crim, 15 septembre 99 (affaire de corruption financée par des fonds prélevés de la société : en l’espèce, l’usage abusif des biens répondait il à un intérêt personnel.)

 

La Cour de Cassation a dit que l’intérêt personnel pouvait être maté riel, personnel et pouvait comme en l’espèce résulter du souci d’entretenir de bonnes relations avec un tiers proche des sphères politiques.

Mais alors tout  devient intérêt moral. La tendance de la jurisprudence  est de réduire l’exigence d’un dol spécial à une condition toujours remplie pour ne pas entraver la répression. Ici, ce qui a poussé à agir le dirigeant c’était d’entretenir des bonnes relations avec le politicien.

 

La Cour de Cassation réussit donc à rendre lettre morte l’exigence de l’intérêt personnel.

 

Et par ailleurs, la jurisprudence n’hé site pas le cas échéant à le présumer. Elle considère que dès lors qu’il n’est pas justifié par le prévenu que les fonds ont été utilisés dans le seul intérêt de la société, ces fonds prélevés de manière occulte l’ont nécessairement été dans son intérêt personnel (Crim, 11 janvier 96 et Crim, 14 juin 2006). Donc en pratique l’élément moral est suffisamment caractérise pour les juges par la conscience et la volonté de l’agent d’agir d’une façon contraire aux intérêts de la société. Et dans les faits, dans la jurisprudence, la condition du dol spécial est quasiment réduit à néant à des fins de répression à tel point que la doctrine souhaiterait que le législateur consacre la jurisprudence.

 

 

 

Section 3 : répression des abus de gestion et réparation

 

 

 

  • 1 L’action publique

 

 

 

 

  1. Règles de fond

 

 

 

 

1) Personnes punissables

 

 

 

 

On retrouve une différence entre abus de confiance et abus de gestion.

 

Abus de confiance : peut être commis par toute personne.

 

Abus de gestion constituent des délits de fonction que certains auteurs désignent comme étant des délits aristocratiques. Seules certaines personnes déterminées peuvent les commettre : les dirigeants de droit ou de fait.

Dirigeant de droit :

 

  • L 242-6 du code de commerce (pour les SA) : le président, les administrateurs, les directeurs généraux de la SA auxquels la jurisprudence a ajouté les directeurs généraux adjoints (Crim, 19 juin 1978)

 

  • L241-3 du code de commerce (pour les sociétés à responsabilité limitée) : le texte vise ici les gérants, BN. Dirigeant de fait :

 

  1. Ils peuvent être coupables de ces infractions depuis que la loi du 24 juillet 1966 les a mis sur le même plan que les dirigeants de droit à cet égard. Par exemple, dans le domaine des SARL, article L 241-9 du code de commerce étend les dispositions réprimant les abus de gestion à toute personne qui directement ou par personne interposée aura en fait exercé la gestion d’une société à responsabilité limitée à la place de son gérant lé gal (Crim, 24 septembre 2008, droit pénal 2008, commentaire 156). En matière de société par actions article ( ?), responsabilité des dirigeants de fait.

 

 

Qu’en est-il des complices ? Il faut se reporter aux règles générales du code pénal (121-6 et 121-7 du code pénal). La complicité est punissable si les actes du complice ont été accomplis en connaissance de cause des actes commis par l’auteur de l’infraction principale. Mais il est important de préciser qu’il n’est pas nécessaire que le complice présente la qualité de dirigeant de fait ou de droit. Quelque soit sa qualité, une personne pourra être complice de l’auteur d’un dirigeant. Ainsi, un salarié pourra être complice alors même qu’il n’a pas la même qualité que l’auteur de l’infraction principale.

 

Précision sur ces personnes ayant tiré un avantage de la commission d’un abus de biens sociaux. En effet, des personnes, tiers à la société, ne s’étant pas rendus coupables de l’abus de biens sociaux puissent être déclarés coupable d’une autre infraction, celle de recel, infraction qu’elles auront commise à la suite de l’abus de biens sociaux commis par e dirigeant.

 

Le recel : article 321-1 du code pénal (5 ans de prison, 375 000 euros d’amende) : quand une personne en connaissance de cause va avoir profité d’avantages accordés par des dirigeants sociaux ayant utilisé à cette fin les biens de la société , cette personne n’est pas coupable elle-même de l’abus de biens sociaux mais est coupable d’u recel (elle doit avoir eu connaissance de l’abus de bien sociaux, infraction préalable) (Crim, 27 octobre 97 : maire de Grenoble coupable de recel d’abus de biens sociaux car c’était fait offrir un appartement par les dirigeants des sociétés qui voulaient la concession des eaux. Crim, 14 janvier 2009 (complicité d’abus de biens sociaux et recel))

 

 

 

2) Peines encourues

 

Article L 242-6 du code de commerce prévoit une amende de 375 000 euros et une peine d’emprisonnement de 5 ans, peines qui sont également prévues en matière de société à responsabilité limitée (L 241-3 du code de commerce). Peines sont importantes. L’article 314-1 du code pénal punit l’abus de confiance de 3 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende. Mais il faut préciser que l’article L 314-2 prévoit en matière d’abus de confiance prévoit des peines plus élevé es (7ans prison et 750 000 euros d’amende) lorsque l’abus de confiance sera accompagné d’une cause aggravante (abus de confiance commis au préjudice d’une personne d’une particulière vulnérabilité). Les abus de gestion ne connaissent pas une telle cause d’aggravation de l’infraction.

 

La tentative de l’infraction n’est pas incriminé e.

 

  1. Prescription

 

 

 

Dans les années 90, scandales politico financiers, l’intérêt pour la prescription a été très fort.

 

La jurisprudence fait ici œuvre créatrice.

 

Les abus de gestion sont des délits donc la prescription est de 3 ans. Ce délai peut paraitre très court et ça l’est car les abus de biens sociaux ce sont des délits qui dans l’ensemble sont peu facilement détectables.

Les infractions tels les abus de gestion sont facilement camouflables de sorte qu’il peut être frustrant pour les juges répressifs de constater que la prescription de l’action publique est acquise car le délit a été commis a un moment ou personne ne s’en est rendu compte.

 

L’abus de biens sociaux c’est une infraction instantanée. Les délits instantanés s’opposent aux délits continus.

 

Donc en toute  rigueur, comme toute  infraction instantanée, il doit se prescrire lorsque l’infraction a été commise (articles 7 et 8 du CPC). Donc si on applique cette règle, il se peut fort bien que l’infraction soit prescrite à un moment ou elle n’est pas encore découverte. Et c’est pour cette raison que la jurisprudence a essayé ici de contourner ou du moins d’atténuer les effets de cette prescription acquise au bout de 3 ans.

La jurisprudence ne peut pas modifier les délais de prescription. Mais la jurisprudence joue sur la détermination un point de départ de la prescription. Règle : point de départ de la prescription de l’abus de biens sociaux : au jour ou le délit a pu être constaté ou est apparu (Crim, 7 décembre 67)

Puis dans les années 80, la Cour de Cassation vient apporter une précision à cela : le point de départ de la prescription doit être fixé au jour ou le délit a pu être constaté ou est apparu, dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique (Crim, 10 aout 81)(Crim, 27 juillet 93).

 

Qu’a voulu dire la Cour de Cassation par cette précision ? Elle a voulu dire que le délai de la prescription ne commençait à courir qu’à compter du jour ou les personnes qui sont habilitées à mettre en œuvre l’action publique ont été en mesure de le faire. Ces personnes ce sont les magistrats membres du MP et également les victimes qui se constituent partie civile (si l’action publique n’avait pas encore été déclenchée). Comme cela pouvait retarder le point de départ de la prescription, les critiques ont fait remarquer que l’abus de biens sociaux devenait quasi imprescriptible. Un député a déposé une proposition de loi pour la prescription en matière d’abus de biens sociaux. La proposition visait à instituer un délai butoir.

 

La proposition prévoyait que le délit d’abus de biens sociaux se prescrivait par trois ans à compter du jour ou les faits ont été constatés mais dans la limite de 6 ans à compter du jour où ils avaient été commis. Donc cela limitait dans le temps la jurisprudence. Cette proposition de loi n’a pas abouti donc la Cour de Cassation a continué dans de nombreux arrêts à préciser sa jurisprudence.

 

A la fin des années 90, elle a fait évoluer sa jurisprudence en énonçant que la prescription de l’action publique du chef d’abus de biens sociaux coure sauf dissimulation à compter de la présentation des comptes annuels (Crim, 5 mai 97) (Crim, 10 novembre 99). Pourquoi le point de départ est il fixé à la présentation des coptes annuels ? Parce qu’on peut raisonnablement penser que les associés auront la possibilité de faire des vérifications et de vérifier les éventuels abus de la part des dirigeants. Mais la Cour de Cassation précise « sauf dissimulation »

 

 

 

La prescription devait être fixée à la présentation des comptes annuels, sauf dissimulation. Qu’est ce que cela veut dire ? En cas de dissimulation, la prescription va commencer à courir le jour ou l’infraction est apparue dans les conditions permettant l’exercice de l’action publique (Crim, 10 avril 2002).

Que faut il entendre par dissimulation car tout dépend de la portée que la jurisprudence va donner à ce terme. La Cour de Cassation contrôle la prescription de la dissimulation et la jurisprudence la reconnait dans de nombreux cas, mais c’est loin d’être systématique et il y a des arrêts qui l’écartent : « il n’y a pas de dissimulation lorsque les documents remis au CAC étaient suffisamment explicites » (Crim, 19 octobre 99) Donc cela montre que la Cour de Cassation n’admet pas facilement la dissimulation. Dans le même esprit, la Cour de Cassation a estimé qu’il n’y avait pas de dissimulation dans une affaire dans laquelle un cautionnement hypothécaire était constitutif d’un abus de gestion. Ce cautionnement avait fait l’objet d’une mesure de publicité à la conservation des hypothèques donc il a été jugé qu’il n’y avait pas de dissimulation et la Cour de Cassation a précisé que c’était à la date de la publication et non pas à celle de la présentation des comptes sociaux que devait commencer la prescription/ être son point de départ (Crim, 26 février 2007).

 

Crim, 14 janvier 2009 (Droit pénal 2009 commentaire 64) : il y avait dissimulation dans une affaire dans laquelle une convention litigieuse de cession de parts constituait un abus de gestion. Il y avait dissimulation car la convention était restée secret jusqu’à sa saisie qui avait eu lieu lors d’une perquisition faite dans une étude notariale. Le contenu de la convention n’avait pas été communiqué aux administrateurs ni au CA, ni aux actionnaires donc volonté de dissimulation de cette convention. Ici y’avait bien dissimulation justifiant le report du point de départ de la prescription.

 

 

 

 

Il faut rappeler que même en l’absence de dissimulation, il peut y avoir possibilité de reporter le point de départ de la prescription : cas ou il y a une convention initiale qui donne lieu pour son exécution à des actes réitérés. Exemple d’une convention de travail en vertu duquel des tiers vont être rémunérés en tant que salariés mais sans contrepartie car c’est un travail fictif. Il y a donc la convention initiale, le contrat de travail et en outre vont se succéder divers actes d’application consistant en des versements de salaires. Ici, la Cour de Cassation sans passer par la notion de dissimulation va jouer sur la notion d’usage abusif pour considérer que l’infraction est réitérée à chaque versement indu de salaire de sorte que ça permet d’étirer dans le temps la matérialité de l’usage abusif et la Cour de Cassation considère alors qu’il faut fixer le point de départ de la prescription au jour du dernier versement (Crim, 28 mai 2003)

 

 

 

  • 2 L’action civile

 

 

 (Qu’en est-il de la réparation du préjudice ?)

 

Il faut distinguer selon que l’on envisage l’action civile exercée en réparation du dommage causé à la société et alors on parle d’action sociale et il faut voir l’action civile exercée à titre individuel par un actionnaire.

 

La jurisprudence est ici réticente à l’égard de l’exercice de l’action civile. Elle considère que l’action de la société est recevable et on verra que tel n’est pas le cas de l’action exercée à titre individuel par un associé.

 

Action sociale : action par laquelle la société demande réparation de la commission des abus de gestion. Cette action vise à protéger les intérêts de la société. La société va se prévaloir d’un préjudice matériel (dissipation des fonds de la société) ou encore préjudice moral (atteinte à son crédit).

 

On parle d’une part de l’action sociale ut universi : la société se constitue partie civile par l’intermédiaire de son représentant social légal (gérant, PDG).

 

Il se peut aussi que l’action sociale soit exercée par un actionnaire et il s’agit alors d’une action sociale ut singuli (Prévue à l’article L225-252 du code de commerce). L’actionnaire ici se dévoue car il exerce l’action sociale non pas en son propre nom, mais au nom de la société. Si le juge accorde des dommages-intérêts en réparation du préjudice ce sera le préjudice de la société et donc les dommages-intérêts ne sont pas attribués à cet actionnaire mais le sont à la société.

 

Donc l’action de la société est recevable.

 

 

 

Mais on pourrait envisager l’action de l’actionnaire qui agit en réparation de son propre préjudice personnel. Sur ce point, la jurisprudence a été évolutive. Elle a admis à une époque cette action civile en réparation du préjudice causé à l’associé puis elle a fini par la considérer irrecevable dans deux arrêts importants : Crim, 13 décembre 2000, Crim, 12 septembre 2001 : « les associés d’une société victime d’abus de biens sociaux, exerçant non l’action sociale mais agissant à titre personnel sont irrecevable à se constituer partie civile sauf à démontrer l’existence d’un préjudice propre distinct du préjudice social découlant directement de l’infraction »

 

Puis la Cour de Cassation rappelle les conditions d’exercice de l’action civile en référence à l’article 2 du code de procédure pénale : condition que le dommage doit remplir. Cet arrêt écarte l’action civile personnelle des associés sauf à démontrer que cet associé remplit les conditions de l’article 2 du CPC. Puis la Cour de Cassation a précisé dès 2001 que les associés ne subissent jamais un tel dommage : Crim, 3 décembre 2003 « le délit d’abus de biens sociaux n’occasionne un dommage personnel et direct qu’à la société elle-même et non à chaque associé ». C’est une solution très sévère pour les associés et juridiquement, la solution est contestable.

 

Cette jurisprudence est sévère.

 

Sur le plan procédural, la Cour de Cassation a précisé dans la lignée de cette jurisprudence : « même lorsque l’action publique a été engagée, l’actionnaire reste devant une juridiction de jugement irrecevable à demander réparation du chef d’un abus de biens sociaux » (Crim, 20 février 2008)

 

 

Titre III : Le droit pénal boursier et bancaire

 

Il y a en matière boursière deux sources normatives qui vont donner lieu à deux sortes de sanctions : pénales et administratives.

Le législateur a ici à cœur de garantir la transparence du marché qui va de pair avec une certaine égalité dans l’information dont peuvent disposer les intervenants sur un marché. S’il est porté atteinte à ces valeurs de transparence et d’égalité entre les intervenants, c’est la confiance des investisseurs qui va s’effriter et notamment la confiance des petits porteurs.

 

Le droit pénal boursier a pour but de punir des comportements qui entrainent une déloyauté et une triche dans le marché. Il ya dissymétrie dans l’information qui est source d’inégalité sur le marché. Cette dissymétrie n’est pas compatible avec la logique du marché qui suppose une part d’aléa qui est atténue.

Mais ici ce n’est pas une morale désintéressée c’est bien pour répondre à une efficacité du marché.

La répression est faite pour des considérations économiques : efficacité de la vie des affaires. Le droit pénal n’est pas ici la seule source de sanctions possibles. En effet, dans le souci de favoriser la bonne spéculation (qui suppose la prise de risques), le législateur a voulu au-delà du cadre purement pénal assurer la matière boursière de règles de jeu qui feront l’objet de la surveillance d’une autorité. Autorité dédiée, consacrée au respect de ces règles qui président au jeu du marché.

 

On abouti ainsi à un cumul répressif : car la répression en matière boursière pourra venir du droit pénal et d’une répression para pénale. Donc les deux sources en ce domaine c’est le droit pénal et le droit administratif.

 

L’existence d’une autorité administrative

 

Ordonnance du 28 septembre 67 a crée une autorité en matière de bourse sur l’exemple des USA : la COB : commission des opérations de bourse. L’accord n’existe plus et lui a été substitué l’AMF. L’AMF est issue d’une fusion entre la COB, le conseil des marchés financiers et le conseil de discipline de la gestion financière par la loi 2003-706 du 1er aout 2003.

 

Initialement la COM a le pouvoir de proposer des modifications de lois en matière boursière. Puis dans les années 80 lui sont reconnues deux nouveaux pouvoirs :

  • Un pouvoir réglementaire lui est reconnu par une loi du 14 décembre 85

 

  • Un pouvoir de sanction des manquements boursiers aux règlements qu’elle édicte reconnue par une loi du 2 aout 89

 

La COB a déterminé les comportements qu’elle pouvait poursuivre.

 

Donc s’est instaurée une double répression avec les délits pénaux et les manquements boursiers d’autre part.

 

Pour sa part, l’AMF a aussi plusieurs casquettes comme l’avait la COB.

 

L’AMF a son propre règlement général, elle a des pouvoirs d’enquêteurs et elle sanctionne les manquements boursiers dans les termes de sanctions administratives.

L’article 6 de la convention EDH relative au procès équitable est applicable à la procédure de sanction devant l’AMF.

 

Source de deux pouvoirs normatifs dans ce domaine :

 

  • Pouvoir d’incrimination du législateur : nombreux comportements en matière boursière ont été érigés en infraction il s’agit des délits boursiers. Ils sont au nombre de trois, tryptique des délits boursiers : délit de diffusion d’information fausse ou trompeuse, le délit de manipulation des cours et le délit d’initié. Ces infractions sont prévues et réprimé es dans le CMF aux articles L 465-1 à L465-3

 

  • Puis, il faut se référer au règlement général de l’AMF publié le 24 novembre 2004.Les manquements boursiers y sont définis et constituent eux aussi aux trois catégories et présentent des points communs très forts avec les infractions pénales : le manquement d’initié, le manquement à la bonne information du public et le manquement au bon établissement des comptes.

 

Donc pour des mêmes faits, une personne pourra être sanctionnée pénalement et administrativement. Si une personne par exemple fait a connaissance d’une information privilégiée elle commet un délit d’initié (L465-1 du CMF) et ses agissements se recoupent aussi avec le manquement d’initié.

 

 

Le délit d’initié c’est l’infraction la plus importante et le plus sévèrement sanctionnée et c’est l’infraction la plus commise et qui a donné lieu à de nombreux débats doctrinaux.

 

 

 

Voyons les grands traits de cette infraction :

 

L465-1 du CMF prévoit et réprime le délit d’initié : il s’agit de préserver l’égalité sur le marché et il s’agit plus précisé ment comme l’indique le titre de la section « d’une atteinte à la transparence du marché » que l’on veut éviter.

L’article L 465-1 du CMF prévoit trois catégories d’initiés :

 

  • Alinéa 1 : les initiés primaires ou initiés par nature car compte tenu de leur fonction, ils sont naturellement amenés à détenir des informations ce sont les dirigeants prévus par l’article L225-109 du code de commerce : président, directeurs généraux, membres du directoire…
  • Alinéa 2 : Les initiés secondaires : il s’agit « de toute personne qui va disposer dans l’exercice de sa profession ou de ses fonctions d’une information privilégiée. Cela élargit le cercle des initiés.
  • Alinéa 3 prévu par la loi du 15 novembre 2001 : il s’agit de toute personne autre que celle visée aux deux alinéas précédents possédant en connaissance de cause des informations privilégié es.

 

L’information privilégiée qui est au cœur de ce texte est confidentielle et doit porter sur les perspectives ou la situation d’un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou bien l’information qui porte sur les perspectives d’évolution d’un instrument financier admis sur un marché réglementé.

 

 

L’article L 465-1 permet de réprimer l’exploitation d’une information privilégiée, la communication de l’information privilégiée (délit de diner en ville !)

Cette information est intentionnelle et les peines varient selon les personnes et le comportement et on peut ici noter que ces peines peuvent aller jusqu’à :

  • Pour l’exploitation d’une information privilégiée par les initiés primaires et secondaires : 2 ans d’emprisonnement et amende d’1 500 000 euros.

 

 

Dirigeants de fait dans les sociétés par actions : L 246-2 du code de commerce (pour hier) ET.

 

 

Infraction d’abus de biens sociaux : connaitre l’évolution de la jurisprudence mais quand on a que des références jurisprudentielles il ne faut pas retenir les dates. Hiérarchiser les informations.