L’établissement et la révision de la constitution

L’ÉTABLISSEMENTET LARÉVISIONDE LA CONSTITUTION

L’établissement de la constitution appartient au pouvoir constituant originaire. La révision de la constitution, quant à elle, appartient au pouvoir constituant institué ou dérivé.

I ) L’établissement de la constitution : le pouvoir constituant originaire

— c’est le pouvoir à l’origine d’une nouvelle constitution qui apparaît généralement lors d’un vide juridique.

— A la création d’un nouvel Etat (réunion d’une confédération d’Etat en un Etat fédéral ou indépendance) il faut le doter d’une Constitution, elle fait donc suite à un changement de régime politique.

— Le pouvoir est originaire, inconditionné et souverain c’est à dire qu’aucun principe, qu’aucune règle supérieure ne s’impose à lui, il peut fixer librement les règles du nouvel Etat.

— Dans chaque Etat, il existe un patrimoine, une tradition politique qui s’impose de facto aux auteurs de la Constitution et le pouvoir constituant irait au devant de gdes difficultés s’il venait modifier ces règles.

=> La plupart des constit. s’inscrivent pr répudier le passé en prenant le contre-pied de la précédente.

— Il existe cependant des dérogations à la souveraineté c’est à dire que dans certains Etats la souveraineté a été contestée et donc leur constitution a été élaborée sous le contrôle d’un pays étranger mais cela reste exceptionnel (En Allemagne, sous le contrôle des Alliés, vainqueurs de la guerre 14-18).

— c’est le gouvernement placé à la tête du nouvel Etat, parce qu’il détient le pouvoir politique, qui va déterminer quel organe est compétent pour établir la nouvelle Constitution.

Il y a 2 modes d’élaboration selon que le peuple soit associé ou non à l’opération constituante:

– Un mode démocratique où le pouvoir constituant appartient au peuple souverain et celui-ci l’exerce, soit par l’intermédiaire de ses représentants, soit par référendum.

— Une assemblée est élue avec pr tâche d’élaborer une Constitution. Le peuple est dc associé à l’œuvre constit. par le choix des représentants. Cette formule de recours à une convention a été utilisée en France en 1791 où la Constitution fut élaborée par la Constituante issue des Etats généraux en 1848 et 1875.

— Un pas supplémentaire consiste à soumettre le texte élaboré par la convention à l’approbation des électeurs par la voie du référendum constituant. Le peuple exerce alors lui-même le pouvoir constituant.

— Les Constitutions de 1793 et de l’an III ont été approuvées par le procédé du mode démocratique ainsi que la Constitution de 1946. Dans ce dernier cas, le peuple ayant d’abord refusé, le 5 mai 1946, d’approuver le projet que lui soumettait l’Assemblée, il a fallu élire une nouvelle assemblée chargée d’élaborer un nouveau projet qui lui fut approuvé par le peuple le 13 octobre 1946.

— Un mode autoritaire qui procède soit par la charte octroyée soit par plébiscite constituant

La Charte octroyée: C’est le procédé employé en France lors de la Restauration monarchique en 1814.

Le souverain accepte de limiter ses pouvoirs au profit des institutions qu’il accepte d’instituer.

Cette limitation procède de sa seule volonté qui en définit la portée et octroie une Constitution à ses sujets.

Si l’on admet que l’UE dispose dès à présent d’une Constitution, il s’agirait d’une charte octroyée par les Etats membres qui limitent leur pouvoir au profit de l’Union. La Cour de justice des Communauté européennes a d’ailleurs qualifié les traités communautaires de «charte constitutionnelle»

Le Plébiscite constituant: L’élaboration de la Constitution de 1958 a été pour l’essentiel l’œuvre de l’exécutif soumise à ratification populaire mais cette procédure avait été acceptée par le Parlement qui avait fixé, dans la loi du 3 juin 1958, les principes sur lesquels devait reposer la future constitution.

=> Le mode démocratique multiplie les appels au peuple et lasse, ce qui entraîne la hausse de l’abstention

=> Le mode d’élaboration de la constitution est toujours démocratique quand l’Assemblée est souveraine car c’est le peuple qui a élu la composition de celle-ci.

— Le projet de constitution est élaboré plus exceptionnellement par le pouvoir exécutif.

L’Assemblée constituante peut être soit ad hoc, soit ordinaire:

  • Ad hoc c’est à dire une assemblée convoquée spécialement dans le but d’établir une constitution et qui n’a pas d’autre mission, elle cesse donc d’exister lorsque la constitution est élaborée

Exemple: La Convention de Philadelphie convoquée en 1787 pour établir la constitution fédérale des EU.

  • Ordinaire c’est à dire une assemblée législative qui en plus va recevoir la fonction de doter l’Etat d’une nouvelle constitution, elle cumule donc un pouvoir législatif et un pouvoir constituant.

— c’est la solution la plus usitée car plus pratique mais il y a risque de concentration des pouvoirs et souvent elle retarde le travail d’écriture de la Constitution car elle va consacrer plus de temps à son pouvoir législatif c’est à dire adopter des lois plutôt que les rédiger.

=> Une assemblée constituante est désignée par le peuple

=> Les constitutions sont conçues par leurs auteurs pour durer mais elles n’échappent malheureusement pas à l’usure du temps, d’où la nécessité de les modifier pour tenir compte des changements qui affectent l’organisation politique et pour qu’elles puissent les accompagner.

— La révision de la constitution, dans les formes, est de la compétence du pouvoir constituant dérivé.

Le Cours complet de droit constitutionnel est divisé en plusieurs fiches :

II) La révision de la constitution : le pouvoir constituant dérivé ou institué

— Prévu et institué par la Constitution elle-même c’est à dire comment elle peut être révisée.

Il y a 2 types de révisions possibles:

  • Les aspects mineurs viennent corriger les imperfections du texte (révisions secondaires)
  • Les aspects principaux introduisent un changement dans l’architecture du texte constitutionnel (révisions principales)

— Le pouvoir constituant dérivé ne peut agir qu’en conformité avec le texte constitutionnel et doit respecter les limites que lui impose la Constitution tant en ce qui concerne la procédure que le contenu de la révision.

— La nature de la Constitution peut être rigide ou souple selon que la procédure prévue pour la révision est difficile ou facile à faire aboutir.

— Une Constitution est considérée comme souple lorsqu’aucune condition spéciale n’est mise à la révision et que cette dernière peut donc être opérée par une loi ordinaire.

— Au contraire, la Constitution sera rigide lorsqu’une procédure particulière, avec des contraintes plus importantes que celles qui sont requises pour l’adoption d’une loi ordinaire, est exigée et cette rigidité est susceptible de degrés en fonction de la difficulté de la procédure de révision.

— Les Constitutions britanniques, nouvelle zélandaise, chinoise et israélienne, ensemble de coutumes et de lois ordinaires, peuvent être considérée comme une Constitution souple.

— Mais, généralement, toutes les autres Constitutions sont rigides car le constituant veut assurer la pérennité de son œuvre et il subordonne la possibilité de révision à des exigences procédurales spécifiques.

— De même, si l’on considère la Constitution comme un pacte fondamental traduisant un large accord entre les citoyens sur la nature et le fonctionnement du régime politique, il est alors nécessaire que soit trouvé un accord d’une qualité identique pour modifier la Constitution.

— La rigidité de la procédure de révision conditionne la suprématie de la Constitution sur la loi ordinaire (coutumes) car s’il est possible de modifier la Constitution d’une loi ordinaire, il devient impossible de contrôler la conformité de la loi à la Constitution puisque les 2 textes se situent au même rang dans l’ordonnancement juridique et le texte postérieur l’emportera donc automatiquement sur le texte antérieur.

=> Les Constitutions coutumières ne sont cependant pas nécessairement souple comme le cas de la Grande-Bretagne.

=> De même les Constitutions écrites ne sont pas toujours rigides comme le cas d’Israël.

— Une Constitution rigide enferme l’exercice du pouvoir constituant dérivé (pouvoir de révision) dans une double série de limites qui touchent à la forme (procédure suivie) et parfois au fond (dispositions de la Constitution pouvant être révisées) ;

=> On parle soit de limites formelles (forme) soit de limites matérielles (contenu)

— Cela s’oppose au contrôle de constitutionnalité c’est à dire les modifications de la Constitution initiale (pouvoir constituant originaire) et prévues par la Constitution elle-même.

— Les limites formelles touchent à la procédure prévue pour réviser la Constitution c’est à dire les conditions de forme auxquelles le pouvoir constituant originaire va soumettre cette révision et qui sont autant de limites qui s’imposent au pouvoir constituant dérivé car soit elles tiennent à la procédure fixée par la révision du texte, soit elles concernent les délais dans lesquels la procédure peut être entamée ou encore les circonstances dans lesquelles les révisions peuvent avoir lieu.

— Plus les limites formelles tenant à la procédure fixée par la révision de la Constitution sont contraignantes et plus la révision est difficile à faire aboutir car elle nécessite la demande auprès d’une assemblée spéciale et les projets de constitution doivent être adoptés à une majorité qualifiée ou relative.

Exemple: L’Assemblée Nationale française est composée par 577 députés dont 500 sont présents à l’Assemblée et si 240 vote pour, 230 contre et 30 s’abstiennent alors on parle de majorité relative.

Si 251 votent pour ou 289 si l’on compte les députés absents de l’Assemblée, on parle de majorité absolue.

— La majorité qualifiée nécessite que 2/3 ou 3/5 des membres de l’Assemblée votent en faveur du texte de révision, soit 60% ou 66%.

— On peut également exiger que la révision de la Constitution soit soumise à un référendum c’est à dire que le peuple vote pour l’approuver ou non.

— L’article 89 de la Constitution française de 1958 fixe les limites de procédure, il s’agit donc d’une Constitution rigide car sa révision est contraignante et car elle suppose que le projet de révision soit adopté par l’Assemblée Nationale et le Sénat (unanimité des 2) ensuite il faut qu’il soit approuvé, pour acquérir sa valeur définitive, soir par la voie d’un référendum, soit par le Congrès du Parlement qui doit l’approuver à la majorité qualifiée de 3/5 (6 parlementaires sur 10 doivent voter oui).

— Les limites formelles peuvent aussi concernées les délais dans lesquels la procédure peut être engagée c’est à dire que la Constitution peut exiger par exemple un délai de 10 ans avant d’autoriser une révision.

— Enfin, ces limites formelles peuvent interdire toute révision dans certaines circonstances (Dans la Constitution de 1958, toute révision est interdite lorsqu’il est porté atteinte au territoire) comme lorsque par exemple le gouvernement est en période d’intérim et que c’est le président du Sénat qui exerce les fonctions présidentielles en attendant l’arrivé du nouveau président.

— Les limites matérielles touchent quant à elles au contenu de la Constitution c’est à dire que le pouvoir constituant originaire interdit au pouvoir de révision certaines dispositions de la Constitution car il les juge fondamentales et essentielles.

Exemple: l’article 89 dernier alinéa de la Constitution de 1958 dans lequel il est énonce que la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l’objet d’une révision c’est à dire qu’on ne peut donc pas supprimer la République et rétablir la monarchie (La constitution du Maroc interdit l’inverse).

— Finalement, le pouvoir de révision est illimité autrement dit souverain, il est de la même nature que le pouvoir constituant originaire ; les limites formelles et matérielles ne sont que des barrières de papier dont il peut s’affranchir quand il le souhaite.

=> Cela est conforme au principe démocratique car rien ne peut fléchir la volonté du peuple et surtout cela permet aux générations suivantes de défaire quand elles veulent les principes déclarés intangibles par les générations précédentes («La nation a le droit imprescriptible de changer sa Constitution»).

— Cette souveraineté en France a été reconnu par le Conseil constitutionnel (qui ne rend ni jugement, ni arrêt, ni sentence) dans une décision du 2 septembre 1992 où il a jugé, dans son considérant de principe, que «le pouvoir constituant est souverain et il lui est loisible de modifier, d’abroger ou de compléter les dispositions de valeur constitutionnelle dans la forme qu’il estime appropriée».

=> Cela parle des 2 pouvoirs constituants car ils sont de même nature

— Cependant, il ne faut pas confondre nature et valeur car en effet la nature c’est quand on dit de la Constitution qu’elle est soit rigide soit souple c’est à dire la façon dont elle est révisée alors que la valeur c’est savoir quelle est la force juridique de la Constitution.

=> La nature a tout de même une implication directe sur la valeur juridique car dans le cas d’une Constitution souple elle a la même valeur qu’une loi ordinaire (= lois constitutionnelles).

— Elle est donc législative c’est à dire que le pouvoir constituant et le pouvoir législatif constitué sont confondus dans un seul et même organe qu’est le Parlement.

— Dans le cas d’une Constitution rigide sa valeur est alors supra législative c’est à dire qu’elle a une valeur supérieure à celle de la loi ordinaire car le projet de révision est adopté par une procédure juridique supérieure à la procédure utilisée pour une simple loi, donc il n’y a plus confusion entre le pouvoir constituant et le pouvoir législatif mais une différenciation.