Le régime de la propriété publique

LE RÉGIME DE LA PROPRIÉTÉ PUBLIQUE

On a soutenu que la propriété publique était de même nature que la propriété privée. Pour certains auteurs, l’affectation elle même serait un régime de propriété. Elle correspondrait à une servitude, grevant dans l’intérêt général, la propriété des dépendances domaniales.

Mais quid de la servitude du droit privé : Servitude d’un fond sur un autre, rapport réel entre deux immeubles, deux terrains et indépendamment des propriétaires successifs, tel terrain va supporter une charge au bénéfice de l’autre : Exemple, servitude de passage.

Mais la servitude domaniale ne fait pas intervenir de rapports de fonds à fonds. C’est la même chose que les servitudes d’urbanisme (exemple, ne pas construire plus haut que telle hauteur), ce sont des servitudes d’Intérêt Général.

La propriété Administrative a des particularités qui viennent du fait que le propriétaire n’est pas le même que les autres.

Mais ceci reste tout de même de l’essence du droit de propriété.

L’incessibilité à vil prix et l’insaisissabilité : Comme l’une comme pour l’autre concernent le domaine public.

I- L’incessibilité à vil prix de la propriété du domaine public

Les personnes publiques ne peuvent pas céder leurs propriétés à vil prix. C’est parce que ces biens qu’elles possèdent ont été acquis par des deniers publics et sont supports de l’intérêt général !

Depuis longtemps, la Jurisprudence a interdit les libéralités de la part des personnes publiques.

Cette interdiction a été obscurcit par une Jurisprudence qui a substitué à cette interdiction claire l’impossibilité pour une personne publique de verser une somme qu’elle ne doit pas (cf. arrêt MERGUI).

Là-dessus le conseil constitutionnel, dans une décision des 25 et 26 Juin 1986, concernant la loi de privatisation des entreprises, a voulu mettre un verrou et a été chercher l’article 17 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1789 qui protège la propriété. Il a dit que cette protection constitutionnelle de la propriété « ne concerne pas seulement la propriété privée des particuliers mais aussi, à un titre égal, la propriété de l’état et des autres personnes publiques ».

Le conseil rajoute que « les entreprises faisant partie du patrimoine public, ou les biens faisant parti de ce patrimoine ne soient privatisées pour des prix inférieurs à leur valeur ».

Il fait monter au niveau constitutionnel le principe de l’incessibilité au vil prix. Cette interdiction de cession de libéralité ne vaut qu’entre une personne publique et une personne privée.

Le juge administratif a rencontré le problème dans une affaire du 3/11/97, COMMUNE DE FOUGEROLLES. Contentieux qui concernait la cession d’un terrain cédé par une commune à une entreprise privée pour 1 franc symbolique. La Commune faisait cela car elle savait que l’entreprise embaucherait des gens.

Opération contestée par le préfet et le Conseil d’Etat est saisi. Ne serait on pas en présence d’une cession à vil prix d’un bien à une personne publique.

Le Conseil d’Etat a considéré que ça passait car la cession est justifiée part des motifs d’Intérêt Général et comprend des contreparties suffisantes, celle de créer 6 emplois sur 3 ans.

Le Conseil d’Etat a vidé de sa substance la position du conseil constitutionnel et a considéré que ces aides, libéralités, subventions, étaient des instruments politiques des personnes publiques et qu’elles étaient autorisées dans un but d’Intérêt Général

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II- L’insaisissabilité du domaine public

Les biens des personnes publiques ne peuvent pas faire l’objet des voies d’exécution du droit privée et ne peuvent pas être saisis.

Caractéristique malheureuse : Ce principe n’est pas constitutionnel. Initialement il se fondait sur des raisonnements de procédure.

Le principe est affirmé comme tel par un arrêt de la Cour de Cassation du 21/12/87. La Cour de Cassation nous dit qu’il y a un Principe Général du Droit suivant lequel les biens des personnes publiques sont insaisissables.

Concernant la SNCF: Elle avait pris l’habitude de ne pas payer ses cotisations URSAF. Elle devient en 82, EPIC. Le blême se pose de savoir si la créance peut être recouvrée en saisissant les biens de la SNCF.

La Cour d’Appel de Paris pose une condition : La saisine est possible sauf si elle méconnaît la continuité du Service Public.

Cette position sera contestée par une note du secrétaire générale du gouvernement, actuel vice président du Conseil d’état.

L’arrêt de 87 casse cette décision de la cour d’appel et pose comme condition l’interdiction totale des saisines.

Apparemment cela est protecteur du Service Public. Mais en fait, la possibilité de saisir, c’est la possibilité d’accorder à des prêteurs des sûretés ! Dès lors que les personnes publiques n’ont plus la possibilité d’engager leur propriété, alors c’est un mauvais service à leur rendre car elles vivent à crédit !

La conséquence de cette Jurisprudence c’est en effet d’interdire sur tous les biens de toutes les personnes publiques, des sûretés qui permettent d’obtenir du crédit.

Ce principe a des conséquences un peu redoutables :

– Protéger la propriété publique alors que nos biens ne sont pas insusceptibles de voies d’exécution. On ne peut pas par contre pour les personnes Publiques

o Donc principe protecteur des personnes publiques qui sont en charges d’administrer un bien au service de l’Intérêt Général.

o En conséquence en permettant des saisies ou voies d’exécution, on risquerait d’affecter le service de l’Intérêt Général.

– Mais cela interdit aussi à ces personnes Publiques d’utiliser leurs biens comme élément de richesse :

o Le fait d’être propriétaire est un instrument qui permet une certaine action économique et notamment d’avoir des financements, des sûretés.

  • On peut donc mettre en gage des terrains ou des propriétés.

o C’est ce comportement économique normal que l’on interdit aux personnes Publiques.

o Mais pour certaines d’entre elles, leurs biens sont des sûretés économiques et il faut leur permettre de l’engager dans un processus qui va leur permettre de vivre de crédit

o Exemple, le financement des EPIC est desservi par la proposition juridique qui consiste à leur dire « vs êtes riches mais vs ne pouvez pas utiliser vos biens ! »

  • Le crédit hypothécaire, reconnaissance d’une garantie aux prêteurs, d’une sûreté réelle, donc droit direct sur une chose, qui n’est jamais l’appropriation de la chose. Donc le créancier hypothécaire n’a pas de droit sur la chose : il a le droit par priorité de saisir le bien pour le vendre, le faire vendre et il sera payé en priorité sur le prix de la chose vendue.
  • Donc par conséquent on ne peut pas prendre de crédit hypothécaire pour certains biens des personnes publiques.
  • Antichrèse : Le débiteur reconnaît au créancier une forme de possession sur la chose. Mais la réalisation du gage est identique. Si le créancier n’est pas payé, il devra saisir la chose et la vendre ce qui sera impossible s’agissant d’une personne publique.

Dès lors qu’on ne peut pas consentir de sûreté réelle dont la réalisation implique la saisie, le principe d’insaisissabilité est un mauvais service rendu aux personnes publiques.

Si on revient à l’arrêt de 87, la Cour d’Appel nous disait « insaisissabilité ok, mais tant que cela ne nuit pas à la continuité du Service Public ».

Donc propriété des personnes publiques sur l’ensemble de leurs biens. Mais avec interdiction des libéralités et le principe d’insaisissabilité.

Le Cours de droit administratif des biens des biens est divisé en plusieurs fiches :