Les juges anglais : rôle, nomination, statut

Les juges en droit anglais : nomination, statut…

Pour comprendre l’importance du juge en droit anglais, il faut savoir que les Anglais ont un droit essentiellement basé sur des jugements antérieurs rendus par les juge, alors qu’en France, nous avons des Codes de lois et règlements faits par le gouvernement ou le Parlement (Code pénal, Code civil, Code de justice administrative…).

En effet, les Anglais sont très attachés aux faits concrets d’une affaire, tandis que les Français préfèrent faire des règles générales et abstraites qu’on pourrait appliquer à n’importe quel fait concret. Dans le système du Common law, les juges décident plus ou moins du droit à appliquer alors que dans le système dit du droit codifié (« Civil Law » en anglais), c’est le gouvernement et le peuple par le biais du Parlement qui décident de la réglementation. Le juge n’a plus qu’à appliquer la loi, en l’interprétant si nécessaire.

Ce Cours complet de droit anglais est divisé en plusieurs chapitres

Dans le système judiciaire d’Angleterre et du pays de Galles, des juges au statut judiciaire différent–, exerçant à temps plein ou à temps partiel,– siègent dans les différentes juridictions :

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1 – Diversité des juges.

Ce résumé est issu du site : https://e-justice.europa.eu/

Juges à temps plein

  • Lord Chief Justice (Lord Président du Banc de la Reine) – Il est devenu le chef de la magistrature de l’Angleterre et du pays de Galles en avril 2006
  • présidents de chambre – quatre juges expérimentés président d’autres formations de jugement: le Maître des Rôles (Master of the Roles) (chambre civile); le président de la Chambre du Banc de la Reine (Queen’s Bench Division); le président de la chambre des affaires familiales (Family Division), et le Chancelier de la Haute Cour (Chancellor of the High Court) (chambre de la Chancellerie).
  • Les Lords Justices of Appeal (juges de la Cour d’Appel) siègent à la Cour d’appel qui connaît d’affaires pénales et civiles.
  • Les High Court judges (juges de la Haute Cour) siègent à la Haute Cour qui juge les affaires civiles les plus complexe et des affaires pénales les plus graves et les plus sensibles portées devant la Crown Court.
  • Les Circuit judges (juges itinérants dans un circuit) statuent normalement sur les affaires de droit pénal et civil ainsi que de droit de la famille.
  • Les District Judges connaissent des affaires de droit civil. Leur travail se déroule pour l’essentiel en chambre du conseil (hors la présence du public). Ils sont également compétents pour juger tout recours formé devant les County Courts (tribunaux de comté) lorsque la sanction est inférieure à un certain montant financier
  • Les District judges des Magistrates’ Courts –, anciennement appelés Stipendiary Magistrates (juges professionnels rétribués). Ils siègent dans les magistrates’ courts et traitent les mêmes types d’affaires que les magistrates
  • Les Masters et Registrars de la Haute Cour statuent sur des questions procédurales et traitent la majorité des affaires civiles portées devant la chambre de la Chancellerie et la chambre du Banc de la Reine de la Haute Cour.

Juges à temps partiel

Les juges à temps partiel sont souvent nommés pour une période d’au moins cinq ans, sous réserve de la limite d’âge supérieure. Parmi les principaux juges à temps partiel figurent:

  • les juges suppléants de la Haute Cour qui siègent au sein d’une ou de plusieurs chambres de cette juridiction.
  • les Recorders qui ont une compétence proche de celle des juges itinérants, bien qu’ils statuent généralement sur les affaires les moins complexes ou les moins graves;
  • les District judges suppléants qui siègent dans les tribunaux de comté et les greffes de district de la Haute Cour. Ils traitent les affaires les moins complexes relevant de la compétence des District judges;
  • les District judges suppléants (Magistrates’ Courts) étaient anciennement appelés acting Stipendiary Magistrates (juges professionnels rétribués en exercice). Leur travail est semblable à celui de leurs homologues exerçant à temps plein.
  • les Masters et Registrars suppléants de la Haute Cour effectuent un travail proche de celui de leurs collègues à temps plein siégeant à la Haute Cour.

Juges des Tribunals

Les Tribunals traitent près de 800 000 affaires par an relatives à des questions très variées, comme les litiges en matière de fiscalité, de pensions de retraite ou d’immigration.

Ils siègent habituellement en comité et se composent d’un président ou d’un juge disposant d’une formation juridique, assisté de membres non-professionnels, experts dans des domaines précis. Il n’y a pas de jury. Un juge de Tribunal n’est pas compétent pour infliger des peines d’emprisonnement à la partie qui succombe. Son rôle consiste principalement à permettre la résolution de conflits et, dans certains cas, à statuer sur le montant de l’indemnité ou de la réparation octroyée à la partie qui a obtenu gain de cause.

Magistrates (juges non-professionnels)

Les magistrates, également dénommés «juges de paix» ou «JP», statuent sur environ 95 % des affaires pénales en Angleterre et au Pays de Galles. On compte plus de 30 000 magistrates au niveau local, qui siègent normalement au moins vingt-six demi-journées par an. Ils n’ont pas nécessairement de formation juridique et sont bénévoles.

  • 2 – Nomination.

Sauf pour la désignation du Lord Chancellor qui, parallèlement à ses fonctions de chef de la magistrature, est également ministre de la justice, membre du Cabinet et président de la Chambre des Lords, aucune considération politique n’intervient dans la nomination des juges. Les juges à plein temps sont recrutés, soit parmi les juges déjà en place, soit parmi les praticiens. Il n’y a pas en Angleterre d’école nationale de la magistrature. Mais, depuis 1979, existe le Bureau d’Etudes Judiciaires, créé à la suite du « Rapport BRIDGE ». Au sein du ministère britannique de la Justice, cet organisme bénéficie d’une large autonomie puisqu’il décide seul des besoins et de la nature de la formation judiciaire mise en place pour les juges. Pour être nommé juge de la Court of Appeal, ou Lord Chief Justice ( Président de la Division du Banc de la Reine ), ou Master of the Rolls ( Président de la Division de la Chancellerie ), ou Président de la Division de la Famille, au sein de la Haute Cour de Justice, il faut:

  • 1°) soit être déjà juge de la Haute Cour;
  • 2°) soit justifier de 15 ans de pratique comme avocat devant la Haute Cour.

Pour être juge de la Haute Cour ou juge itinérant, il faut justifier de 10 ans de pratique comme avocat, ou avoir été juge à temps partiel pendant au moins 5 ans. Enfin pour être juge à temps partiel, il faut avoir exercé en tant qu’avocat, ou en tant que solicitor, pendant 5 ans. Les fonctions de juge de paix rémunéré ( juge professionnel nommé et payé d’une MAGISTRATES’ COURT ) sont ouvertes aux avocats et aux solicitors justifiant d’au moins 7 ans de pratique. Les MAGISTRATES sont nommés par le Ministre de la Justice sur proposition de 95 commissions consultatives. Un MAGISTRATE peut siéger jusqu’à 70 ans. Il reçoit 9 heures de formation théorique et 6 heures de formation pratique. Pendant les premiers mois de sa fonction il siége collégialement. Tous les juges sont nommés par la Reine. Sur proposition du Premier Ministre, la reine nomme le Lord Chancelier, le Lord Chief Justice, le Master of the Rolls, le Président de la Division de la Famille de la Haute Cour, les juges de la Chambre des Lords, les juges de la Court of Appeal. Sur proposition de Lord Chancellor, la reine nomme les juges de la High Court of Justice, les juges itinérants ou juges de tournée, et les juges à temps partiel. Dans la mesure où le pouvoir judiciaire se voit souvent contraint d’arbitrer des différends entre les citoyens et l’Exécutif, en particulier lorsque les administrés introduisent des recours contre les décisions administratives, il est essentiel que le pouvoir judiciaire échappe à l’emprise du Gouvernement. En Angleterre, l’indépendance de la magistrature repose non pas sur des garanties constitutionnelles, mais sur un mélange de règles légales et de règles de common law, de conventions constitutionnelles et de pratique parlementaire, consolidés par la tradition et l’opinion publique.

  • 3 – Statut.

Comme on le sait, le travail des juges consiste à trancher les litiges. A cette fin, leur tâche est souvent de définir les intentions du législateur et d’appliquer la jurisprudence. Théoriquement ils ne peuvent créer le droit. Mais lorsqu’il n’y a pas de règle de droit préexistante pour résoudre une situation donnée, ou lorsque la décision est laissée à la discrétion du juge, ils doivent établir de nouvelles règles qui constitueront des précédents. En ce sens ils créent bien le droit.

Les juges ont le pouvoir de punir toute conduite qui entrave le bon fonctionnement de la justice. Sont considérées comme entraves au bon fonctionnement de la justice toutes sortes d’agissements, soit positifs ( faire quelque chose ), soit négatifs comme refuser d’exécuter des ordonnances de justice. Les sanctions sont des amendes ou des peines de prison. Selon la common law, la bonne foi et l’erreur ne constituaient pas des excuses valables. Cependant l’article 11 de la loi de 1960, sur l’administration de la justice, excuse une personne :

  • 1°) qui a publié des documents qui entravent le bon fonctionnement de la justice, mais qui ignorait et n’avait aucune raison de soupçonner qu’un procès était en cours ou imminent;
  • 2°) qui a diffusé de tels documents de bonne foi.

Avant la loi constitutionnelle de 1701 qui a décidé que les salaires des juges devaient être « fixes et assurés », le roi exerçait un contrôle important sur ses juges par le biais des pressions financières. Les salaires des juges des cours supérieures sont désormais fixés par la loi et prélevés sur le budget de l’Etat.

Les juges des cours supérieures ( High Court, Court of Appeal et Chambre des Lords ) sont inamovibles, sauf faute de conduite grave. Ils peuvent être démis de leurs fonctions sur requête des deux chambres du Parlement. L’article 12 de la loi de 1973 sur l’administration de la justice permet au Lord Chancellor de déclarer vacant le poste d’un juge des cours supérieures qui est atteint d’incapacité permanente et n’est pas en mesure de démissionner. En vertu de la loi de 1971, les juges itinérants et les juges à temps partiel peuvent être démis de leurs fonctions par le Lord Chancellor pour incapacité ou mauvaise conduite. La loi n’accorde aux juges de paix des magistrates’ courts aucune sécurité dans leurs fonctions. Un certain nombre de règles servent à protéger les juges. Ils sont isolés de la politique par le fait qu’ils ne peuvent, ni être députés à la Chambre des Communes, ni faire de propagande en faveur d’un parti politique. L’exécutif doit s’abstenir de tout commentaire sur leurs activités, et la réciproque est vraie. Les juridictions s’abstiennent de tout examen de la régularité des procédures parlementaires. Enfin les juges sont protégés contre toute action en justice pour les discours prononcés ou les actes commis dans l’exercice de leurs fonctions, et alors qu’ils croyaient sincèrement agir dans le cadre de leur juridiction.

  • 3 – Les conseillers juridiques de la Couronne.

L’Attorney Général est le principal conseiller juridique des différents ministères. Il vérifie le texte des projets de loi. Il peut engager des poursuites au civil devant la Haute Cour, pour défendre des droits publics, et peut prêter son nom pour des actions intentées par des particuliers contre des organismes publics. Il peut engager des poursuites pénales, ou peut ordonner un non-lieu et mettre un terme à tout procès. Il est politiquement responsable des agissements du procureur général ( DIRECTOR OF PUBLIC PROSECUTIONS ), et habilité à lui donner des ordres. Le Solicitor Général peut remplacer l’Attorney Général dans certaines de ses fonctions. Le procureur général n’est pas à proprement parler un conseiller juridique de la Couronne. C’est un barrister ou un solicitor nommé par le Ministre de l’Intérieur ( HOME SECRETARY ), mais qui travaille sous les ordres de l’Attorney Général. Il charge des barristers et des solicitors de poursuivre pénalement dans les affaires que lui confient les différents ministères. Il conseille la police, lorsqu’elle le lui demande, sur l’opportunité d’engager des poursuites.

  • 4 – L’indépendance du pouvoir judiciaire.

Le système juridique anglais se caractérise par une totale indépendance du pouvoir judiciaire. En Angleterre, le pouvoir judiciaire est un véritable pouvoir ( à la différence du système romano-germanique), qui est un contrepoids aux pouvoirs législatif et exécutif. Pour garantir cette indépendance, les anglais disent qu’il y a 4 remparts.

1°) L’inamovibilité des juges des juridictions supérieures. C’est le roi qui destitue un juge à la demande des deux chambres du Parlement. Cette procédure ne fut utilisée qu’une fois, en 1830, pour un juge qui avait été reconnu coupable de détournement de fonds.

2°) La loi garante du nombre, du salaire et du prestige des juges. Les promotions des juges ne dépendent pas de créations de postes dues au bon vouloir du gouvernement, et celui-ci ne peut pas nommer des fournées de juges à sa botte. Les juges des cours supérieures prennent leur retraite à 75 ans, 72 ans pour les juges itinérants.

Les juges sont payés sur le CONSOLIDATED FUND, partie du budget qui n’a pas à être discutée mais simplement votée chaque année par le Parlement, et qui est donc renouvelée automatiquement. Les salaires sont réévalués chaque année par le Lord CHANCELLOR. Ce sont des salaires très élevés, plus élevés qu’en France : plus de 80.000 £ par an pour les juges supérieurs. Il faut dire qu’ils sont peu nombreux : l’élitisme et le malthusianisme sévissent dans la haute magistrature anglaise comme dans celle de beaucoup de pays du système romano-germanique.

3°) Les juges : sources du droit. Si le pouvoir judiciaire, pour les anglais, se limite aux seules juridictions supérieures ( SUPREME COURT OF JUDICATURE ), c’est parce que seuls les juges des cours supérieures peuvent énoncer le droit, en ce sens que seules leurs décisions peuvent créer des précédents qui ont force obligatoire. Un débat doctrinal divise les juristes anglais. Pour une grand partie d’entre eux le juge anglais n’a pas le pouvoir d’imposer la règle de droit qu’il estime applicable ; pour d’autres, au contraire, il n’est pas interdit au juge de proposer un moyen de droit qui n’a pas été invoqué, ou d’ordonner la réouverture des débats si un moyen de droit nouveau se présente à lui. Cette proposition doit être reprise par les parties. Il faut toutefois admettre, qu’en droit positif anglais, le juge ne peut pas relever d’office un point de droit contre la volonté des parties au procès.

4°) Les juges ont les moyens de se faire respecter avec la procédure de CONTEMPT OF COURT ( CONTEMPT OF COURT ACT de 1981 ). Le prestige des juges anglais ne tient pas qu’à leur magnifique costume et à leur perruque. Ils peuvent se faire respecter. Le CONTEMPT OF COURT correspond à notre notion d’outrage à magistrat, mais dans un sens beaucoup plus large. Les tribunaux anglais, inférieurs et supérieurs, disposent de pouvoirs péremptoires pour appeler à comparaître, sans délai, celui qui s’est rendu coupable de CONTEMPT OF COURT, et pour le juger sur-le-champ, de manière aussi expéditive que catégorique ex: le fait de refuser de verser, à une victime, l’indemnité qu’a prescrite un tribunal, peut être assimilé à un contempt of court. C’est assez dissuasif, et renforce l’autorité de la chose jugée. Les juges anglais n’utilisent pas cette procédure si c’est leur personne qui est attaquée. La procédure de contempt of court leur sert, non à se défendre eux-mêmes, mais à faire respecter les citations, les ordonnances et les décisions de justice, bref à assurer le bon fonctionnement de la justice. Cette procédure existe aussi aux Etats-Unis et en Inde.

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