Les juridictions administratives

LES JURIDICTIONS DE L’ORDRE ADMINISTRATIF

Les juridictions administratives ont pour fonction d’examiner les affaires qui mettent en cause les collectivités publiques (Etat, communes, départements, régions et établissements publics). Les juridictions de l’ordre administratif sont le tribunal administratif, le Conseil d’Etat et la Cour administrative d’appel.

Les juridictions vont donc examiner les litiges qui consistent à contester une décision ou un acte administratif, par exemple le montant de l’impôt, le refus d’une demande de permis de construire ou la proclamation des résultats d’élections municipales ou cantonales ainsi que pour demander réparation d’un dommage causé par un ouvrage public ou par l’exécution de travaux publics.

-Avant d’envisager les différentes juridictions, disons quelques mots sur les juges qui les composent : Par rapport aux juges de l’ordre judiciaire, on peut noter trois grandes différences :

-L’absence d’unité de corps : il existe un statut différent des juges au sein de chaque catégorie de juridictions. Le statut du juge administratif est différent suivant qu’il exerce ses fonctions au tribunal administratif, à la cour administrative d’appel ou au Conseil d’Etat. Il n’y a pas de formation juridictionnelle comparable à celle dispensée par l’ordre judiciaire. Beaucoup des juges administratifs sont issus de l’Ecole nationale d’administration où ils suivent les mêmes études que les futurs membres de l’administration active.

Le choix de la carrière dépend du rang du classement final à l’E.N.A. Les 3/4 des juges des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel proviennent de l’E.N.A. Certains juges administratifs proviennent d’un recrutement latéral, dit « au tour extérieur », au choix du gouvernement. Le recrutement latéral est largement admis. Ce mode de recrutement contribue à assurer la liaison entre juridiction administrative et administration active. C’est ce qui fait dire que « le juge administratif est l’Administration qui se juge ».

-La moindre dérogation au statut général de la fonction publique. Les juges administratifs sont soumis au statut général des fonctionnaires, même si on leur a reconnu quelque particularisme statutaire pour faciliter l’exercice de leur mission et la tendance actuelle est d’aligner leur statut sur celui des magistrats.

L’inamovibilité n’est pas reconnue aux juges administratifs de manière générale (sauf Cour des comptes). Une conception traditionnelle dénie aux juges administratifs la qualité de magistrat (mais évolution pour les juges des tribunaux et cours administratifs et Cour des comptes). Cependant la carrière et le discipline des juges des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel dépendent de propositions qui sont faites par le Conseil supérieur des Tribunaux administratifs et cours administratives d’appel, organisme indépendant crée en

  1. Mais il n’existe rien de comparable pour les membres du Conseil d’Etat. Aussi, les membres du Conseil d’Etat demeurent théoriquement révocables et leur indépendance n’est garantie que par la seule tradition. Pour éviter les pressions extérieures, la pratique a établi un avancement à l’ancienneté, qui garantie par son automaticité, l’indépendance des juges mais qui ne stimule pas trop les ambitions.

-L’absence de distinction du siège et du parquet. Les commissaires du gouvernement sont membres à part entière des juridictions dans lesquelles ils exercent leur fonction (maîtres des requêtes au Conseil d’Etat, conseillers de tribunal administratif). Contrairement à ce que laisse croire leur appellation, les commissaires du gouvernement ne représentent en aucune manière le gouvernement, qui ne peut leur donner la moindre instruction. Ils sont des membres de la formation de jugement, temporairement chargés de proposer à leurs collègues, en toutes indépendances, la solution juridique que leur paraît appeler le litige soumis à la juridiction, sous forme de présentation de « conclusions ». Seule la Cour des comptes dispose d’un parquet.

-L’ordre dans lequel nous allons étudier les juridictions administratives est inversé par rapport à celui employé pour les juridictions judiciaires. Nous envisagerons les juridictions administratives dans l’ordre de leur création. En effet, jusqu’en 1953, le Conseil d’Etat (I) était la seule juridiction ordinaire du contentieux administratif. Après la création des tribunaux administratifs (II) en 1953 intervint la création des cours administratives d’appel (III).

Le tribunal administratif : Il juge les contestations entre les particuliers et l’Administration, à l’exception de celles qui sont réservées par des textes spéciaux à d’autres juridictions (Conseil d’Etat par exemple). Il examine ainsi les décisions de l’Administration qui porteraient préjudice aux particuliers et les dommages causés par l’activité des services publics.

La cour administrative d’appel : Elle réexamine en appel les dossiers déjà jugés par un tribunal administratif lorsque l’une des parties n’est pas satisfaite de la décision rendue.

Le Conseil d’État examine

– en premier et dernier ressort les demandes d’annulation des décisions les plus importantes des autorités de l’Etat (décrets du Président de la République ou du Premier ministre, certains arrêtés pris par les ministres, etc).

– Il examine comme juge d’appel certains jugements prononcés par les tribunaux administratifs, notamment ceux qui portent sur la contestation d’élections municipales et cantonales.

– il est juge de cassation des décisions rendues par les cours administratives d’appel et par certaines juridictions administratives spécialisées. Dans ce cas, il n’examine que les questions de droit.

  • I – Le Conseil d’Etat

Le Conseil d’Etat est une juridiction unique qui siège à Paris, au Palais Royal. Il est présidé par le Premier ministre, supplée en fait dans cette fonction par le Garde des Sceaux.

-Compétence : Le Conseil d’Etat est à la fois un organe consultatif de l’Administration active et organe juridictionnel. Le Conseil d’Etat est devenu une véritable juridiction souveraine libérée de toute indépendance vis à vis du pouvoir exécutif (une loi du 24 mai 1872 décide que le Conseil d’Etat doit statuer en véritable juge indépendant).

-Formation : En raison de la double nature du Conseil d’Etat, il existe deux types de formation

-Les formations administratives qui émettent des avis à l’intention du gouvernement. Il y a 4 sections spécialisées (intérieur, finances, travaux publics, social) consultées par le gouvernement pour la préparation des textes et décisions. Il existe aussi une section du rapport et des études, chargée de rédiger un rapport annuel adressé au Président de la République et qui préconise des réformes législatives, administratives ou réglementaires.

-Les formations contentieuses qui émanent d’une section unique : la section du contentieux. Elle possède un président, 3 présidents adjoints et un certain nombre de conseillers d’Etat, des maîtres des requêtes et d’auditeurs. La section du contentieux est divisée en 10 sous-sections spécialisées.

-Attributions contentieuses :

En tant que juridiction, selon la nature du contentieux, le Conseil d’Etat statue soit en premier et dernier ressort (juge du fond), soit en appel (comme juge d’appel), soit en cassation (comme juge de cassation).

  • II – Les tribunaux administratifs

-Origine : Les tribunaux administratifs doivent leur nom à la réforme opérée par le décret du 30 septembre 1953 qui a supprimé les conseils de préfecture, crée par Bonaparte sous l’an VIII. Ils sont depuis 1953, la juridiction administrative de droit commun pour désencombrer le Conseil d’Etat.

-Organisation territoriale : Il existe 35 tribunaux administratifs, dont 27 en métropole. Ils siègent au chef-lieu d’un département et le ressort comprend 1 à 5 départements.

-Formation : Le tribunal peut statuer à juge unique ou en formation collégiale plus ou moins étendue.

-Compétence : Le tribunal administratif est juge de droit commun pour connaître au premier degré de tous les litiges qui n’ont pas été expressément attribués à une autre juridiction. Son rôle est spécialement important en matière fiscale, électorale et de travaux publics.

III. – Les cours administratives d’appel

-Origine : Les cours administratives d’appel ont été crée par la loi du 31 décembre 1987 pour désencombrer le Conseil d’Etat.

-Compétence : Elles deviennent le juge d’appel ordinaire des décisions des tribunaux administratifs dans certaines matières seulement, le Conseil d’Etat demeure juge d’appel dans les autres. En fait, la cour administrative est le juge d’appel des affaires de pleine juridiction (par opposition au recours pour excès de pouvoir, appréciation d’un acte : ex. responsabilité de l’autorité publique, litige à propos d’un contrat passé avec l’Administration).

-Organisation territoriale : Il existe actuellement 7 cours (Bordeaux, Nancy, Nantes, Lyon, Paris, Marseille

Douai) qui ont un ressort très étendu.

Le Cours complet d’Introduction au droit est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, biens, acteurs de la vie juridique, sources du droit, preuves, responsabilité…)