Qualité et intérêt à agir du requérant en contentieux administratif

La recevabilité du recours : Conditions tenant à la personne du requérant

Les conditions de recevabilité du recours en contentieux administratif sont examinées par le juge avant l’analyse du fond du recours. Ces conditions portent sur quatre points : la nature de l’acte attaqué, les délais, l’absence de recours parallèle et la capacité et l’intérêt à agir du requérant (objet de la présente étude).

Le requérant doit disposer de la capacité pour agir et avoir un intérêt à agir.

– Concernant la capacité : Le requérant doit remplir les conditions du droit commun pour ester en justice fixées.

– Concernant l’intérêt à agir, l’objectif de cette condition est d’éviter une contestation systématique de l’action administrative, et un encombrement des tribunaux alors même que l’on pourrait estimer que tout administré devrait être considéré comme ayant intérêt au respect de la légalité par l’administration.

Résultat de recherche d'images pour

A) La capacité

Le recours contentieux devant le juge administratif ne peut être introduit que par une personne ayant une capacité d’ester en justice ce qui exclu donc les mineurs et les incapables majeurs qui doivent se faire représenter

B) L’intérêt à agir

Un intérêt direct : c’est-à-dire que le lien entre la personne et le litige doit être suffisamment direct. Cet intérêt direct est facile à vérifier dans le contentieux du droit subjectif. Ce lien direct s’établit car c’est un droit subjectif qui est affecté. En revanche, en matière d’excès de pouvoir l’acte n’affecte pas directement les droits subjectifs. L’intérêt direct sera analysé de manière plus souple : le juge met en place une stratégie jurisprudentielle en admettant de manière plus ou moins direct l’intérêt à agir.

L’intérêt doit être lésé de manière plus ou moins certaine. Ainsi, une personne qui a 40 ans d’âge et 15 ans d’ancienneté dans la fonction publique, ne sera pas recevable simplement parce qu’elle remplit les conditions de contester la nomination d’autres personnes à la cour des comptes. (16 janvier 1944). En revanche, la jurisprudence admet que les agents appartenant à un corps de la fonction publique soit recevables à attaquer des nominations, même à des postes dont ils ne peuvent prétendre à l’accès. Le seul fait de l’appartenance au même corps suffit.

— Il y a tout un arsenal autour de la notion d’intérêt à agir qui met en évidence un certain arbitraire du juge. Cet arbitraire est corrigé par ce qu’on appelle les « blocs d’intérêt à agir ».

— Les blocs d’intérêt à agir

Il existe une jurisprudence de principe qui tire du rapport entre la situation du requérant et l’acte attaqué la conséquence objective de l’intérêt à agir. La jurisprudence a donc multipliée ces blocs (éléments de sécurité juridique).

Exemples :

— 1/ lorsqu’on demande à l’administration de prendre un acte, ou d’abroger un acte… Plus simplement, lorsqu’on demande une autorisation administrative, la qualité de demandeur à l’administration donne automatiquement qualité pour contester le refus. Le demandeur n’a rien d’autre à établir que cette qualité de demandeur (Conseil d’Etat, 27 juin 1986, association SOS Défense).

— 2/ Les contribuables. On a admis l’action du contribuable communal : celui là est recevable de plein droit à contester toutes les mesures financières émanant de la commune. La qualité de contribuable communal donne bloc d’intérêt à agir. La solution fut étendue au contribuable départemental (27 janvier 1911, arrêt Richmond). Un peu plus tard, la solution est étendue au contribuable coloniale (24 juin 1932), elle a été étendue plus largement.

— 3/ Les groupements ou usagers du service public : ils ont qualité pour contester n’importe quelle mesure d’organisation du service public. (Arrêt du 21 décembre 1906 : l’usager d’un service public de transport a automatiquement un intérêt à contester les mesures d’organisation et de fonctionnement du service).

— 4/ Les électeurs : tout électeur, qu’il ait voté ou non, peut contester les opérations électorales dans sa circonscription. Solution qui a été retenue d’abord par la jurisprudence, reprise ensuite par le droit écrit qui figure de façon explicite dans le code électoral.

C) La représentation du requérant

— 1/ Le ministère d’avocat : le recours n’est recevable que formé par le ministère d’avocat. L’avocat n’a pas à justifier d’un mandat spécifique (car il est titulaire d’un mandat spécial, de par la loi). Cette disposition, vieux principe du droit français, a été critiquée devant la CEDH. On y a vu une entrave au droit au recours. La cour a répondu avec sagesse en décidant que « le droit de se défendre soit même n’existe qu’en matière pénale ».

Application du principe en matière administrative ?

— Devant le Conseil d’Etat : mise en place d’un ordre particulier d’avocats : les avocats au conseil, corps ancien (son origine remonte à St. Louis). Il a le monopole de la juridiction devant les cours suprême du pays. Ce corps est organisé différemment que devant les avocats à la cour. L’ordre est unique, et il est constitué par des personnalités titulaires de leur charge. Ils ont donc un statut d’officier ministériel. Le nombre des charges est de 60. Ce nombre fut fixé sous la restauration. Toutefois, ces avocats n’ont pas le monopole devant la CEDH. Ces avocats au conseil peuvent représenter les parties devant les juridictions ordinaires, en vertu de leur mandat légal.

— Devant les juridictions ordinaires : les avocats bénéficient du mandat légal.

Ce principe bénéficie de nombreux recours :

— Le REP. Le législateur, en 1964, dispense les requérants du ministère d’avocat. L’idée est donc bien une action disponible, ouverte… Une action de contrôle de la légalité, mais non onéreuse du fait de l’absence du ministère d’avocat.

— Les recours fait au nom de l’Etat. L’Etat peut être requérant. Il n’a pas besoin du ministère d’avocat.

— La dispense du ministère d’avocat est ensuite étendue pour toute une série de cas devant le TA.

— La dispense du ministère d’avocat, devant les cours d’appel, ne concerne que le contentieux fiscal, électoral, des pensions et des aides sociales.

— Devant le Conseil d’Etat, les dérogations ne concernent plus que le contentieux des pensions, des élections, le contentieux de certains domaines tout à fait particulier, mais pour l’essentiel, en dehors de la matière de l’excès de pouvoir, le monopole des avocats au conseil s’exerce.

En dehors de ces hypothèses, le requérant peut choisir de se faire représenter par un mandataire.

— 2/ La représentation par un mandataire

— Devant les tribunaux administratifs et Cour Administrative d’Appel. Mandat ad litem. Ne peut être confié qu’à un avocat ou à un avoué. En matière fiscale, ou électoral, il peut être donné à une autre personne.

— Devant le Conseil d’Etat : le principe est celui du libre choix. Les parties ont toujours qualité (sauf lorsque la représentation par un avocat au conseil est obligatoire). C’est-à-dire que les parties sont libres de désigner qui elles veulent.

— 3/ La représentation des personnes morales

Personnes privées. La représentation est assurée conformément aux dispositions légales ou statutaires qui régissent ces personnes morales de droit privé. La loi donne à l’exécutif de cette personne de droit privé qualité pour agir en justice sur la base d’une autorisation (d’une habilitation) de l’organe délibérant. Le juge administratif vérifiera que ces dispositions ont bien été respectées.

Théorie du mandat apparent. Idée selon laquelle on prend acte de la situation du requérant dans l’organigramme de la personne morale qui agit. Cette construction est admise pour la représentation des personnes privée, dans le contentieux judiciaire.

Personnes publiques : c’est l’administration (elle n’est faite que de personnes morales).

o Collectivité locales et établissements public. Ici, l’autorité exécutive représente la personne morale, en demande ou en défense, sur la base d’une autorisation/délibération de l’organisme collégial. On admet cependant que dans le cas d’urgence, l’autorité exécutive puisse agir sans cette délibération. Dans l’application de ces règles, le juge fait preuve d’un relatif libéralisme. Il a admis que le maire ne requiert pas une autorisation spécifique lorsqu’il présente une demande reconventionnelle (en défense).

o L’Etat. Les choses sont un peu plus compliquées. Il est en principe représenté par les ministres. C’est le ministre intéressé qui a qualité pour représenter l’Etat. La solution vaut pour toutes les tribunaux administratifs. Cependant, les ministres disposent d’une large délégation de signature (pas de pouvoir). Cette délégation intervient au cas par cas. La représentation du CSA est assurée par le prédisent du CSA, alors qu’il n’y a pas de personnalité juridique distincte de l’Etat. Et puis, on a déconcentré toute une partie de la représentation de l’Etat entre les mains du préfet. Ceci vaut pour tous les litiges concernant la police des étrangers. Il en est de même pour tous les litiges liés à l’action des services déconcentrés de l’Etat dans le département. La représentation de l’Etat est confiée à un service qui s’appelait « l’agent judiciaire du trésor ». Cet agent judiciaire, service du ministère des finances, aujourd’hui fondu dans sa direction juridique, a le monopole de la représentation de l’Etat devant les juridictions judiciaire.

L’exercice de l’action du contribuable communal. Article L2132-5 du code communal. Il s’agit du droit pour le contribuable communal d’exercer, notamment devant les juridictions administratives les actions qu’il croit devoir être exercé par la commune et que la commune néglige ou refuse d’exercer. C’est donc une action supplétive qui intervient en cas de carence de la commune, mais c’est une action de la commune : c’est la commune qui va plaider. C’est donc le mandataire qui supporte le cout de l’exercice du mandat et ceci signifie qu’il supportera les frais de la procédure (et éventuellement une peine d’amende si elle est imposée par le juge). Deux conditions :

o Une condition de fond : carence de la commune. Cela peut être du fait que le maire n’a pas eu l’autorisation d’agir, que le maire néglige de le faire en dépit d’une condamnation, ou bien qu’elle refuse explicitement d’agir, soit en demande soit en défense.

o Condition de forme : il faut une autorisation de plaider. Elle sera donnée par le tribunal administratif. Elle sera donnée sur la base d’un mémoire développé et qui débouchera sur une autorisation ou un refus d’autorisation. Ces autorisations n’ont pas de caractère juridictionnel. Le contribuable peut former un pourvoi de la décision. Mais ce n’est pas un recours juridictionnel (car les décisions d’autorisation ne sont pas des décisions de justice). Au sein du Conseil d’Etat, l’instruction du recours contre le refus d’autorisation n’est pas menée par la section du contentieux mais par une section administrative. La décision du Conseil d’Etat prend la forme d’un décret. Ce décret, est lui-même susceptible d’un REP. Cette solution permet donc au contribuable communal de s’emparer de l’intérêt communal.

— Pendant longtemps, la formule fut très peut utilisée. Elle fut ensuite utilisée pour la première fois afin de faire apparaître les défauts et la mauvaise gestion de l’équipe en place. Cette procédure fut utilisée à des fins électorales. (Cf. : arrêt du 29 juillet 1994, arrêt GHIS).

— 4/ L’aide juridictionnelle

L’aide juridictionnelle conduit à certains aménagements dans la représentation des parties. Les justiciables peuvent demander le bénéfice de cette aide, lorsque les ressources sont inférieures à certains plafonds (l’aide n’est généralement accordée qu’à des personnes physiques). Une loi de 1991 souleva, sous l’intitulé d’aide juridique, deux éléments :

— L’aide à l’accès au droit

— L’aide juridictionnelle proprement dite.

L’aide juridictionnelle est accordée sous conditions de ressources. Ces plafonds sont réévalués régulièrement

— 800 € / mois pour une aide complète

— 1 200 € / mois pour une aide partielle

Les personnes physiques peuvent bénéficier de l’aide juridictionnelle, sans condition de nationalité, mais à condition qu’ils résident habituellement en France. Les associations et les personnes morales ne peuvent obtenir le bénéfice de l’aide juridictionnelle qu’exceptionnellement et encore, si elles sont des personnes morales à but non lucratif. Cela veut dire qu’elles n’ont pas de droit à l’aide juridictionnelle (on retrouve ici un arrêt SOS Défense du 24 novembre 1982).

Les demandes se font auprès de bureaux rattachés au TGI. Il y a des sections administratives qui traitent les demandes devant les juridictions administratives. Il existe un bureau auprès du Conseil d’Etat pour l’aide pour les conflits devant le Conseil d’Etat.

La demande d’aide juridictionnelle est interruptive du délai du recours contentieux.

Voici la liste des liens relatifs au contentieux administratif