Quelle différence entre magistrat du siège et du parquet ?

LES MAGISTRATS DU SIÈGE ET DU PARQUET

Avant d’examiner les différentes juridictions, quelques mots sur ceux qui les composent, les magistrats : on distingue deux grandes catégories de juges professionnels (il en existe aussi des non professionnels, les Prud’hommes) : ce sont les magistrats dits « du siège » (c’est à dire les juges, qui restent assis) et les magistrats dits « du parquet » ou du « ministère public » (c’est à dire les procureurs et leurs substituts, qui en audience se mettent debout pour parler).

La magistrature est, depuis la monarchie, divisée en deux branches distinctes. Le terme « magistrat » désigne à la fois les juges du siège et les membres du parquet représentant le ministère public. Les magistrats du siège et du parquet ne forment qu’un seul corps et sont recrutés et formés de la même manière mais ils ne sont pas soumis aux mêmes obligations et ne bénéficient pas des mêmes droits.

MAGISTRAT DU PARQUET et MAGISTRAT DU SIEGE

Les magistrats du siège (magistrature assise) ont pour fonction de juger ou d’instruire les procès. Il est indispensable que les magistrats du siège, qui composent les cours et les tribunaux, remplissent leurs fonctions en toute indépendance, et ne soient l’objet d’aucune pression. C’est la raison pour laquelle ce ne sont pas des fonctionnaires hiérarchisés, dépendants du Gouvernement. L’essentiel des droits qui leur sont reconnus visent à garantir leur indépendance, notamment en soustrayant l’organisation de leur carrière aux aléas politiques et aux pressions de toute sorte, et en la confiant à un organe indépendant, le Conseil national de la magistrature (mais indépendance suspectée car membre nommés en partie par le Président de la République).

Cette formation est aussi compétente depuis une reforme opérée en 1993, à l’égard des magistrats du parquet.

Elle fait des propositions pour les nominations des magistrats du siège mais ne donne que des avis pour les nominations des magistrats du parquet. Le gouvernement ne peut pas donner des ordres aux magistrats ni quant à leur attitude générale, ni quant à leur attitude dans une affaire particulière.

-Les magistrats du siège sont inamovibles, ce qui signifie qu’ils ne peuvent recevoir, sans leur consentement, aucune affectation nouvelle, même en avancement. Ils ne sont pas destitués, suspendus ou déplacés à la discrétion du gouvernement. (Article 64 alinéa 4 de la Constitution).

Les magistrats du siège sont indépendants. Ils statuent en toute indépendance et doivent faire preuve d’impartialité (Article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme).

Les magistrats du ministère public, dits du Parquet (la magistrature debout : ils doivent requérir debout) sont présents en tant qu’agents du pouvoir exécutif auprès des tribunaux : ils représentent l’Etat, ils requièrent l’application de la loi dans l’intérêt de la société. Leur indépendance à l’égard du pouvoir exécutif, notamment du Garde des Sceaux, est moins effective (une réflexion a été récemment engagée, à l’initiative du Président de la République, Jacques Chirac, sur l’indépendance du parquet à l’égard du pouvoir exécutif).

En matière pénale, leur rôle est considérable. Le Ministère public a le monopole de l’exercice et de l’opportunité des poursuites, il est la partie principale opposé au délinquant : il joue le rôle d’accusateur. En matière civile, son rôle est plus modeste. Il est souvent seulement partie jointe et expose son opinion. Il n’a pas, en principe, l’initiative de l’action en justice. Néanmoins, son rôle est important en matière d’état des personnes (nationalité, nullité du mariage) ou de « faillites » des sociétés. Il peut toujours intervenir librement au procès civil, à chaque fois que les faits portent atteinte à l’ordre public (Article 423 CODE DE PROCÉDURE CIVILE). Ils communiquent au tribunal par voie de conclusions écrites. Les conclusions du ministère public sont toujours très précieuses car ce magistrat formule en toute liberté son avis sur les points de droit délicats. Des conclusions sont parfois à l’origine de revirement de jurisprudence, elles sont parfois publiées. Les magistrats du ministère public sont hiérarchisés ; ils doivent obéir aux ordres qui leur sont donnés par leurs supérieurs, notamment par le ministre de la Justice. Les membres du Ministère public, du fait de sa spécificité, se trouvent subordonnés au Garde des Sceaux, ministre de la Justice, et doivent obéir à l’autorité hiérarchique, sous peine de sanctions disciplinaires.

Néanmoins, cette subordination est tempérée par un principe : « si la plume est serbe, la parole est libre », ce qui signifie que si le membre du parquet est tenu de requérir par écrit conformément aux instructions qu’il a reçu de ses supérieurs hiérarchiques, à l’audience, sa parole est libre et il peut exprimer oralement des opinions différentes.

-En raison de l’éminence de leur fonction, il est évident que les obligations du magistrat vont au-delà de ce qui est habituellement requis du fonctionnaire. Le magistrat est tenu de rendre la justice, il ne peut faire grève , il doit tenir secrète les délibérations. Les magistrats doivent, en tout temps et même dans leur vie privée, mener une vie « digne ». Il leur est interdit toute manifestation de nature politique et prendre des positions publiques partisanes. Le magistrat ne peut cumuler sa fonction avec une autre activité professionnelle (sauf enseignement, recherche scientifique, activité littéraire ou artistique, arbitrage). L’idée est d’éviter toute subordination de droit ou de fait, susceptible de contrarier l’indépendance et l’objectivité du magistrat. L’exercice d’un mandat politique, national ou européen est tout à fait incompatible avec la fonction de magistrat. Néanmoins, les magistrats ont le droit d’adhérer à un syndicat (3 syndicats essentiels : le syndicat de la magistrature, l’union syndicale de la magistrature, l’association professionnelle des magistrats).

Revenons aux juridictions elles-mêmes :

-Les juridictions de l’ordre judiciaire remplissent deux sortes de fonctions : d’une part, elles sont chargées de juger les procès entre les particuliers, relatifs à l’application du droit privé ; d’autre part, elles frappent de peines ceux qui ont commis des infractions.

-Une erreur est, à ce propos, fréquemment commise à propos des juridictions. A force de parler de « tribunal de grande instance », d’une part de « tribunal correctionnel », d’autre part, on a tendance à croire qu’il existe au sein des juridictions judiciaires, des juridictions qui jugent les procès civils et d’autres qui jugent les procès pénaux.

-C’est inexact : la France a adopté le principe de l’unité de la justice civile et pénale : ce sont les mêmes juridictions (même personnel, même locaux) qui statuent alternativement dans le domaine civil et pénal même si elles portent des noms différents selon le domaine dans lequel elles agissent. Ainsi, par exemple, le tribunal d’instance connaît à la fois les litiges civils de moindre importance et, dans sa formation répressive, en tant que tribunal de police, des contraventions. Il existe cependant des juridictions purement civiles (juridictions spécialisées) et une juridiction purement répressive (cour d’assises).

-La liaison entre la juridiction civile et la juridiction pénale est encore renforcée par le fait que ces juridictions pénales sont également compétentes pour statuer sur l’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction, la victime ayant le choix et pouvant soit agir en dommages-intérêts devant un tribunal « civil » (TGI ou TI) soit porter l’action en dommages-intérêts devant la juridiction pénale en se portant partie civile.

-Il faut distinguer les juridictions du premier degré (I), devant lequel le litige est porté en premier lieu et la juridiction du second degré (II), la cour d’appel, devant laquelle le plaideur, mécontent du jugement, peut porter le litige une seconde fois en vertu du principe, non absolu, du double degré de juridiction. Un pourvoi en cassation, porté devant la Cour de cassation (III) est toujours possible, mais il ne portera que sur l’examen de la décision des juges du fond (jugent l’ensemble du procès, fait et droit) pour vérifier s’ils ont fait une application correcte du droit.

Le Cours complet d’Introduction au droit est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, biens, acteurs de la vie juridique, sources du droit, preuves, responsabilité…)